Le Temps, La Suisse
Lundi 25 Juillet 2011
Le meurtrier de Hrant Dink lourdement condamné
Le meurtrier du journaliste et écrivain turc d'origine arménienne
Hrant Dink a finalement été condamné à 23 ans de prison. L'affaire
avait bouleversé le pays en 2007, et 100'000 personnes s'étaient
rendues à son enterrement
Un tribunal d'Istanbul a condamné lundi à près de 23 ans de prison le
meurtrier du journaliste turc d'origine arménienne Hrant Dink, dont
l'assassinat en 2007 avait bouleversé la Turquie et soulevé une vague
de critiques sur l'incapacité de l'Etat à assumer son devoir de
protection.
Le tribunal, une cour d'assises pour enfants, a dans un premier temps
condamné Ogün Samast à la prison à vie, puis a réduit sa peine à 21
ans et demi du fait qu'il n'était pas majeur au moment des faits. Mais
il l'a aussi condamné à 16 mois de prison supplémentaires pour
possession illégale d'arme.
100'000 personnes à son enterrement
Chômeur originaire de Trabzon (nord-est), Samast avait 17 ans quand il
a abattu Hrant Dink le 19 janvier 2007 devant les locaux de
l'hebdomadaire bilingue turco-arménien Agos, que celui-ci dirigeait, à
Istanbul. Cet attentat avait créé une onde de choc à travers la
Turquie, et quelque 100.000 personnes avaient assisté aux obsèques du
journaliste, qui plaidait pour la réconciliation entre les Turcs et
les Arméniens au regard de leur passé sanglant.
Dink était cependant la bête noire des milieux nationalistes, qui lui
en voulaient d'avoir employé pour le massacre des Armémiens sous
l'Empire ottoman le terme de «génocide», qu'Ankara rejette
farouchement.
Le meurtre avait aussi donné lieu à des accusations contre les
services de sécurité, informés des menaces qui pesaient sur Dink mais
qui ne sont pas parvenus à assurer sa sécurité. Un tribunal a ainsi
condamné le mois dernier un colonel de gendarmerie et cinq autres
gendarmes de Trabzon à des peines allant de quatre à six mois de
prison pour négligence en lien avec le meurtre de Dink.
Le rôle des médias
A l'issue du procès, les avocats de la partie civile se sont dits
satisfaits du verdict. «La Cour a rendu un verdict qui est proche de
la plus lourde sanction possible», a déclaré Me Fetiye Cetin à des
journalistes. «Cette punition est importante pour empêcher que de tels
actes mettant en danger notre capacité à vivre ensemble se répètent»,
a-t-elle ajouté.
Lors de précédentes audiences, Ogün Samast a reconnu avoir abattu Dink
parce qu'il était un «ennemi des Turcs».
Lundi, peu avant que la cour rende son verdict, l'accusé a mis en
avant sa mauvaise éducation et a affirmé qu'il avait été manipulé par
la presse. «Où est-ce que j'ai entendu parler d'Agos ? Où est-ce que
j'ai entendu parler de Hrant Dink, le traître à la patrie ? Dans (les
journaux) Vatan et Hürriyet !» s'est écrié Ogün Samast.
Six mois avant sa mort, Dink avait été condamné à six mois de prison
pour «insulte à l'identité turque» en raison d'un article sur la
mémoire collective des massacres d'Arméniens de 1915-1917. Il avait
alors été pris à partie par de nombreux quotidiens.
Bien que l'accusé ait admis le meurtre, son avocat, Me Levent
Yildirim, a demandé en vain l'annulation du procès, arguant que le
statut de mineur de son client n'avait pas été reconnu dès le début de
la procédure.
Les poursuites concernant Samast ne sont pas closes, puisque celui-ci
est également jugé pour sa participation à une organisation
terroriste, avec 18 de ses complices supposés. Les proches de Hrant
Dink espèrent que ce deuxième procès sera l'occasion de faire la
lumière sur le rôle joué par les forces de sécurité et de prouver la
détermination de l'Etat turc à faire respecter l'état de droit.
Les procureurs affirment que la police avait connaissance dès 2006
d'un complot visant à tuer le journaliste, orchestré depuis Trabzon.
En septembre, la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) avait
estimé que les autorités turques n'étaient pas parvenues à prendre les
mesures appropriées pour protéger Dink, et prévenir son assassinat.
From: A. Papazian
Lundi 25 Juillet 2011
Le meurtrier de Hrant Dink lourdement condamné
Le meurtrier du journaliste et écrivain turc d'origine arménienne
Hrant Dink a finalement été condamné à 23 ans de prison. L'affaire
avait bouleversé le pays en 2007, et 100'000 personnes s'étaient
rendues à son enterrement
Un tribunal d'Istanbul a condamné lundi à près de 23 ans de prison le
meurtrier du journaliste turc d'origine arménienne Hrant Dink, dont
l'assassinat en 2007 avait bouleversé la Turquie et soulevé une vague
de critiques sur l'incapacité de l'Etat à assumer son devoir de
protection.
Le tribunal, une cour d'assises pour enfants, a dans un premier temps
condamné Ogün Samast à la prison à vie, puis a réduit sa peine à 21
ans et demi du fait qu'il n'était pas majeur au moment des faits. Mais
il l'a aussi condamné à 16 mois de prison supplémentaires pour
possession illégale d'arme.
100'000 personnes à son enterrement
Chômeur originaire de Trabzon (nord-est), Samast avait 17 ans quand il
a abattu Hrant Dink le 19 janvier 2007 devant les locaux de
l'hebdomadaire bilingue turco-arménien Agos, que celui-ci dirigeait, à
Istanbul. Cet attentat avait créé une onde de choc à travers la
Turquie, et quelque 100.000 personnes avaient assisté aux obsèques du
journaliste, qui plaidait pour la réconciliation entre les Turcs et
les Arméniens au regard de leur passé sanglant.
Dink était cependant la bête noire des milieux nationalistes, qui lui
en voulaient d'avoir employé pour le massacre des Armémiens sous
l'Empire ottoman le terme de «génocide», qu'Ankara rejette
farouchement.
Le meurtre avait aussi donné lieu à des accusations contre les
services de sécurité, informés des menaces qui pesaient sur Dink mais
qui ne sont pas parvenus à assurer sa sécurité. Un tribunal a ainsi
condamné le mois dernier un colonel de gendarmerie et cinq autres
gendarmes de Trabzon à des peines allant de quatre à six mois de
prison pour négligence en lien avec le meurtre de Dink.
Le rôle des médias
A l'issue du procès, les avocats de la partie civile se sont dits
satisfaits du verdict. «La Cour a rendu un verdict qui est proche de
la plus lourde sanction possible», a déclaré Me Fetiye Cetin à des
journalistes. «Cette punition est importante pour empêcher que de tels
actes mettant en danger notre capacité à vivre ensemble se répètent»,
a-t-elle ajouté.
Lors de précédentes audiences, Ogün Samast a reconnu avoir abattu Dink
parce qu'il était un «ennemi des Turcs».
Lundi, peu avant que la cour rende son verdict, l'accusé a mis en
avant sa mauvaise éducation et a affirmé qu'il avait été manipulé par
la presse. «Où est-ce que j'ai entendu parler d'Agos ? Où est-ce que
j'ai entendu parler de Hrant Dink, le traître à la patrie ? Dans (les
journaux) Vatan et Hürriyet !» s'est écrié Ogün Samast.
Six mois avant sa mort, Dink avait été condamné à six mois de prison
pour «insulte à l'identité turque» en raison d'un article sur la
mémoire collective des massacres d'Arméniens de 1915-1917. Il avait
alors été pris à partie par de nombreux quotidiens.
Bien que l'accusé ait admis le meurtre, son avocat, Me Levent
Yildirim, a demandé en vain l'annulation du procès, arguant que le
statut de mineur de son client n'avait pas été reconnu dès le début de
la procédure.
Les poursuites concernant Samast ne sont pas closes, puisque celui-ci
est également jugé pour sa participation à une organisation
terroriste, avec 18 de ses complices supposés. Les proches de Hrant
Dink espèrent que ce deuxième procès sera l'occasion de faire la
lumière sur le rôle joué par les forces de sécurité et de prouver la
détermination de l'Etat turc à faire respecter l'état de droit.
Les procureurs affirment que la police avait connaissance dès 2006
d'un complot visant à tuer le journaliste, orchestré depuis Trabzon.
En septembre, la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) avait
estimé que les autorités turques n'étaient pas parvenues à prendre les
mesures appropriées pour protéger Dink, et prévenir son assassinat.
From: A. Papazian