LOI/GENOCIDE : A QUELLE SAUCE LES ENTREPRISES FRANCAISES VONT ETRE MANGEES EN TURQUIE
Stephane
armenews.com
lundi 26 decembre 2011
La colère de la Turquie après le vote jeudi par les deputes francais
d'un texte de loi reprimant la negation du genocide armenien de
1915-17, qu'Ankara recuse, est lourde de risques pour les relations
economiques entre les deux pays. Panorama des dangers menacant les
entreprises francaises :
- Les relations economiques franco-turques, ca represente quoi ?
La Turquie est le troisième marche de la France a l'exportation hors
Union europeenne et Suisse, avec un montant de 6,3 milliards d'euros
exportes en 2010. Elle est aussi un important fournisseur avec 5,4
milliards d'euros d'importations en 2010. Les entreprises francaises
sont massivement implantees en Turquie, avec quelque 400 compagnies
installees et 11,5 milliards d'euros d'investissements directs
cumules. La Turquie, c'est surtout un marche en pleine explosion,
avec un taux de croissance record de 9,6% sur les trois premiers
trimestres de 2011, et une influence croissante dans sa region,
des Balkans au Proche-Orient, en passant par l'Asie centrale. Cette
influence nouvelle n'est d'ailleurs pas etrangère a l'intransigeance
du gouvernement face a la France, estiment nombre d'analystes.
- Les marches publics, principal levier de l'Etat turc contre la
France ?
"Ceux qui pensent dans leurs bureaux parisiens que la Turquie
va se gener pour exclure les entreprises francaises des appels
d'offre publics au motif qu'elle est liee par des traites et membre
de l'Organisation mondiale du commerce se trompent lourdement",
constate un analyste economique. Dans la ligne de mire, EDF et Alstom
pourraient voir leur echapper de juteux contrats dans le domaine de
l'energie et Vinci celui de la construction du troisième pont sur
le Bosphore. "La France etait bien placee, au moins techniquement,
pour jouer un rôle dans la construction d'une centrale nucleaire",
indique Raphael Esposito, directeur de la Chambre de commerce
francaise en Turquie. Les analystes craignent aussi des retombees sur
des produits qui ne sont pas estampilles "made in France", comme les
Airbus europeens. Les degâts seront cependant limites par le fait que
la France a deja ete evincee de nombreux marches publics a l'occasion
d'une precedente tentative -avortee- de legiferer sur la negation du
genocide armenien, en 2006.
- Les entreprises actives sur les marches prives sont elles en danger ?
Meme si certaines federations de PME ont appele leurs membres a adopter
des mesures de retorsion, les entrepreneurs francais ne redoutent
pas vraiment la remise en cause d'accords par leurs partenaires
turcs -"les hommes d'affaires turcs sont des hommes pragmatiques,
et les deux economies sont deja tellement imbriquees", commente l'un
d'eux, parlant sous le couvert de l'anonymat. En revanche, "on peut
surtout craindre l'action de fonctionnaires turcs agissant a titre
individuel pour creer des difficultes au niveau du dedouanement, des
formalites des expatries, oubliant d'apposer un tampon a un document",
affirme Yves-marie Laouënan, vice-president de la Chambre de commerce
francaise en Turquie.
- Faut-il avoir peur des appels au boycott ?
Les consommateurs peuvent aussi avoir leur rôle a jouer et des sites
internets repertorient deja les produits reputes francais a boycotter.
L'experience vecue lors de la reconnaissance du genocide armenien par
la France en 2001, puis en 2006, montre toutefois que les mouvements de
boycotts peuvent avoir des effets serieux sur certains produits, mais
pour une duree limitee. Surtout, il est bien difficile aujourd'hui
pour un consommateur turc de sanctionner une marque "francaise"
sans porter atteinte aux interets turcs, de nombreux produits etant
fabriques localement. Ainsi, "Un vehicule sur six vendu en Turquie
sort des chaînes d'assemblage de Renault", fait-on valoir a la regie,
qui fete ses 42 ans d'implantation en Turquie et emploie 6.200 salaries
dans son usine de Bursa (nord-ouest).
Par Nicolas CHEVIRON
ISTANBUL, 23 dec 2011 (AFP)
Stephane
armenews.com
lundi 26 decembre 2011
La colère de la Turquie après le vote jeudi par les deputes francais
d'un texte de loi reprimant la negation du genocide armenien de
1915-17, qu'Ankara recuse, est lourde de risques pour les relations
economiques entre les deux pays. Panorama des dangers menacant les
entreprises francaises :
- Les relations economiques franco-turques, ca represente quoi ?
La Turquie est le troisième marche de la France a l'exportation hors
Union europeenne et Suisse, avec un montant de 6,3 milliards d'euros
exportes en 2010. Elle est aussi un important fournisseur avec 5,4
milliards d'euros d'importations en 2010. Les entreprises francaises
sont massivement implantees en Turquie, avec quelque 400 compagnies
installees et 11,5 milliards d'euros d'investissements directs
cumules. La Turquie, c'est surtout un marche en pleine explosion,
avec un taux de croissance record de 9,6% sur les trois premiers
trimestres de 2011, et une influence croissante dans sa region,
des Balkans au Proche-Orient, en passant par l'Asie centrale. Cette
influence nouvelle n'est d'ailleurs pas etrangère a l'intransigeance
du gouvernement face a la France, estiment nombre d'analystes.
- Les marches publics, principal levier de l'Etat turc contre la
France ?
"Ceux qui pensent dans leurs bureaux parisiens que la Turquie
va se gener pour exclure les entreprises francaises des appels
d'offre publics au motif qu'elle est liee par des traites et membre
de l'Organisation mondiale du commerce se trompent lourdement",
constate un analyste economique. Dans la ligne de mire, EDF et Alstom
pourraient voir leur echapper de juteux contrats dans le domaine de
l'energie et Vinci celui de la construction du troisième pont sur
le Bosphore. "La France etait bien placee, au moins techniquement,
pour jouer un rôle dans la construction d'une centrale nucleaire",
indique Raphael Esposito, directeur de la Chambre de commerce
francaise en Turquie. Les analystes craignent aussi des retombees sur
des produits qui ne sont pas estampilles "made in France", comme les
Airbus europeens. Les degâts seront cependant limites par le fait que
la France a deja ete evincee de nombreux marches publics a l'occasion
d'une precedente tentative -avortee- de legiferer sur la negation du
genocide armenien, en 2006.
- Les entreprises actives sur les marches prives sont elles en danger ?
Meme si certaines federations de PME ont appele leurs membres a adopter
des mesures de retorsion, les entrepreneurs francais ne redoutent
pas vraiment la remise en cause d'accords par leurs partenaires
turcs -"les hommes d'affaires turcs sont des hommes pragmatiques,
et les deux economies sont deja tellement imbriquees", commente l'un
d'eux, parlant sous le couvert de l'anonymat. En revanche, "on peut
surtout craindre l'action de fonctionnaires turcs agissant a titre
individuel pour creer des difficultes au niveau du dedouanement, des
formalites des expatries, oubliant d'apposer un tampon a un document",
affirme Yves-marie Laouënan, vice-president de la Chambre de commerce
francaise en Turquie.
- Faut-il avoir peur des appels au boycott ?
Les consommateurs peuvent aussi avoir leur rôle a jouer et des sites
internets repertorient deja les produits reputes francais a boycotter.
L'experience vecue lors de la reconnaissance du genocide armenien par
la France en 2001, puis en 2006, montre toutefois que les mouvements de
boycotts peuvent avoir des effets serieux sur certains produits, mais
pour une duree limitee. Surtout, il est bien difficile aujourd'hui
pour un consommateur turc de sanctionner une marque "francaise"
sans porter atteinte aux interets turcs, de nombreux produits etant
fabriques localement. Ainsi, "Un vehicule sur six vendu en Turquie
sort des chaînes d'assemblage de Renault", fait-on valoir a la regie,
qui fete ses 42 ans d'implantation en Turquie et emploie 6.200 salaries
dans son usine de Bursa (nord-ouest).
Par Nicolas CHEVIRON
ISTANBUL, 23 dec 2011 (AFP)