GENOCIDE ARMENIEN : LE PARLEMENT TURC DENONCE L'ATTITUDE DE LA FRANCE
par Sophie Shihab
Le Monde, France
19 octobre 2006 jeudi
Après le vote a Paris d'un projet de loi penalisant la negation du
genocide armenien, les protestations se multiplient en Turquie. Les
appels au boycottage inquiètent le patronat francais
Un restaurateur turc qui ne veut plus de Francais a sa table, une
Legion d'honneur et une medaille du Merite renvoyees a l'ambassade de
France a Ankara, des milliers d'appels au boycottage des produits
francais - mais pas de mesures de retorsion gouvernementales :
c'est le bilan des effets de la colère turque après l'adoption par
les deputes francais, le 12 octobre, de la proposition de loi qui
penalise le deni du genocide armenien.
Reuni pour definir sa reaction, le Parlement turc a vote, mardi 17
octobre, a Ankara, un texte qui promet " des dommages irreparables
aux liens politiques, economiques et militaires entre la France
et la Turquie " au cas où la proposition de loi devait etre un jour
adoptee. Mais aucune mesure de retorsion immediate n'a ete preconisee,
contrairement a ce que les medias turcs avaient laisse entrevoir.
Ces derniers ont fini par tenir compte des reserves qui se sont
manifestees en France sur la proposition de loi - elle prevoit de
punir d'un an de prison et d'amendes s'elevant jusqu'a 45 000 euros
quiconque niera la realite du " genocide " commis contre les Armeniens
dans l'Empire ottoman - realite deja reconnue en France en 2001 par une
loi. Ces reserves ont ete exprimees par le president de la Republique
lui-meme, dans un appel telephonique, le 14 octobre, au president turc
Recep Tayyip Erdogan, mais aussi par le gouvernement et une partie des
medias. Relevant qu'il a ete vote par moins d'un cinquième des deputes,
les Turcs veulent croire que le projet a peu de chances d'etre adopte,
du moins tant que ses initiateurs socialistes sont dans l'opposition.
SITUATION JUGEE " INQUIETANTE "
La resolution adoptee, mardi, par le Parlement turc, menace neanmoins
de sanctions et marque la " surprise de voir la France en position de
decideur lorsqu'il s'agit d'evenements historiques lies a la Turquie,
alors qu'elle a preconise de laisser ce rôle aux historiens dans les
cas où ses propres actions ont fait plus d'un million de morts en
Algerie, Indochine, Madagascar et autres pays d'Afrique ". Les deputes
ont rappele la proposition turque de former une commission conjointe
d'historiens sur le sujet - proposition qualifiee d'" importante
" par le commissaire europeen a l'elargissement, Olli Rehn, mais
rejetee par l'Armenie.
" La France a perdu sa position privilegiee en Turquie (...) a cause
de simples visees electoralistes ", a affirme le ministre des affaires
etrangères Abdullah Gul. " Au lieu d'accuser la Turquie de genocide, -
elle - devrait s'excuser pour son rôle dans les massacres (...) commis
par les Armeniens qui avaient cru aux promesses francaises de creer
une Armenie independante " en Anatolie du Sud-Est, a dit le ministre,
qui a promis de " faire tout ce qui est possible en droit international
" pour empecher l'adoption du projet de loi.
En attendant, l'image de la France comme avant-garde des ennemis de
l'entree de la Turquie dans l'Union europeenne a ete renforcee.
L'Hexagone devrait le payer lors des attributions de grands contrats
dans le domaine militaire et la construction de centrales nucleaires,
et d'autres, pour un total de près de 4 milliards d'euros de projets
en cours.
Les echanges commerciaux, qui se sont eleves, en 2005, a 8,2
milliards d'euros, pourraient aussi souffrir. Des chambres de
commerce ou d'industrie, dont celle d'Ankara, appellent a boycotter
les produits francais, de meme que des dizaines de sites Internet,
crees pour l'occasion.
En France, la presidente du Medef, Laurence Parisot, a qualifie, mardi,
a Bruxelles, la situation d'" inquietante ". Critiquant le projet de
resolution du Parlement francais, elle a souligne qu'" une reaction
trop vive des autorites ou des responsables economiques turcs peut
etre très prejudiciable pour la sante des entreprises francaises " -
beaucoup sont implantees en Turquie ou exportent vers ce pays. Elle a
rencontre, le meme jour, le president du patronat turc, le Tusiad, a
l'occasion d'une reunion de l'Unice, organisation patronale europeenne.
Une note de nature a la rassurer a ete donnee par l'association des
investissements etrangers Yased : elle a appele a la moderation "
pour ne pas penaliser les 65 000 employes turcs " des entreprises
francaises implantees en Turquie.
