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Les reticences a l'entree d'Ankara dans l'Union europeenne dominent

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  • Les reticences a l'entree d'Ankara dans l'Union europeenne dominent

    Le Monde, France
    04 octobre 2004

    Les réticences à l'entrée d'Ankara dans l'Union européenne dominent
    largement dans le débat politique français ;
    FRANCE ÉLARGISSEMENT DE L'EUROPE M. Chirac promet un référendum sur
    l'adhésion de la Turquie

    Jean-Michel Bezat


    L'ÉCHÉANCE est lointaine, mais le sujet est si sensible qu'il
    mobilise déjà, en France, l'ensemble des chefs de partis. Tous ont
    officiellement arrêté une position - pour ou contre - l'adhésion de
    la Turquie dans l'Union européenne (UE). Dans le camp du « oui »
    comme dans celui du « non », chaque argument avancé est retourné par
    l'adversaire. Un élargissement de plus, pour le premier ; une
    dilution, selon le second. L'arrivée d'une nation musulmane mais d'un
    Etat laïque ; le cheval de Troie de l'islamisme dans la vieille
    Europe chrétienne. La poursuite d'un projet destiné à contrebalancer
    la superpuissance américaine ; la mort du projet d'Europe-puissance.

    Une chose est sûre, les « turcosceptiques », pour reprendre
    l'expression de huit intellectuels turcs ( Le Monde du 29 septembre),
    dominent la classe politique française. Ils relaient ainsi une
    opinion publique majoritairement hostile à l'entrée de la Turquie
    dans l'Union, qu'il s'agisse des sympathisants du FN (74 %), de l'UDF
    (72 %) et de l'UMP (63 %), mais aussi des partisans du PS (55 %),
    selon un sondage Ipsos publié, le 28 septembre, par Le Figaro. Le FN
    et le Mouvement pour la France (MPF) de Philippe de Villiers mettent
    en avant le risque d'une perte de l'identité culturelle, voire
    religieuse, du Vieux Continent. Il est d'autant plus fondé, selon
    eux, que le parti du premier ministre, Recep Erdogan, défend les
    valeurs islamiques.

    Les craintes des dirigeants de l'UMP sont aussi fortes, mais elles
    s'expriment de façon plus nuancée - sauf quand Jean-Pierre Raffarin
    redoute, dans un récent entretien au Wall Street Journal, que « le
    fleuve de l'islam » ne rejoigne « le lit de la laïcité ». Ces
    positions sont éloignées de celles de Jacques Chirac, qui juge que la
    Turquie a « vocation » à intégrer l'Union « à long terme ». Le chef
    de l'Etat récuse notamment les argumentaires ethniques ou religieux,
    persuadé qu'ils confortent tous ceux qui, aux Etats-Unis et en
    Europe, ne voient plus dans la marche du monde qu'un « choc des
    civilisations ».

    Encore président du parti chiraquien, Alain Juppé avait été sans
    ambiguïté. Invitant les militants à « ne pas confondre élargissement
    et dilution », il soulignait, en mai 2004, que ni « la culture » ni «
    l'histoire » de la Turquie - pas plus que celles de la Russie, de
    l'Ukraine ou du Maghreb - ne la destinent à entrer dans « la famille
    » européenne. Nicolas Sarkozy, le futur président de l'UMP, défendra
    un point de vue similaire : il affirmait récemment, et en termes
    presque identiques à ceux de M. Juppé, que la Turquie « n'a pas sa
    place en Europe ».

    Président de l'UDF, François Bayrou joue, lui aussi, sur le triple
    registre de la culture - « une autre conception de l'homme, de la
    famille, de la femme » -, de la démographie - « choisir de faire d'un
    pays non européen le plus important d'Europe par sa représentativité
    au Parlement est un danger » - et de la politique - « une adhésion
    éventuelle signifie en fait le renoncement au projet d'union
    politique » - pour la rejeter aux marges de l'Union. Il préfère lui
    accorder le statut de « partenaire associé » prévu par les traités
    européens, comme Valéry Giscard d'Estaing, Edouard Balladur et...
    Laurent Fabius.

    « PAS UN CLUB CHRÉTIEN »

    Comme le projet de Constitution européenne, la question turque
    suscite une divergence entre l'ancien premier ministre et le premier
    secrétaire du PS, François Hollande. M. Fabius renvoie le pays de
    Kemal Atatürk dans le troisième des « cercles concentriques » autour
    desquels l'Europe devrait, selon lui, s'organiser. Plus ouvert à une
    intégration dans l'Union, M. Hollande cherche, lui, un point
    d'équilibre entre ses partisans et ses adversaires. En recevant M.
    Erdogan, le 22 juillet, il lui a confirmé son « oui » de principe,
    tout en l'assortissant de conditions strictes, dont la reconnaissance
    du génocide arménien de 1915 et un respect plus strict des droits de
    l'homme.

    Sans états d'me, Michel Rocard, européen fervent, défend pour sa
    part l'intégration de la Turquie, notamment au nom de la sauvegarde
    de la paix dans la région. La refuser, argumente l'ancien premier
    ministre, ce serait « attiser le brasier » que l'invasion de l'Irak
    par les Etats-Unis a allumé dans le monde musulman.

    Dans cet environnement fait d'hostilité et de prudence tactique, les
    Verts apparaissent les plus « turcophiles ». Ils souhaitent que le
    processus d'adhésion soit engagé « le plus vite possible »,
    soulignant que « l'Union n'est pas un club chrétien » et que « la
    Turquie est un pays laïque ». Deux arguments régulièrement invoqués
    par le PCF et la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) pour
    défendre, eux aussi, son entrée dans l'Europe.
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