PRINTEMPS ARABE ET HIVER CAUCASIEN
Hurriyet Daily News
11-07-2011
Info Collectif VAN - www.collectifvan.org - Selon Zaur Shiriyev,
analyste en politique etrangère au Centre des etudes strategiques de
Bakou : " Il est peut-etre temps d'imaginer un processus different,
qui prendrait au serieux tant les questions de la securite des
Armeniens du Karabagh que les droits des Azerbaïdjanais du Karabagh.
Autrement dit, l'objectif supreme du processus de règlement du conflit
est d'elaborer et de definir un modèle politique et un cadre juridique
pour le statut de la region du Haut-Karabagh dans les frontières
internationalement reconnues de l'Azerbaïdjan. " Sans surprise, cet
analyste nous explique comment proceder pour aboutir a un règlement
du conflit sur le Karabagh au profit de l'Azerbaïdjan. Le Collectif
VAN vous livre la traduction de l'article en anglais paru dans le
quotidien turc Hurriyet Daily News le 6 juillet 2011
Legende photo: Kazan 2011, les presidents armenien Serge Sarkissian,
azeri Ilham Aliev, russe Dmitri Medvedev.
L'hiver caucasien
Le Moyen-Orient est le point le plus important de l'agenda politique de
la communaute internationale : le "printemps arabe" et les evenements
en Lybie sont des priorites. Cependant, le 24 juin, le monde avait
les yeux fixes sur la ville russe de Kazan, où les presidents russe,
armenien et azerbaidjanais se rencontraient pour discuter du conflit
du Nagorno Karabagh qui dure depuis des annees entre l'Armenie et
l'Azerbaïdjan. Avant la reunion, les analystes regionaux avaient
exprime leur inquietude quant a une nouvelle guerre.
Ils parlaient d'un "hiver caucasien" indiquant que les relations
politiques entre les pays de la region devenaient de plus en plus
froides, et que celle-ci pourrait redevenir le centre de l'attention
internationale. D'autres analystes ont donne une attention exclusive
aux questions soulevees par les revolutions du printemps arabe, car
elles pourraient se transferer dans le Caucase, mais la question de
cet eventuel "hiver" est d'une plus grande urgence.
Avant la reunion de Kazan, la communaute internationale a fait part
de ses craintes d'une reprise du conflit et Kazan a ete decrit comme
"la dernière chance pour la paix." Ces espoirs suscites par la reunion
de Kazan suivaient ce que plusieurs envisagent etre une declaration
commune sans precedent, faite par les Etats-Unis et les presidents
russe et francais au sommet du G8 a Deauville en France, le 26 mai.
Les presidents de l'Armenie, la Russie et l'Azerbaïdjan ont publie
une declaration conjointe après Kazan, disant que les parties avaient
fait des progrès sur les principes de base pour resoudre le conflit
de Haut-Karabagh.
Il semble que les principales questions non resolues et litigieuses
entre les parties impliquees sont "les principes fondamentaux" des
"Principes de Madrid" proposes par le Groupe de Minsk de l'OSCE en
2007. Après des annees de discussions entre les parties concernees,
il y a toujours une long chemin a parcourir avant que les "Principes
de Madrid" ne soient acceptes comme la base d'une resolution politique
pacifique du conflit. Cependant, les paramètres proceduraux pour le
règlement tels que decrits dans les Principes de Madrid sont clairs.
C'est la formule de base qui a etaye toutes les tentatives precedentes
de negociation d'un accord et qui a ete publiquement acceptee par le
gouvernement azerbaïdjanais, bien que Bakou ait essaye de faire un
compromis en proposant de donner au Karabagh le "plus haut niveau
d'autonomie" possible dans son territoire (comme c'est le cas pour
le Tatarstan a l'interieur de la Federation de Russie).
Dans les cercles gouvernementaux en Azerbaïdjan, le sentiment existe
bel et bien que le processus actuel est le prix a payer pour toutes ces
annees "d'espoirs decus", et en absence de pression de la communaute
internationale sur l'Armenie, le processus de paix a uniquement servi
a soutenir et solidifier le statu quo. C'est pourquoi l'Azerbaïdjan
considerait la reunion de Kazan comme une occasion cle pour mettre
en place un processus de paix concret. La crainte etait que si ces
pourparlers n'aboutissaient pas a de nouveaux progrès, comme ce fut
le cas dans le passe, l'Azerbaïdjan pourrait boycotter les reunions
a venir.
Pour bien comprendre la dynamique des negociations de paix et l'impasse
actuelle, il est important de prendre en compte la base sous-jacente
de la position armenienne. À un niveau pratique, Erevan est sous
la pression tant des autorites du Haut-Karabagh que des diverses
diasporas armeniennes, notamment celle des Etats-Unis. Ces groupes
sont plus nationalistes et moins disposes a accepter un compromis que
les partis d'opposition en Armenie meme, en raison dans le premier
cas d'un "esprit de frontière" et dans le second, du luxe de la
distance. Ces groupes exercent des pressions financières, politiques et
ideologiques sur le gouvernement armenien et ne sentent certainement
pas redevables a sa politique. Tout engagement de l'Armenie de se
retirer des regions entourant le Karabagh sera confronte a une forte
opposition de Khankendi (Stepanakert) et pourrait pousser l'armee du
Haut-Karabagh separatiste a lancer des attaques contre l'Azerbaïdjan,
pour perturber le processus de paix.
Le fait que l'Armenie construise un aeroport dans les territoires
occupes de l'Azerbaïdjan constitue une reelle provocation ; si
l'Azerbaïdjan repond par une action militaire, il sera alors plus
facile pour l'Armenie de soutenir que l'Azerbaïdjan constitue une
menace a la paix. Le risque est que le cadre de travail pour une
resolution du conflit sera abandonne et remplace par des approches
unilaterales - et potentiellement militaires - des parties impliquees.
Cela ete demontre lors d'une recente interview de BBC Russie avec
Ter-Petrosyan, l'ex-president de l'Armenie et l'actuel chef de
l'opposition. Il a soutenu que : "Le conflit du Karabagh n'a pas
ete resolu parce que le peuple du Karabagh a montre une approche
maximaliste - il a decide que ce n'etait pas suffisant, qu'il
pourrait pousser plus durement et obtenir davantage... Et pas
seulement le peuple du Karabagh", a dit l'ex-president, qui a ete
force de demissionner en fevrier 1998, moins de six mois après la
presentation de son plan pour mettre fin au conflit.
On pourrait raisonnablement poser la question : est-ce que ce processus
definit les termes d'un accord de paix equitable ou est-ce qu'il
soutient le statu quo ?
Manifestement, a chaque fois que le processus de paix a ete relance,
nous avons entendu le meme genre de declarations pleines d'espoir
des copresidents du Groupe de Minsk de l'OSCE et les memes conseils
des analystes politiques. À chaque fois, on nous a dit que ceux
qui critiquent la position armenienne sont "les adversaires de
paix." Mais a chaque fois, ce processus politique defectueux ne nous
a pas rapproches d'une solution realisable.
Il est peut-etre temps d'imaginer un processus different, qui prendrait
au serieux tant les questions de la securite des Armeniens du Karabagh
que les droits des Azerbaïdjanais du Karabagh, cela devant absolument
etre fait. Autrement dit, l'objectif supreme du processus de règlement
du conflit est d'elaborer et de definir un modèle politique et un
cadre juridique pour le statut de la region du Haut-Karabagh dans
les frontières internationalement reconnues de l'Azerbaïdjan.
L'Azerbaïdjan pense que le processus de definition d'un tel statut aura
lieu dans des conditions pacifiques normales avec la participation
directe, complète et egale de la population entière de la region,
a savoir les communautes armeniennes et azerbaïdjanaises, avec une
interaction constructive du gouvernement de l'Azerbaïdjan et dans le
cadre d'un processus legal et democratique.
Enfin et surtout, ce dont le processus de paix a besoin c'est
d'un changement de "lieu" ; il n'a pas besoin de changer sa forme
actuelle, seul un fort soutien et des innovations peuvent mener a une
resolution. Sinon, l'agenda politique international presentera la
guerre de "l'hiver caucasien", la guerre et le chaos comme en août
2008, ou ce sera un silence continu de "pas de guerre, pas de paix"
comme cela est considere au niveau international. La communaute
internationale doit apporter le "printemps" dans le Caucase et cela
signifie la paix, des discussions constructives (comme les pourparlers
de Key West en 2001 et de Rambue en 2006).
Nous n'avons pas besoin de debats steriles bases sur des copier-coller
des manifestations arabes. Dans un avenir proche, l'engagement de la
communaute internationale dans le processus de paix est une source
d'optimisme ; c'est-a-dire, que les Etats-Unis et la France, en tant
que representant de l'UE, pourraient apporter un souffle "d'air frais"
au processus.
* Zaur Shiriyev est analyste en politique etrangère au Centre des
etudes strategiques de Bakou, Azerbaïdjan et editeur du Caucasus
International journal.
©Traduction de l'anglais C.Gardon pour le Collectif VAN - 10 juillet
2011 - 07:10 - www.collectifvan.org
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From: Baghdasarian
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11-07-2011
Info Collectif VAN - www.collectifvan.org - Selon Zaur Shiriyev,
analyste en politique etrangère au Centre des etudes strategiques de
Bakou : " Il est peut-etre temps d'imaginer un processus different,
qui prendrait au serieux tant les questions de la securite des
Armeniens du Karabagh que les droits des Azerbaïdjanais du Karabagh.
Autrement dit, l'objectif supreme du processus de règlement du conflit
est d'elaborer et de definir un modèle politique et un cadre juridique
pour le statut de la region du Haut-Karabagh dans les frontières
internationalement reconnues de l'Azerbaïdjan. " Sans surprise, cet
analyste nous explique comment proceder pour aboutir a un règlement
du conflit sur le Karabagh au profit de l'Azerbaïdjan. Le Collectif
VAN vous livre la traduction de l'article en anglais paru dans le
quotidien turc Hurriyet Daily News le 6 juillet 2011
Legende photo: Kazan 2011, les presidents armenien Serge Sarkissian,
azeri Ilham Aliev, russe Dmitri Medvedev.
L'hiver caucasien
Le Moyen-Orient est le point le plus important de l'agenda politique de
la communaute internationale : le "printemps arabe" et les evenements
en Lybie sont des priorites. Cependant, le 24 juin, le monde avait
les yeux fixes sur la ville russe de Kazan, où les presidents russe,
armenien et azerbaidjanais se rencontraient pour discuter du conflit
du Nagorno Karabagh qui dure depuis des annees entre l'Armenie et
l'Azerbaïdjan. Avant la reunion, les analystes regionaux avaient
exprime leur inquietude quant a une nouvelle guerre.
Ils parlaient d'un "hiver caucasien" indiquant que les relations
politiques entre les pays de la region devenaient de plus en plus
froides, et que celle-ci pourrait redevenir le centre de l'attention
internationale. D'autres analystes ont donne une attention exclusive
aux questions soulevees par les revolutions du printemps arabe, car
elles pourraient se transferer dans le Caucase, mais la question de
cet eventuel "hiver" est d'une plus grande urgence.
Avant la reunion de Kazan, la communaute internationale a fait part
de ses craintes d'une reprise du conflit et Kazan a ete decrit comme
"la dernière chance pour la paix." Ces espoirs suscites par la reunion
de Kazan suivaient ce que plusieurs envisagent etre une declaration
commune sans precedent, faite par les Etats-Unis et les presidents
russe et francais au sommet du G8 a Deauville en France, le 26 mai.
Les presidents de l'Armenie, la Russie et l'Azerbaïdjan ont publie
une declaration conjointe après Kazan, disant que les parties avaient
fait des progrès sur les principes de base pour resoudre le conflit
de Haut-Karabagh.
Il semble que les principales questions non resolues et litigieuses
entre les parties impliquees sont "les principes fondamentaux" des
"Principes de Madrid" proposes par le Groupe de Minsk de l'OSCE en
2007. Après des annees de discussions entre les parties concernees,
il y a toujours une long chemin a parcourir avant que les "Principes
de Madrid" ne soient acceptes comme la base d'une resolution politique
pacifique du conflit. Cependant, les paramètres proceduraux pour le
règlement tels que decrits dans les Principes de Madrid sont clairs.
C'est la formule de base qui a etaye toutes les tentatives precedentes
de negociation d'un accord et qui a ete publiquement acceptee par le
gouvernement azerbaïdjanais, bien que Bakou ait essaye de faire un
compromis en proposant de donner au Karabagh le "plus haut niveau
d'autonomie" possible dans son territoire (comme c'est le cas pour
le Tatarstan a l'interieur de la Federation de Russie).
Dans les cercles gouvernementaux en Azerbaïdjan, le sentiment existe
bel et bien que le processus actuel est le prix a payer pour toutes ces
annees "d'espoirs decus", et en absence de pression de la communaute
internationale sur l'Armenie, le processus de paix a uniquement servi
a soutenir et solidifier le statu quo. C'est pourquoi l'Azerbaïdjan
considerait la reunion de Kazan comme une occasion cle pour mettre
en place un processus de paix concret. La crainte etait que si ces
pourparlers n'aboutissaient pas a de nouveaux progrès, comme ce fut
le cas dans le passe, l'Azerbaïdjan pourrait boycotter les reunions
a venir.
Pour bien comprendre la dynamique des negociations de paix et l'impasse
actuelle, il est important de prendre en compte la base sous-jacente
de la position armenienne. À un niveau pratique, Erevan est sous
la pression tant des autorites du Haut-Karabagh que des diverses
diasporas armeniennes, notamment celle des Etats-Unis. Ces groupes
sont plus nationalistes et moins disposes a accepter un compromis que
les partis d'opposition en Armenie meme, en raison dans le premier
cas d'un "esprit de frontière" et dans le second, du luxe de la
distance. Ces groupes exercent des pressions financières, politiques et
ideologiques sur le gouvernement armenien et ne sentent certainement
pas redevables a sa politique. Tout engagement de l'Armenie de se
retirer des regions entourant le Karabagh sera confronte a une forte
opposition de Khankendi (Stepanakert) et pourrait pousser l'armee du
Haut-Karabagh separatiste a lancer des attaques contre l'Azerbaïdjan,
pour perturber le processus de paix.
Le fait que l'Armenie construise un aeroport dans les territoires
occupes de l'Azerbaïdjan constitue une reelle provocation ; si
l'Azerbaïdjan repond par une action militaire, il sera alors plus
facile pour l'Armenie de soutenir que l'Azerbaïdjan constitue une
menace a la paix. Le risque est que le cadre de travail pour une
resolution du conflit sera abandonne et remplace par des approches
unilaterales - et potentiellement militaires - des parties impliquees.
Cela ete demontre lors d'une recente interview de BBC Russie avec
Ter-Petrosyan, l'ex-president de l'Armenie et l'actuel chef de
l'opposition. Il a soutenu que : "Le conflit du Karabagh n'a pas
ete resolu parce que le peuple du Karabagh a montre une approche
maximaliste - il a decide que ce n'etait pas suffisant, qu'il
pourrait pousser plus durement et obtenir davantage... Et pas
seulement le peuple du Karabagh", a dit l'ex-president, qui a ete
force de demissionner en fevrier 1998, moins de six mois après la
presentation de son plan pour mettre fin au conflit.
On pourrait raisonnablement poser la question : est-ce que ce processus
definit les termes d'un accord de paix equitable ou est-ce qu'il
soutient le statu quo ?
Manifestement, a chaque fois que le processus de paix a ete relance,
nous avons entendu le meme genre de declarations pleines d'espoir
des copresidents du Groupe de Minsk de l'OSCE et les memes conseils
des analystes politiques. À chaque fois, on nous a dit que ceux
qui critiquent la position armenienne sont "les adversaires de
paix." Mais a chaque fois, ce processus politique defectueux ne nous
a pas rapproches d'une solution realisable.
Il est peut-etre temps d'imaginer un processus different, qui prendrait
au serieux tant les questions de la securite des Armeniens du Karabagh
que les droits des Azerbaïdjanais du Karabagh, cela devant absolument
etre fait. Autrement dit, l'objectif supreme du processus de règlement
du conflit est d'elaborer et de definir un modèle politique et un
cadre juridique pour le statut de la region du Haut-Karabagh dans
les frontières internationalement reconnues de l'Azerbaïdjan.
L'Azerbaïdjan pense que le processus de definition d'un tel statut aura
lieu dans des conditions pacifiques normales avec la participation
directe, complète et egale de la population entière de la region,
a savoir les communautes armeniennes et azerbaïdjanaises, avec une
interaction constructive du gouvernement de l'Azerbaïdjan et dans le
cadre d'un processus legal et democratique.
Enfin et surtout, ce dont le processus de paix a besoin c'est
d'un changement de "lieu" ; il n'a pas besoin de changer sa forme
actuelle, seul un fort soutien et des innovations peuvent mener a une
resolution. Sinon, l'agenda politique international presentera la
guerre de "l'hiver caucasien", la guerre et le chaos comme en août
2008, ou ce sera un silence continu de "pas de guerre, pas de paix"
comme cela est considere au niveau international. La communaute
internationale doit apporter le "printemps" dans le Caucase et cela
signifie la paix, des discussions constructives (comme les pourparlers
de Key West en 2001 et de Rambue en 2006).
Nous n'avons pas besoin de debats steriles bases sur des copier-coller
des manifestations arabes. Dans un avenir proche, l'engagement de la
communaute internationale dans le processus de paix est une source
d'optimisme ; c'est-a-dire, que les Etats-Unis et la France, en tant
que representant de l'UE, pourraient apporter un souffle "d'air frais"
au processus.
* Zaur Shiriyev est analyste en politique etrangère au Centre des
etudes strategiques de Bakou, Azerbaïdjan et editeur du Caucasus
International journal.
©Traduction de l'anglais C.Gardon pour le Collectif VAN - 10 juillet
2011 - 07:10 - www.collectifvan.org
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