--Boundary_(ID_+PZehg60ATPR+fwnF8Q9nQ)--
From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress
par Sophie Shihab
Le Monde, France
19 octobre 2006 jeudi
Après le vote a Paris d'un projet de loi penalisant la negation du
genocide armenien, les protestations se multiplient en Turquie. Les
appels au boycottage inquiètent le patronat francais
Un restaurateur turc qui ne veut plus de Francais a sa table, une
Legion d'honneur et une medaille du Merite renvoyees a l'ambassade de
France a Ankara, des milliers d'appels au boycottage des produits
francais - mais pas de mesures de retorsion gouvernementales :
c'est le bilan des effets de la colère turque après l'adoption par
les deputes francais, le 12 octobre, de la proposition de loi qui
penalise le deni du genocide armenien.
Reuni pour definir sa reaction, le Parlement turc a vote, mardi 17
octobre, a Ankara, un texte qui promet " des dommages irreparables
aux liens politiques, economiques et militaires entre la France
et la Turquie " au cas où la proposition de loi devait etre un jour
adoptee. Mais aucune mesure de retorsion immediate n'a ete preconisee,
contrairement a ce que les medias turcs avaient laisse entrevoir.
Ces derniers ont fini par tenir compte des reserves qui se sont
manifestees en France sur la proposition de loi - elle prevoit de
punir d'un an de prison et d'amendes s'elevant jusqu'a 45 000 euros
quiconque niera la realite du " genocide " commis contre les Armeniens
dans l'Empire ottoman - realite deja reconnue en France en 2001 par une
loi. Ces reserves ont ete exprimees par le president de la Republique
lui-meme, dans un appel telephonique, le 14 octobre, au president turc
Recep Tayyip Erdogan, mais aussi par le gouvernement et une partie des
medias. Relevant qu'il a ete vote par moins d'un cinquième des deputes,
les Turcs veulent croire que le projet a peu de chances d'etre adopte,
du moins tant que ses initiateurs socialistes sont dans l'opposition.
SITUATION JUGEE " INQUIETANTE "
La resolution adoptee, mardi, par le Parlement turc, menace neanmoins
de sanctions et marque la " surprise de voir la France en position de
decideur lorsqu'il s'agit d'evenements historiques lies a la Turquie,
alors qu'elle a preconise de laisser ce rôle aux historiens dans les
cas où ses propres actions ont fait plus d'un million de morts en
Algerie, Indochine, Madagascar et autres pays d'Afrique ". Les deputes
ont rappele la proposition turque de former une commission conjointe
d'historiens sur le sujet - proposition qualifiee d'" importante
" par le commissaire europeen a l'elargissement, Olli Rehn, mais
rejetee par l'Armenie.
" La France a perdu sa position privilegiee en Turquie (...) a cause
de simples visees electoralistes ", a affirme le ministre des affaires
etrangères Abdullah Gul. " Au lieu d'accuser la Turquie de genocide, -
elle - devrait s'excuser pour son rôle dans les massacres (...) commis
par les Armeniens qui avaient cru aux promesses francaises de creer
une Armenie independante " en Anatolie du Sud-Est, a dit le ministre,
qui a promis de " faire tout ce qui est possible en droit international
" pour empecher l'adoption du projet de loi.
En attendant, l'image de la France comme avant-garde des ennemis de
l'entree de la Turquie dans l'Union europeenne a ete renforcee.
L'Hexagone devrait le payer lors des attributions de grands contrats
dans le domaine militaire et la construction de centrales nucleaires,
et d'autres, pour un total de près de 4 milliards d'euros de projets
en cours.
Les echanges commerciaux, qui se sont eleves, en 2005, a 8,2
milliards d'euros, pourraient aussi souffrir. Des chambres de
commerce ou d'industrie, dont celle d'Ankara, appellent a boycotter
les produits francais, de meme que des dizaines de sites Internet,
crees pour l'occasion.
En France, la presidente du Medef, Laurence Parisot, a qualifie, mardi,
a Bruxelles, la situation d'" inquietante ". Critiquant le projet de
resolution du Parlement francais, elle a souligne qu'" une reaction
trop vive des autorites ou des responsables economiques turcs peut
etre très prejudiciable pour la sante des entreprises francaises " -
beaucoup sont implantees en Turquie ou exportent vers ce pays. Elle a
rencontre, le meme jour, le president du patronat turc, le Tusiad, a
l'occasion d'une reunion de l'Unice, organisation patronale europeenne.
Une note de nature a la rassurer a ete donnee par l'association des
investissements etrangers Yased : elle a appele a la moderation "
pour ne pas penaliser les 65 000 employes turcs " des entreprises
francaises implantees en Turquie.
--Boundary_(ID_+PZehg60ATPR+fwnF8Q9nQ)--
From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress