"Aztag" Daily Newspaper
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Extrait de l'interview de Ben Kiernan par Khatchig Mouradian du journal «
Aztag Daily »
http://www.aztagdaily.com/Interviews/Interviews.htm
Le 10 juin 2004.
Aztag - Quelles sont quelques-unes des caractéristiques communes aux
génocides arménien et cambodgien ?
Ben Kiernan - En 1919, une Cour d'Istanbul a déclaré Enver Pacha,
l'ex-ministre de la Guerre « Jeune Turc », coupable de « crime de massacre »
pendant le Génocide arménien. Suite à ce jugement, et en l'absence de
condamnation, Enver se rendit en Asie Centrale. Le 1er septembre 1920, Enver
fit sensation au Congrès des Peuples de l'Est à Bakou, en Azerbaidjan
soviétique. Enver exprima son regret d'avoir combattu aux côtés des «
Impérialistes d'Allemagne que je hais et que je maudis, exactement comme je
hais et maudits ceux de Grande Bretagne ». Mais il prit soin de justifier
son alliance lors de la Première Guerre Mondiale : « Nous nous sommes rangés
aux côtés de l'Allemagne qui avait consenti à nous laisser vivre. Les
Impérialistes allemands nous ont habitués à parvenir à leurs fins
malhonnêtes ; mais notre but était seulement de préserver notre
indépendance. Les sentiments qui nous guidaient...n'étaient pas des sentiments
impériaux. » Il dit qu'il « reconnaissait » maintenant que l'Azerbaidjan
devait appartenir à son propre peuple ». Mais Enver ne mentionna pas
l'Arménie. Il déguisa son chauvinisme génocidaire en un désir de vivre et de
laisser vivre, chérissant l'indépendance nationale ; et même en solidarité
internationale, comme lorsqu'il fit l'éloge de son armée turque pour avoir
aidé à renverser le tsar.
Dans ce discours, Enver a fourni d'autres indications intéressantes sur sa
philosophie politique. Sa célèbre armée turque, dit-il, « tirait toute sa
force de la classe rurale ». Tout en dénonçant l'impérialisme, il
spécifiait: « A mon avis, tous ceux qui cherchent à enrichir ceux qui ne
travaillent pas devraient être détruits ». Et il prédisait que « Le monde
oriental » qu'il définissait comme « tous les peuples opprimés » allait «
anéantir les monstres impérialistes
et capitalistes ». Enver plus tard conduisit plusieurs milliers de troupes
contre le régime soviétique, dans le but déclaré de « chasser les Européens
et de créer le grand Etat Musulman d'Asie Centrale ».
Pol Pot aurait bien reconnu cet amalgame de paysannisme, de violence de
`classe' et de racisme du tiers-monde. Enver rejetait la notion de tout
peuple ami opprimé en Europe, même en dehors de la construction européenne
elle-même, « l'Orient ». L'enfermement ironique d'Enver dans une idéologie
occidentale était tout à fait comparable à celle de Pol Pot. Tous deux
justifiaient leurs campagnes racistes de destruction par une lutte de
classe, tous deux décrivaient leur expansionnisme militariste comme une
auto-défense nationale, et tous deux décrivaient avec romantisme la
paysannerie de leur pays, alors qu'ils avaient réussi à détériorer
spectaculairement ses conditions de vie.
Enver fut condamné par contumace, et fut plus tard tué au cours d'un combat
contre les forces soviétiques. Pol Pot mourut en 1998 sans avoir eu à
affronter une sanction légale. Mais le Cambodge et les Nations Unies étaient
d'accord l'an dernier pour établir un tribunal spécial pour juger les
crimes des dirigeants Khmers Rouges survivants. Le commandant militaire de
Pol Pot, Mok, et son chef de la Sécurité, Deuch sont tous deux incarcérés à
Pnom Penh dans l'attente de leur procès.
Aztag - Vous avez joué un rôle décisif en révélant des milliers de documents
sur le régime Khmer Rouge. Dans la cas du Génocide des Arméniens une
documentation détaillée est bien plus difficile à obtenir à cause de
l'inaccessibilité des archives ottomanes. Que pouvez-vous dire des
difficultés auxquelles vous avez été confronté lorsque vous avez essayé de
déterrer la vérité ?
Ben Kiernan - « Vous êtes stupide » avait dit à Deuch ex-Commandant des
Khmers Rouges à la prison de Tuol Sleng, le député de Pol Pot Nuon Chea,
après avoir appris que Deuch n'avait pas réussi à détruire les archives de
la prison avant de s'envoler de Phnom Penh en 1979. Deuch était resté à
l'arrière pendant plusieurs heures après l'entrée des forces vietnamiennes
dans la ville le 9 janvier, mais au lieu de brûler les archives il avait
préféré s'assurer que les derniers prisonniers soient tués. Plus de 100 000
pages de preuves tombèrent entre les mains des Vietnamiens et furent bientôt
à la disposition des chercheurs. Un `Musée du Génocide de Tuol Sleng' fut
créé, avec les archives de la « Bureaucratie de Mort » khmère rouge. Un
journaliste britannique, Anthony Barnett se rendit au Cambodge début 1980,
et rapporta une grosse pile de photocopies que nous avons présentées en
couverture du magazine londonien New Statesman du 2 mai 1980. Quand un autre
journaliste montra les copies de ces documents au beau-frère de Pol Pot Ieng
Sary, il fut pris au dépourvu et admit qu'ils étaient authentiques. Cette
affirmation fut aussitôt controversée par un aide Khmer Rouge anonyme, dans
une lettre non signée à la « Far Eastern Economic Review ». Dix ans plus
tard, un autre dirigeant Khmer Rouge, Son Sen, lut la Convention sur le
Génocide, et souligna les passages qui pourraient être utilisés pour le
poursuivre, y compris la définition de ce crime et les paragraphes
spécifiant : « qu'il soit commis en temps de paix ou en temps de guerre, (le
génocide) est un crime qui tombe sous la loi internationale ». En 1996, le
programme sur le Génocide cambodgien de l'Université de Yale découvrit 100
000 autres pages de documents secrets, les archives de Santebal, gérées par
Son Sen.
Quelques mois plus tard, Ieng Sary se livra au gouvernement cambodgien et
forma son propre `Centre de Documentation' pour défendre son rapport. Pol
Pot assassina Son Sen l'année suivante et mourut lui-même en 1998. Mais Ieng
Sary pouvait encore être jugé par le futur tribunal des Nations Unies.
Les preuves contre eux sont fortes. Un document manuscrit, daté du 17 avril
1978, comporte une liste de noms de parents ou d'associés d'un prisonnier
nommé San Eap. Un commandant de secteur envoya la liste au `Comité 870' un
terme rappelant la période royale, utilisé par Pol Pot. Utilisant de même un
pseudo personnel `Angkar' (`l'Organisation') Pol Pot griffonna sur la lettre
de couverture avec un gros crayon rouge : `A/k 19/4/78 Faire suivre' (taam
daan). C'était un ordre d'arrêter ceux qui étaient nommés dans la liste.
Les dirigeants Khmers Rouges se sentirent mal à l'aise lors de la
publication de tels rapports internes incriminatoires. Jamais ils ne
se seraient imaginés qu'un jour leurs arrêts de mort, signés, seraient
rendus publics sur le Web. Peut-être qu'une telle possibilité servira de
référence à d'éventuels génocideurs. Leur incapacité à dénier leur génocide
prive les auteurs d'une arme puissante contre la mémoire de leurs victimes.
Aztag - Ces dernières années, vous avez écrit un certain nombre d'articles
relatifs au Génocide arménien. Quand avez-vous commencé à faire des
recherches sur ce génocide et à le comparer aux autres cas de crimes de
masse ?
Ben Kiernan - J'ai commencé ces recherches sur le Génocide arménien en 1989,
après 15 années de recherches sur le Cambodge. J'ai lu l'ouvrage de Ronald
Suny sur l'histoire sociale du génocide arménien avant de lire d'autres
études de dirigeants Jeunes Turcs et de leur idéologie. Au début, j'ai fait
un parallèle entre la destruction du royaume médiéval arménien en 1375, et
celle du royaume de Champa de l'Asie du sud en 1471. Au 20ème siècle, la
population musulmane Chame, sans Etat, au Cambodge, devint une principale
victime des Khmers Rouges, exactement comme les Arméniens devinrent victimes
des Jeunes Turcs.
J'ai aussi trouvé de troublantes similitudes entre Pol Pot, Enver Pacha et
quelques autres dirigeants du génocide, y compris des connexions marginales
avec la royauté. Le dirigeant nazi Heinrich Himmler était le filleul et
l'homonyme d'un prince bavarois. Enver Pacha avait épousé une fille du
sultan ottoman. La s`ur de Pol Pot et sa cousine étaient respectivement
l'épouse du prince consort et la seconde épouse du roi khmer. Plusieurs
auteurs de génocides modernes ont partagé des origines géographiques
marginales. Hitler et d'autres dirigeants nazis comme Kaltenbrunner étaient
d'origine autrichienne. Enver et d'autres dirigeants Jeunes Turcs comme
Talaat et le Dr. Nazim venaient des communautés minoritaires turques de
l'Europe de l'Est. Les dirigeants Khmers Rouges Son Sen et Ieng Sary
venaient d'une minorité cambodgienne du Vietnam.
Quoique la Révolution française ait influencé à la fois les Jeunes Turcs et
les Khmers Rouges, et que ces derniers fussent communistes, les deux régimes
étaient aussi racistes et expansionnistes, comme les Nazis.
Ben Kiernan
Khatchig Mouradian
Traduction Louise Kiffer
Source : www.aztagdaily.com/Interviews/Interviews.htm/
10 juin 2004
(Ben Kiernan est professeur d'histoire et directeur du programme d'études du
Génocide à l'Université de Yale www.yale.edu/gsp/
Il est spécialiste de l'histoire de l'Asie du sud, et le meilleur du monde
occidental pour le Cambodge.
Il est l'auteur de plusieurs livres sur ce sujet.)
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Extrait de l'interview de Ben Kiernan par Khatchig Mouradian du journal «
Aztag Daily »
http://www.aztagdaily.com/Interviews/Interviews.htm
Le 10 juin 2004.
Aztag - Quelles sont quelques-unes des caractéristiques communes aux
génocides arménien et cambodgien ?
Ben Kiernan - En 1919, une Cour d'Istanbul a déclaré Enver Pacha,
l'ex-ministre de la Guerre « Jeune Turc », coupable de « crime de massacre »
pendant le Génocide arménien. Suite à ce jugement, et en l'absence de
condamnation, Enver se rendit en Asie Centrale. Le 1er septembre 1920, Enver
fit sensation au Congrès des Peuples de l'Est à Bakou, en Azerbaidjan
soviétique. Enver exprima son regret d'avoir combattu aux côtés des «
Impérialistes d'Allemagne que je hais et que je maudis, exactement comme je
hais et maudits ceux de Grande Bretagne ». Mais il prit soin de justifier
son alliance lors de la Première Guerre Mondiale : « Nous nous sommes rangés
aux côtés de l'Allemagne qui avait consenti à nous laisser vivre. Les
Impérialistes allemands nous ont habitués à parvenir à leurs fins
malhonnêtes ; mais notre but était seulement de préserver notre
indépendance. Les sentiments qui nous guidaient...n'étaient pas des sentiments
impériaux. » Il dit qu'il « reconnaissait » maintenant que l'Azerbaidjan
devait appartenir à son propre peuple ». Mais Enver ne mentionna pas
l'Arménie. Il déguisa son chauvinisme génocidaire en un désir de vivre et de
laisser vivre, chérissant l'indépendance nationale ; et même en solidarité
internationale, comme lorsqu'il fit l'éloge de son armée turque pour avoir
aidé à renverser le tsar.
Dans ce discours, Enver a fourni d'autres indications intéressantes sur sa
philosophie politique. Sa célèbre armée turque, dit-il, « tirait toute sa
force de la classe rurale ». Tout en dénonçant l'impérialisme, il
spécifiait: « A mon avis, tous ceux qui cherchent à enrichir ceux qui ne
travaillent pas devraient être détruits ». Et il prédisait que « Le monde
oriental » qu'il définissait comme « tous les peuples opprimés » allait «
anéantir les monstres impérialistes
et capitalistes ». Enver plus tard conduisit plusieurs milliers de troupes
contre le régime soviétique, dans le but déclaré de « chasser les Européens
et de créer le grand Etat Musulman d'Asie Centrale ».
Pol Pot aurait bien reconnu cet amalgame de paysannisme, de violence de
`classe' et de racisme du tiers-monde. Enver rejetait la notion de tout
peuple ami opprimé en Europe, même en dehors de la construction européenne
elle-même, « l'Orient ». L'enfermement ironique d'Enver dans une idéologie
occidentale était tout à fait comparable à celle de Pol Pot. Tous deux
justifiaient leurs campagnes racistes de destruction par une lutte de
classe, tous deux décrivaient leur expansionnisme militariste comme une
auto-défense nationale, et tous deux décrivaient avec romantisme la
paysannerie de leur pays, alors qu'ils avaient réussi à détériorer
spectaculairement ses conditions de vie.
Enver fut condamné par contumace, et fut plus tard tué au cours d'un combat
contre les forces soviétiques. Pol Pot mourut en 1998 sans avoir eu à
affronter une sanction légale. Mais le Cambodge et les Nations Unies étaient
d'accord l'an dernier pour établir un tribunal spécial pour juger les
crimes des dirigeants Khmers Rouges survivants. Le commandant militaire de
Pol Pot, Mok, et son chef de la Sécurité, Deuch sont tous deux incarcérés à
Pnom Penh dans l'attente de leur procès.
Aztag - Vous avez joué un rôle décisif en révélant des milliers de documents
sur le régime Khmer Rouge. Dans la cas du Génocide des Arméniens une
documentation détaillée est bien plus difficile à obtenir à cause de
l'inaccessibilité des archives ottomanes. Que pouvez-vous dire des
difficultés auxquelles vous avez été confronté lorsque vous avez essayé de
déterrer la vérité ?
Ben Kiernan - « Vous êtes stupide » avait dit à Deuch ex-Commandant des
Khmers Rouges à la prison de Tuol Sleng, le député de Pol Pot Nuon Chea,
après avoir appris que Deuch n'avait pas réussi à détruire les archives de
la prison avant de s'envoler de Phnom Penh en 1979. Deuch était resté à
l'arrière pendant plusieurs heures après l'entrée des forces vietnamiennes
dans la ville le 9 janvier, mais au lieu de brûler les archives il avait
préféré s'assurer que les derniers prisonniers soient tués. Plus de 100 000
pages de preuves tombèrent entre les mains des Vietnamiens et furent bientôt
à la disposition des chercheurs. Un `Musée du Génocide de Tuol Sleng' fut
créé, avec les archives de la « Bureaucratie de Mort » khmère rouge. Un
journaliste britannique, Anthony Barnett se rendit au Cambodge début 1980,
et rapporta une grosse pile de photocopies que nous avons présentées en
couverture du magazine londonien New Statesman du 2 mai 1980. Quand un autre
journaliste montra les copies de ces documents au beau-frère de Pol Pot Ieng
Sary, il fut pris au dépourvu et admit qu'ils étaient authentiques. Cette
affirmation fut aussitôt controversée par un aide Khmer Rouge anonyme, dans
une lettre non signée à la « Far Eastern Economic Review ». Dix ans plus
tard, un autre dirigeant Khmer Rouge, Son Sen, lut la Convention sur le
Génocide, et souligna les passages qui pourraient être utilisés pour le
poursuivre, y compris la définition de ce crime et les paragraphes
spécifiant : « qu'il soit commis en temps de paix ou en temps de guerre, (le
génocide) est un crime qui tombe sous la loi internationale ». En 1996, le
programme sur le Génocide cambodgien de l'Université de Yale découvrit 100
000 autres pages de documents secrets, les archives de Santebal, gérées par
Son Sen.
Quelques mois plus tard, Ieng Sary se livra au gouvernement cambodgien et
forma son propre `Centre de Documentation' pour défendre son rapport. Pol
Pot assassina Son Sen l'année suivante et mourut lui-même en 1998. Mais Ieng
Sary pouvait encore être jugé par le futur tribunal des Nations Unies.
Les preuves contre eux sont fortes. Un document manuscrit, daté du 17 avril
1978, comporte une liste de noms de parents ou d'associés d'un prisonnier
nommé San Eap. Un commandant de secteur envoya la liste au `Comité 870' un
terme rappelant la période royale, utilisé par Pol Pot. Utilisant de même un
pseudo personnel `Angkar' (`l'Organisation') Pol Pot griffonna sur la lettre
de couverture avec un gros crayon rouge : `A/k 19/4/78 Faire suivre' (taam
daan). C'était un ordre d'arrêter ceux qui étaient nommés dans la liste.
Les dirigeants Khmers Rouges se sentirent mal à l'aise lors de la
publication de tels rapports internes incriminatoires. Jamais ils ne
se seraient imaginés qu'un jour leurs arrêts de mort, signés, seraient
rendus publics sur le Web. Peut-être qu'une telle possibilité servira de
référence à d'éventuels génocideurs. Leur incapacité à dénier leur génocide
prive les auteurs d'une arme puissante contre la mémoire de leurs victimes.
Aztag - Ces dernières années, vous avez écrit un certain nombre d'articles
relatifs au Génocide arménien. Quand avez-vous commencé à faire des
recherches sur ce génocide et à le comparer aux autres cas de crimes de
masse ?
Ben Kiernan - J'ai commencé ces recherches sur le Génocide arménien en 1989,
après 15 années de recherches sur le Cambodge. J'ai lu l'ouvrage de Ronald
Suny sur l'histoire sociale du génocide arménien avant de lire d'autres
études de dirigeants Jeunes Turcs et de leur idéologie. Au début, j'ai fait
un parallèle entre la destruction du royaume médiéval arménien en 1375, et
celle du royaume de Champa de l'Asie du sud en 1471. Au 20ème siècle, la
population musulmane Chame, sans Etat, au Cambodge, devint une principale
victime des Khmers Rouges, exactement comme les Arméniens devinrent victimes
des Jeunes Turcs.
J'ai aussi trouvé de troublantes similitudes entre Pol Pot, Enver Pacha et
quelques autres dirigeants du génocide, y compris des connexions marginales
avec la royauté. Le dirigeant nazi Heinrich Himmler était le filleul et
l'homonyme d'un prince bavarois. Enver Pacha avait épousé une fille du
sultan ottoman. La s`ur de Pol Pot et sa cousine étaient respectivement
l'épouse du prince consort et la seconde épouse du roi khmer. Plusieurs
auteurs de génocides modernes ont partagé des origines géographiques
marginales. Hitler et d'autres dirigeants nazis comme Kaltenbrunner étaient
d'origine autrichienne. Enver et d'autres dirigeants Jeunes Turcs comme
Talaat et le Dr. Nazim venaient des communautés minoritaires turques de
l'Europe de l'Est. Les dirigeants Khmers Rouges Son Sen et Ieng Sary
venaient d'une minorité cambodgienne du Vietnam.
Quoique la Révolution française ait influencé à la fois les Jeunes Turcs et
les Khmers Rouges, et que ces derniers fussent communistes, les deux régimes
étaient aussi racistes et expansionnistes, comme les Nazis.
Ben Kiernan
Khatchig Mouradian
Traduction Louise Kiffer
Source : www.aztagdaily.com/Interviews/Interviews.htm/
10 juin 2004
(Ben Kiernan est professeur d'histoire et directeur du programme d'études du
Génocide à l'Université de Yale www.yale.edu/gsp/
Il est spécialiste de l'histoire de l'Asie du sud, et le meilleur du monde
occidental pour le Cambodge.
Il est l'auteur de plusieurs livres sur ce sujet.)