AZERBAIDJAN: RAPPORT 2011 DE L'ECRI
Source/Lien : Conseil de l'Europe
01-06-2011
Info Collectif VAN - www.collectifvan.org - L'ECRI recommande aux
autorites de Bakou d'aligner la legislation en vigueur en matière de
liberte religieuse avec les exigences de Convention europeenne des
droits de l'homme et de renforcer leurs efforts pour lutter contre
les manifestations d'intolerance religieuse. L'ECRI recommande aux
autorites d'adopter dès que possible une loi sur les droits des
minorites nationales et de veiller a ce que les representants des
minorites nationales puissent participer de manière effective a la
prise de decisions les concernant. L'ECRI exhorte les autorites
a travailler activement pour ameliorer le climat a l'egard des
Armeniens relevant de la juridiction de l'Azerbaïdjan. Le discours
negatif constant de la part des autorites et des medias vis-a-vis de
la Republique d'Armenie contribue a entretenir un climat d'opinion
negatif a l'egard des personnes d'origine armenienne, qui demeurent
vulnerables a la discrimination. Le Collectif VAN vous invite a
prendre connaissance du Rapport 2011 de la Commission Europeenne
contre le Racisme et l'Intolerance (ECRI).
Conseil de l'Europe
Rapport de l'ECRI sur l'Azerbaïdjan
(quatrième cycle de monitoring) Adopte le 23 mars 2011 Publie le 31
mai 2011
Depuis la publication du second rapport de l'ECRI sur l'Azerbaïdjan le
24 mai 2007, des progrès ont ete accomplis dans un certain nombre de
domaines abordes dans le rapport. Les autorites ont engage des efforts
pour reformer le système judiciaire et ameliorer la formation dispensee
a l'ensemble des acteurs du système, y compris en ce qui concerne
les infractions a caractère raciste et la discrimination. Un site
internet gratuit a egalement ete cree contenant toute la legislation
azerbaïdjanaise, afin de rendre celle-ci plus accessible au grand
public.
Le rôle de l'Ombudsperson commence a etre mieux connu en Azerbaïdjan
et celui-ci a consacre d'importants efforts ces dernières annees a
des activites de sensibilisation. Des bureaux regionaux ont egalement
ete ouverts dans plusieurs regions. Un nouveau mecanisme a ete mis
en place pour traiter les demandes d'acquisition de la nationalite
azerbaïdjanaise et les autorites ont commence a examiner de plus près
la situation des apatrides, dans l'optique de remedier aux problèmes
constates. En ce qui concerne les minorites, les autorites continuent a
soutenir des activites culturelles des minorites nationales/ethniques
et d'assurer l'enseignement general en trois langues (azerbaïdjanais,
russe et georgien) ainsi que l'enseignement a l'ecole primaire de
plusieurs langues des minorites. Par ailleurs, il existe un certain
nombre de journaux locaux publies dans les langues minoritaires,
ainsi que des organes et dispositions pour veiller a ce que les medias
fassent leur travail dans le respect de la diversite et sans inciter
a la haine.
Plusieurs mesures ont ete adoptees visant notamment a simplifier les
procedures en vigueur concernant les travailleurs migrants. Ainsi, un
Service public des migrations a ete cree ; un " guichet unique " pour
les migrants a ete etabli ; et les non ressortissants et apatrides
titulaires d'un permis de sejour en Azerbaïdjan sont desormais
dispenses de la necessite d'obtenir des visas d'entree et de sortie.
Les autorites sont egalement en train d'elaborer un Code des migrations
regroupant l'ensemble des dispositions pertinentes.
Par ailleurs, un decret presidentiel a ete adopte fin 2010 qui devrait
faciliter l'accès des refugies a leurs droits sociaux. Les autorites
ont engage des efforts importants pour ameliorer les conditions de
vie des personnes deplacees suite au conflit relatif au Haut-Karabakh.
Dans le domaine du logement, des villages de tentes ont notamment
ete remplaces par des maisons en bois ; d'autres mesures d'action
positive ont egalement ete prises dans le domaine de l'accès a d'autres
droits sociaux.
Dans le domaine de la sante, les autorites ont adopte un certain nombre
de mesures visant a ameliorer l'accès de l'ensemble de la population
a des soins efficaces. Tous les travailleurs migrants disposeraient
ainsi d'une fiche de sante electronique censee faciliter l'accès aux
soins medicaux, ainsi que tous les enfants nes en Azerbaïdjan depuis
l'introduction de ces fiches, quel que soit le statut juridique
de leurs parents. Dans le cadre du recensement de la population
effectue en 2009 les individus ont eu la possibilite de repondre a
des questions concernant leur nationalite, leur appartenance ethnique
et leur langue maternelle.
Suite a l'analyse des informations recueillies, quinze etudes sur
la situation en Azerbaïdjan devraient etre publiees courant 2011, ce
qui devrait permettre d'identifier toute situation de discrimination
directe ou indirecte ainsi que des pistes permettant d'y remedier.
L'ECRI se felicite de ces developpements positifs en Azerbaïdjan.
Cependant, malgre les progrès accomplis, certains points demeurent
preoccupants. La legislation anti discrimination reste peu connue,
dispersee et peu appliquee. La manière dont des dispositions du
Code penal censees proteger la securite nationale ou interdire
l'incitation a l'hostilite ethnique sont employees a l'encontre de
personnes appartenant a des minorites ou de journalistes presentant
leurs points de vue, demeure egalement preoccupante. Alors que la
societe civile fait etat de cas d'infractions a caractère raciste ou de
discrimination raciale fondees sur l'origine ethnique ou la religion,
très peu de plaintes sont deposees concernant de tels faits.
Certaines pratiques et dispositions restrictives a l'egard des
communautes religieuses ont ete renforcees suite a l'adoption
d'amendements a la loi sur la liberte religieuse en 2009 et les
communautes religieuses dont la demande de reenregistrement est encore
en instance sont exposees a des risques d'agissements arbitraires.
Certains groupes se plaignent par ailleurs de manifestations
d'intolerance religieuse de la part des autorites et de reportages
parfois stigmatisants dans les medias.
En outre, il a ete signale a l'ECRI qu'en l'absence d'une loi
permettant d'effectuer un service civil de remplacement des objecteurs
de conscience continuent a etre poursuivis et incarceres. Le cadre
juridique en ce qui concerne les minorites nationales/ethniques reste
faible. Celles-ci font aussi etat de difficultes pratiques dans l'accès
a l'enseignement des langues minoritaires. Par ailleurs, l'absence de
structures consultatives pour les minorites nuit a la prise en compte
de leurs besoins specifiques ; des difficultes sont egalement signalees
concernant l'enregistrement des associations de minorites nationales.
Des difficultes continuent a etre signalees en ce qui concerne
l'acquisition de la nationalite azerbaïdjanaise par les apatrides mais
aussi les non ressortissants residents de longue duree en Azerbaïdjan.
Les personnes confrontees a des difficultes d'accès a des documents
d'identite rencontrent egalement de serieuses difficultes dans l'accès
a d'autres droits qui en dependent. Pour les travailleurs migrants,
les longs delais de traitement des demandes de renouvellement de
titres de sejour creent des problèmes considerables et en raison
notamment du coût eleve des permis de travail et de la duree de
l'attente pour les obtenir, beaucoup d'employeurs se tournent vers
des pratiques illegales, exposant ainsi les travailleurs migrants a
de graves abus. Les migrants en situation irregulière ne disposent
souvent d'aucune possibilite reelle de contester leur expulsion devant
les tribunaux.
Dans le domaine de l'asile, les personnes dont le statut de refugie
a ete reconnu continuent a rencontrer des problèmes dans l'exercice
de leurs droits sociaux. Le taux de reconnaissance du statut de
refugie dans les cas examines par les autorites azerbaïdjanaises
est extremement bas, point d'autant plus inquietant qu'aucune
forme de protection subsidiaire n'est prevue par la legislation
azerbaïdjanaise. De nombreuses personnes necessitant une protection
internationale mais ne remplissant pas les critères stricts prevus
par le droit national se trouvent dans une situation très precaire,
sans statut juridique et sans pouvoir subvenir a leurs besoins. De
graves problèmes ont ete signales en ce qui concerne l'accès de
travailleurs migrants en situation irregulière a des soins de sante,
et la corruption existant dans le système sanitaire a un impact
particulièrement grave sur les personnes aux plus petits revenus -
dont notamment les refugies, les demandeurs d'asile et les personnes
ayant besoin de protection internationale mais qui n'ont pas de statut
juridique en Azerbaïdjan.
Dans d'autres domaines comme l'emploi et le logement, des prejuges
existant au sein de la societe seraient a l'origine de comportements
discriminatoires a l'egard de personnes appartenant a certains groupes
relevant du mandat de l'ECRI.
Les personnes deplacees continuent a faire face a des difficultes
importantes dans la vie quotidienne, notamment dans le domaine de
l'accès aux droits sociaux, et des efforts supplementaires semblent
encore necessaires pour remedier a certains des problèmes constates.
Le discours negatif constant de la part des autorites et des medias
vis-a-vis de la Republique d'Armenie contribue a entretenir un climat
d'opinion negatif a l'egard des personnes d'origine armenienne,
qui demeurent vulnerables a la discrimination.
De nombreux rapports font etat d'abus commis par des representants
des forces de l'ordre ; certains cas particulièrement graves ont
concerne des membres de groupes relevant du mandat de l'ECRI. Des
methodes abusives, y compris de mauvais traitements, seraient employees
pour obtenir des preuves, et certains groupes feraient l'objet d'un
profilage ethnique. De telles allegations sont toujours examinees
par des instances internes aux forces de l'ordre et non par un
mecanisme independant. Enfin, l'absence d'informations detaillees
sur la situation des divers groupes relevant du mandat de l'ECRI
entrave l'identification des domaines où une discrimination raciale
directe ou indirecte existe et des meilleurs moyens de lutter contre
ces phenomènes.
Dans le present rapport, l'ECRI demande aux autorites azerbaïdjanaises
de prendre des mesures supplementaires dans un certain nombre de
domaines ; elle formule une serie de recommandations, dont les
suivantes. L'ECRI recommande aux autorites de veiller a ce que la
legislation nationale contre la discrimination raciale soit redigee de
manière precise et exhaustive. Elle recommande egalement aux autorites
de veiller a la bonne application des dispositions existantes en
matière de droit penal, civil et administratif interdisant les actes
a caractère raciste et la discrimination raciale, de sensibiliser le
grand public a ces dispositions et de renforcer la formation des juges,
des avocats et des fonctionnaires du système judiciaire en la matière.
L'ECRI recommande aux autorites d'aligner la legislation en vigueur
en matière de liberte religieuse avec les exigences de Convention
europeenne des droits de l'homme, de renforcer leurs efforts pour
lutter contre les manifestations d'intolerance religieuse, et
d'adopter dans les plus brefs delais une loi sur le service civil
de remplacement conforme aux normes europeennes. L'ECRI recommande
aux autorites d'adopter dès que possible une loi sur les droits des
minorites nationales et de veiller a ce que les representants des
minorites nationales puissent participer de manière effective a la
prise de decisions les concernant. L'ECRI exhorte les autorites a
travailler activement pour ameliorer le climat a l'egard des Armeniens
relevant de la juridiction de l'Azerbaïdjan.
L'ECRI recommande vivement aux autorites azerbaïdjanaises de mener
a bien, dans les plus brefs delais, la procedure d'enregistrement
des communautes religieuses actuellement en cours, tenant compte de
la jurisprudence de la Cour europeenne des droits de l'homme. Elle
souligne dans ce contexte qu'il est essentiel de clarifier la
situation juridique des communautes encore en attente d'une reponse
definitive du Comite d'Etat pour les relations avec les religions
ou des tribunaux, notamment en precisant clairement que celles deja
enregistrees en vertu des dispositions precedentes doivent pouvoir
continuer a fonctionner normalement.
Les recommandations de ce paragraphe feront l'objet d'un processus
de suivi intermediaire par l'ECRI au plus tard deux ans après la
publication du present rapport.
L'ECRI encourage vivement les autorites azerbaïdjanaises a mener a
bien le processus d'adoption d'un Code des migrations et a accorder
un traitement prioritaire a cette question. Elle souligne a cet egard
la necessite de prevoir des recours efficaces, notamment pour faire
valoir les droits proteges par des instruments internationaux tels
que la Convention europeenne des droits de l'homme et la Convention
pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et
des membres de leur famille.
L'ECRI encourage les autorites a intensifier leurs efforts visant a
eliminer les cas d'apatridie. Elle leur recommande de prendre une
serie de mesures afin de renforcer la protection des demandeurs
d'asile, des refugies, des personnes ayant besoin de protection
internationale et des travailleurs migrants en Azerbaïdjan. L'ECRI
recommande vivement aux autorites azerbaïdjanaises d'introduire dans
la legislation nationale, en complement du statut de refugie, une
protection subsidiaire couvrant toutes les personnes ayant besoin de
protection internationale. Elle les encourage vivement a cet egard a
cooperer etroitement avec le bureau du Haut-Commissariat des Nations
Unies pour les refugies et les autres acteurs de la societe civile
concernes, et a accorder un traitement prioritaire a cette question.
L'ECRI encourage vivement les autorites azerbaïdjanaises a poursuivre
et a intensifier leurs efforts pour ameliorer les conditions de vie
des personnes deplacees. L'ECRI recommande aux autorites de prendre
toutes les mesures voulues afin d'assurer que personne relevant
du mandat de l'ECRI ne soit injustement prive de soins de sante,
et pour eliminer toute discrimination dans les domaines de l'emploi
et du logement. L'ECRI exhorte les autorites a redoubler d'efforts
pour eliminer toute pratique abusive de la part des representants
des forces de l'ordre, de veiller a ce que les auteurs de ces actes
soient traduits en justice et dûment sanctionnes, et de creer un
organe independant charge d'enqueter sur toutes les allegations dans
ce domaine, et notamment les allegations de discrimination raciale.
L'ECRI recommande aux autorites azerbaïdjanaises de mettre en place
un système de collecte de donnees sur le système judiciaire conforme
aux normes europeennes relatives a la protection des donnees et de
la vie privee et ventilees selon des categories telles que l'origine
ethnique ou nationale, la religion, la langue et la nationalite des
plaignants ainsi que des personnes poursuivies, detenues et condamnees,
afin de reperer toute discrimination directe ou indirecte a l'egard
des personnes appartenant a des groupes relevant du mandat de l'ECRI
dans leurs contacts avec le système judiciaire et de faciliter
l'identification de mesures susceptibles d'y mettre fin.
Extraits :
CONSTATATIONS ET RECOMMANDATIONS
I. Existence et mise en ~\uvre de dispositions juridiques
Dispositions en matière de droit penal
27. Les autorites ont indique a plusieurs reprises que depuis le
second rapport de l'ECRI, aucun individu n'a porte plainte pour
violation des dispositions penales pertinentes. Selon les autorites,
le fait que très peu de plaintes soient deposees concernant des
infractions a caractère raciste serait la consequence de la très
grande tolerance qui regnerait en Azerbaïdjan. Cette analyse ignore
toutefois un certain nombre d'autres elements inquietants deja mis en
avant par l'ECRI dans son precedent rapport. En effet, des declarations
publiques faites par certains medias ou personnes politiques et ayant
un caractère raciste ou haineux, ainsi que certaines politiques allant
a l'encontre de la promotion de la tolerance religieuse continuent
a etre signalees. Il continue egalement a etre fait etat de cas de
discrimination a l'encontre de personnes d'origine armenienne vivant
en Azerbaïdjan et d'une connaissance insuffisante des dispositions
existantes en matière d'interdiction d'infractions racistes, a la
fois parmi les acteurs du système de justice penale et au sein du
grand public. De nombreux acteurs soulignent en outre un manque de
confiance très repandu dans le système judiciaire.
Organes de lutte contre le racisme et la discrimination raciale
46. Malgre le grand nombre de requetes recues, l'Ombudsperson a
indique qu'aucune de celles-ci ne comportaient des allegations de
discrimination raciale. L'Ombudsperson ne recueille pas de donnees
statistiques ventilees par l'origine ethnique ou nationale des
requerants, ni par leur religion ou d'autres critères ayant trait aux
travaux de l'ECRI. Il ressort toutefois des informations fournies a
l'ECRI que certaines tendances ont neanmoins pu etre decelees : ainsi,
si la plupart des plaintes recues par l'Ombudsperson concerneraient
l'accès aux droits sociaux, de nombreuses plaintes introduites par des
personnes d'origine armenienne concerneraient notamment des problèmes
d'accès aux documents d'identite. L'Ombudsperson a egalement indique
avoir ete saisi dans le passe de requetes concernant l'interdiction
de certains ouvrages religieux et, en 2010, de plaintes concernant
la non reconnaissance de l'objection de conscience fondee sur des
motifs religieux. L'ECRI regrette qu'il n'y ait pas de collecte de
donnees systematique couvrant les origines des requerants et le type
de plaintes deposees : ceci permettrait non seulement de detecter
rapidement des tendances affectant de manière disproportionnee
certains groupes, mais egalement d'identifier plus rapidement des
mesures efficaces pour y remedier.
II. Racisme dans le discours public Discours concernant la situation
suite au conflit relatif au Haut-Karabakh
50. Dans son second rapport, l'ECRI a recommande aux autorites
azerbaïdjanaises de contribuer plus activement a la mise en place d'un
climat dans lequel les Armeniens ne se sentent pas menaces quand ils
affichent publiquement leur identite. Elle a exhorte les autorites
a apporter une reponse adequate au discours haineux a l'encontre
des Armeniens.
51. L'ECRI note que bien que le discours des autorites azerbaïdjanaises
au sujet de l'Armenie, des Armeniens et de la situation suite au
conflit relatif au Haut- Karabakh n'ait guère evolue depuis son
precedent rapport, les autorites soulignent l'attitude tolerante
dont beneficieraient les personnes armeniennes vivant au sein de la
population azerbaïdjanaise. En effet, la population azerbaïdjanaise
dans son ensemble n'eprouverait selon les autorites, aucune difficulte
a distinguer entre les personnes armeniennes et les actions de la
Republique d'Armenie. Les autorites insistent en outre que dès lors
que le conflit du Haut-Karabakh sera resolu, aucun individu d'origine
armenienne n'aura a craindre une attitude hostile du reste de la
population.
53. L'ECRI exhorte les autorites azerbaïdjanaises a travailler
activement pour ameliorer le climat a l'egard des Armeniens relevant
de la juridiction de l'Azerbaïdjan. Elle souligne que tous les partis
politiques se doivent de prendre fermement position contre toute
forme de racisme, de discrimination et de xenophobie et de formuler
un message politique clair favorable a la diversite et au pluralisme ;
ils doivent en outre eviter d'aborder de manière negative les questions
relatives aux Armeniens.
55. L'ECRI note qu'il existe un Conseil de l'audiovisuel, etabli en
2002 en conformite avec la loi. Il existe egalement des dispositions de
droit28 interdisant la diffusion par le biais des medias audiovisuels
de tout contenu incitant a la discrimination raciale.
Concernant la presse, le Conseil de la Presse est un organe
d'auto-regulation. Celui-ci a adopte un code deontologique couvrant
la presse ecrite (y compris l'Internet) en 2003. Ce code contient
des dispositions relatives au traitement par la presse de questions
relatives aux minorites ethniques et religieuses ; son renforcement
est actuellement en cours d'examen. Ces deux Conseils font etat de
peu de plaintes au sujet de propos haineux ou discriminatoires mais
indiquent que lorsqu'ils recoivent de telles plaintes, celles-ci
sont examinees attentivement. Le Conseil de la Presse a par exemple
invite un journal qui avait publie un article susceptible d'offenser
des chretiens a retirer cet article de son site Internet, ce qui a
ete fait ; dans un autre cas, la plainte d'une personne d'origine
armenienne, dont l'ethnicite avait ete mentionnee dans un article
de presse sans que cette mention ne soit justifiee, a ete accueillie
favorablement par le Conseil de la Presse qui a recommande au journal
de retracter les propos en question.
56. Malgre ces dispositions, de nombreuses sources indiquent que la
situation en ce qui concerne les medias n'a guère evolue depuis le
precedent rapport de l'ECRI. Ainsi, il continue a etre signale que
les medias manquent d'objectivite et participent, notamment par la
facon dont ils rendent compte du conflit relatif au Haut-Karabakh,
ou par leur manière de presenter differents groupes religieux, a
propager une image negative de certaines minorites ethniques/nationales
ou religieuses. Bien que certains reportages ponctuels couvrent la
situation de personnes appartenant a des minorites et bien qu'il existe
un certain nombre de journaux publies dans les langues minoritaires
et distribues au niveau local, les poursuites penales lancees a
l'encontre de certains journalistes ou redacteurs de publications
qui presentent le point de vue de groupes relevant du mandat de
l'ECRI ont selon de nombreuses sources contribue a creer un paysage
mediatique caracterise par peu de diversite. Par ailleurs, des cas
continuent a etre signales de personnes d'origine armenienne qui,
nees et vivant regulièrement en Azerbaïdjan mais n'ayant pas sollicite
immediatement un passeport azerbaïdjanais au moment où ceux-ci sont
venus remplacer les anciens passeports de l'Union sovietique, se
trouvent aujourd'hui dans une situation d'apatridie de facto. Elles
se voient en effet dans l'incapacite de faire valoir leurs droits en
tant que ressortissants azerbaïdjanais. De plus, des tentatives de
faire annuler par les tribunaux des decisions administratives refusant
de fournir des papiers a des personnes dans cette situation se sont
averees infructueuses. D'après les informations dont dispose l'ECRI,
plusieurs centaines de personnes d'origine armenienne se trouveraient
ainsi privees de la nationalite azerbaïdjanaise a laquelle elles
pourraient pretendre - avec toutes les consequences que cela implique
en matière d'accès aux droits sociaux.
Armeniens
98. Comme l'indiquent d'autres parties du present rapport, les
personnes d'origine armenienne sont vulnerables a la discrimination
dans la vie quotidienne. Certaines personnes issues de mariages
mixtes choisissent d'utiliser le nom de leur parent azerbaïdjanais
afin d'eviter des ennuis dans leurs interactions avec les autorites ;
d'autres n'ayant pas immediatement demande des documents d'identite
azerbaïdjanais au moment de la suppression des passeports sovietiques
rencontrent des difficultes pour obtenir aujourd'hui des documents
d'identite39. Ces problèmes, ainsi que des prejuges existant au sein
de la population a l'egard des Armeniens, entrainent egalement de
serieuses difficultes d'accès aux droits sociaux.
99. L'ECRI demeure profondement preoccupee par le fait que le discours
negatif constant de la part des autorites et des medias vis-a-vis de
la Republique d'Armenie contribue a entretenir un climat d'opinion
negatif a l'egard des personnes d'origine armenienne qui relèvent
de la juridiction des autorites azerbaïdjanaises. Ces prejuges
sont tellement enracines que le fait d'etre qualifie par les medias
d'Armenien est considere par certains - y compris dans certains cas
par des Armeniens eux-memes - comme un insulte justifiant le lancement
de procedures judiciaires a l'encontre des auteurs de tels propos.
L'ECRI souligne la gravite de cette situation, où il semble que des
personnes appartenant au groupe faisant l'objet de ces attitudes
discriminatoires aient elles-memes interiorise ces attitudes.
100. L'ECRI reste par ailleurs perplexe quant aux informations
contradictoires qu'elle a recues concernant le nombre de personnes
d'origine armenienne residant actuellement en Armenie. En effet,
selon le precedent recensement, 120 700 Armeniens vivaient en
Azerbaïdjan en 1999. Les autorites ont indique que le chiffre de 120
000 constituait une estimation du nombre d'Armeniens vivant dans le
Haut-Karabakh ou dans les regions affectees par le conflit y relatif
et refletait les resultats du dernier recensement effectue dans la
region a l'epoque sovietique. En dehors de ces zones, 700 personnes
avaient declare etre d'origine armenienne. Compte tenu de la situation
dans le Haut-Karabakh et dans les regions affectees par le conflit y
relatif, il n'a de nouveau pas ete possible de compter le nombre reel
d'Armeniens vivant dans ces zones lors du recensement effectue en 2009
; par consequent, l'estimation de 120 000 demeurera d'actualite pour
ces zones et seul le chiffre de 700, refletant le nombre de personnes
reellement comptees dans le reste du territoire est susceptible de
changer. Si ces explications sont claires, l'ECRI souligne qu'elles
presentent un contraste saisissant avec le nombre de 30 000 Armeniens
vivant dans les parties de l'Azerbaïdjan qui sont sous le contrôle
effectif des autorites azerbaïdjanaises, chiffre regulièrement cite
par les autorites. Selon l'ECRI, il y a lieu de s'interroger sur les
raisons pour lesquelles moins de 3% des interesses seraient prets
a declarer officiellement leur appartenance a ce groupe. Il serait
important de reflechir notamment aux mesures qui pourraient etre prises
afin d'eliminer les prejuges et stereotypes existant au sein de la
population majoritaire et qui peuvent donner lieu a des comportements
discriminatoires a l'egard des personnes d'origine armenienne.
101. L'ECRI renvoie aux recommandations formulees dans d'autres parties
du present rapport relatives a la necessite d'apporter une reponse
adequate a tous les cas de discrimination et de discours haineux a
l'encontre des Armeniens, ainsi qu'a ses recommandations concernant
l'application des dispositions juridiques pertinentes40.
Elle considère que les autorites azerbaïdjanaises devraient contribuer
activement a la creation d'un climat où toutes les personnes d'origine
armenienne vivant en Azerbaïdjan peuvent afficher sans crainte leur
appartenance ethnique.
Emploi et logement
123. Malgre des dispositions constitutionnelles et legislatives
interdisant toute discrimination dans les domaines de l'emploi et
du logement49, il ressort des informations recueillies par l'ECRI
que dans ces domaines, des prejuges existant au sein de la societe
azerbaïdjanaise seraient a l'origine de comportements souvent
discriminatoires a l'egard de personnes appartenant a des groupes
relevant du mandat de l'ECRI. Ainsi, dans le domaine de l'accès
a l'emploi, des personnes d'origine armenienne seraient amenees a
cacher leur identite lorsqu'elles postulent pour un emploi et sur
leur lieu du travail car elles craignent de se voir refuser l'accès
a l'emploi ou de faire l'objet de discrimination ou de harcèlement
si elles la revèlent. En ce qui concerne l'accès au logement, les
proprietaires seraient souvent reticents a louer des appartements
a des personnes en provenance de la Republique tchetchène qu'elles
percoivent de manière generale comme dangereuses.
