Libération, France
Jeudi 28 Juillet 2011
Tigran Hamasyan, clavier maître
Piano. Le jeune prodige d'origine arménienne sera à l'affiche de
nombreux festivals jazz et classique.
par Dominique Queillé
On ne troque que rarement sans sacrifier à une certaine prestance un
fauteuil contre un tabouret. Pour Tigran Hamasyan, l'échange tient du
conte de fées. Le jeune pianiste originaire d'Arménie, qui n'était
entré dans le thétre du Chtelet à Paris qu'une seule fois pour aller
y écouter Herbie Hancock, son prestigieux aîné américain, s'est vu
décrocher cette place d'honneur en mars, à seulement 23 ans, un mois
après la sortie de son premier album solo dense et subtil, A Fable
(Verve/Universal), dont il a composé la majeure partie.
«Emotion». Rencontré quelques jours avant ce concert, le natif de la
petite ville de Gyumri avait avoué son intimidation malgré une
certaine expérience de la scène, alimentée par trois antécédents
discographiques parus (en groupe) sur le label Plus Loin Music : «Je
n'avais pas ressenti une telle émotion depuis un concert donné à 11
ans devant l'orchestre philharmonique d'Erevan. Je suis tout aussi
impressionné.» Rapport ou non, c'est aussi à cette époque que le
virtuose change son look en raccourcissant son épaisse tignasse
frisée. Mais, sous ses airs réservés de gendre idéal, Hamasyan - dont
le seul prénom figure sur ce disque solo coproduit avec Nate Wood,
batteur attitré de son groupe, Arrata Rebirth - cache un tempérament
musical bien trempé aux influences multiples. Sa culture arménienne,
bien sûr, dont tous ses opus se font l'écho avec des thèmes revisités
issus du répertoire populaire, mais aussi le rock, le metal, le
classique et le jazz. Entre fougue et sérénité, son toucher nuancé,
très relevé sur le plan technique, n'empêche pas l'inventivité mise au
service de l'improvisation - malgré une écriture au cordeau. Ce qui
confère au musicien, que d'aucuns comparent déjà à Keith Jarrett (bien
que lui s'en défende), une maturité sidérante.
C'est en autodidacte que Tigran Hamasyan fait ses premières armes au
piano... à l'ge de 2 ans. Né dans une famille férue de musique, avec
un père fan de rock et un oncle fan de jazz, le garçon se montre assez
vite sensible à Led Zeppelin comme à Thelonious Monk. Sa formation se
poursuit auprès de divers professeurs qui lui font aborder différents
styles, du classique au jazz. Tôt inscrit à de nombreux concours en
Arménie, il est repéré par le pianiste français d'origine arménienne
Stéphane Kochoyan - actuel directeur des festivals Orléans Jazz et les
Enfants du Jazz à Barcelonnette -, qui lui ouvre la porte de concerts
et festivals en France et en Europe. Quand, déjà primé, Tigran
Hamasyan atteint l'ge de 16 ans, ses parents décident de s'installer
en Californie, à Los Angeles, pour pouvoir offrir à leurs enfants (sa
soeur et lui) des perspectives d'avenir plus favorables.
«Energie». En 2006, alors qu'il fête ses 19 ans, il remporte le
premier prix du Thelonious Monk Institute of Jazz. Les membres du jury
ne sont autres que Herbie Hancock et Wayne Shorter. Il avait, quelques
années auparavant, raflé le 3e prix du Concours de piano international
Martial-Solal. Depuis deux ans, le prodige du clavier vit à New York.
«C'est ici que se dégage la plus grande énergie pour le jazz, et où
toutes les expériences sont possibles», confie celui qui clame son
désir de multiplier les rencontres. «J'ai découvert plein de musiciens
dans cette ville, surtout dans le milieu underground - comme par
exemple le chanteur Theo Bleckmann - avec lesquels je souhaiterais
développer de nouveaux projets.» De quoi surprendre encore.
