LOI SUR LES GENOCIDES : LA TURQUIE MENACE LA FRANCE DE "CONSEQUENCES IRREPARABLES"
Francetv info
http://www.francetv.fr/info/loi-sur-les-genocides-la-turquie-menace-la-france-de-consequences-irreparables_41409.html
20 dec 2011
Les relations entre la France et la Turquie se sont tendues mardi
20 decembre, depuis que Jean-Marc Ayrault, le president du groupe
PS a l'Assemblee nationale, a annonce que les deputes socialistes
voteraient la proposition de loi UMP visant a reprimer la negation
des genocides, qui sera examinee jeudi au Palais Bourbon.
Celle-ci prevoit un an de prison et une amende de 45 000 euros en cas
de contestation d'un genocide reconnu par la France, comme le genocide
armenien, reconnu depuis 2001. Le chef de l'Etat turc, Abdullah Gul,
a immediatement exhorte la France a abandonner une loi "inacceptable"
et prevoit d'imposer une panoplie de sanctions diplomatiques et
commerciales contre l'Hexagone si ce texte est vote jeudi.
Pourquoi cette loi fait-elle polemique ?
Si la decision suscite tant la colère de la Turquie, c'est qu'elle
estime que le genocide armenien est une consequence de la Première
Guerre mondiale, et non un acte volontaire orchestre par l'Empire
ottoman, devenu Republique de Turquie en 1923.
A la fin du XIXe siècle, les Armeniens sont près de deux millions
dans l'Empire ottoman. Voyant leurs droits bafoues, des groupes
independantistes se forment. A la meme epoque, un groupe d'opposants
au sultan forme le Comite Union et Progrès (ou Jeunes-Turcs). Ils
parviennent a le renverser et prennent la tete de l'Empire en 1908.
Lorsque la Première Guerre mondiale eclate, l'Empire ottoman combat
aux côtes de l'Allemagne, de l'Autriche-Hongrie et de l'Italie.
Le gouvernement Jeune-Turc, oppose a la creation d'un Etat armenien,
accuse alors les Armeniens de collaborer avec l'ennemi russe,
et organise leur extermination. Des deportations massives et des
executions sommaires ont lieu dès 1915. Les massacres font 1,5 million
de morts entre 1915 et 1916, mais la Turquie, qui nie l'appellation
de genocide, admet environ 500 000 victimes.
De nombreux Etats ont reconnu le genocide armenien depuis le premier,
l'Urugay, le 20 avril 1965. Le Parlement europeen l'a fait le 18
juin 1987.
Mais sa reconnaissance de la part du gouvernement turc implique des
enjeux financiers importants, comme le versement d'une indemnisation,
a l'instar de l'Allemagne après le genocide juif, voire la restitution
de territoires a l'Armenie. De plus, la majorite des dirigeants
turcs actuels sont issus des rangs des Jeunes-Turcs, qui ont fonde
la Republique en 1923.
Quelles sont les menaces de la Turquie ?
Ces derniers jours, Ankara a menace Paris d'un rappel de son
ambassadeur, de l'expulsion de son homologue francais en Turquie, et de
"consequences graves (et) irreparables" pour les relations bilaterales.
L'Etat a egalement depeche en debut de semaine a Paris deux missions,
l'une d'industriels, l'autre de parlementaires, pour obtenir que le
Parlement n'examine pas la proposition de loi. "Il n'est pas question
pour nous d'accepter cette proposition de loi (...) qui denie le droit
de rejeter des accusations infondees et injustes contre notre pays
et notre nation", a declare le president turc, indique Le Parisien.
Des sanctions diplomatiques et commerciales ont egalement
ete evoquees. Selon le Nouvel Obs, une source anonyme proche du
gouvernement affirme que les entreprises francaises en Turquie "seront
ecartees des marches publics, notamment dans le domaine des transports,
de l'armement et du nucleaire", et que "la cooperation culturelle,
scientifique et technologique turco-francaise sera egalement gelee".
La France cèdera-t-elle ?
Face aux menaces d'Ankara, le ministère des Affaires etrangères a
mis en garde la Turquie, en rappelant qu'elle etait tenue par ses
engagements internationaux. "Je rappelle que la Turquie est membre de
l'Organisation mondiale du commerce, et qu'elle est liee a l'Union
europeenne par un accord d'union douanière. Ces deux engagements
juridiques impliquent un traitement non discriminatoire a l'egard des
entreprises de l'Union europeenne", a declare lors d'un point-presse
le porte-parole du ministère, Bernard Valero.
Malgre la colère de la Turquie, il semble que la proposition de
loi sera bel et bien votee jeudi. "Nous allons voter le texte sur
la negation des genocides meme s'il pose problème et comporte des
lacunes serieuses", a affirme Roland Muzeau, chef de file des deputes
communistes et du Parti de gauche, rapporte Le Parisien.
Axel Poniatowski, le president (UMP) de la commission des Affaires
etrangères a l'Assemblee, a neanmoins indique a Liberation qu'il
s'abstiendrait lors du vote prevu jeudi, se disant "reserve sur les
degâts que cela pourrait engendrer dans les relations franco-turques".
Car si Ankara le prend personnellement, ce texte "n'est pas une attaque
contre la Turquie", assure Jean-Marc Ayrault. Il ne fait qu'encadrer le
"respect de cette loi pour ceux qui ne la respecteraient pas". "C'est
une proposition de loi qui vise a sanctionner la non-reconnaissance
de tous les genocides quels qu'ils soient. Ce n'est pas uniquement le
problème des Armeniens", ajoute Patrick Ollier, ministre des Relations
avec le Parlement et qui representera le gouvernement jeudi lors de
l'examen du texte.
From: A. Papazian
Francetv info
http://www.francetv.fr/info/loi-sur-les-genocides-la-turquie-menace-la-france-de-consequences-irreparables_41409.html
20 dec 2011
Les relations entre la France et la Turquie se sont tendues mardi
20 decembre, depuis que Jean-Marc Ayrault, le president du groupe
PS a l'Assemblee nationale, a annonce que les deputes socialistes
voteraient la proposition de loi UMP visant a reprimer la negation
des genocides, qui sera examinee jeudi au Palais Bourbon.
Celle-ci prevoit un an de prison et une amende de 45 000 euros en cas
de contestation d'un genocide reconnu par la France, comme le genocide
armenien, reconnu depuis 2001. Le chef de l'Etat turc, Abdullah Gul,
a immediatement exhorte la France a abandonner une loi "inacceptable"
et prevoit d'imposer une panoplie de sanctions diplomatiques et
commerciales contre l'Hexagone si ce texte est vote jeudi.
Pourquoi cette loi fait-elle polemique ?
Si la decision suscite tant la colère de la Turquie, c'est qu'elle
estime que le genocide armenien est une consequence de la Première
Guerre mondiale, et non un acte volontaire orchestre par l'Empire
ottoman, devenu Republique de Turquie en 1923.
A la fin du XIXe siècle, les Armeniens sont près de deux millions
dans l'Empire ottoman. Voyant leurs droits bafoues, des groupes
independantistes se forment. A la meme epoque, un groupe d'opposants
au sultan forme le Comite Union et Progrès (ou Jeunes-Turcs). Ils
parviennent a le renverser et prennent la tete de l'Empire en 1908.
Lorsque la Première Guerre mondiale eclate, l'Empire ottoman combat
aux côtes de l'Allemagne, de l'Autriche-Hongrie et de l'Italie.
Le gouvernement Jeune-Turc, oppose a la creation d'un Etat armenien,
accuse alors les Armeniens de collaborer avec l'ennemi russe,
et organise leur extermination. Des deportations massives et des
executions sommaires ont lieu dès 1915. Les massacres font 1,5 million
de morts entre 1915 et 1916, mais la Turquie, qui nie l'appellation
de genocide, admet environ 500 000 victimes.
De nombreux Etats ont reconnu le genocide armenien depuis le premier,
l'Urugay, le 20 avril 1965. Le Parlement europeen l'a fait le 18
juin 1987.
Mais sa reconnaissance de la part du gouvernement turc implique des
enjeux financiers importants, comme le versement d'une indemnisation,
a l'instar de l'Allemagne après le genocide juif, voire la restitution
de territoires a l'Armenie. De plus, la majorite des dirigeants
turcs actuels sont issus des rangs des Jeunes-Turcs, qui ont fonde
la Republique en 1923.
Quelles sont les menaces de la Turquie ?
Ces derniers jours, Ankara a menace Paris d'un rappel de son
ambassadeur, de l'expulsion de son homologue francais en Turquie, et de
"consequences graves (et) irreparables" pour les relations bilaterales.
L'Etat a egalement depeche en debut de semaine a Paris deux missions,
l'une d'industriels, l'autre de parlementaires, pour obtenir que le
Parlement n'examine pas la proposition de loi. "Il n'est pas question
pour nous d'accepter cette proposition de loi (...) qui denie le droit
de rejeter des accusations infondees et injustes contre notre pays
et notre nation", a declare le president turc, indique Le Parisien.
Des sanctions diplomatiques et commerciales ont egalement
ete evoquees. Selon le Nouvel Obs, une source anonyme proche du
gouvernement affirme que les entreprises francaises en Turquie "seront
ecartees des marches publics, notamment dans le domaine des transports,
de l'armement et du nucleaire", et que "la cooperation culturelle,
scientifique et technologique turco-francaise sera egalement gelee".
La France cèdera-t-elle ?
Face aux menaces d'Ankara, le ministère des Affaires etrangères a
mis en garde la Turquie, en rappelant qu'elle etait tenue par ses
engagements internationaux. "Je rappelle que la Turquie est membre de
l'Organisation mondiale du commerce, et qu'elle est liee a l'Union
europeenne par un accord d'union douanière. Ces deux engagements
juridiques impliquent un traitement non discriminatoire a l'egard des
entreprises de l'Union europeenne", a declare lors d'un point-presse
le porte-parole du ministère, Bernard Valero.
Malgre la colère de la Turquie, il semble que la proposition de
loi sera bel et bien votee jeudi. "Nous allons voter le texte sur
la negation des genocides meme s'il pose problème et comporte des
lacunes serieuses", a affirme Roland Muzeau, chef de file des deputes
communistes et du Parti de gauche, rapporte Le Parisien.
Axel Poniatowski, le president (UMP) de la commission des Affaires
etrangères a l'Assemblee, a neanmoins indique a Liberation qu'il
s'abstiendrait lors du vote prevu jeudi, se disant "reserve sur les
degâts que cela pourrait engendrer dans les relations franco-turques".
Car si Ankara le prend personnellement, ce texte "n'est pas une attaque
contre la Turquie", assure Jean-Marc Ayrault. Il ne fait qu'encadrer le
"respect de cette loi pour ceux qui ne la respecteraient pas". "C'est
une proposition de loi qui vise a sanctionner la non-reconnaissance
de tous les genocides quels qu'ils soient. Ce n'est pas uniquement le
problème des Armeniens", ajoute Patrick Ollier, ministre des Relations
avec le Parlement et qui representera le gouvernement jeudi lors de
l'examen du texte.
From: A. Papazian