TURQUIE : "JE SUIS CE QUE MON GRAND-PèRE éTAIT"
www.collectifvan.org
Publié le : 02-03-2011
Info Collectif VAN - www.collectifvan.org - En Turquie, la région
montagneuse du Dersim abrite de nombreux descendants d'Arméniens,
islamisés de force durant le génocide de 1915. Certains redécouvrent
aujourd'hui leurs racines et se font baptiser. Malgré les
difficultés, ils adoptent un nom et un prénom arméniens. "J'étais
l'enfant d'un peuple martyr dont les femmes ont été violées,
les hommes, tombés au bord des routes, enfant d'un peuple ancien
qui avait subi le génocide.
J'étais un enfant arménien. Etant devenu Turc, j'ai oublié ma
langue.
Etant devenu Kurde, j'ai oublié mon peuple, étant devenu Alévi,
j'ai oublié ma religion. Et lorsque a 50 ans, je me suis rappelé qui
j'étais et que je l'ai appris, je suis devenu ce que mon grand-père
était." Un témoignage bouleversant, recueilli par Pakrat Estukyan
et publié en turc le 22 octobre 2010, dans le journal arménien de
Turquie, Agos. Le Collectif VAN vous en propose la traduction.
Légende: Trois Dersimtsis issus de familles arméniennes
Agos N° 760 22/10/2010
Il s'est fait baptiser dans l'église de GedikpaÅ~_a : "Je suis ce
que mon grand-père était"
Pakrat Estukyan
La plupart du temps notre prénom est notre identité. Il est
porteur d'un message, d'une histoire. Les Deniz, les tout jeunes
Ula, les Sevag, les tout jeunes Zohrab... Les Hrant dont l'âge
est inférieur a quatre ans... [Nota CVAN : il s'agit des prénoms
des martyrs. Deniz et Ulas étaient des étudiants turcs qui ont
été pendus en 1972 par les militaires, parce qu'ils demandaient
l'égalité et la fraternité entre les peuples. Roupen Sevag et Krikor
Zohrab, membres de l'intelligentsia arménienne de Constantinople,
ont été arrêtés en 1915 et font partie des martyrs du génocide :
Roupen Sevag a été exécuté le 26 aoÃ"t 1915. Krikor Zohrab a été
arrêté en juin 2015 et déporté vers Alep (Syrie), puis assassiné
près d'Urfa. Le journaliste arménien de Turquie, Hrant Dink, est
le dernier d'entre eux : il a été assassiné le 19 janvier 2007].
La cérémonie de baptême qui a eu lieu mardi dernier [Nota CVAN
: cet article date d'octobre 2010] a l'église Sourp Hovhannès
de GedikpaÅ~_a [Nota CVAN : le quartier d'Istanbul où se trouve
le patriarcat arménien] avait justement une importance toute
particulière en terme de recherche d'identité, de tentative
d'établir un lien avec l'histoire. C'était une cérémonie
inhabituelle. La question posée au parrain par le prêtre, résonnait
de manière très bizarre : "Parrain, que souhaite votre enfant?". Car
'l'enfant' en question avait 70 ans.
C'était un Arménien du Dersim. La réponse classique a la
question est "Havadk, Ser yèv Meguerdoutioun" [la foi, l'amour et le
baptême]. Mais 'l'enfant' demandait encore une chose de plus. C'était
un vÅ"u très simple... Il voulait être appelé dorénavant par le
prénom de son grand-père. En changeant, devant la cuve baptismale,
son prénom 'Yusuf' par 'Haroutioun' et en prononcant ce prénom,
il rattachait les deux maillons de la chaîne héritée par son
grand-père et rompue depuis deux générations. La vision de cet
instant dans l'église de GedikpaÅ~_a mardi dernier ne semblait pas
pouvoir être expliquée simplement par la foi et la croyance.
Ils étaient quatre Arméniens du Dersim. Quatre hommes. Le plus âgé
avait environ 70 ans et le plus jeune avait a peine 21. Le plus jeune,
en restant fidèle a la tradition, a laissé le choix de son prénom
au parrain.
Le choix du parrain a été Hrant. On pouvait lire la satisfaction de
ce choix a l'instant même où il [le baptisé] a entendu le prénom.
Un défi lancé
Nous avons dit que c'était une cérémonie inhabituelle. Comme si
le coup de poing soulignant son aspect 'retour aux sources' pesait
plus lourd. Lors de notre conversation dans la cour de l'église,
avant la cérémonie, l'ancien Selahaddin, nouvellement appelé Mihran
Perguitch, racontait son vécu: "cela n'a pas été très facile de
faire effacer Selahaddin de ma carte d'identité et de faire inscrire
Mihran Perguitch [Mihran le Sauveur]. Ces dernières années, tous
mes proches ressentent des sentiments semblables. Mais la plupart
n'osent pas faire le pas, ils ont peur. Ces choses-la sont plus
simples pour nos proches qui sont allés vivre a l'étranger. Je vais
parler en mon nom, ce geste est aussi un défi lancé aux racistes,
aux nationalistes.
Rappelez-vous, nous avions crié 'Nous sommes tous Hrant, nous sommes
tous Arméniens !'... Voici maintenant, je transforme ce slogan
en vérité. Je suis obligé de le faire. Car je suis vraiment
Arménien. Je ne souhaite plus être un Arménien qui nie son
identité, c'est pourquoi j'ai pris cette décision. "
Je me suis rappelé qui j'étais a 50 ans
C'est la conclusion d'une réflexion longue et mesurée, de débats
minutieux. De ce fait, Mirhan Perguitch parle avec beaucoup de
confiance en lui.
Hrant et Sarkis sont respectueux, ils n'interviennent pas dans la
conversation. Mais leur attitude montre qu'ils approuvent tous les
deux ces paroles. Tout est concu pour relier la chaîne rompue. Ce
qui est en question ici ce n'est pas une remise a zéro d'un jour
a l'autre, l'abandon de son appartenance, de son identité, de son
prénom porté jusqu'a l'âge adulte. Ces choses sont très simples
dans les pays étrangers où personne ne te connait, où il y a peu
de probabilité de rencontrer tes camarades de l'école primaire,
des copains de service militaire. Mais dans ton propre milieu, dans
ton entourage, alors que toi-même tu n'as pas encore résolu les
points d'interrogations dans ton esprit ? Même tes amis, ta femme,
ton mari, ton père, ta mère, ton enfant te tournent le dos, ils
te rejettent. Alors que tu essayes de rétablir une injustice, tu
risques de te trouver dans la posture d'un traître.
Au moment où nos esprits sont perturbés par ces pensées, les
paroles poétiques de Mihran Perguitch clarifient tout.
"Oui, j'ai 50 ans... La jarre de ma vie est presque pleine. Jusqu'a
ce jour, il y a eu des moments où j'étais Turc. J'ai commencé a
l'école, j'ai dit, 'Je suis Turc, je suis juste, je suis travailleur'
[Nota CVAN : récitation imposée par Mustafa Kemal, et que tous
les écoliers de Turquie doivent réciter chaque matin dans la cour
de l'école]. Il y eut des jours où je suis devenu Kurde. J'ai
appris la langue Zaza. Il y eut des jours où j'étais Alevi, j'ai
pratiqué les rites alévis. J'ai eu l'âge de comprendre, je suis
devenu révolutionnaire. J'ai dit 'Vive la fraternité des peuples'.
Alors que ma vérité unique et fondamentale n'était pas tout cela.
Parce que j'étais l'enfant d'un peuple martyr dont les femmes
ont été violées, les hommes, tombés au bord des routes, enfant
d'un peuple ancien qui avait subi le génocide. J'étais un enfant
arménien. Etant devenu Turc, j'ai oublié ma langue. Etant devenu
Kurde, j'ai oublié mon peuple, étant devenu Alévi, j'ai oublié
ma religion.
Et lorsque a 50 ans, je me suis rappelé qui j'étais et que je l'ai
appris, je suis devenu ce que mon grand-père était. Lorsque les
livres ont commencé a être écrits sur notre passé, et que nous
les avons lus, nous avons appris tout ce que nos ancêtres avaient
vécu. Nous nous sommes mis en route avec des larmes aux yeux... Nous
avons voulu connaître combien de personnes au Dersim avaient un
passé arménien.
Nous avons décidé de créer une association. Nous allons réussir,
il reste peu de temps. Nous avons constaté qu'il y avait des gens
qui nous attendaient dans divers lieux en Europe, en Turquie. Ils
nous appellent déja pour nous demander quand est-ce que nous allons
créer l'association. Oui, dans très peu de temps... Nous allons
briser le tabou des Arméniens du Dersim et nous allons nous retrouver
nous-mêmes."
Yusuf, Murat UlaÅ~_, Oncu Egemen, Selahaddin... Haroutioun, Sarkis,
Hrant, Mihran Perguitch. Ils se sont mis en route. Ils sont peut être
conscients, peut-être pas, mais tous ensemble ils ont marqué un point
d'interrogation dans les cahiers de l'arménité, de la turcité, de la
kurdité, de l'identité alévie et de l'identité chrétienne. Afin
de trouver des réponses aux questions que l'histoire ne pouvait pas
résoudre, ils ont fait ce qu'ils croyaient juste. Ils ont franchi la
porte vers un avenir où les identités seront a nouveau définies,
où les définitions seront remplies de nouvelles significations.
Et ils nous ont invités a réfléchir a nouveau sur ces définitions
que nous connaissons.
Traduction du turc : S.C. pour le Collectif VAN - 02 mars 2011 -
07 :00 - www.collectifvan.org
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From: A. Papazian
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Publié le : 02-03-2011
Info Collectif VAN - www.collectifvan.org - En Turquie, la région
montagneuse du Dersim abrite de nombreux descendants d'Arméniens,
islamisés de force durant le génocide de 1915. Certains redécouvrent
aujourd'hui leurs racines et se font baptiser. Malgré les
difficultés, ils adoptent un nom et un prénom arméniens. "J'étais
l'enfant d'un peuple martyr dont les femmes ont été violées,
les hommes, tombés au bord des routes, enfant d'un peuple ancien
qui avait subi le génocide.
J'étais un enfant arménien. Etant devenu Turc, j'ai oublié ma
langue.
Etant devenu Kurde, j'ai oublié mon peuple, étant devenu Alévi,
j'ai oublié ma religion. Et lorsque a 50 ans, je me suis rappelé qui
j'étais et que je l'ai appris, je suis devenu ce que mon grand-père
était." Un témoignage bouleversant, recueilli par Pakrat Estukyan
et publié en turc le 22 octobre 2010, dans le journal arménien de
Turquie, Agos. Le Collectif VAN vous en propose la traduction.
Légende: Trois Dersimtsis issus de familles arméniennes
Agos N° 760 22/10/2010
Il s'est fait baptiser dans l'église de GedikpaÅ~_a : "Je suis ce
que mon grand-père était"
Pakrat Estukyan
La plupart du temps notre prénom est notre identité. Il est
porteur d'un message, d'une histoire. Les Deniz, les tout jeunes
Ula, les Sevag, les tout jeunes Zohrab... Les Hrant dont l'âge
est inférieur a quatre ans... [Nota CVAN : il s'agit des prénoms
des martyrs. Deniz et Ulas étaient des étudiants turcs qui ont
été pendus en 1972 par les militaires, parce qu'ils demandaient
l'égalité et la fraternité entre les peuples. Roupen Sevag et Krikor
Zohrab, membres de l'intelligentsia arménienne de Constantinople,
ont été arrêtés en 1915 et font partie des martyrs du génocide :
Roupen Sevag a été exécuté le 26 aoÃ"t 1915. Krikor Zohrab a été
arrêté en juin 2015 et déporté vers Alep (Syrie), puis assassiné
près d'Urfa. Le journaliste arménien de Turquie, Hrant Dink, est
le dernier d'entre eux : il a été assassiné le 19 janvier 2007].
