La responsabilité des hébergeurs devant le tribunal
Par Arnaud Devillard
01net , France
19 novembre 2004
Une association demandait à Wanadoo de couper l'accès à un contenu
estimé illicite sur le site du Consul général de Turquie, en
invoquant les dispositions de la LEN. Le TGI a rejeté cette demande.
L'article certainement le plus débattu de la loi pour la confiance
dans l'économie numérique, celui sur la responsabilité des
prestataires techniques en cas de contenu à "caractère illicite",
vient de faire l'objet d'une nouvelle décision de justice.
C'est une association, le Comité de défense de la cause arménienne
(CDCA), qui s'en est servi contre Wanadoo et le Consul général de
Turquie à Paris. Le tribunal de grande instance (TGI) de Paris a
rejeté lundi 15 novembre la demande du CDCA, soit la suppression de
l'accès à un contenu sur le site officiel du Consul général, hébergé
par la filiale de France Télécom. L'association pointait du doigt un
texte intitulé "Allégations arméniennes et faits historiques".
Selon le CDCA, "ce texte reprend sous forme de dix questions et
réponses, la thèse développée, depuis de longues années, par l'Etat
turc à l'égard du génocide des Arméniens". A savoir qu'il n'y a pas
eu génocide en 1915. Or, par la loi du 29 janvier 2001, la France
reconnaît officiellement son existence. Pour le CDCA, le site du
Consul général relayait donc une "propagande négationniste".
L'association a alors envoyé une notification à Wanadoo lui demandant
d'empêcher l'accès à ce texte en vertu de l'article 6 de la LEN. Le
FAI a d'abord préféré s'en remettre pour avis et recommandation à
l'Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies
de l'information et de la communication, organisme dépendant de la
police judiciaire. Après quoi, en juin, il a transmis la notification
du contenu incriminé au TGI.
Wanadoo joue la prudence
Début juillet, le CDCA déposait une assignation auprès du tribunal
contre le Consul général pour diffusion de propos négationnistes. Il
demandait la condamnation du diplomate et la suppression de l'accès à
son site par Wanadoo.
Il s'agit là de l'application point par point des dispositions de la
loi. Malgré, ou plutôt à cause de, la gravité de l'accusation du CDCA
(le négationnisme), Wanadoo a joué la prudence. De plus, le site
étant un site officiel, destiné à la communauté turque en France, il
propose une série de services pratiques. Satisfaire la demande du
CDCA en aurait empêché l'accès.
Plus délicat : le texte dénoncé par l'association relève d'une
position officielle d'un Etat. En interdire l'accès serait revenu à
contester la version officielle que cet Etat donne de sa propre
histoire. Drôle de position à tenir pour un fournisseur d'accès à
Internet-- Mais pour le CDCA "l'absence de contrôle et de réaction de
l'hébergeur [du] site Internet [du Consul général] constitue une
faute majeure que la justice doit sanctionner".
Cela n'a pas été l'avis du tribunal. Car si la France a reconnu le
génocide arménien, contester, nier ce même génocide ne constitue pas
un délit. "Si l'on n'aborde le sujet que d'un strict point de vue
juridique, c'est le " génocide " arménien qui a été reconnu par la
France dans sa loi du 29 janvier 2001, précise Sandrine Rouja,
juriste et rédactrice en chef du site Juriscom.net. À l'heure
actuelle, le terme " négationnisme " ne vise quant à lui
exclusivement que la remise en cause du génocide des juifs pendant la
seconde guerre mondiale".
Quant au Consul, il est protégé par son immunité diplomatique. Le TGI
a donc adressé une fin de non-recevoir au CDCA sur les deux volets de
son assignation.
--Boundary_(ID_h6fQHX4tazgyBvnyZqQREQ)--
From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress
Par Arnaud Devillard
01net , France
19 novembre 2004
Une association demandait à Wanadoo de couper l'accès à un contenu
estimé illicite sur le site du Consul général de Turquie, en
invoquant les dispositions de la LEN. Le TGI a rejeté cette demande.
L'article certainement le plus débattu de la loi pour la confiance
dans l'économie numérique, celui sur la responsabilité des
prestataires techniques en cas de contenu à "caractère illicite",
vient de faire l'objet d'une nouvelle décision de justice.
C'est une association, le Comité de défense de la cause arménienne
(CDCA), qui s'en est servi contre Wanadoo et le Consul général de
Turquie à Paris. Le tribunal de grande instance (TGI) de Paris a
rejeté lundi 15 novembre la demande du CDCA, soit la suppression de
l'accès à un contenu sur le site officiel du Consul général, hébergé
par la filiale de France Télécom. L'association pointait du doigt un
texte intitulé "Allégations arméniennes et faits historiques".
Selon le CDCA, "ce texte reprend sous forme de dix questions et
réponses, la thèse développée, depuis de longues années, par l'Etat
turc à l'égard du génocide des Arméniens". A savoir qu'il n'y a pas
eu génocide en 1915. Or, par la loi du 29 janvier 2001, la France
reconnaît officiellement son existence. Pour le CDCA, le site du
Consul général relayait donc une "propagande négationniste".
L'association a alors envoyé une notification à Wanadoo lui demandant
d'empêcher l'accès à ce texte en vertu de l'article 6 de la LEN. Le
FAI a d'abord préféré s'en remettre pour avis et recommandation à
l'Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies
de l'information et de la communication, organisme dépendant de la
police judiciaire. Après quoi, en juin, il a transmis la notification
du contenu incriminé au TGI.
Wanadoo joue la prudence
Début juillet, le CDCA déposait une assignation auprès du tribunal
contre le Consul général pour diffusion de propos négationnistes. Il
demandait la condamnation du diplomate et la suppression de l'accès à
son site par Wanadoo.
Il s'agit là de l'application point par point des dispositions de la
loi. Malgré, ou plutôt à cause de, la gravité de l'accusation du CDCA
(le négationnisme), Wanadoo a joué la prudence. De plus, le site
étant un site officiel, destiné à la communauté turque en France, il
propose une série de services pratiques. Satisfaire la demande du
CDCA en aurait empêché l'accès.
Plus délicat : le texte dénoncé par l'association relève d'une
position officielle d'un Etat. En interdire l'accès serait revenu à
contester la version officielle que cet Etat donne de sa propre
histoire. Drôle de position à tenir pour un fournisseur d'accès à
Internet-- Mais pour le CDCA "l'absence de contrôle et de réaction de
l'hébergeur [du] site Internet [du Consul général] constitue une
faute majeure que la justice doit sanctionner".
Cela n'a pas été l'avis du tribunal. Car si la France a reconnu le
génocide arménien, contester, nier ce même génocide ne constitue pas
un délit. "Si l'on n'aborde le sujet que d'un strict point de vue
juridique, c'est le " génocide " arménien qui a été reconnu par la
France dans sa loi du 29 janvier 2001, précise Sandrine Rouja,
juriste et rédactrice en chef du site Juriscom.net. À l'heure
actuelle, le terme " négationnisme " ne vise quant à lui
exclusivement que la remise en cause du génocide des juifs pendant la
seconde guerre mondiale".
Quant au Consul, il est protégé par son immunité diplomatique. Le TGI
a donc adressé une fin de non-recevoir au CDCA sur les deux volets de
son assignation.
--Boundary_(ID_h6fQHX4tazgyBvnyZqQREQ)--
From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress