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Sarkis Sahinian: J'ai essaye d'etre le plus diplomatique possible

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  • Sarkis Sahinian: J'ai essaye d'etre le plus diplomatique possible

    Sarkis Sahinian « J'ai essayé d'être le plus diplomatique possible,
    mais il fallait dire des vérités »

    SUISSE

    dimanche30 mai 2010, par Stéphane/armenews


    © Hayasdan Pan Armenian Fund (Photo : Martin Shahbazyan, RA Presidency)
    Armenews : Sarkis Shahinian vous revenez d'Erevan après avoir reçu le
    prix du président 2009 pour votre action pour la reconnaissance du
    génocide. Quelles sont vos impressions ?

    Ce prix constitue, de la part des Institutions de la République
    d'Arménie, une reconnaissance du travail mené par l'Association
    Suisse-Arménie, en Suisse et au niveau international, pour la
    reconnaissance du génocide et pour combattre le négationnisme. Un tel
    prix, décerné par le Président de la République après la signature des
    protocoles arméno-turcs et les efforts de la Turquie pour imposer le
    préalable d'une solution au conflit du Karabakh, revêt une
    signification qui va bien au delà d'une simple reconnaissance. Sur ce
    point comme sur d'autres, nous relevons des différences entre ce que
    les autorités arméniennes disent et ce qu'elles font. Le Gouvernement
    d'Erevan et en particulier la diplomatie arménienne n'ont pas créé les
    bases nécessaires pour développer une stratégie commune avec la
    Diaspora. Même si des points de désaccord subsistaient entre les deux
    entités, elles devraient jouer ensemble, sur le même échiquier. Le
    Ministère de la Diaspora montre en ce moment ses limites et
    objectivement, n'est pas à la hauteur pour maintenir de tels liens, à
    fortiori pour les créer. Les ministères clés devraient avoir des
    liaisons directes avec la Diaspora, afin que celle-ci soit pleinement
    efficace dans son travail politique dans chaque Pays ou elle est
    représentée. La Turquie et l'Azerbaïdjan ont beau jeu de diviser
    l'Arménie et la Diaspora. Elles font un très bon travail avec leurs
    communautés à l'étranger, un travail dont la portée n'a absolument pas
    été comprise par l'Arménie. En vérité, la Diaspora arménienne ne fait
    pas son devoir non plus et continue à attendre des signaux de la part
    d'Erevan. Sur la base de mon expérience, je suis toutefois convaincu
    que ces signaux ne viendront pas. Il faudrait un changement radical de
    paradigme et pour cela il faudrait que l'Arménie et la Diaspora se
    donnent les ressources nécessaires Malheureusement, les signes d'une
    telle prise de conscience, unanime, n'apparaissent ni d'un côté ni de
    l'autre.


    © Hayasdan Pan Armenian Fund (Photo : Martin Shahbazyan, RA Presidency)
    Armenews : Comment s'est déroulée la cérémonie ?