La cérémonie de baptême qui a eu lieu mardi dernier [Nota CVAN
: cet article date d'octobre 2010] a l'église Sourp Hovhannès
de GedikpaÅ~_a [Nota CVAN : le quartier d'Istanbul où se trouve
le patriarcat arménien] avait justement une importance toute
particulière en terme de recherche d'identité, de tentative
d'établir un lien avec l'histoire. C'était une cérémonie
inhabituelle. La question posée au parrain par le prêtre, résonnait
de manière très bizarre : "Parrain, que souhaite votre enfant?". Car
'l'enfant' en question avait 70 ans.
C'était un Arménien du Dersim. La réponse classique a la
question est "Havadk, Ser yèv Meguerdoutioun" [la foi, l'amour et le
baptême]. Mais 'l'enfant' demandait encore une chose de plus. C'était
un vÅ"u très simple... Il voulait être appelé dorénavant par le
prénom de son grand-père. En changeant, devant la cuve baptismale,
son prénom 'Yusuf' par 'Haroutioun' et en prononcant ce prénom,
il rattachait les deux maillons de la chaîne héritée par son
grand-père et rompue depuis deux générations. La vision de cet
instant dans l'église de GedikpaÅ~_a mardi dernier ne semblait pas
pouvoir être expliquée simplement par la foi et la croyance.
Ils étaient quatre Arméniens du Dersim. Quatre hommes. Le plus âgé
avait environ 70 ans et le plus jeune avait a peine 21. Le plus jeune,
en restant fidèle a la tradition, a laissé le choix de son prénom
au parrain.
Le choix du parrain a été Hrant. On pouvait lire la satisfaction de
ce choix a l'instant même où il [le baptisé] a entendu le prénom.
Un défi lancé
Nous avons dit que c'était une cérémonie inhabituelle. Comme si
le coup de poing soulignant son aspect 'retour aux sources' pesait
plus lourd. Lors de notre conversation dans la cour de l'église,
avant la cérémonie, l'ancien Selahaddin, nouvellement appelé Mihran
Perguitch, racontait son vécu: "cela n'a pas été très facile de
faire effacer Selahaddin de ma carte d'identité et de faire inscrire
Mihran Perguitch [Mihran le Sauveur]. Ces dernières années, tous
mes proches ressentent des sentiments semblables. Mais la plupart
n'osent pas faire le pas, ils ont peur. Ces choses-la sont plus
simples pour nos proches qui sont allés vivre a l'étranger. Je vais
parler en mon nom, ce geste est aussi un défi lancé aux racistes,
aux nationalistes.
Rappelez-vous, nous avions crié 'Nous sommes tous Hrant, nous sommes
tous Arméniens !'... Voici maintenant, je transforme ce slogan
en vérité. Je suis obligé de le faire. Car je suis vraiment
Arménien. Je ne souhaite plus être un Arménien qui nie son
identité, c'est pourquoi j'ai pris cette décision. "
Je me suis rappelé qui j'étais a 50 ans
C'est la conclusion d'une réflexion longue et mesurée, de débats
minutieux. De ce fait, Mirhan Perguitch parle avec beaucoup de
confiance en lui.
