ISRAEL ET LE GENOCIDE ARMENIEN : " TROP TARD, TROP MOCHE "
Haaretz
Publie le : 06-06-2011
Info Collectif VAN - www.collectifvan.org - " Il y a onze ans, lors de
la 85e journee de commemoration [Nota CVAN : du genocide armenien],
je suis alle a l'eglise armenienne de Jerusalem, et en tant qu'"
etre humain, en tant que Juif, en tant qu'Israelien et en tant que
ministre de l'education de l'Etat d'Israël " - c'est ainsi que je
me suis presente - j'ai parle de la justice historique qui devait
etre rendue, de l'engagement special du peuple juif envers le peuple
armenien, et de mon projet d'enseigner a nos etudiants la signification
universelle du genocide. Le scandale a eclate immediatement. Mon
Premier ministre s'est oppose a moi avec virulence, et Ehud Barak a
ete rapidement rejoint par Shimon Peres: " Ces evenements, a-t-il dit,
" devraient etre laisses aux historiens et non aux politiciens." "
L'homme politique israelien d'extreme-gauche Yossi Sarid analyse ici
dans un article publie dans Haaretz le vote unanime de la Knesset
visant a autoriser un debat sur le genocide armenien, au sein du
Parlement d'Israël. Le Collectif VAN vous propose la traduction de
cet article publie le 27 mai 2011.
Trop tard, trop moche
C'est a cause de mon admiration pour la Turquie que je trouve
difficile de comprendre sa position intransigeante sur la question
armenienne. Après tout, ce n'est pas cette generation qui a fait
couler le sang il y a 100 ans.
Par Yossi Sarid
J'ai obtenu un grand succès: le plenum de la Knesset a enfin permis
au Comite d'education de la Knesset de mener un debat public sur le
genocide du peuple armenien. Cette meme discussion qui a ete contree
pendant des decennies. Depuis des generations, nos gouvernements s'y
sont fermement opposes.
Et parmi tous les gouvernements, l'actuel gouvernement est celui qui
l'accepte. Tous les membres presents a la Knesset ont vote en faveur
du debat, personne ne s'y est oppose, une decision unanime qui degage
une mauvaise odeur: trop tard, trop moche, beurk.
Zahava Gal-On, qui est retourne a la Knesset avec une force accrue,
a prononce un très beau discours. C'est ainsi qu'elle a pris sa place
dans la course de relais et la mission de son mouvement, le seul
en Israël qui venge l'honneur du peuple armenien et demande que la
lecon historique soit tiree de ce genocide particulier - des victimes
sans meurtriers. Je lui ai souhaite a l'avance qu'elle reussisse la
où ses predecesseurs - les dirigeants du Meretz - avaient echoue,
et mes v~\ux se sont realises.
Mais ce ne sont pas mes v~\ux qui ont change la decision parlementaire,
et la raison du revirement est claire : les Israeliens ne favorisent
plus les Turcs, et ils sont meme prets a abandonner les charmes et
les tentations d'Antalya, c'est dire s'ils sont fâches. Nous allons
maintenant vous montrer ce qui se passe pour un pays qu'Israël ne
soutient plus - nous le mettrons dans une position inferieure, comme
une revanche contre les peuples non-juifs. Maintenant, nous allons
leur montrer qui est le patron.
Alors nous le leur avons montre, et voici a quoi nous ressemblons :
toutes les anciennes explications favorables aux Turcs ont subitement
coule au fond du verre de la colère, attitude pour laquelle Israël
est celèbre. Rappelons-le, celles-ci etaient des explications surgies
des profondeurs de la mer de Marmara et auxquelles nos dirigeants
ont prete un caractère ethique, en les accompagnant meme d'idees
historiosophiques.
Il y a onze ans, lors de la 85e journee de commemoration [Nota
CVAN : du genocide armenien] , je suis alle a l'eglise armenienne
de Jerusalem, et en tant qu' "etre humain, en tant que Juif, en tant
qu'Israelien et en tant que ministre de l'education de l'Etat d'Israël
" - c'est ainsi que je me suis presente - j'ai parle de la justice
historique qui devait etre rendue, de l'engagement special du peuple
juif envers le peuple armenien, et de mon projet d'enseigner a nos
etudiants la signification universelle du genocide.
Le scandale a eclate immediatement. Mon Premier ministre s'est oppose a
moi avec virulence, et Ehud Barak a ete rapidement rejoint par Shimon
Peres: " Ces evenements, a-t-il dit, " devraient etre laisses aux
historiens et non aux politiciens."
Il a ete frappe de mutisme la semaine dernière, lorsque la bonne
decision a ete prise pour de mauvaises raisons, et la voix de Shimon
ne s'est pas fait entendre.
À l'epoque, les Turcs m'ont declare persona non grata. Comme moi,
ils confondent parfois leurs rivaux et leurs amis, et je me considère
comme leur ami. La Turquie est aujourd'hui une puissance mondiale en
developpement, un exemple de prosperite economique, qui mène a bon
escient ses affaires dans l'arène regionale et internationale. Elle
est aussi la preuve qu'un regime islamique n'est pas necessairement
iranien, et que l'Europe se trompe amèrement en verrouillant la porte
a Ankara au lieu de l'ouvrir.
Le mechant - le Premier ministre Tayyip Erdogan - est bon pour les
Turcs, et il a ete reelu a une majorite croissante. Cette semaine,
il a dit qu'il a essaye de convaincre le Hamas de reconnaître Israël,
et il continuera a le faire.
C'est justement a cause de mon admiration pour la Turquie que
j'ai du mal a comprendre sa position intransigeante sur la question
armenienne. Après tout, ce n'est pas cette generation qui a fait couler
le sang il y a 100 ans; de nombreux pays ont accepte la responsabilite
de crimes commis en leur nom il y a longtemps. Pas plus tard que
cette semaine, la reine Elizabeth II a visite la Republique d'Irlande
et a exprime a ses hôtes ses regrets et sa compassion pour tous les
Irlandais qui ont souffert sous le joug de l'Angleterre.
Pourquoi seule la Turquie reste-t-elle intransigeante ? Ce n'est
pas clair.
Par contre, on comprend clairement pourquoi Israël l'a soutenu toutes
ces annees. En plus des interets securitaires et financiers, il y a
ici une autre raison inavouee : si chacun commence a reconnaître la
tragedie de l'autre - son propre rôle dans la Nakba* - que va-t-il
advenir de nous?
Traduction Collectif VAN - 6 juin 2001 - 07 :10 - www.collectifvan.org
*Nota CVAN : 700 000 Arabes palestiniens ont ete expulses de leurs
villes et villages en 1948 durant la première guerre israelo-arabe.
Les Palestiniens y ont toujours fait reference en tant qu'al-Nakba
(egalement orthographie Naqba) : la catastrophe.
**************************
Biographie :
Yossi Sarid
Membre du parti Meretz, un parti d'extreme-gauche laïc, dont il prendra
la tete en 1996, il a siege plusieurs fois a la Knesset depuis 1973. Il
a ete ministre de l'Environnement dans le gouvernement de coalition
forme par Yitzhak Rabin en 1992 puis ministre de l'Education dans
le gouvernement de coalition forme par Ehud Barak, malgre sa forte
reticence a sieger avec des membres du parti Shas. Avant les elections
de 2006, il a annonce intention de ne pas se representer a la Knesset
et son retrait de la politique. Il preconise la fusion de son ancien
parti avec le Parti travailliste. Diplôme en sciences politiques de
The New School de New York, il ecrit des editoriaux pour le journal
Haaretz, commentant la vie politique israelienne.
Wikipedia
Retour a la rubrique
Source/Lien : Haaretz
From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress
Haaretz
Publie le : 06-06-2011
Info Collectif VAN - www.collectifvan.org - " Il y a onze ans, lors de
la 85e journee de commemoration [Nota CVAN : du genocide armenien],
je suis alle a l'eglise armenienne de Jerusalem, et en tant qu'"
etre humain, en tant que Juif, en tant qu'Israelien et en tant que
ministre de l'education de l'Etat d'Israël " - c'est ainsi que je
me suis presente - j'ai parle de la justice historique qui devait
etre rendue, de l'engagement special du peuple juif envers le peuple
armenien, et de mon projet d'enseigner a nos etudiants la signification
universelle du genocide. Le scandale a eclate immediatement. Mon
Premier ministre s'est oppose a moi avec virulence, et Ehud Barak a
ete rapidement rejoint par Shimon Peres: " Ces evenements, a-t-il dit,
" devraient etre laisses aux historiens et non aux politiciens." "
L'homme politique israelien d'extreme-gauche Yossi Sarid analyse ici
dans un article publie dans Haaretz le vote unanime de la Knesset
visant a autoriser un debat sur le genocide armenien, au sein du
Parlement d'Israël. Le Collectif VAN vous propose la traduction de
cet article publie le 27 mai 2011.
Trop tard, trop moche
C'est a cause de mon admiration pour la Turquie que je trouve
difficile de comprendre sa position intransigeante sur la question
armenienne. Après tout, ce n'est pas cette generation qui a fait
couler le sang il y a 100 ans.
Par Yossi Sarid
J'ai obtenu un grand succès: le plenum de la Knesset a enfin permis
au Comite d'education de la Knesset de mener un debat public sur le
genocide du peuple armenien. Cette meme discussion qui a ete contree
pendant des decennies. Depuis des generations, nos gouvernements s'y
sont fermement opposes.
Et parmi tous les gouvernements, l'actuel gouvernement est celui qui
l'accepte. Tous les membres presents a la Knesset ont vote en faveur
du debat, personne ne s'y est oppose, une decision unanime qui degage
une mauvaise odeur: trop tard, trop moche, beurk.
Zahava Gal-On, qui est retourne a la Knesset avec une force accrue,
a prononce un très beau discours. C'est ainsi qu'elle a pris sa place
dans la course de relais et la mission de son mouvement, le seul
en Israël qui venge l'honneur du peuple armenien et demande que la
lecon historique soit tiree de ce genocide particulier - des victimes
sans meurtriers. Je lui ai souhaite a l'avance qu'elle reussisse la
où ses predecesseurs - les dirigeants du Meretz - avaient echoue,
et mes v~\ux se sont realises.
Mais ce ne sont pas mes v~\ux qui ont change la decision parlementaire,
et la raison du revirement est claire : les Israeliens ne favorisent
plus les Turcs, et ils sont meme prets a abandonner les charmes et
les tentations d'Antalya, c'est dire s'ils sont fâches. Nous allons
maintenant vous montrer ce qui se passe pour un pays qu'Israël ne
soutient plus - nous le mettrons dans une position inferieure, comme
une revanche contre les peuples non-juifs. Maintenant, nous allons
leur montrer qui est le patron.
Alors nous le leur avons montre, et voici a quoi nous ressemblons :
toutes les anciennes explications favorables aux Turcs ont subitement
coule au fond du verre de la colère, attitude pour laquelle Israël
est celèbre. Rappelons-le, celles-ci etaient des explications surgies
des profondeurs de la mer de Marmara et auxquelles nos dirigeants
ont prete un caractère ethique, en les accompagnant meme d'idees
historiosophiques.
Il y a onze ans, lors de la 85e journee de commemoration [Nota
CVAN : du genocide armenien] , je suis alle a l'eglise armenienne
de Jerusalem, et en tant qu' "etre humain, en tant que Juif, en tant
qu'Israelien et en tant que ministre de l'education de l'Etat d'Israël
" - c'est ainsi que je me suis presente - j'ai parle de la justice
historique qui devait etre rendue, de l'engagement special du peuple
juif envers le peuple armenien, et de mon projet d'enseigner a nos
etudiants la signification universelle du genocide.
Le scandale a eclate immediatement. Mon Premier ministre s'est oppose a
moi avec virulence, et Ehud Barak a ete rapidement rejoint par Shimon
Peres: " Ces evenements, a-t-il dit, " devraient etre laisses aux
historiens et non aux politiciens."
Il a ete frappe de mutisme la semaine dernière, lorsque la bonne
decision a ete prise pour de mauvaises raisons, et la voix de Shimon
ne s'est pas fait entendre.
À l'epoque, les Turcs m'ont declare persona non grata. Comme moi,
ils confondent parfois leurs rivaux et leurs amis, et je me considère
comme leur ami. La Turquie est aujourd'hui une puissance mondiale en
developpement, un exemple de prosperite economique, qui mène a bon
escient ses affaires dans l'arène regionale et internationale. Elle
est aussi la preuve qu'un regime islamique n'est pas necessairement
iranien, et que l'Europe se trompe amèrement en verrouillant la porte
a Ankara au lieu de l'ouvrir.
Le mechant - le Premier ministre Tayyip Erdogan - est bon pour les
Turcs, et il a ete reelu a une majorite croissante. Cette semaine,
il a dit qu'il a essaye de convaincre le Hamas de reconnaître Israël,
et il continuera a le faire.
C'est justement a cause de mon admiration pour la Turquie que
j'ai du mal a comprendre sa position intransigeante sur la question
armenienne. Après tout, ce n'est pas cette generation qui a fait couler
le sang il y a 100 ans; de nombreux pays ont accepte la responsabilite
de crimes commis en leur nom il y a longtemps. Pas plus tard que
cette semaine, la reine Elizabeth II a visite la Republique d'Irlande
et a exprime a ses hôtes ses regrets et sa compassion pour tous les
Irlandais qui ont souffert sous le joug de l'Angleterre.
Pourquoi seule la Turquie reste-t-elle intransigeante ? Ce n'est
pas clair.
Par contre, on comprend clairement pourquoi Israël l'a soutenu toutes
ces annees. En plus des interets securitaires et financiers, il y a
ici une autre raison inavouee : si chacun commence a reconnaître la
tragedie de l'autre - son propre rôle dans la Nakba* - que va-t-il
advenir de nous?
Traduction Collectif VAN - 6 juin 2001 - 07 :10 - www.collectifvan.org
*Nota CVAN : 700 000 Arabes palestiniens ont ete expulses de leurs
villes et villages en 1948 durant la première guerre israelo-arabe.
Les Palestiniens y ont toujours fait reference en tant qu'al-Nakba
(egalement orthographie Naqba) : la catastrophe.
**************************
Biographie :
Yossi Sarid
Membre du parti Meretz, un parti d'extreme-gauche laïc, dont il prendra
la tete en 1996, il a siege plusieurs fois a la Knesset depuis 1973. Il
a ete ministre de l'Environnement dans le gouvernement de coalition
forme par Yitzhak Rabin en 1992 puis ministre de l'Education dans
le gouvernement de coalition forme par Ehud Barak, malgre sa forte
reticence a sieger avec des membres du parti Shas. Avant les elections
de 2006, il a annonce intention de ne pas se representer a la Knesset
et son retrait de la politique. Il preconise la fusion de son ancien
parti avec le Parti travailliste. Diplôme en sciences politiques de
The New School de New York, il ecrit des editoriaux pour le journal
Haaretz, commentant la vie politique israelienne.
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From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress