Le Figaro, France
7 oct 2011
Caucase : l'imbroglio du Nagorny Karabakh
Pierre Avril
Trois soldats sont morts mercredi sur la ligne de front séparant la
république autoproclamée et l'Azerbaïdjan
Comme pour confirmer à Nicolas Sarkozy combien la situation reste
explosive au Nagorny Karabakh, trois soldats sont morts mercredi sur
la ligne de front séparant la république autoproclamée soutenue par
l'Arménie, et l'Azerbaïdjan. Le long de ces tranchées sinueuses,
peuplées de snipers, deux soldats azerbaïdjanais ont été tués «par des
tirs arméniens», a accusé Bakou. Un soldat arménien est tombé sous les
balles azerbaïdjanaises, a répliqué Erevan. Depuis janvier, près de
vingt militaires et civils ont été tués, obligeant les diplomates à
utiliser des contorsions de langage pour décrire le climat de guerre
larvée qui règne depuis le cessez-le-feu officiel de 1994.
L'Azerbaïdjan, qui avait hérité du Karabakh durant la période
stalinienne, avait échoué, en 1992, à le reprendre par les armes, au
terme d'une guerre qui avait fait plus de 22 000 morts. Un affront
jamais digéré par Bakou, qui, depuis, assiste, impuissant, a
«l'arménisation» quasi totale du territoire.
Réunis au sein du groupe de Minsk, les États-Unis, la France et la
Russie se montrent impuissants à relancer les négociations visant à
instaurer un cessez-le-feu durable. Moscou a également offert sa
médiation particulière, sans plus de succès. La dernière réunion
tripartite réunissant en juin Dmitri Medvedev, l'Arménien Serge
Sarkissian, et son homologue azerbaïdjanais Ilham Aliev, a échoué à
adopter des «principes de base».
Sur le terrain, les récriminations réciproques se multiplient. Erevan
accuse Bakou d'utiliser les revenus du pétrole pour renforcer son
potentiel militaire et déclencher une nouvelle guerre. Sceptiques à
l'égard des principes de négociations adoptés par le groupe de Minsk,
les Arméniens du Karabakh se disent prêts à un conflit, et reprochent
la tiédeur de leurs frères d'Arménie à l'égard de leur cause. De son
côté, Bakou soupçonne la Russie, principal sponsor militaire de
l'Arménie, de manquer de neutralité. La jeunesse azerbaïdjanaise, très
influente dans le pays, fait de la réintégration du territoire du
Karabakh, une revendication majeure. 80 000 réfugiés de la guerre de
1992 se voient aujourd'hui privés de retour sur leur «terre».
En Azerbaïdjan, la France est parfois soupçonnée de se voir guider sa
politique caucasienne par son influente diaspora arménienne, qui aide
financièrement le Karabakh. «Nous espérons que Paris considérera les
principes de paix et de justice comme supérieurs aux intérêts
personnels», déclare le député Fuad Muradov, vice-président du comité
de coopération avec l'Union européenne. Néanmoins, les deux parties se
sont abstenues, jeudi, de monter en épingle leur accident frontalier.
Pour sa part, l'Arménie se retient d'ouvrir une ligne aérienne entre
Erevan et la capitale du Karabakh (Stepanakert) initiative qui
constituerait un casus belli pour Bakou. Autant de signes qui laissent
espérer à la diplomatie que l'embrasement n'est pas pour demain.
http://www.lefigaro.fr/international/2011/10/06/01003-20111006ARTFIG00739-caucase-l-imbroglio-du-nagorny-karabakh.php
7 oct 2011
Caucase : l'imbroglio du Nagorny Karabakh
Pierre Avril
Trois soldats sont morts mercredi sur la ligne de front séparant la
république autoproclamée et l'Azerbaïdjan
Comme pour confirmer à Nicolas Sarkozy combien la situation reste
explosive au Nagorny Karabakh, trois soldats sont morts mercredi sur
la ligne de front séparant la république autoproclamée soutenue par
l'Arménie, et l'Azerbaïdjan. Le long de ces tranchées sinueuses,
peuplées de snipers, deux soldats azerbaïdjanais ont été tués «par des
tirs arméniens», a accusé Bakou. Un soldat arménien est tombé sous les
balles azerbaïdjanaises, a répliqué Erevan. Depuis janvier, près de
vingt militaires et civils ont été tués, obligeant les diplomates à
utiliser des contorsions de langage pour décrire le climat de guerre
larvée qui règne depuis le cessez-le-feu officiel de 1994.
L'Azerbaïdjan, qui avait hérité du Karabakh durant la période
stalinienne, avait échoué, en 1992, à le reprendre par les armes, au
terme d'une guerre qui avait fait plus de 22 000 morts. Un affront
jamais digéré par Bakou, qui, depuis, assiste, impuissant, a
«l'arménisation» quasi totale du territoire.
Réunis au sein du groupe de Minsk, les États-Unis, la France et la
Russie se montrent impuissants à relancer les négociations visant à
instaurer un cessez-le-feu durable. Moscou a également offert sa
médiation particulière, sans plus de succès. La dernière réunion
tripartite réunissant en juin Dmitri Medvedev, l'Arménien Serge
Sarkissian, et son homologue azerbaïdjanais Ilham Aliev, a échoué à
adopter des «principes de base».
Sur le terrain, les récriminations réciproques se multiplient. Erevan
accuse Bakou d'utiliser les revenus du pétrole pour renforcer son
potentiel militaire et déclencher une nouvelle guerre. Sceptiques à
l'égard des principes de négociations adoptés par le groupe de Minsk,
les Arméniens du Karabakh se disent prêts à un conflit, et reprochent
la tiédeur de leurs frères d'Arménie à l'égard de leur cause. De son
côté, Bakou soupçonne la Russie, principal sponsor militaire de
l'Arménie, de manquer de neutralité. La jeunesse azerbaïdjanaise, très
influente dans le pays, fait de la réintégration du territoire du
Karabakh, une revendication majeure. 80 000 réfugiés de la guerre de
1992 se voient aujourd'hui privés de retour sur leur «terre».
En Azerbaïdjan, la France est parfois soupçonnée de se voir guider sa
politique caucasienne par son influente diaspora arménienne, qui aide
financièrement le Karabakh. «Nous espérons que Paris considérera les
principes de paix et de justice comme supérieurs aux intérêts
personnels», déclare le député Fuad Muradov, vice-président du comité
de coopération avec l'Union européenne. Néanmoins, les deux parties se
sont abstenues, jeudi, de monter en épingle leur accident frontalier.
Pour sa part, l'Arménie se retient d'ouvrir une ligne aérienne entre
Erevan et la capitale du Karabakh (Stepanakert) initiative qui
constituerait un casus belli pour Bakou. Autant de signes qui laissent
espérer à la diplomatie que l'embrasement n'est pas pour demain.
http://www.lefigaro.fr/international/2011/10/06/01003-20111006ARTFIG00739-caucase-l-imbroglio-du-nagorny-karabakh.php