Agence France Presse
4 mai 2011
Le Sénat enterre un texte sur la négation du génocide arménien
De Suzette BLOCH (AFP) -
PARIS - Le Sénat a enterré mercredi une proposition de loi déposée par
des sénateurs PS visant à réprimer la négation du génocide arménien de
1915, à l'issue d'un débat passionné entre partisans et opposants du
texte.
Les sénateurs ont voté par 196 voix contre 74 une motion de procédure
déclarant "irrecevable" ce texte, ce qui équivaut à son rejet.
La proposition de loi proposait de punir d'un an de prison et de
45.000 euros d'amende la contestation de l'existence du génocide
arménien.
Elle était présentée par Serge Lagauche (PS, Val de Marne) et trente
de ses collègues socialistes dans une "niche" (séance d'initiative
parlementaire) réservée au groupe PS, à la demande expresse de la
première secrétaire du parti, Martine Aubry.
Elle reprenait à l'identique une proposition de loi de députés
socialistes qui avait été adoptée à l'Assemblée nationale en 2006.
M. Lagauche a déploré "cinq années de blocage de la part du
gouvernement et de la Conférence des présidents du Sénat" (qui
organise l'ordre du jour parlementaire). Jugeant que la loi du 29
janvier 2001 par laquelle la France reconnaît le génocide arménien
n'est que "déclarative", il a plaidé pour un "complément normatif"
afin de la rendre "efficace".
Ce texte a divisé tous les groupes politiques. Les élus des
départements où vit une forte communauté arménienne l'ont défendu et
ont voté contre la motion d'irrecevabilité, comme le président du
groupe UMP, le sénateur-maire de Marseille Jean-Claude Gaudin, ou le
sénateur-maire PS de Lyon Gérard Collomb.
L'UMP a cependant soutenu en grande majorité (137) l'irrecevabilité
ainsi que l'Union Centriste (25). Le groupe PS, très embarrassé, s'est
divisé: 49 n'ont pas pris part au vote, 39 ont voté contre
l'irrecevabilité dont son président Jean-Pierre Bel, 21 pour et 6 se
sont abstenus. Le CRC-SPG (communistes et parti de gauche) a voté
contre l'irrecevabilité sauf Robert Hue.
L'irrecevabilité a été défendue par le président UMP de la Commission
des Lois, Jean-Jacques Hyest jugeant néfaste "l'intervention du juge
pénal dans le jugement de l'histoire" et soulevant des risques
d'inconstitutionnalité.
"Cette proposition de loi est liberticide, inquisitoriale et
obscurantiste", a renchéri le président UMP de la Commission des
Affaires étrangères, Josselin de Rohan.
"La voie empruntée conduit à pire qu'une impasse, à la destruction de
ce qui a été acquis contre les révisionnistes", a embrayé l'ex-garde
des sceaux PS Robert Badinter craignant qu'une question prioritaire de
constitutionnalité (QPC) sur cette PPL ne puisse remettre en cause la
loi reconnaissant le génocide.
"C'est ce même type de raisonnements qui historiquement a fait que les
Arméniens ont été victimes du premier génocide du XXème siècle dans le
silence assourdissant des nations", a rétorqué Gérard Collomb (PS).
"Ce sujet grave et douloureux méritait mieux qu'une petite combine
politicienne et partisane", a ajouté Bruno Gilles (UMP,
Bouches-du-Rhône) qui soutenait le texte.
Ce débat s'est déroulé en présence dans les tribunes du chanteur
Charles Aznavour, ambassadeur d'Arménie en Suisse et de l'écrivain
Bernard-Henri Lévy tandis que 600 membres de la communauté arménienne
(selon une estimation de la police) manifestaient devant le Palais du
Luxembourg.
Le garde des Sceaux, Michel Mercier, n'a pas pris position s'en
remettant "à la sagesse du Sénat".
Nicolas Sarkozy avait promis en 2007, juste avant son élection, aux
associations arméniennes de soutenir la ratification par le Sénat de
cette proposition.
Le génocide arménien, perpétré entre 1915 et 1916 en Turquie, a fait
plusieurs centaines de milliers de victimes.
From: A. Papazian
4 mai 2011
Le Sénat enterre un texte sur la négation du génocide arménien
De Suzette BLOCH (AFP) -
PARIS - Le Sénat a enterré mercredi une proposition de loi déposée par
des sénateurs PS visant à réprimer la négation du génocide arménien de
1915, à l'issue d'un débat passionné entre partisans et opposants du
texte.
Les sénateurs ont voté par 196 voix contre 74 une motion de procédure
déclarant "irrecevable" ce texte, ce qui équivaut à son rejet.
La proposition de loi proposait de punir d'un an de prison et de
45.000 euros d'amende la contestation de l'existence du génocide
arménien.
Elle était présentée par Serge Lagauche (PS, Val de Marne) et trente
de ses collègues socialistes dans une "niche" (séance d'initiative
parlementaire) réservée au groupe PS, à la demande expresse de la
première secrétaire du parti, Martine Aubry.
Elle reprenait à l'identique une proposition de loi de députés
socialistes qui avait été adoptée à l'Assemblée nationale en 2006.
M. Lagauche a déploré "cinq années de blocage de la part du
gouvernement et de la Conférence des présidents du Sénat" (qui
organise l'ordre du jour parlementaire). Jugeant que la loi du 29
janvier 2001 par laquelle la France reconnaît le génocide arménien
n'est que "déclarative", il a plaidé pour un "complément normatif"
afin de la rendre "efficace".
Ce texte a divisé tous les groupes politiques. Les élus des
départements où vit une forte communauté arménienne l'ont défendu et
ont voté contre la motion d'irrecevabilité, comme le président du
groupe UMP, le sénateur-maire de Marseille Jean-Claude Gaudin, ou le
sénateur-maire PS de Lyon Gérard Collomb.
L'UMP a cependant soutenu en grande majorité (137) l'irrecevabilité
ainsi que l'Union Centriste (25). Le groupe PS, très embarrassé, s'est
divisé: 49 n'ont pas pris part au vote, 39 ont voté contre
l'irrecevabilité dont son président Jean-Pierre Bel, 21 pour et 6 se
sont abstenus. Le CRC-SPG (communistes et parti de gauche) a voté
contre l'irrecevabilité sauf Robert Hue.
L'irrecevabilité a été défendue par le président UMP de la Commission
des Lois, Jean-Jacques Hyest jugeant néfaste "l'intervention du juge
pénal dans le jugement de l'histoire" et soulevant des risques
d'inconstitutionnalité.
"Cette proposition de loi est liberticide, inquisitoriale et
obscurantiste", a renchéri le président UMP de la Commission des
Affaires étrangères, Josselin de Rohan.
"La voie empruntée conduit à pire qu'une impasse, à la destruction de
ce qui a été acquis contre les révisionnistes", a embrayé l'ex-garde
des sceaux PS Robert Badinter craignant qu'une question prioritaire de
constitutionnalité (QPC) sur cette PPL ne puisse remettre en cause la
loi reconnaissant le génocide.
"C'est ce même type de raisonnements qui historiquement a fait que les
Arméniens ont été victimes du premier génocide du XXème siècle dans le
silence assourdissant des nations", a rétorqué Gérard Collomb (PS).
"Ce sujet grave et douloureux méritait mieux qu'une petite combine
politicienne et partisane", a ajouté Bruno Gilles (UMP,
Bouches-du-Rhône) qui soutenait le texte.
Ce débat s'est déroulé en présence dans les tribunes du chanteur
Charles Aznavour, ambassadeur d'Arménie en Suisse et de l'écrivain
Bernard-Henri Lévy tandis que 600 membres de la communauté arménienne
(selon une estimation de la police) manifestaient devant le Palais du
Luxembourg.
Le garde des Sceaux, Michel Mercier, n'a pas pris position s'en
remettant "à la sagesse du Sénat".
Nicolas Sarkozy avait promis en 2007, juste avant son élection, aux
associations arméniennes de soutenir la ratification par le Sénat de
cette proposition.
Le génocide arménien, perpétré entre 1915 et 1916 en Turquie, a fait
plusieurs centaines de milliers de victimes.
From: A. Papazian