    Le matin du 13 mai les personnes nommées pour les prix ainsi que les
    invités ont été conviés au Palais présidentiel, avenue Baghramian. En
    présence de Jean Boghossian, coprésident de la Fondation qui porte son
    nom, le Président Sargsyan a remis les différents prix. Dans son
    discours, il a souligné l'importance de l'attribution du prix à
    chacune des deux organisations qui s'étaient distinguées dans la
    promotion de la question arménienne. Les éloges ont été prononcés pour
    chacune et chacun des nommés devant le Président de l'Assemblée
    nationale, le Premier Ministre, la Ministre de la Culture, la Ministre
    de la Diaspora, le Ministre de la Santé, le Ministre de l'Education,
    le Président de l'Académie des Sciences, les Ambassadeurs de France,
    de Belgique et du Liban (celui de Suisse s'est excusé), ainsi que les
    représentants de la Fondation Pan arménienne Hayasdan et les experts
    de chacune des 17 catégories dans lesquelles ont été décernés les
    prix. Pour la catégorie de la cause arménienne, c'est le directeur de
    l'Institut et du Mémorial du génocide, Dr. Hayk Demoyan, qui a
    introduit le Professeur Alex Hinton, représentant de l'International
    Association of Genocide Scholars (qui a retiré le prix à la place du
    Professeur William Shabbas, empêché à cette date) ainsi que ma
    personne. Puis, chacun de nous a eu l'occasion de prononcer un mot de
    remerciement. La cérémonie s'est conclue par un verre de l'amitié et
    une photo de groupe. Le soir, un concert a été organisé à la Salle de
    Musique de Chambre "Komitas" en honneur des invités. En particulier,
    les personnes ayant obtenu un prix dans la catégorie "Musique" ont
    donné une performance de très haut niveau, introduites et accompagnées
    pour l'occasion par les soeurs Anoush et Inga Arshakyan, qui avaient
    représenté l'Arménie au Concours Eurovisions de la Chanson à Moscou en
    2009. Le concert a été précédé par un film documentaire voué au 10e
    jubilée du Prix du Président, un hommage bien mérité aux frères Jean
    et Albert Boghossian, sponsors de ce Prix. La soirée s'est conclue par
    un riche apéritif dînatoire.


    © Hayasdan Pan Armenian Fund (Photo : Martin Shahbazyan, RA Presidency)
    Armenews : Vous êtes intervenu pour vous opposer à la signature des
    protocoles arméno-turcs. Quel a été votre message au président Serge
    Sarkissian ?

    J'ai essayé d'être le plus diplomatique possible, mais il fallait dire
    des vérités. J'ai remercié le Président de la République et Monsieur
    Boghossian pour ce prix. J'ai rappelé l'engagement constant et continu
    de tous les membres du Comité de notre association jusqu'à la
    reconnaissance du génocide par le Conseil national et la condamnation
    d'un négationniste. J'ai saisi l'occasion, (et je le fais aussi
    maintenant) pour remercier ma femme et mes enfants pour l'immense
    patience qu'ils ont eue dans les moments les plus difficiles.


    © Hayasdan Pan Armenian Fund (Photo : Martin Shahbazyan, RA Presidency)
    © Hayasdan Pan Armenian Fund (Photo : Martin Shahbazyan, RA Presidency)
    J'ai souligné que le peuple arménien est entré dans une nouvelle phase
    de son existence, où il n'y aura plus de place pour la haine à
    l'encontre du peuple turc, sans toutefois oublier les droits non pas
    historiques, mais bien actuels des Arméniens, et que cette phase
    passait par une collaboration horizontale et étroite entre la Diaspora
    et l'Arménie. Depuis 2003, la question arménienne est devenu un sujet
    de politique nationale en Suisse et la création du Groupe
    parlementaire Suisse-Arménie a permis de créer un auditoire important
    au sein de l'Assemblée fédérale de notre Confédération. Il est
    toutefois évident, que les autorités d'Erevan n'ont pas mesuré tous
    les efforts qu'il nous a fallu pour parvenir à ce résultat. J'ai dit
    au Président que la sécurité nationale de l'Arménie, en ce moment si
    délicat de son histoire, imposait le recours à toutes les ressources
    disponibles de la nation arménienne en Arménie et en Diaspora. Ce
    `Prix du Président' constitue sans doute un premier pas dans la bonne
    direction, mais la collaboration que nous souhaitons devrait être
    concrète, au-delà des actes symboliques, jusqu'au jour où une totale
    compréhension s'établira entre Arménie et Diaspora. Je lui ai dit
    qu'il fallait une plateforme commune, informelle, pour déterminer et
    suivre une vision stratégique unique. Au vu des derniers
    développements internationaux de la question arménienne, pourtant
    prévisibles et partiellement anticipés par différents organes
    diasporiques, dont l'ASA, cette plateforme n'est pas seulement
    souhaitable mais indispensable. Notamment, la destruction de la
    nécropole de Djougha, la guerre médiatique et diplomatique lancée par
    la Turquie et l'Azerbaïdjan ainsi que la direction imprimée (par
    d'autres) aux rapports entre l'Arménie et la Turquie au moyen des
    protocoles signés à Zurich, démontrent l'importance d'une stratégie
    commune. Si d'un côté on assiste à des signaux encourageants provenant
    des sociétés turque et arménienne, on voit aussi que l'Etat turc ne
    perd pas une occasion d'exercer des pressions sur les Etats ayant déjà
    reconnu le génocide des Arméniens. La dernière visite à Ankara de la
    Présidente du Conseil aux Etats (Sénat suisse), Madame Erika
    Forster-Vanini, a démontré la validité de nos craintes. Pour conclure,
    et en m'adressant au Président et au Premier Ministre, je leur ai dit
    qu'il fallait arrêter de soigner les `symptômes' et qu'il fallait
    affronter les `maladies' sur un plan plus systématique et
    scientifique.

    Le lendemain, le Professeur Hinton et moi avons tenu une conférence à
    l'auditoire du Musée du génocide, à Dzidzernagabert. M. Hinton a parlé
    de la justice transitionnelle, traçant des parallèles entre les
    critères à la base du Médz Yeghérn et ceux des massacres de masse au
    Cambodge sous le régime de Pol Pot. Il a également mis en exergue
    l'importance des tribunaux internationaux et la notion de réparation.
    J'ai pour ma part développé le concept de plateforme commune entre
    l'Etat d'Arménie et la Diaspora que justifient les défis posés à la
    sécurité nationale de l'Arménie. J'ai en particulier relevé tout ce
    qui n'avait pas été fait en matière de défense des Droits de l'homme,
    que ce soit dans le cas du droit à l'autodétermination du Karabakh, ou
    dans celui de la condamnation internationale des crimes de Soumgait,
    Bakou et Kirovabad et dans celui de la dénonciation de la destruction
    de Djougha. Dans tous ces cas le Gouvernement arménien s'est distingué
    par une absence totale d'initiative diplomatique. D'autant que Charles
    Aznavour, ambassadeur d'Arménie en Suisse, en écho aux discours de
    Deir es Zor et du 22 avril du président, aurait dû défendre devant les
    media suisses et internationaux les revendications arméniennes. Il ne
    l'a pas fait, quoique on lui avait préparé une audience considérable.
    Son silence est incompréhensible et on attend de sa part une
    explication valable. Toutefois, ce n'est pas un phénomène nouveau :
    lorsque pour dénoncer la destruction de Djougha par les forces armées
    azerbaïdjanaises, notre Groupe parlementaire Suisse-Arménie,
    accompagné d'une délégation parlementaire internationale, s'est
    présenté devant le Directeur général de l'UNESCO à Paris, on n'a
    entendu ni Vartan Oskanian, ministre des Affaires Etrangères, ni le
    ministre actuel des Affaires Etrangères alors Ambassadeur en France,
    Edouard Nalbandian. Une inertie inexplicable de côté arménien !


    © Hayasdan Pan Armenian Fund (Photo : Martin Shahbazyan, RA Presidency)
    Armenews : Ou en est-on avec le procès de Dogu Perincek en Suisse ?

    En Suisse le procès s'est conclu le 12 décembre 2007 avec l'arrêt du
    Tribunal fédéral, qui a ainsi fait jurisprudence. Je sais que les
    avocats de Dogu Perincek ont porté le cas devant la Cour Européenne
    des Droits de l'Homme. Je n'ai pas d'informations supplémentaires en
    matière. Par contre, les trois partisans du Chef du Parti des
    Travailleurs Turc qui ont publiquement nié le génocide des Arméniens à
    la fin de juin 2007 dans la ville de Winterthur ont été condamnés en
    première instance et le verdict a été confirmé par le Tribunal d'appel
    cantonal de Zurich. Ils ont porté le cas devant le Tribunal fédéral,
    qui devrait se prononcer d'ici à la fin de l'année. Nous ne nous
    attendons pas à des grandes surprises.




    From: A. Papazian
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