A LYON, LE MEMORIAL DU GENOCIDE ARMENIEN INAUGURE DANS LE CALME
Yves Bordenave Article paru dans l'edition du 26.04.06
Le Monde, France
25 Avril 2006
Jules Mardirossian peut se rejouir. Cet homme, ne il y a 68 ans
a Lyon, president de l'association pour le memorial lyonnais du
genocide des Armeniens, a reussi son pari : depuis lundi 24 avril,
pour le 91e anniversaire du genocide perpetre par les Turcs entre
1915 et 1918, un memorial se dresse en plein coeur de Lyon, sur la
place Antonin-Poncet. Trente-six stèles, feuilles de pierres blanches,
emergent du bitume. S'elevant a 3,46 mètres du sol, l'oeuvre concue par
l'architecte Leonardo Basmadyian interpelle le regard des passants
afin qu'ils se souviennent "du genocide armenien et de tous les
autres genocides".
Lundi en fin d'après-midi, environ deux mille personnes ont assiste a
la ceremonie d'inauguration. Elle s'est deroulee dans le calme et le
recueillement, en presence du maire de Lyon, Gerard Collomb, des elus
de l'agglomeration et de Dominique Perben, ministre des transports,
et candidat declare aux municipales de 2008 a Lyon, qui representait
le president de la Republique. Un important service de securite avait
ete deploye par la prefecture du Rhône qui redoutait des incidents.
Dans cette ville qui compte environ 40 000 personnes d'origine
armenienne et autant d'origine turque, la decision unanime, votee en
2004 au conseil municipal, d'edifier un lieu dedie a la memoire du
genocide armenien, a suscite de nombreuses reactions. Selon Jean-Yves
Secheresse, l'elu (PS) charge du dossier, des lettres d'indignation -
parfois d'insultes - et des petitions emanant le plus souvent, de la
communaute turque ont afflue a la mairie. Quatre recours en refere
ont ete deposes devant le tribunal administratif par une association
de riverains et une elue UMP qui voulaient conserver cette place
en l'etat.
Plus recemment, l'edification du monument a provoque des protestations
virulentes, et des manifestations, parfois violentes.
Les dernières datent du 17 avril : "Il n'y a pas eu de genocide"
proclamaient des inscriptions taguees sur le site.
Un mois auparavant, le 18 mars, une manifestation a l'appel de
plusieurs associations franco-turques, rassemblant des jeunes
Turcs venus de l'agglomeration lyonnaise et des regions voisines,
brandissant des pancartes negationnistes et faisant le signe des
Loups-Gris (mouvement turc d'extreme droite), avait degenere (Le
Monde du 21 mars). "On savait que ce memorial allait entraîner des
mouvements de rejet, mais pas a ce point-la", deplore M.
Mardirossian, qui soupconne le consulat de Turquie a Lyon d'avoir
fomente ces debordements.
Le consulat rejette ces accusations, mais ne dissimule pas son
hostilite. "Nous sommes contre le memorial, car il n'y a pas eu de
genocide, plaide Derya Tutumel, de l'ambassade de Turquie en France.
Des deux côtes, les populations ont souffert des evenements tragiques
de cette epoque." Et d'interroger : "A quoi sert ce genre de
monument, sinon a encourager la haine ?" Au cours des derniers mois,
le consul general de Turquie a Lyon, Ozer Aydan, s'est adresse a deux
reprises par courrier a M. Collomb pour le convaincre de surseoir a
la realisation du memorial. Ces requetes sont restees sans effet.
--Boundary_(ID_HSpqV6sZEbLrpTN2mQc6mw)--
Yves Bordenave Article paru dans l'edition du 26.04.06
Le Monde, France
25 Avril 2006
Jules Mardirossian peut se rejouir. Cet homme, ne il y a 68 ans
a Lyon, president de l'association pour le memorial lyonnais du
genocide des Armeniens, a reussi son pari : depuis lundi 24 avril,
pour le 91e anniversaire du genocide perpetre par les Turcs entre
1915 et 1918, un memorial se dresse en plein coeur de Lyon, sur la
place Antonin-Poncet. Trente-six stèles, feuilles de pierres blanches,
emergent du bitume. S'elevant a 3,46 mètres du sol, l'oeuvre concue par
l'architecte Leonardo Basmadyian interpelle le regard des passants
afin qu'ils se souviennent "du genocide armenien et de tous les
autres genocides".
Lundi en fin d'après-midi, environ deux mille personnes ont assiste a
la ceremonie d'inauguration. Elle s'est deroulee dans le calme et le
recueillement, en presence du maire de Lyon, Gerard Collomb, des elus
de l'agglomeration et de Dominique Perben, ministre des transports,
et candidat declare aux municipales de 2008 a Lyon, qui representait
le president de la Republique. Un important service de securite avait
ete deploye par la prefecture du Rhône qui redoutait des incidents.
Dans cette ville qui compte environ 40 000 personnes d'origine
armenienne et autant d'origine turque, la decision unanime, votee en
2004 au conseil municipal, d'edifier un lieu dedie a la memoire du
genocide armenien, a suscite de nombreuses reactions. Selon Jean-Yves
Secheresse, l'elu (PS) charge du dossier, des lettres d'indignation -
parfois d'insultes - et des petitions emanant le plus souvent, de la
communaute turque ont afflue a la mairie. Quatre recours en refere
ont ete deposes devant le tribunal administratif par une association
de riverains et une elue UMP qui voulaient conserver cette place
en l'etat.
Plus recemment, l'edification du monument a provoque des protestations
virulentes, et des manifestations, parfois violentes.
Les dernières datent du 17 avril : "Il n'y a pas eu de genocide"
proclamaient des inscriptions taguees sur le site.
Un mois auparavant, le 18 mars, une manifestation a l'appel de
plusieurs associations franco-turques, rassemblant des jeunes
Turcs venus de l'agglomeration lyonnaise et des regions voisines,
brandissant des pancartes negationnistes et faisant le signe des
Loups-Gris (mouvement turc d'extreme droite), avait degenere (Le
Monde du 21 mars). "On savait que ce memorial allait entraîner des
mouvements de rejet, mais pas a ce point-la", deplore M.
Mardirossian, qui soupconne le consulat de Turquie a Lyon d'avoir
fomente ces debordements.
Le consulat rejette ces accusations, mais ne dissimule pas son
hostilite. "Nous sommes contre le memorial, car il n'y a pas eu de
genocide, plaide Derya Tutumel, de l'ambassade de Turquie en France.
Des deux côtes, les populations ont souffert des evenements tragiques
de cette epoque." Et d'interroger : "A quoi sert ce genre de
monument, sinon a encourager la haine ?" Au cours des derniers mois,
le consul general de Turquie a Lyon, Ozer Aydan, s'est adresse a deux
reprises par courrier a M. Collomb pour le convaincre de surseoir a
la realisation du memorial. Ces requetes sont restees sans effet.
--Boundary_(ID_HSpqV6sZEbLrpTN2mQc6mw)--