Hrant et Sarkis sont respectueux, ils n'interviennent pas dans la
conversation. Mais leur attitude montre qu'ils approuvent tous les
deux ces paroles. Tout est concu pour relier la chaîne rompue. Ce
qui est en question ici ce n'est pas une remise a zéro d'un jour
a l'autre, l'abandon de son appartenance, de son identité, de son
prénom porté jusqu'a l'âge adulte. Ces choses sont très simples
dans les pays étrangers où personne ne te connait, où il y a peu
de probabilité de rencontrer tes camarades de l'école primaire,
des copains de service militaire. Mais dans ton propre milieu, dans
ton entourage, alors que toi-même tu n'as pas encore résolu les
points d'interrogations dans ton esprit ? Même tes amis, ta femme,
ton mari, ton père, ta mère, ton enfant te tournent le dos, ils
te rejettent. Alors que tu essayes de rétablir une injustice, tu
risques de te trouver dans la posture d'un traître.
Au moment où nos esprits sont perturbés par ces pensées, les
paroles poétiques de Mihran Perguitch clarifient tout.
"Oui, j'ai 50 ans... La jarre de ma vie est presque pleine. Jusqu'a
ce jour, il y a eu des moments où j'étais Turc. J'ai commencé a
l'école, j'ai dit, 'Je suis Turc, je suis juste, je suis travailleur'
[Nota CVAN : récitation imposée par Mustafa Kemal, et que tous
les écoliers de Turquie doivent réciter chaque matin dans la cour
de l'école]. Il y eut des jours où je suis devenu Kurde. J'ai
appris la langue Zaza. Il y eut des jours où j'étais Alevi, j'ai
pratiqué les rites alévis. J'ai eu l'âge de comprendre, je suis
devenu révolutionnaire. J'ai dit 'Vive la fraternité des peuples'.
Alors que ma vérité unique et fondamentale n'était pas tout cela.
Parce que j'étais l'enfant d'un peuple martyr dont les femmes
ont été violées, les hommes, tombés au bord des routes, enfant
d'un peuple ancien qui avait subi le génocide. J'étais un enfant
arménien. Etant devenu Turc, j'ai oublié ma langue. Etant devenu
Kurde, j'ai oublié mon peuple, étant devenu Alévi, j'ai oublié
ma religion.
Et lorsque a 50 ans, je me suis rappelé qui j'étais et que je l'ai
appris, je suis devenu ce que mon grand-père était. Lorsque les
livres ont commencé a être écrits sur notre passé, et que nous
les avons lus, nous avons appris tout ce que nos ancêtres avaient
vécu. Nous nous sommes mis en route avec des larmes aux yeux... Nous
avons voulu connaître combien de personnes au Dersim avaient un
passé arménien.
Nous avons décidé de créer une association. Nous allons réussir,
il reste peu de temps. Nous avons constaté qu'il y avait des gens
qui nous attendaient dans divers lieux en Europe, en Turquie. Ils
nous appellent déja pour nous demander quand est-ce que nous allons
créer l'association. Oui, dans très peu de temps... Nous allons
briser le tabou des Arméniens du Dersim et nous allons nous retrouver
nous-mêmes."
Yusuf, Murat UlaÅ~_, Oncu Egemen, Selahaddin... Haroutioun, Sarkis,
Hrant, Mihran Perguitch. Ils se sont mis en route. Ils sont peut être
conscients, peut-être pas, mais tous ensemble ils ont marqué un point
d'interrogation dans les cahiers de l'arménité, de la turcité, de la
kurdité, de l'identité alévie et de l'identité chrétienne. Afin
de trouver des réponses aux questions que l'histoire ne pouvait pas
résoudre, ils ont fait ce qu'ils croyaient juste. Ils ont franchi la
porte vers un avenir où les identités seront a nouveau définies,
où les définitions seront remplies de nouvelles significations.
Et ils nous ont invités a réfléchir a nouveau sur ces définitions
que nous connaissons.
Traduction du turc : S.C. pour le Collectif VAN - 02 mars 2011 -
07 :00 - www.collectifvan.org
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