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From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress
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autorites de Bakou d'aligner la legislation en vigueur en matière de
liberte religieuse avec les exigences de Convention europeenne des
droits de l'homme et de renforcer leurs efforts pour lutter contre
les manifestations d'intolerance religieuse. L'ECRI recommande aux
autorites d'adopter dès que possible une loi sur les droits des
minorites nationales et de veiller a ce que les representants des
minorites nationales puissent participer de manière effective a la
prise de decisions les concernant. L'ECRI exhorte les autorites
a travailler activement pour ameliorer le climat a l'egard des
Armeniens relevant de la juridiction de l'Azerbaïdjan. Le discours
negatif constant de la part des autorites et des medias vis-a-vis de
la Republique d'Armenie contribue a entretenir un climat d'opinion
negatif a l'egard des personnes d'origine armenienne, qui demeurent
vulnerables a la discrimination. Le Collectif VAN vous invite a
prendre connaissance du Rapport 2011 de la Commission Europeenne
contre le Racisme et l'Intolerance (ECRI).
Conseil de l'Europe
Rapport de l'ECRI sur l'Azerbaïdjan
(quatrième cycle de monitoring) Adopte le 23 mars 2011 Publie le 31
mai 2011
Depuis la publication du second rapport de l'ECRI sur l'Azerbaïdjan le
24 mai 2007, des progrès ont ete accomplis dans un certain nombre de
domaines abordes dans le rapport. Les autorites ont engage des efforts
pour reformer le système judiciaire et ameliorer la formation dispensee
a l'ensemble des acteurs du système, y compris en ce qui concerne
les infractions a caractère raciste et la discrimination. Un site
internet gratuit a egalement ete cree contenant toute la legislation
azerbaïdjanaise, afin de rendre celle-ci plus accessible au grand
public.
Le rôle de l'Ombudsperson commence a etre mieux connu en Azerbaïdjan
et celui-ci a consacre d'importants efforts ces dernières annees a
des activites de sensibilisation. Des bureaux regionaux ont egalement
ete ouverts dans plusieurs regions. Un nouveau mecanisme a ete mis
en place pour traiter les demandes d'acquisition de la nationalite
azerbaïdjanaise et les autorites ont commence a examiner de plus près
la situation des apatrides, dans l'optique de remedier aux problèmes
constates. En ce qui concerne les minorites, les autorites continuent a
soutenir des activites culturelles des minorites nationales/ethniques
et d'assurer l'enseignement general en trois langues (azerbaïdjanais,
russe et georgien) ainsi que l'enseignement a l'ecole primaire de
plusieurs langues des minorites. Par ailleurs, il existe un certain
nombre de journaux locaux publies dans les langues minoritaires,
ainsi que des organes et dispositions pour veiller a ce que les medias
fassent leur travail dans le respect de la diversite et sans inciter
a la haine.
Plusieurs mesures ont ete adoptees visant notamment a simplifier les
procedures en vigueur concernant les travailleurs migrants. Ainsi, un
Service public des migrations a ete cree ; un " guichet unique " pour
les migrants a ete etabli ; et les non ressortissants et apatrides
titulaires d'un permis de sejour en Azerbaïdjan sont desormais
dispenses de la necessite d'obtenir des visas d'entree et de sortie.
Les autorites sont egalement en train d'elaborer un Code des migrations
regroupant l'ensemble des dispositions pertinentes.
Par ailleurs, un decret presidentiel a ete adopte fin 2010 qui devrait
faciliter l'accès des refugies a leurs droits sociaux. Les autorites
ont engage des efforts importants pour ameliorer les conditions de
vie des personnes deplacees suite au conflit relatif au Haut-Karabakh.
Dans le domaine du logement, des villages de tentes ont notamment
ete remplaces par des maisons en bois ; d'autres mesures d'action
positive ont egalement ete prises dans le domaine de l'accès a d'autres
droits sociaux.
Dans le domaine de la sante, les autorites ont adopte un certain nombre
de mesures visant a ameliorer l'accès de l'ensemble de la population
a des soins efficaces. Tous les travailleurs migrants disposeraient
ainsi d'une fiche de sante electronique censee faciliter l'accès aux
soins medicaux, ainsi que tous les enfants nes en Azerbaïdjan depuis
l'introduction de ces fiches, quel que soit le statut juridique
de leurs parents. Dans le cadre du recensement de la population
effectue en 2009 les individus ont eu la possibilite de repondre a
des questions concernant leur nationalite, leur appartenance ethnique
et leur langue maternelle.
Suite a l'analyse des informations recueillies, quinze etudes sur
la situation en Azerbaïdjan devraient etre publiees courant 2011, ce
qui devrait permettre d'identifier toute situation de discrimination
directe ou indirecte ainsi que des pistes permettant d'y remedier.
L'ECRI se felicite de ces developpements positifs en Azerbaïdjan.
Cependant, malgre les progrès accomplis, certains points demeurent
preoccupants. La legislation anti discrimination reste peu connue,
dispersee et peu appliquee. La manière dont des dispositions du
Code penal censees proteger la securite nationale ou interdire
l'incitation a l'hostilite ethnique sont employees a l'encontre de
personnes appartenant a des minorites ou de journalistes presentant
leurs points de vue, demeure egalement preoccupante. Alors que la
societe civile fait etat de cas d'infractions a caractère raciste ou de
discrimination raciale fondees sur l'origine ethnique ou la religion,
très peu de plaintes sont deposees concernant de tels faits.
Certaines pratiques et dispositions restrictives a l'egard des
communautes religieuses ont ete renforcees suite a l'adoption
d'amendements a la loi sur la liberte religieuse en 2009 et les
communautes religieuses dont la demande de reenregistrement est encore
en instance sont exposees a des risques d'agissements arbitraires.
Certains groupes se plaignent par ailleurs de manifestations
d'intolerance religieuse de la part des autorites et de reportages
parfois stigmatisants dans les medias.
En outre, il a ete signale a l'ECRI qu'en l'absence d'une loi
permettant d'effectuer un service civil de remplacement des objecteurs
de conscience continuent a etre poursuivis et incarceres. Le cadre
juridique en ce qui concerne les minorites nationales/ethniques reste
faible. Celles-ci font aussi etat de difficultes pratiques dans l'accès
a l'enseignement des langues minoritaires. Par ailleurs, l'absence de
structures consultatives pour les minorites nuit a la prise en compte
de leurs besoins specifiques ; des difficultes sont egalement signalees
concernant l'enregistrement des associations de minorites nationales.
Des difficultes continuent a etre signalees en ce qui concerne
l'acquisition de la nationalite azerbaïdjanaise par les apatrides mais
aussi les non ressortissants residents de longue duree en Azerbaïdjan.
Les personnes confrontees a des difficultes d'accès a des documents
d'identite rencontrent egalement de serieuses difficultes dans l'accès
a d'autres droits qui en dependent. Pour les travailleurs migrants,
les longs delais de traitement des demandes de renouvellement de
titres de sejour creent des problèmes considerables et en raison
notamment du coût eleve des permis de travail et de la duree de
l'attente pour les obtenir, beaucoup d'employeurs se tournent vers
des pratiques illegales, exposant ainsi les travailleurs migrants a
de graves abus. Les migrants en situation irregulière ne disposent
souvent d'aucune possibilite reelle de contester leur expulsion devant
les tribunaux.
Dans le domaine de l'asile, les personnes dont le statut de refugie
a ete reconnu continuent a rencontrer des problèmes dans l'exercice
de leurs droits sociaux. Le taux de reconnaissance du statut de
refugie dans les cas examines par les autorites azerbaïdjanaises
est extremement bas, point d'autant plus inquietant qu'aucune
forme de protection subsidiaire n'est prevue par la legislation
azerbaïdjanaise. De nombreuses personnes necessitant une protection
internationale mais ne remplissant pas les critères stricts prevus
par le droit national se trouvent dans une situation très precaire,
sans statut juridique et sans pouvoir subvenir a leurs besoins. De
graves problèmes ont ete signales en ce qui concerne l'accès de
travailleurs migrants en situation irregulière a des soins de sante,
et la corruption existant dans le système sanitaire a un impact
particulièrement grave sur les personnes aux plus petits revenus -
dont notamment les refugies, les demandeurs d'asile et les personnes
ayant besoin de protection internationale mais qui n'ont pas de statut
juridique en Azerbaïdjan.
Dans d'autres domaines comme l'emploi et le logement, des prejuges
existant au sein de la societe seraient a l'origine de comportements
discriminatoires a l'egard de personnes appartenant a certains groupes
relevant du mandat de l'ECRI.
Les personnes deplacees continuent a faire face a des difficultes
importantes dans la vie quotidienne, notamment dans le domaine de
l'accès aux droits sociaux, et des efforts supplementaires semblent
encore necessaires pour remedier a certains des problèmes constates.
Le discours negatif constant de la part des autorites et des medias
vis-a-vis de la Republique d'Armenie contribue a entretenir un climat
d'opinion negatif a l'egard des personnes d'origine armenienne,
qui demeurent vulnerables a la discrimination.
De nombreux rapports font etat d'abus commis par des representants
des forces de l'ordre ; certains cas particulièrement graves ont
concerne des membres de groupes relevant du mandat de l'ECRI. Des
methodes abusives, y compris de mauvais traitements, seraient employees
pour obtenir des preuves, et certains groupes feraient l'objet d'un
profilage ethnique. De telles allegations sont toujours examinees
par des instances internes aux forces de l'ordre et non par un
mecanisme independant. Enfin, l'absence d'informations detaillees
sur la situation des divers groupes relevant du mandat de l'ECRI
entrave l'identification des domaines où une discrimination raciale
directe ou indirecte existe et des meilleurs moyens de lutter contre
ces phenomènes.
Dans le present rapport, l'ECRI demande aux autorites azerbaïdjanaises
de prendre des mesures supplementaires dans un certain nombre de
domaines ; elle formule une serie de recommandations, dont les
suivantes. L'ECRI recommande aux autorites de veiller a ce que la
legislation nationale contre la discrimination raciale soit redigee de
manière precise et exhaustive. Elle recommande egalement aux autorites
de veiller a la bonne application des dispositions existantes en
matière de droit penal, civil et administratif interdisant les actes
a caractère raciste et la discrimination raciale, de sensibiliser le
grand public a ces dispositions et de renforcer la formation des juges,
des avocats et des fonctionnaires du système judiciaire en la matière.
L'ECRI recommande aux autorites d'aligner la legislation en vigueur
en matière de liberte religieuse avec les exigences de Convention
europeenne des droits de l'homme, de renforcer leurs efforts pour
lutter contre les manifestations d'intolerance religieuse, et
d'adopter dans les plus brefs delais une loi sur le service civil
de remplacement conforme aux normes europeennes. L'ECRI recommande
aux autorites d'adopter dès que possible une loi sur les droits des
minorites nationales et de veiller a ce que les representants des
minorites nationales puissent participer de manière effective a la
prise de decisions les concernant. L'ECRI exhorte les autorites a
travailler activement pour ameliorer le climat a l'egard des Armeniens
relevant de la juridiction de l'Azerbaïdjan.
L'ECRI recommande vivement aux autorites azerbaïdjanaises de mener
a bien, dans les plus brefs delais, la procedure d'enregistrement
des communautes religieuses actuellement en cours, tenant compte de
la jurisprudence de la Cour europeenne des droits de l'homme. Elle
souligne dans ce contexte qu'il est essentiel de clarifier la
situation juridique des communautes encore en attente d'une reponse
definitive du Comite d'Etat pour les relations avec les religions
ou des tribunaux, notamment en precisant clairement que celles deja
enregistrees en vertu des dispositions precedentes doivent pouvoir
continuer a fonctionner normalement.
Les recommandations de ce paragraphe feront l'objet d'un processus
de suivi intermediaire par l'ECRI au plus tard deux ans après la
publication du present rapport.
L'ECRI encourage vivement les autorites azerbaïdjanaises a mener a
bien le processus d'adoption d'un Code des migrations et a accorder
un traitement prioritaire a cette question. Elle souligne a cet egard
la necessite de prevoir des recours efficaces, notamment pour faire
valoir les droits proteges par des instruments internationaux tels
que la Convention europeenne des droits de l'homme et la Convention
pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et
des membres de leur famille.
L'ECRI encourage les autorites a intensifier leurs efforts visant a
eliminer les cas d'apatridie. Elle leur recommande de prendre une
serie de mesures afin de renforcer la protection des demandeurs
d'asile, des refugies, des personnes ayant besoin de protection
internationale et des travailleurs migrants en Azerbaïdjan. L'ECRI
recommande vivement aux autorites azerbaïdjanaises d'introduire dans
la legislation nationale, en complement du statut de refugie, une
protection subsidiaire couvrant toutes les personnes ayant besoin de
protection internationale. Elle les encourage vivement a cet egard a
cooperer etroitement avec le bureau du Haut-Commissariat des Nations
Unies pour les refugies et les autres acteurs de la societe civile
concernes, et a accorder un traitement prioritaire a cette question.
L'ECRI encourage vivement les autorites azerbaïdjanaises a poursuivre
et a intensifier leurs efforts pour ameliorer les conditions de vie
des personnes deplacees. L'ECRI recommande aux autorites de prendre
toutes les mesures voulues afin d'assurer que personne relevant
du mandat de l'ECRI ne soit injustement prive de soins de sante,
et pour eliminer toute discrimination dans les domaines de l'emploi
et du logement. L'ECRI exhorte les autorites a redoubler d'efforts
pour eliminer toute pratique abusive de la part des representants
des forces de l'ordre, de veiller a ce que les auteurs de ces actes
soient traduits en justice et dûment sanctionnes, et de creer un
organe independant charge d'enqueter sur toutes les allegations dans
ce domaine, et notamment les allegations de discrimination raciale.
L'ECRI recommande aux autorites azerbaïdjanaises de mettre en place
un système de collecte de donnees sur le système judiciaire conforme
aux normes europeennes relatives a la protection des donnees et de
la vie privee et ventilees selon des categories telles que l'origine
ethnique ou nationale, la religion, la langue et la nationalite des
plaignants ainsi que des personnes poursuivies, detenues et condamnees,
afin de reperer toute discrimination directe ou indirecte a l'egard
des personnes appartenant a des groupes relevant du mandat de l'ECRI
dans leurs contacts avec le système judiciaire et de faciliter
l'identification de mesures susceptibles d'y mettre fin.
Extraits :
CONSTATATIONS ET RECOMMANDATIONS
I. Existence et mise en ~\uvre de dispositions juridiques
Dispositions en matière de droit penal
27. Les autorites ont indique a plusieurs reprises que depuis le
second rapport de l'ECRI, aucun individu n'a porte plainte pour
violation des dispositions penales pertinentes. Selon les autorites,
le fait que très peu de plaintes soient deposees concernant des
infractions a caractère raciste serait la consequence de la très
grande tolerance qui regnerait en Azerbaïdjan. Cette analyse ignore
toutefois un certain nombre d'autres elements inquietants deja mis en
avant par l'ECRI dans son precedent rapport. En effet, des declarations
publiques faites par certains medias ou personnes politiques et ayant
un caractère raciste ou haineux, ainsi que certaines politiques allant
a l'encontre de la promotion de la tolerance religieuse continuent
a etre signalees. Il continue egalement a etre fait etat de cas de
discrimination a l'encontre de personnes d'origine armenienne vivant
en Azerbaïdjan et d'une connaissance insuffisante des dispositions
existantes en matière d'interdiction d'infractions racistes, a la
fois parmi les acteurs du système de justice penale et au sein du
grand public. De nombreux acteurs soulignent en outre un manque de
confiance très repandu dans le système judiciaire.
Organes de lutte contre le racisme et la discrimination raciale
46. Malgre le grand nombre de requetes recues, l'Ombudsperson a
indique qu'aucune de celles-ci ne comportaient des allegations de
discrimination raciale. L'Ombudsperson ne recueille pas de donnees
statistiques ventilees par l'origine ethnique ou nationale des
requerants, ni par leur religion ou d'autres critères ayant trait aux
travaux de l'ECRI. Il ressort toutefois des informations fournies a
l'ECRI que certaines tendances ont neanmoins pu etre decelees : ainsi,
si la plupart des plaintes recues par l'Ombudsperson concerneraient
l'accès aux droits sociaux, de nombreuses plaintes introduites par des
personnes d'origine armenienne concerneraient notamment des problèmes
d'accès aux documents d'identite. L'Ombudsperson a egalement indique
avoir ete saisi dans le passe de requetes concernant l'interdiction
de certains ouvrages religieux et, en 2010, de plaintes concernant
la non reconnaissance de l'objection de conscience fondee sur des
motifs religieux. L'ECRI regrette qu'il n'y ait pas de collecte de
donnees systematique couvrant les origines des requerants et le type
de plaintes deposees : ceci permettrait non seulement de detecter
rapidement des tendances affectant de manière disproportionnee
certains groupes, mais egalement d'identifier plus rapidement des
mesures efficaces pour y remedier.
II. Racisme dans le discours public Discours concernant la situation
suite au conflit relatif au Haut-Karabakh
50. Dans son second rapport, l'ECRI a recommande aux autorites
azerbaïdjanaises de contribuer plus activement a la mise en place d'un
climat dans lequel les Armeniens ne se sentent pas menaces quand ils
affichent publiquement leur identite. Elle a exhorte les autorites
a apporter une reponse adequate au discours haineux a l'encontre
des Armeniens.
51. L'ECRI note que bien que le discours des autorites azerbaïdjanaises
au sujet de l'Armenie, des Armeniens et de la situation suite au
conflit relatif au Haut- Karabakh n'ait guère evolue depuis son
precedent rapport, les autorites soulignent l'attitude tolerante
dont beneficieraient les personnes armeniennes vivant au sein de la
population azerbaïdjanaise. En effet, la population azerbaïdjanaise
dans son ensemble n'eprouverait selon les autorites, aucune difficulte
a distinguer entre les personnes armeniennes et les actions de la
Republique d'Armenie. Les autorites insistent en outre que dès lors
que le conflit du Haut-Karabakh sera resolu, aucun individu d'origine
armenienne n'aura a craindre une attitude hostile du reste de la
population.
53. L'ECRI exhorte les autorites azerbaïdjanaises a travailler
activement pour ameliorer le climat a l'egard des Armeniens relevant
de la juridiction de l'Azerbaïdjan. Elle souligne que tous les partis
politiques se doivent de prendre fermement position contre toute
forme de racisme, de discrimination et de xenophobie et de formuler
un message politique clair favorable a la diversite et au pluralisme ;
ils doivent en outre eviter d'aborder de manière negative les questions
relatives aux Armeniens.
55. L'ECRI note qu'il existe un Conseil de l'audiovisuel, etabli en
2002 en conformite avec la loi. Il existe egalement des dispositions de
droit28 interdisant la diffusion par le biais des medias audiovisuels
de tout contenu incitant a la discrimination raciale.
Concernant la presse, le Conseil de la Presse est un organe
d'auto-regulation. Celui-ci a adopte un code deontologique couvrant
la presse ecrite (y compris l'Internet) en 2003. Ce code contient
des dispositions relatives au traitement par la presse de questions
relatives aux minorites ethniques et religieuses ; son renforcement
est actuellement en cours d'examen. Ces deux Conseils font etat de
peu de plaintes au sujet de propos haineux ou discriminatoires mais
indiquent que lorsqu'ils recoivent de telles plaintes, celles-ci
sont examinees attentivement. Le Conseil de la Presse a par exemple
invite un journal qui avait publie un article susceptible d'offenser
des chretiens a retirer cet article de son site Internet, ce qui a
ete fait ; dans un autre cas, la plainte d'une personne d'origine
armenienne, dont l'ethnicite avait ete mentionnee dans un article
de presse sans que cette mention ne soit justifiee, a ete accueillie
favorablement par le Conseil de la Presse qui a recommande au journal
de retracter les propos en question.
56. Malgre ces dispositions, de nombreuses sources indiquent que la
situation en ce qui concerne les medias n'a guère evolue depuis le
precedent rapport de l'ECRI. Ainsi, il continue a etre signale que
les medias manquent d'objectivite et participent, notamment par la
facon dont ils rendent compte du conflit relatif au Haut-Karabakh,
ou par leur manière de presenter differents groupes religieux, a
propager une image negative de certaines minorites ethniques/nationales
ou religieuses. Bien que certains reportages ponctuels couvrent la
situation de personnes appartenant a des minorites et bien qu'il existe
un certain nombre de journaux publies dans les langues minoritaires
et distribues au niveau local, les poursuites penales lancees a
l'encontre de certains journalistes ou redacteurs de publications
qui presentent le point de vue de groupes relevant du mandat de
l'ECRI ont selon de nombreuses sources contribue a creer un paysage
mediatique caracterise par peu de diversite. Par ailleurs, des cas
continuent a etre signales de personnes d'origine armenienne qui,
nees et vivant regulièrement en Azerbaïdjan mais n'ayant pas sollicite
immediatement un passeport azerbaïdjanais au moment où ceux-ci sont
venus remplacer les anciens passeports de l'Union sovietique, se
trouvent aujourd'hui dans une situation d'apatridie de facto. Elles
se voient en effet dans l'incapacite de faire valoir leurs droits en
tant que ressortissants azerbaïdjanais. De plus, des tentatives de
faire annuler par les tribunaux des decisions administratives refusant
de fournir des papiers a des personnes dans cette situation se sont
averees infructueuses. D'après les informations dont dispose l'ECRI,
plusieurs centaines de personnes d'origine armenienne se trouveraient
ainsi privees de la nationalite azerbaïdjanaise a laquelle elles
pourraient pretendre - avec toutes les consequences que cela implique
en matière d'accès aux droits sociaux.
Armeniens
98. Comme l'indiquent d'autres parties du present rapport, les
personnes d'origine armenienne sont vulnerables a la discrimination
dans la vie quotidienne. Certaines personnes issues de mariages
mixtes choisissent d'utiliser le nom de leur parent azerbaïdjanais
afin d'eviter des ennuis dans leurs interactions avec les autorites ;
d'autres n'ayant pas immediatement demande des documents d'identite
azerbaïdjanais au moment de la suppression des passeports sovietiques
rencontrent des difficultes pour obtenir aujourd'hui des documents
d'identite39. Ces problèmes, ainsi que des prejuges existant au sein
de la population a l'egard des Armeniens, entrainent egalement de
serieuses difficultes d'accès aux droits sociaux.
99. L'ECRI demeure profondement preoccupee par le fait que le discours
negatif constant de la part des autorites et des medias vis-a-vis de
la Republique d'Armenie contribue a entretenir un climat d'opinion
negatif a l'egard des personnes d'origine armenienne qui relèvent
de la juridiction des autorites azerbaïdjanaises. Ces prejuges
sont tellement enracines que le fait d'etre qualifie par les medias
d'Armenien est considere par certains - y compris dans certains cas
par des Armeniens eux-memes - comme un insulte justifiant le lancement
de procedures judiciaires a l'encontre des auteurs de tels propos.
L'ECRI souligne la gravite de cette situation, où il semble que des
personnes appartenant au groupe faisant l'objet de ces attitudes
discriminatoires aient elles-memes interiorise ces attitudes.
100. L'ECRI reste par ailleurs perplexe quant aux informations
contradictoires qu'elle a recues concernant le nombre de personnes
d'origine armenienne residant actuellement en Armenie. En effet,
selon le precedent recensement, 120 700 Armeniens vivaient en
Azerbaïdjan en 1999. Les autorites ont indique que le chiffre de 120
000 constituait une estimation du nombre d'Armeniens vivant dans le
Haut-Karabakh ou dans les regions affectees par le conflit y relatif
et refletait les resultats du dernier recensement effectue dans la
region a l'epoque sovietique. En dehors de ces zones, 700 personnes
avaient declare etre d'origine armenienne. Compte tenu de la situation
dans le Haut-Karabakh et dans les regions affectees par le conflit y
relatif, il n'a de nouveau pas ete possible de compter le nombre reel
d'Armeniens vivant dans ces zones lors du recensement effectue en 2009
; par consequent, l'estimation de 120 000 demeurera d'actualite pour
ces zones et seul le chiffre de 700, refletant le nombre de personnes
reellement comptees dans le reste du territoire est susceptible de
changer. Si ces explications sont claires, l'ECRI souligne qu'elles
presentent un contraste saisissant avec le nombre de 30 000 Armeniens
vivant dans les parties de l'Azerbaïdjan qui sont sous le contrôle
effectif des autorites azerbaïdjanaises, chiffre regulièrement cite
par les autorites. Selon l'ECRI, il y a lieu de s'interroger sur les
raisons pour lesquelles moins de 3% des interesses seraient prets
a declarer officiellement leur appartenance a ce groupe. Il serait
important de reflechir notamment aux mesures qui pourraient etre prises
afin d'eliminer les prejuges et stereotypes existant au sein de la
population majoritaire et qui peuvent donner lieu a des comportements
discriminatoires a l'egard des personnes d'origine armenienne.
101. L'ECRI renvoie aux recommandations formulees dans d'autres parties
du present rapport relatives a la necessite d'apporter une reponse
adequate a tous les cas de discrimination et de discours haineux a
l'encontre des Armeniens, ainsi qu'a ses recommandations concernant
l'application des dispositions juridiques pertinentes40.
Elle considère que les autorites azerbaïdjanaises devraient contribuer
activement a la creation d'un climat où toutes les personnes d'origine
armenienne vivant en Azerbaïdjan peuvent afficher sans crainte leur
appartenance ethnique.
Emploi et logement
123. Malgre des dispositions constitutionnelles et legislatives
interdisant toute discrimination dans les domaines de l'emploi et
du logement49, il ressort des informations recueillies par l'ECRI
que dans ces domaines, des prejuges existant au sein de la societe
azerbaïdjanaise seraient a l'origine de comportements souvent
discriminatoires a l'egard de personnes appartenant a des groupes
relevant du mandat de l'ECRI. Ainsi, dans le domaine de l'accès
a l'emploi, des personnes d'origine armenienne seraient amenees a
cacher leur identite lorsqu'elles postulent pour un emploi et sur
leur lieu du travail car elles craignent de se voir refuser l'accès
a l'emploi ou de faire l'objet de discrimination ou de harcèlement
si elles la revèlent. En ce qui concerne l'accès au logement, les
proprietaires seraient souvent reticents a louer des appartements
a des personnes en provenance de la Republique tchetchène qu'elles
percoivent de manière generale comme dangereuses.
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From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress