Le Figaro, France
Samedi 23 Janvier 2010
Le rapprochement turco-arménien en panne;
Le génocide de 1915 et le conflit du Haut-Karabakh ralentissent le
processus de réconciliation.
par Marchand, Laure
TURQUIE Les résistances turques à la reconnaissance du génocide de
1915 continuent d'entraver le rapprochement entre la Turquie et
l'Arménie. Une référence indirecte à ce pan sombre de l'histoire par
la Cour constitutionnelle arménienne a déclenché la colère d'Ankara,
qui juge qu'elle « altère l'objectif et l'esprit des protocoles »,
signés en octobre par les deux pays afin de normaliser leurs
relations.
Le 12 janvier, la Cour a validé ces accords, tout en mentionnant un
article de la déclaration d'indépendance de l'Arménie qui soutient «
les efforts pour la reconnaissance internationale du génocide arménien
(...) dans la Turquie ottomane et en Arménie occidentale ».
Le premier ministre turc a estimé que cette mention des massacres
commis par l'Empire ottoman, dont la Turquie nie le caractère
génocidaire, était « inacceptable ». La réconciliation entre Ankara et
Erevan « sera remise en cause à moins que cette erreur ne soit
corrigée », a déclaré cette semaine Recep Tayyip Erdogan.
« La Turquie exagère »
à l'automne dernier, Arméniens et Turcs avaient franchi un pas
important pour mettre fin à près d'un siècle d'inimitié en s'engageant
à établir des relations diplomatiques, à rouvrir leur frontière
commune et à mettre en place une commission d'historiens. Mais, plus
de trois mois après leur signature, les accords n'ont toujours pas
franchi la dernière étape indispensable à leur entrée en vigueur et
attendent d'être approuvés par les Parlements des deux pays.
L'enlisement de la dynamique enclenchée en octobre est essentiellement
dû à la partie turque, qui a clairement conditionné la ratification Ã
des progrès dans les négociations sur le Haut-Karabakh, une province
azerbaïdjanaise à majorité arménienne et occupée par Erevan. Mais ce
conflit, hérité de la chute de l'URSS, est gelé. Un accord de paix
n'est pas espéré à court terme et aucune avancée substantielle n'est
attendue lors de la rencontre, le 25 janvier, entre les chefs d'Ã?tat
arménien et azerbaïdjanais, qu'a préparée le groupe de Minsk
(coprésidé par la France, les �tats-Unis et la Russie). En choisissant
de soutenir l'Azerbaïdjan, son allié turcophone et surtout l'un de ses
principaux fournisseurs de gaz, Ankara se retrouve donc bloqué. La
semaine dernière, à Moscou, le premier ministre Vladimir Poutine a
profité d'une visite de son homologue turc pour désapprouver les
exigences d'Ankara de subordonner la normalisation de ses relations
avec l'Arménie au sort de l'enclave disputée, jugeant cet « unique
paquet » fortement contre-productif.
« La Turquie exagère car le protocole avec l'Arménie ne fait pas
référence au Karabakh », commente Aybars Görgülü, coordinateur des
recherches turco-arméniennes à la Fondation turque des études
économiques et sociales. Le gouvernement turc utilise la décision de
la Cour arménienne « comme une excuse et cherche à faire porter la
responsabilité du blocage du processus à l'Arménie », selon ce
spécialiste. L'équation se complique d'autant plus pour Ankara que le
24 avril, date de commémoration des massacres de 1915, se profile et
que, à cette période de l'année, la diaspora arménienne fait
traditionnellement pression sur l'Administration américaine pour
qu'elle reconnaisse le génocide.
Samedi 23 Janvier 2010
Le rapprochement turco-arménien en panne;
Le génocide de 1915 et le conflit du Haut-Karabakh ralentissent le
processus de réconciliation.
par Marchand, Laure
TURQUIE Les résistances turques à la reconnaissance du génocide de
1915 continuent d'entraver le rapprochement entre la Turquie et
l'Arménie. Une référence indirecte à ce pan sombre de l'histoire par
la Cour constitutionnelle arménienne a déclenché la colère d'Ankara,
qui juge qu'elle « altère l'objectif et l'esprit des protocoles »,
signés en octobre par les deux pays afin de normaliser leurs
relations.
Le 12 janvier, la Cour a validé ces accords, tout en mentionnant un
article de la déclaration d'indépendance de l'Arménie qui soutient «
les efforts pour la reconnaissance internationale du génocide arménien
(...) dans la Turquie ottomane et en Arménie occidentale ».
Le premier ministre turc a estimé que cette mention des massacres
commis par l'Empire ottoman, dont la Turquie nie le caractère
génocidaire, était « inacceptable ». La réconciliation entre Ankara et
Erevan « sera remise en cause à moins que cette erreur ne soit
corrigée », a déclaré cette semaine Recep Tayyip Erdogan.
« La Turquie exagère »
à l'automne dernier, Arméniens et Turcs avaient franchi un pas
important pour mettre fin à près d'un siècle d'inimitié en s'engageant
à établir des relations diplomatiques, à rouvrir leur frontière
commune et à mettre en place une commission d'historiens. Mais, plus
de trois mois après leur signature, les accords n'ont toujours pas
franchi la dernière étape indispensable à leur entrée en vigueur et
attendent d'être approuvés par les Parlements des deux pays.
L'enlisement de la dynamique enclenchée en octobre est essentiellement
dû à la partie turque, qui a clairement conditionné la ratification Ã
des progrès dans les négociations sur le Haut-Karabakh, une province
azerbaïdjanaise à majorité arménienne et occupée par Erevan. Mais ce
conflit, hérité de la chute de l'URSS, est gelé. Un accord de paix
n'est pas espéré à court terme et aucune avancée substantielle n'est
attendue lors de la rencontre, le 25 janvier, entre les chefs d'Ã?tat
arménien et azerbaïdjanais, qu'a préparée le groupe de Minsk
(coprésidé par la France, les �tats-Unis et la Russie). En choisissant
de soutenir l'Azerbaïdjan, son allié turcophone et surtout l'un de ses
principaux fournisseurs de gaz, Ankara se retrouve donc bloqué. La
semaine dernière, à Moscou, le premier ministre Vladimir Poutine a
profité d'une visite de son homologue turc pour désapprouver les
exigences d'Ankara de subordonner la normalisation de ses relations
avec l'Arménie au sort de l'enclave disputée, jugeant cet « unique
paquet » fortement contre-productif.
« La Turquie exagère car le protocole avec l'Arménie ne fait pas
référence au Karabakh », commente Aybars Görgülü, coordinateur des
recherches turco-arméniennes à la Fondation turque des études
économiques et sociales. Le gouvernement turc utilise la décision de
la Cour arménienne « comme une excuse et cherche à faire porter la
responsabilité du blocage du processus à l'Arménie », selon ce
spécialiste. L'équation se complique d'autant plus pour Ankara que le
24 avril, date de commémoration des massacres de 1915, se profile et
que, à cette période de l'année, la diaspora arménienne fait
traditionnellement pression sur l'Administration américaine pour
qu'elle reconnaisse le génocide.