L'Humanité
27 avril 2005
Sans patrie ni recours;
Droits de l'homme. Une famille arménienne, déboutée de sa demande
d'asile, est à la rue depuis hier matin dans le Rhône.
Émilie Rive
Décines (Rhône), neuf heures, à l'hôtel Classe 1. Il reste une
heure à Armo et Arévik Goukassov et leurs trois filles pour quitter
la chambre. Pour aller où ? Mystère. Ils sont là depuis le 15
avril, jour où Forum Réfugiés a expliqué que, parce qu'ils
étaient déboutés du droit d'asile, leur hébergement n'était plus
pris en charge dans le foyer de Villeurbanne, où ils vivaient depuis
quatre ans. Ils avaient un sursis de huit jours, à l'hôtel, pour
trouver un toit... Les bagages sont à l'accueil, la famille devant
la porte, avec des responsables de la Ligue des droits de l'homme de
Villeurbanne, de Resovigi, des élus communistes de Décines et de
Vaulx-en-Velin. Elina, dix-huit ans en octobre, est au lycée et
Nelia à l'école primaire, à Villeurbanne, Genia, au collège
Jacques-Duclos de Vaulx-en-Velin.
Plus de nationalité
La famille n'a plus de nationalité : arménienne de l'Azerbaïdjan,
elle a fui la guerre, s'est réfugiée en Ukraine, alors République
de l'Union soviétique, dont elle a obtenu la nationalité. Mais, à
l'implosion de l'URSS, la nationalité ukrainienne est retirée.
Arévik, infirmière, perd son emploi, Armo, marin, devient taxi
clandestin. Ils cherchent protection en France pour leurs enfants.
Aujourd'hui, l'Ukraine refuse de les accueillir. Les autorités
françaises leur demandent pourtant d'y retourner.
Après le refus de l'OFPRA et de la commission de recours des
réfugiés, la demande de réexamen s'est déroulée selon la
procédure dite « prioritaire », dont le refus est pratiquement
inscrit d'avance, pour demande « infondée ». Aujourd'hui, le seul
recours possible, devant la commission de recours des réfugiés, est
à titre humanitaire : Nelia souffre de graves troubles
psychologiques dus aux violences dont son père a été victime.
Mais, dans ce cas, l'État n'assume plus quelque responsabilité que
ce soit en matière de logement. Il reste la rue. Depuis quatre ans,
tout droit au travail leur est refusé. Ils se nourrissent de bons
d'alimentation.
Préfecture sourde
La préfecture du Rhône, qui a, le 15 avril, déclaré qu'il ne
pouvait être question que des familles restent à la rue à la suite
du plan froid, a refusé toute entrevue hier matin. Les services de
la DDASS ont répondu qu'ils avaient trois cents personnes dont ils
ne savaient quoi faire. Pour cette nuit, malgré les réticences à
pallier les carences de l'État, le groupe des élus communistes et
républicains de Vaulx-en-Velin a décidé de financer, en urgence,
la chambre d'hôtel, dont le gérant explique qu'il a cinq familles
dans le même cas. La mairie de Villeurbanne est sollicitée.
L'avocate Nathalie Caron ne décolère pas : « Il y a la famille
Goussakov, apatride, il y a une autre famille arménienne dont
l'enfant a une maladie génétique qui va être expulsée, il y a ce
jeune homme en procédure de demande d'asile dont le conseil
général du Rhône ne veut plus payer la chambre d'hôtel à la
seconde pile de ses dix-huit ans... ».
Émilie Rive
27 avril 2005
Sans patrie ni recours;
Droits de l'homme. Une famille arménienne, déboutée de sa demande
d'asile, est à la rue depuis hier matin dans le Rhône.
Émilie Rive
Décines (Rhône), neuf heures, à l'hôtel Classe 1. Il reste une
heure à Armo et Arévik Goukassov et leurs trois filles pour quitter
la chambre. Pour aller où ? Mystère. Ils sont là depuis le 15
avril, jour où Forum Réfugiés a expliqué que, parce qu'ils
étaient déboutés du droit d'asile, leur hébergement n'était plus
pris en charge dans le foyer de Villeurbanne, où ils vivaient depuis
quatre ans. Ils avaient un sursis de huit jours, à l'hôtel, pour
trouver un toit... Les bagages sont à l'accueil, la famille devant
la porte, avec des responsables de la Ligue des droits de l'homme de
Villeurbanne, de Resovigi, des élus communistes de Décines et de
Vaulx-en-Velin. Elina, dix-huit ans en octobre, est au lycée et
Nelia à l'école primaire, à Villeurbanne, Genia, au collège
Jacques-Duclos de Vaulx-en-Velin.
Plus de nationalité
La famille n'a plus de nationalité : arménienne de l'Azerbaïdjan,
elle a fui la guerre, s'est réfugiée en Ukraine, alors République
de l'Union soviétique, dont elle a obtenu la nationalité. Mais, à
l'implosion de l'URSS, la nationalité ukrainienne est retirée.
Arévik, infirmière, perd son emploi, Armo, marin, devient taxi
clandestin. Ils cherchent protection en France pour leurs enfants.
Aujourd'hui, l'Ukraine refuse de les accueillir. Les autorités
françaises leur demandent pourtant d'y retourner.
Après le refus de l'OFPRA et de la commission de recours des
réfugiés, la demande de réexamen s'est déroulée selon la
procédure dite « prioritaire », dont le refus est pratiquement
inscrit d'avance, pour demande « infondée ». Aujourd'hui, le seul
recours possible, devant la commission de recours des réfugiés, est
à titre humanitaire : Nelia souffre de graves troubles
psychologiques dus aux violences dont son père a été victime.
Mais, dans ce cas, l'État n'assume plus quelque responsabilité que
ce soit en matière de logement. Il reste la rue. Depuis quatre ans,
tout droit au travail leur est refusé. Ils se nourrissent de bons
d'alimentation.
Préfecture sourde
La préfecture du Rhône, qui a, le 15 avril, déclaré qu'il ne
pouvait être question que des familles restent à la rue à la suite
du plan froid, a refusé toute entrevue hier matin. Les services de
la DDASS ont répondu qu'ils avaient trois cents personnes dont ils
ne savaient quoi faire. Pour cette nuit, malgré les réticences à
pallier les carences de l'État, le groupe des élus communistes et
républicains de Vaulx-en-Velin a décidé de financer, en urgence,
la chambre d'hôtel, dont le gérant explique qu'il a cinq familles
dans le même cas. La mairie de Villeurbanne est sollicitée.
L'avocate Nathalie Caron ne décolère pas : « Il y a la famille
Goussakov, apatride, il y a une autre famille arménienne dont
l'enfant a une maladie génétique qui va être expulsée, il y a ce
jeune homme en procédure de demande d'asile dont le conseil
général du Rhône ne veut plus payer la chambre d'hôtel à la
seconde pile de ses dix-huit ans... ».
Émilie Rive