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BEYROUTH: George Pehlivanian, la musique dans le sang

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  • BEYROUTH: George Pehlivanian, la musique dans le sang

    L'Orient-Le Jour, Liban
    18 Nov 2010


    George Pehlivanian, la musique dans le sang

    Par Edgar DAVIDIAN | 19/11/2010

    Passage d'une dizaine de jours en sol majeur pour le maestro George
    Pehlivanian qui foule, avec une émotion intense, la terre qui l'a vu
    naître.


    De Paris à Montmartre, où il est installé à présent depuis plus de
    quinze ans, à Beyrouth, et plus précisément à Mar Mikhael, où il a
    vécu jusqu'à l'ge de dix ans, le chef d'orchestre George Pehlivanian,
    adulé et applaudi à l'étranger, décortique le passé, inspecte le
    présent et regarde le futur...

    Partition intégrale à un retour aux sources pour les besoins d'un
    film-portrait du musicien tourné par Nicolas Raynal, mais aussi besoin
    de revisiter le passé après plus de trente-cinq ans d'absence quand
    une pluie de bombes en 1975 a fait éclater et chavirer la vie des
    Libanais.

    Non, pas encore de soirée musicale en prévision à Beyrouth ou autres
    hauts lieux festivaliers, mais simple redécouverte vacancière d'un
    pays d'origine où, radieux et terribles, abondent et affleurent les
    souvenirs de l'enfance. Avec des odeurs, des parfums et des saveurs
    toniques et tenaces.

    Tout comme la madeleine de Proust, le «foul» à l'huile, pour maestro
    Pehlivanian, est l'occasion d'un troublant retour en arrière. Il
    évoque avec frémissement la première délicieuse bouchée qui mouille
    déjà ses paupières d'une larme qui se retient à peine.
    Rencontre avec un chef d'orchestre affable et avenant, qui a la
    musique dans le sang, dans un café à Achrafieh, sous un soleil aussi
    brûlant au c`ur de novembre qu'aux solstices les plus chauds de
    juin...

    La silhouette menue, les yeux grands et légèrement bridés, vêtu de
    noir, les cheveux déjà sel et poivre en bataille jusque dans la nuque,
    la voix mesurée (il est polyglotte - neuf langues à son actif! - et
    «surfe» facilement du français à l'arménien en ponctuant ses phrases
    d'intonations allemandes ou américaines), maestro Pehlivanian est de
    toute évidence heureux d'être en lieu ensoleillé et familier. Et c'est
    en toute tranquillité et douceur que glisse cette imperceptible
    confidence, qui sonne toutefois comme un regret maîtrisé: «C'est le
    hasard qui m'a fait retourner et non la musique...»

    Sa mère n'est autre que la cantatrice soprano Arpiné Pehlivanian et sa
    tante la pianiste Madeleine Medawar. Sa s`ur Elizabeth est pianiste et
    prof de chant. C'est déjà dire que pour lui la musique est dans la
    famille et bon sang ne saurait mentir...

    Un premier prix à neuf ans...

    «C'est par miracle que je suis resté vivant quand les bombes se sont
    mis à pleuvoir en 1975, confie-t-il... À l'époque, je fréquentais le
    Conservatoire national supérieur en ferraillant avec le piano, le
    violon et le solfège. En fait, j'étais tout à fait sous l'ombrelle de
    la musique puisque à neuf ans je gagnais un concours national pour
    violon... Installé à Los Angeles, j'ai continué à travailler le violon
    et, par la suite, j'ai fréquenté l'Accademia musicale Chiggiana en
    Italie tout en peaufinant ma formation sous la houlette de Lorin
    Maazel, Pierre Boulez et Ferdinand Leitner. Ma carrière a démarré
    surtout en 1991 après avoir emporté, en compétition, le prix de
    Besançon en France pour la direction du Sacre de printemps de
    Stravinsky et le Concerto n° 1 pour piano et orchestre de Brahms.
    Vingt ans que je n'arrête plus. Combien de concerts j'ai donné dans ma
    vie? Difficile à dire. Peut-être plus de mille. Avec plus de cent
    différents orchestres placés sous ma houlette. J'aime les grands
    espaces pour y donner des concerts festifs qui font aimer la musique à
    un grand nombre d'auditeurs, car la culture est vitale pour tout pays.
    La musique est un moyen de communication. C'est un message d'amour, de
    beauté et de paix. Pour cela, j'aimerai me produire à Baalbeck,
    Beiteddine ou aussi au centre-ville... J'aime aussi la musique de
    chambre. J'aime communiquer avec l'orchestre, le public, le soliste.»

    À 46 ans, George Pehlivanian a dirigé les ensembles orchestraux les
    plus prestigieux (loin d'être une liste exhaustive, on cite
    volontiers, entre autres, les Philharmoniques de Londres, de la BBC,
    la Scala, Santa Cecilia, l'Orchestre de la Suisse Romande, les
    orchestres symphoniques de Baltimore, Toronto, Houston, Cincinnatti,
    Indianapolis, Vancouver, Montréal), tout en donnant la réplique à des
    solistes stars tels que David Garrett, Paul Badura Skoda, Janine
    Jansens, Éric Le Sage, Eva Johansson.

    Épris aussi de composition, il avoue cependant, avec une pointe
    presque d'humour: «Si je rêve "symphonique", mes compositions sont
    encore toujours seulement pour moi...»

    Féru de Brahms, Dvorak, Beethoven, Prokofiev, Boulez, Ravel, Debussy,
    il révèle aussi ses préférences pour des modernes contemporains, tels
    Christian Jost, Cosina, Thomas Marco, Louis de Pablo, Rueda, Thomas
    Daniel Schnee et Philippe Leroux, tout en gardant dans le c`ur un élan
    pour les compositeurs arméniens dont Khatchadourian, Komitas et
    Aharonian.

    Plus de quinze CD dans les bacs portent l'empreinte de la direction de
    maestro George Pehlivanian. Des ouvertures de Verdi et Rossini à
    l'intégrale des `uvres pour piano et orchestre de Liszt, en passant
    par des pages de Mahler, Strauss, Rodrigo, Zukoff, Cosina, Beethoven
    et Arnich, la musique est ici un monde coloré et sans frontière. Un
    monde qui tente de resserrer les maillons d'une vie et de rejoindre
    aujourd'hui le bonheur d'une enfance lumineuse entre les curés, les
    «vartabed» à Antelias et les jeux au Bois de Boulogne, haut lieu de
    villégiature de la communauté arménienne libanaise d'avant-guerre.

    «C'était magnifique», dit le musicien en se remémorant le clair
    désordre de l'enfance. Et d'ajouter, dans un vigoureux éclat de rire,
    comme quelqu'un pris en flagrant délit d'un rêve-mirage:

    «C'était si grand dans ma mémoire et, brusquement, je réalise que ce
    n'est pas si immense que cela ! Et pourtant, tout cela m'a tellement
    marqué!»

    http://www.lorientlejour.com/category/Culture/article/678863/George_Pehlivanian,__la_musique_dans_le_sang.html




    From: A. Papazian
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