LES " LECONS " DE LA TURQUIE EUROPEENNE
Jean Eckian
armenews.com
mercredi 21 decembre 2011
Par Sarkis Shahinian, president honoraire de l'Association
Suisse-Armenie et co-fondateur de l'Observatoire armenien
Qui croit encore a cette Turquie ? En s'opposant a l'adoption d'une loi
antiraciste dans un Etat tiers, elle donne a la France et a l'Europe
des " lecons " de droit, d'histoire, d'economie et de democratie. Non
sans consequences.
Le monde politique et economique turc exerce actuellement un
chantage inouï sur la France, sur le President de la Republique,
les Conseillers presidentiels, le Premier Ministre, le President de
l'Assemblee nationale, les Presidents des Commissions, les deputes, le
Quai d'Orsay, et sur le monde economique. De son côte, le president de
"Liberte pour l'Histoire", historien distingue, ramène indirectement
le Genocide Armenien a une tuerie de mouches. Pour sa part, l'opinion
publique francaise est en train de subir une attaque du plus pur style
(neo-) ottoman et s'estime impliquee dans une affaire qui lui semble
n'etre pas la sienne. La loi mise a l'ordre du jour de l'Assemblee
Nationale, tendant a proteger la dignite humaine, droit fondamental
inscrit dans la Constitution, ne traduit pourtant que la volonte du
legislateur de combler une lacune de taille. En realite, par cette
loi, qui prevoit notamment la punition de l'apologie, la negation ou
la banalisation grossière publiques des crimes contre l'humanite, en
particulier des genocides, la France transpose un droit negocie dans le
cadre des institutions europeennes (la Decision-cadre 2008/913/JAI)
dans son droit penal. Le fait que la Turquie s'y oppose, relève
d'une violation flagrante de la souverainete non seulement francaise,
mais aussi et surtout europeenne.
Contre toute evidence, la Turquie pretend que cette loi est dirigee
contre elle. Pas contente, Ankara fait a Paris la lecon sur la liberte
d'expression, alors qu'il ne se passe pas de jour sans que soient
arretes en Turquie journalistes, ecrivains où editeurs, qui s'opposent
a elle sur les questions de justice, kurde ou armenienne. L'Etat turc
est actuellement confronte a une repression inconnue depuis le coup
d'etat militaire de 1980.
La Turquie surencherit en donnant des " lecons " a la France,
l'appelant a reconnaître ses propres crimes. On pourrait se demander
a quel titre. L'Etat turc qui ne perd aucune occasion pour nier
le genocide de plus d'un million d'Armeniens et un demi-million
d'Assyriens, se place, d'un point de vue juridique en situation de
continuite avec l'Empire ottoman, un Etat criminel qui a organise
et execute en 14 mois ce genocide. N'est-ce pas lui qui instille
en permanence la negation de ces crimes, non seulement sur son
territoire, mais aussi dans les communautes turques des etats tiers,
tels la France ou la Suisse, où a ete decouverte une collusion avec
l'Etat profond turc pour exporter ce negationnisme avec Halacoglou,
Perincek et Mercan ?
Pour qui l'aurait oublie ou l'ignore, c'est bien la Turquie, poussee
par l'Azerbaïdjan, qui etrangle l'Armenie par son blocus, acte
caracterise d'hostilite internationale. La proposition du Ministre des
affaires etangères turc, M. Davoutoglou, a son homologue suisse, Mme
Calmy-Rey, debut decembre, de relancer les protocoles armeno-turcs est
de ce fait impossible a comprendre. S'agit-il de negocier l'ouverture
d'une frontière que la Turquie a fermee unilateralement depuis 1993 ?
Ou de se meler du conflit du Haut-Karabagh pour une solution en faveur
de Bakou ? Ou plutôt de creer une commission d'historiens qui servirait
a demontrer que Turcs et Armeniens sont en train de dialoguer sur la
qualification des crimes de 1915 ? L'attitude de la Turquie montre,
en verite, que sa volonte affichee de reconciliation avec l'Armenie
n'est fondee que sur la mauvaise fois et la recuperation politique.
From: Baghdasarian
Jean Eckian
armenews.com
mercredi 21 decembre 2011
Par Sarkis Shahinian, president honoraire de l'Association
Suisse-Armenie et co-fondateur de l'Observatoire armenien
Qui croit encore a cette Turquie ? En s'opposant a l'adoption d'une loi
antiraciste dans un Etat tiers, elle donne a la France et a l'Europe
des " lecons " de droit, d'histoire, d'economie et de democratie. Non
sans consequences.
Le monde politique et economique turc exerce actuellement un
chantage inouï sur la France, sur le President de la Republique,
les Conseillers presidentiels, le Premier Ministre, le President de
l'Assemblee nationale, les Presidents des Commissions, les deputes, le
Quai d'Orsay, et sur le monde economique. De son côte, le president de
"Liberte pour l'Histoire", historien distingue, ramène indirectement
le Genocide Armenien a une tuerie de mouches. Pour sa part, l'opinion
publique francaise est en train de subir une attaque du plus pur style
(neo-) ottoman et s'estime impliquee dans une affaire qui lui semble
n'etre pas la sienne. La loi mise a l'ordre du jour de l'Assemblee
Nationale, tendant a proteger la dignite humaine, droit fondamental
inscrit dans la Constitution, ne traduit pourtant que la volonte du
legislateur de combler une lacune de taille. En realite, par cette
loi, qui prevoit notamment la punition de l'apologie, la negation ou
la banalisation grossière publiques des crimes contre l'humanite, en
particulier des genocides, la France transpose un droit negocie dans le
cadre des institutions europeennes (la Decision-cadre 2008/913/JAI)
dans son droit penal. Le fait que la Turquie s'y oppose, relève
d'une violation flagrante de la souverainete non seulement francaise,
mais aussi et surtout europeenne.
Contre toute evidence, la Turquie pretend que cette loi est dirigee
contre elle. Pas contente, Ankara fait a Paris la lecon sur la liberte
d'expression, alors qu'il ne se passe pas de jour sans que soient
arretes en Turquie journalistes, ecrivains où editeurs, qui s'opposent
a elle sur les questions de justice, kurde ou armenienne. L'Etat turc
est actuellement confronte a une repression inconnue depuis le coup
d'etat militaire de 1980.
La Turquie surencherit en donnant des " lecons " a la France,
l'appelant a reconnaître ses propres crimes. On pourrait se demander
a quel titre. L'Etat turc qui ne perd aucune occasion pour nier
le genocide de plus d'un million d'Armeniens et un demi-million
d'Assyriens, se place, d'un point de vue juridique en situation de
continuite avec l'Empire ottoman, un Etat criminel qui a organise
et execute en 14 mois ce genocide. N'est-ce pas lui qui instille
en permanence la negation de ces crimes, non seulement sur son
territoire, mais aussi dans les communautes turques des etats tiers,
tels la France ou la Suisse, où a ete decouverte une collusion avec
l'Etat profond turc pour exporter ce negationnisme avec Halacoglou,
Perincek et Mercan ?
Pour qui l'aurait oublie ou l'ignore, c'est bien la Turquie, poussee
par l'Azerbaïdjan, qui etrangle l'Armenie par son blocus, acte
caracterise d'hostilite internationale. La proposition du Ministre des
affaires etangères turc, M. Davoutoglou, a son homologue suisse, Mme
Calmy-Rey, debut decembre, de relancer les protocoles armeno-turcs est
de ce fait impossible a comprendre. S'agit-il de negocier l'ouverture
d'une frontière que la Turquie a fermee unilateralement depuis 1993 ?
Ou de se meler du conflit du Haut-Karabagh pour une solution en faveur
de Bakou ? Ou plutôt de creer une commission d'historiens qui servirait
a demontrer que Turcs et Armeniens sont en train de dialoguer sur la
qualification des crimes de 1915 ? L'attitude de la Turquie montre,
en verite, que sa volonte affichee de reconciliation avec l'Armenie
n'est fondee que sur la mauvaise fois et la recuperation politique.
From: Baghdasarian