From: Baghdasarian
Jeudi 28 Juillet 2011
Tigran Hamasyan, clavier maître
Piano. Le jeune prodige d'origine arménienne sera à l'affiche de
nombreux festivals jazz et classique.
par Dominique Queillé
On ne troque que rarement sans sacrifier à une certaine prestance un
fauteuil contre un tabouret. Pour Tigran Hamasyan, l'échange tient du
conte de fées. Le jeune pianiste originaire d'Arménie, qui n'était
entré dans le thétre du Chtelet à Paris qu'une seule fois pour aller
y écouter Herbie Hancock, son prestigieux aîné américain, s'est vu
décrocher cette place d'honneur en mars, à seulement 23 ans, un mois
après la sortie de son premier album solo dense et subtil, A Fable
(Verve/Universal), dont il a composé la majeure partie.
«Emotion». Rencontré quelques jours avant ce concert, le natif de la
petite ville de Gyumri avait avoué son intimidation malgré une
certaine expérience de la scène, alimentée par trois antécédents
discographiques parus (en groupe) sur le label Plus Loin Music : «Je
n'avais pas ressenti une telle émotion depuis un concert donné à 11
ans devant l'orchestre philharmonique d'Erevan. Je suis tout aussi
impressionné.» Rapport ou non, c'est aussi à cette époque que le
virtuose change son look en raccourcissant son épaisse tignasse
frisée. Mais, sous ses airs réservés de gendre idéal, Hamasyan - dont
le seul prénom figure sur ce disque solo coproduit avec Nate Wood,
batteur attitré de son groupe, Arrata Rebirth - cache un tempérament
musical bien trempé aux influences multiples. Sa culture arménienne,
bien sûr, dont tous ses opus se font l'écho avec des thèmes revisités
issus du répertoire populaire, mais aussi le rock, le metal, le
classique et le jazz. Entre fougue et sérénité, son toucher nuancé,
très relevé sur le plan technique, n'empêche pas l'inventivité mise au
service de l'improvisation - malgré une écriture au cordeau. Ce qui
confère au musicien, que d'aucuns comparent déjà à Keith Jarrett (bien
que lui s'en défende), une maturité sidérante.
C'est en autodidacte que Tigran Hamasyan fait ses premières armes au
piano... à l'ge de 2 ans. Né dans une famille férue de musique, avec
un père fan de rock et un oncle fan de jazz, le garçon se montre assez
vite sensible à Led Zeppelin comme à Thelonious Monk. Sa formation se
poursuit auprès de divers professeurs qui lui font aborder différents
styles, du classique au jazz. Tôt inscrit à de nombreux concours en
Arménie, il est repéré par le pianiste français d'origine arménienne
Stéphane Kochoyan - actuel directeur des festivals Orléans Jazz et les
Enfants du Jazz à Barcelonnette -, qui lui ouvre la porte de concerts
et festivals en France et en Europe. Quand, déjà primé, Tigran
Hamasyan atteint l'ge de 16 ans, ses parents décident de s'installer
en Californie, à Los Angeles, pour pouvoir offrir à leurs enfants (sa
soeur et lui) des perspectives d'avenir plus favorables.
«Energie». En 2006, alors qu'il fête ses 19 ans, il remporte le
premier prix du Thelonious Monk Institute of Jazz. Les membres du jury
ne sont autres que Herbie Hancock et Wayne Shorter. Il avait, quelques
années auparavant, raflé le 3e prix du Concours de piano international
Martial-Solal. Depuis deux ans, le prodige du clavier vit à New York.
«C'est ici que se dégage la plus grande énergie pour le jazz, et où
toutes les expériences sont possibles», confie celui qui clame son
désir de multiplier les rencontres. «J'ai découvert plein de musiciens
dans cette ville, surtout dans le milieu underground - comme par
exemple le chanteur Theo Bleckmann - avec lesquels je souhaiterais
développer de nouveaux projets.» De quoi surprendre encore.
From: Baghdasarian