AVENIR
Entretien avec ARAM 1er
USA Armenian Life n°1274 -
7 octobre 2011 -
Entretien avec Sa Sainteté Aram I, Catholicos de la Grande Maison de
Cilicie Arménie et Diasporas
QUEL AVENIR ?
USA ARMENIAN LIFE : Votre Sainteté, vous avez souvent souligné que la
Diaspora est un partenaire équivalent de l'Arménie. Pourriez-vous
expliquer sur quels fondements vous faites une telle déclaration ?
SA SAINTETÉ ARAM I : nous avons souvent souligné que le peuple
arménien est unique fut-il d'Arménie, d'Artsakh ou de la Diaspora.
L'Artsakh et la Diaspora sont donc des extensions de l'Arménie. Au
sens large, la Diaspora n'est pas partenaire de l'Arménie. Il est vrai
que l'Arménien de la Diaspora ne vit pas en Arménie, mais il
considère- comme il doit le faire- sa patrie envers laquelle il a à la
fois des devoirs et des droits. C'est à partir de cette observation,
classique, que nous devons envisager la coopération Arménie-Diaspora.
Les initiatives fondées sur des positions ordinaires ou
conditionnelles sont inopérantes, mais des actions bien pensées et à
long terme peuvent bonifier notre coopération et renforcer l'unité et
le potentiel internes de notre nation.
USA ARMENIAN LIFE : Que peut-on dire de la qualité des relations entre
le Catholicossat de Tous les Arméniens d'Etchmiadzin et le
Catholicossat de la Grande Maison de Cilicie d'Antélias au Liban ? Et
comment peut-on définir la nature des liens entre les Diocèses de
chacun des deux Sièges ?
SA SAINTETÉ ARAM I : La coopération entre les deux Saint Sièges - le
Catholicossat de Tous les Arméniens et le Catholicossat de la Grande
Maison de Cilicie- est positive. Deux commissions sont formées
représentant chacun des sièges vis-à-vis de la réforme de notre
église. Il est nécessaire de continuer dans cette voie. Les questions
de nature juridiques héritées du passé existent. Il est essentiel
d'aborder ces questions avec pragmatisme ; en tenant compte des
aspirations profondes de notre communauté et de notre peuple ; en
gardant à l'esprit le nécessité absolue de coopérer. Nous
souhaiterions également dire qu'aujourd'hui, l'esprit de fraternité à
tus les niveaux prévaut dans les relations et la coopération entre les
deux sièges. Cet esprit doit être développé encore pour le bénéfice de
notre église, de notre patrie et de notre peuple.
USA ARMENIAN LIFE : A présent et dans les temps à venir, quelle est la
mission du Catholicossat de la Grande Maison de Cilicie dans la vie du
peuple arménien ?
SA SAINTETÉ ARAM I : Nous avons souvent attiré l'attention sur la
mission de la Grande Maison de Cilicie dans nos messages et nos
publications. Le CATHOLICOSSAT DE LA GRANDE MAISON DE CILICIE se
considère elle-même comme une mission de foi et de service de notre
peuple. Ces deux domaines qui sont fortement liés à la vie et au
travail de notre Saint Siège, se complémentent s'enrichissent et
s'achèvent l'un l'autre. La mission de notre Siège a ses priorités
permanentes telles l'éducation Chrétienne et Arménienne ; l'action
sociale ; la jeunesse ; la diffusion de valeurs spirituelles et
morales, la poursuite de notre demande nationale pour que la justice
soit rendue, entre autres. Notre Siège tient compte aussi des
changements qui se produisent à l'intérieur de notre peuple et des
besoins et espoirs que ces évolutions suscitent. Veillons à ne pas
oublier que nous vivons dans un monde qui change constamment. Par sa
mission au service de notre peuple, l'église doit garder le contact
avec les évolutions et les soucis qui en résultent dans la vie de ses
fidèles.
USA ARMENIAN LIFE : Récemment, vous avez adressé une lettre
pontificale au gouvernement du premier ministre turc Erdogan dans
laquelle vous avez qualifié son initiative de restituer certains biens
religieux confisqués à leur propriétaire en droit comme étant
incomplète et injuste. Selon vous, quelles sont les mesures que
devraient prendre la Turquie pour rendre totalement justice ?
SA SAINTETÉ ARAM I : Nos exigences envers la Turquie sont claires. La
Turquie doit reconnaître et faire amende honorable pour le Génocide
commis contre le peuple arménien par l'Empire Ottoman - les grand
parents des dirigeants de la Turquie. Selon les lois internationales,
si le génocide est un crime contre l'humanité, alors il peu importe
les méthodes diplomatiques ou autres que la Turquie emploie pour
essayer de cacher la vérité, le génocide, comme fait historique, ne
peut trouver sanction dans l'oubli. La Bible dit qu'on ne peut pas
cacher la lumière derrière un panier - c'est la même chose pour la
vérité. Pendant 97 ans, notre peuple ne fait pas seulement que de se
souvenir de ses martyrs mais demande à être rétabli dans ses droits.
Plus les années passeront et plus forte sera l'exigence de justice de
notre peuple, et cela est très éloquent. Nous avons dit clairement au
Premier Ministre turc que justice n'a pas été rendue aux Arméniens.
Notre peuple continuera à réclamer justice à la Turquie.
USA ARMENIAN LIFE : La jeunesse arménienne continue-telle à se
rassembler autour de l'Eglise Apostolique Arménienne en rang serrés ?
Le Catholicossat a-t-il développé de nouvelles passerelles pour la
communication et le renforcement des liens avec la jeunesse ?
SA SAINTETE ARAM I : Nous avons toujours donné une importance
particulière à notre jeunesse soulignant le fait que nos jeunes ne
sont pas seulement notre futur mais aussi notre présent. Les portes de
notre église, de nos organisations et communautés sont largement
ouvertes pour nos jeunes. Dans notre vie collective, nos jeunes sont
porteurs d'un message et ont des choses à entreprendre. Nous devons
leur faire confiance. Ils sont conscients de la réalité actuelle, des
défis et des problèmes de notre monde. Ils peuvent donc jouer un rôle
important dans nos vies. Nos structures ont un urgent besoin de
rénovation. Les mêmes personnes avec les même idées et les mêmes
méthodes ne peuvent contribuer à plus de développement et de
réorganisation de nos vies. Notre vie a un besoin urgent de
vitalisation par l'intérieur ; de nouvelles approches
organisationnelles ; et d'une qualité nouvelle. De ce point de vue,
nous considérons que le rôle de notre jeunesse est d'une importance
fondamentale. En outre, nous attendons de notre jeunesse qu'elle se
comporte avec responsabilité envers nos valeurs spirituelles, morales
et nationales. Nous avons amplement traité ce sujet dans notre livre
`Nous devons Rendre l'Eglise au Peuple`.
USA ARMENIAN LIFE : Contrairement à certains Diocèses du monde
appartenant au Saint Siège d'Etchmiadzin, les Diocèses ressortant de
la Grande Maison de Cilicie ont fait des efforts incessants et
travaillé à grande échelle et créé un réseau assez étendu d'écoles
arméniennes aux quatre coins de la Diaspora. Pour quelles raisons la
Grande Maison de Cilicie a-t-elle préféré consacrer une grande partie
de ses ressources à construire des édifices scolaires à proximité des
églises plutôt que se concentrer sur la construction d'églises ?
SA SAINTETÉ ARAM I : Il y a quelque temps, nous avons observé que la
mission et le service à la nation fondés sur la foi forment un aspect
singulier de notre mission. Cela n'est pas une idée abstraite. C'est
ainsi qu'a été notre église à travers l'histoire, et c'est ainsi
qu'elle devrait être aujourd'hui. Education religieuse et éducation
arménienne ne sont pas des réalités distantes, mais la même entité vue
sous différents aspects. L'éducation arménienne est éducation
religieuse et il n'est pas possible de dispenser l'éducation
religieuse sans éducation arménienne ; en d'autres termes, nos valeurs
religieuses et nos valeurs morales ne peuvent être dissociées de nos
valeurs nationales et vice-versa. Telle est l'identité de notre
église. Telle est l'identité arménienne. Par conséquent, la
coexistence à la fois de l'église et de l'école n'est pas fortuite.
L'école est le prolongement de l'église. C'est de cette façon qu'elle
doit être dans son environnement interne envers notre mission pour le
développement de nos fidèles comme êtres humains et comme Arméniens.
J'espère que cela rend évidentes les raisons pour lesquelles le
CATHOLICOSSAT DE LA GRANDE MAISON DE CILICIE a donné une importance
particulière aux écoles arméniennes, en insistant sur l'unicité de
l'entité constituée par l'église et l'école.
USA ARMENIAN LIFE : Selon vous, comment peut-on optimiser le niveau
d'organisation actuel de la Diaspora ? Pensez-vous que l'actuelle
quasi-organisation et l'absence d'harmonie interne, que l'inexistence
de direction élective facilite les visées de la Turquie et celles
d'autres forces anti-arméniennes ? Quelles solutions proposez-vous ?
SA SAINTETÉ ARAM I : Il n'est pas facile à la Diaspora d'entreprendre
un processus de réorganisation parce qu'existent aujourd'hui trois
Diasporas - la Diaspora classique, la Diaspora de l'espace
anciennement soviétique et la Diaspora apparue du fait de l'émigration
d'Arménie. En conséquence, aujourd'hui, le tableau est très coloré. La
création d'une intimité, d'un esprit de coopération et d'harmonie est
une priorité pour ces trois diasporas. L'Eglise et les organisations
communautaires ont un rôle important à jouer dans ce processus. Elles
doivent servi de passerelle, et constituer des lieux de rencontres où
tous les enfants de notre peuple - en termes tangibles, se sentiront
appartenir à la même nation, à la même culture et à la même patrie.
Même si la création d'une harmonie est un processus long, nous
considérons comme urgente et primordiale la coopération sur les
questions affectant notre peuple, notre patrie ou l'une de nos
communautés. Tout comme nous y avons insisté dans notre message à
l'Arménie, nous devons développer une pensée pan-arménienne. La
coopération peut grandement contribuer au développement d'une pensée
pan-arménienne.
USA ARMENIAN LIFE : LE CATHOLICOSSAT DE LA GRANDE MAISON DE CILICIE a
toujours été l'avocat du bien être de l'Eglise Arménienne et du peuple
arménien. Est-il possible d'évoquer quelques unes des actions
concrètes entreprises à cet égard ?
SA SAINTETÉ ARAM I : Il y a un instant, alors que nous parlions de la
mission du CATHOLICOSSAT DE LA GRANDE MAISON DE CILICIE, nous
décrivions ses aspects religieux et nationaux. C'est cela que devrait
être la mission de notre église. Elle devrait être non seulement
l'avocate mais aussi l'initiatrice, la dirigeante de toutes les
actions qui renforcent l'unité de notre peuple ; la consolidation de
notre patrie ; l'épanouissement de notre culture ; et la poursuite de
nos aspirations et des droits de notre nation. En d'autres termes,
notre église, en tant qu'institution nationale, doit être à l'affût et
en quête des intérêts collectifs de notre nation - naturellement en
tant que structure spirituelle, uniquement guidée par une approche
unique et indépendante de ces questions. Veillons à ne pas oublier
qu'à l'instar d'autres organisations qui influent sur notre vie, la
nature de l'église n'est pas seulement religieuse. Une telle vision de
l'église n'est pas acceptable. L'église est le lieu de la foi ; c'est
la présence de Dieu dans nos vies ; c'est la voix de Dieu, et les
membres du clergé sont les ambassadeurs du Christ. C'est sur une telle
conception de soi que doit fonctionner l'église et devenir l'avocate
de la vérité dans nos vies, et certainement pas rester silencieuse en
face du mensonge. Elle doit être le défenseur du pauvre, et non le
protecteur du riche et de l'exploiteur. Elle doit être l'évangéliste
de la justice, et non un compagnon indifférent de la justice. Jésus
n'a-t-il pas accompagné les déshérités ?
USA ARMENIAN LIFE : Récemment, une très importante conférence
consacrée à l'Arménien Occidental s'est déroulée au Séminaire Bikfaya
du Liban sous vos Hauts Auspices et organisé par le CATHOLICOSSAT DE
LA GRANDE MAISON DE CILICIE. Selon plusieurs articles parus dans les
media, les idées ont amplement été exprimées au cours de cette
conférence de trois jours et parmi elles, celle unanime de la
conférence de créer un corps qui préserverait l'Arménien Occidental.
L'idée est merveilleuse, mais quelles actions pratiques et sur quelle
sorte de mandat ce corps pourrait-il prendre les dispositions qui
s'imposent ?
SA SAINTETÉ ARAM I : Nous en avons discuté en profondeur, et les
media ont abondamment fait état de la tenue de cette conférence sur
l'Arménien Occidental qui a eu lieu au Catholicossat, sur notre
initiative et sous notre patronage. Nous voudrions éviter de répéter
les discussions. Mais nous tenons cependant à souligner quelques
points importants.
A) L'Arménien Occidental est en crise. Si nous ne prenons pas les
mesures appropriées pour empêcher qu'elle se prolonge, nous pourrions
perdre rapidement notre langue. C'est pour cela que nous avons
organisé la conférence. La conférence a permis d'attirer l'attention
sur l'urgence et le caractère impératif des mesures efficaces à
prendre ;
B) L'une de ces mesures concrètes proposée par la conférence est la
constitution d'un Conseil de Préservation de l'Arménien Occidental à
l'initiative du CATHOLICOSSAT DE LA GRANDE MAISON DE CILICIE, auquel
participeraient d'érudits en études de l'Arménien qui pourraient faire
avancer la cause. Nous allons passer des consultations pour la
composition du Conseil après l'achèvement de notre Visite Pontificale
à la Prélature de l'Ouest des Etats-Unis ;
C) Organiser des conférences et proposer des idées n'est pas
suffisant. Il est essentiel que nous mettions en pratique les idées et
les plans dans nos communautés. C'est sur ce plan que nous échouons
régulièrement. La préservation de l'Arménien Occidental doit se faire
à l'échelon local - dans les églises, les écoles, les maisons, les
clubs. Notre travail est donc collectif et résulter d'une prise de
conscience qui repose sur nos épaules à tous.
USA ARMENIAN LIFE : La conférence sur l'Arménien Occidental a-t-elle
identifié le rôle des media arméniens de la Diaspora, et a-t-elle
souligné l'importance d'employer un Arménien Occidental clair, précis
et fluide dans les media qui favorisent la qualité pour le bénéfice de
l'Arménien Occidental ? Des discussions ont-elles eu lieu sur la
recherche de moyens pour assister la presse arménienne de la Diaspora
à la fois moralement et financièrement en sorte que les media puissent
emplir leur rôle ?
SA SAINTETÉ ARAM I : La presse a occupé une place importante dans la
conférence. Beaucoup de reportages y ont été présentés et tous les
participants ont abondamment insisté sur le rôle des media dans la
préservation de l'Arménien Occidental et dans la diffusion des valeurs
culturelles, et pour le maintien de l'identité arménienne dans son
ensemble. Nous considérons que les media ont une mission à remplir.
C'est avec une telle prise de conscience que les dirigeants des media
devraient remplir leur mission et c'est avec la même dévotion que les
enfants de notre nation devraient soutenir les media arméniens.
Propos recueillis par Appo Jabarian, Directeur de publication et
Rédacteur en chef d'USA Armenian Life Magazine
dimanche 9 octobre 2011,
Jean Eckian ©armenews.com
From: A. Papazian
Entretien avec ARAM 1er
USA Armenian Life n°1274 -
7 octobre 2011 -
Entretien avec Sa Sainteté Aram I, Catholicos de la Grande Maison de
Cilicie Arménie et Diasporas
QUEL AVENIR ?
USA ARMENIAN LIFE : Votre Sainteté, vous avez souvent souligné que la
Diaspora est un partenaire équivalent de l'Arménie. Pourriez-vous
expliquer sur quels fondements vous faites une telle déclaration ?
SA SAINTETÉ ARAM I : nous avons souvent souligné que le peuple
arménien est unique fut-il d'Arménie, d'Artsakh ou de la Diaspora.
L'Artsakh et la Diaspora sont donc des extensions de l'Arménie. Au
sens large, la Diaspora n'est pas partenaire de l'Arménie. Il est vrai
que l'Arménien de la Diaspora ne vit pas en Arménie, mais il
considère- comme il doit le faire- sa patrie envers laquelle il a à la
fois des devoirs et des droits. C'est à partir de cette observation,
classique, que nous devons envisager la coopération Arménie-Diaspora.
Les initiatives fondées sur des positions ordinaires ou
conditionnelles sont inopérantes, mais des actions bien pensées et à
long terme peuvent bonifier notre coopération et renforcer l'unité et
le potentiel internes de notre nation.
USA ARMENIAN LIFE : Que peut-on dire de la qualité des relations entre
le Catholicossat de Tous les Arméniens d'Etchmiadzin et le
Catholicossat de la Grande Maison de Cilicie d'Antélias au Liban ? Et
comment peut-on définir la nature des liens entre les Diocèses de
chacun des deux Sièges ?
SA SAINTETÉ ARAM I : La coopération entre les deux Saint Sièges - le
Catholicossat de Tous les Arméniens et le Catholicossat de la Grande
Maison de Cilicie- est positive. Deux commissions sont formées
représentant chacun des sièges vis-à-vis de la réforme de notre
église. Il est nécessaire de continuer dans cette voie. Les questions
de nature juridiques héritées du passé existent. Il est essentiel
d'aborder ces questions avec pragmatisme ; en tenant compte des
aspirations profondes de notre communauté et de notre peuple ; en
gardant à l'esprit le nécessité absolue de coopérer. Nous
souhaiterions également dire qu'aujourd'hui, l'esprit de fraternité à
tus les niveaux prévaut dans les relations et la coopération entre les
deux sièges. Cet esprit doit être développé encore pour le bénéfice de
notre église, de notre patrie et de notre peuple.
USA ARMENIAN LIFE : A présent et dans les temps à venir, quelle est la
mission du Catholicossat de la Grande Maison de Cilicie dans la vie du
peuple arménien ?
SA SAINTETÉ ARAM I : Nous avons souvent attiré l'attention sur la
mission de la Grande Maison de Cilicie dans nos messages et nos
publications. Le CATHOLICOSSAT DE LA GRANDE MAISON DE CILICIE se
considère elle-même comme une mission de foi et de service de notre
peuple. Ces deux domaines qui sont fortement liés à la vie et au
travail de notre Saint Siège, se complémentent s'enrichissent et
s'achèvent l'un l'autre. La mission de notre Siège a ses priorités
permanentes telles l'éducation Chrétienne et Arménienne ; l'action
sociale ; la jeunesse ; la diffusion de valeurs spirituelles et
morales, la poursuite de notre demande nationale pour que la justice
soit rendue, entre autres. Notre Siège tient compte aussi des
changements qui se produisent à l'intérieur de notre peuple et des
besoins et espoirs que ces évolutions suscitent. Veillons à ne pas
oublier que nous vivons dans un monde qui change constamment. Par sa
mission au service de notre peuple, l'église doit garder le contact
avec les évolutions et les soucis qui en résultent dans la vie de ses
fidèles.
USA ARMENIAN LIFE : Récemment, vous avez adressé une lettre
pontificale au gouvernement du premier ministre turc Erdogan dans
laquelle vous avez qualifié son initiative de restituer certains biens
religieux confisqués à leur propriétaire en droit comme étant
incomplète et injuste. Selon vous, quelles sont les mesures que
devraient prendre la Turquie pour rendre totalement justice ?
SA SAINTETÉ ARAM I : Nos exigences envers la Turquie sont claires. La
Turquie doit reconnaître et faire amende honorable pour le Génocide
commis contre le peuple arménien par l'Empire Ottoman - les grand
parents des dirigeants de la Turquie. Selon les lois internationales,
si le génocide est un crime contre l'humanité, alors il peu importe
les méthodes diplomatiques ou autres que la Turquie emploie pour
essayer de cacher la vérité, le génocide, comme fait historique, ne
peut trouver sanction dans l'oubli. La Bible dit qu'on ne peut pas
cacher la lumière derrière un panier - c'est la même chose pour la
vérité. Pendant 97 ans, notre peuple ne fait pas seulement que de se
souvenir de ses martyrs mais demande à être rétabli dans ses droits.
Plus les années passeront et plus forte sera l'exigence de justice de
notre peuple, et cela est très éloquent. Nous avons dit clairement au
Premier Ministre turc que justice n'a pas été rendue aux Arméniens.
Notre peuple continuera à réclamer justice à la Turquie.
USA ARMENIAN LIFE : La jeunesse arménienne continue-telle à se
rassembler autour de l'Eglise Apostolique Arménienne en rang serrés ?
Le Catholicossat a-t-il développé de nouvelles passerelles pour la
communication et le renforcement des liens avec la jeunesse ?
SA SAINTETE ARAM I : Nous avons toujours donné une importance
particulière à notre jeunesse soulignant le fait que nos jeunes ne
sont pas seulement notre futur mais aussi notre présent. Les portes de
notre église, de nos organisations et communautés sont largement
ouvertes pour nos jeunes. Dans notre vie collective, nos jeunes sont
porteurs d'un message et ont des choses à entreprendre. Nous devons
leur faire confiance. Ils sont conscients de la réalité actuelle, des
défis et des problèmes de notre monde. Ils peuvent donc jouer un rôle
important dans nos vies. Nos structures ont un urgent besoin de
rénovation. Les mêmes personnes avec les même idées et les mêmes
méthodes ne peuvent contribuer à plus de développement et de
réorganisation de nos vies. Notre vie a un besoin urgent de
vitalisation par l'intérieur ; de nouvelles approches
organisationnelles ; et d'une qualité nouvelle. De ce point de vue,
nous considérons que le rôle de notre jeunesse est d'une importance
fondamentale. En outre, nous attendons de notre jeunesse qu'elle se
comporte avec responsabilité envers nos valeurs spirituelles, morales
et nationales. Nous avons amplement traité ce sujet dans notre livre
`Nous devons Rendre l'Eglise au Peuple`.
USA ARMENIAN LIFE : Contrairement à certains Diocèses du monde
appartenant au Saint Siège d'Etchmiadzin, les Diocèses ressortant de
la Grande Maison de Cilicie ont fait des efforts incessants et
travaillé à grande échelle et créé un réseau assez étendu d'écoles
arméniennes aux quatre coins de la Diaspora. Pour quelles raisons la
Grande Maison de Cilicie a-t-elle préféré consacrer une grande partie
de ses ressources à construire des édifices scolaires à proximité des
églises plutôt que se concentrer sur la construction d'églises ?
SA SAINTETÉ ARAM I : Il y a quelque temps, nous avons observé que la
mission et le service à la nation fondés sur la foi forment un aspect
singulier de notre mission. Cela n'est pas une idée abstraite. C'est
ainsi qu'a été notre église à travers l'histoire, et c'est ainsi
qu'elle devrait être aujourd'hui. Education religieuse et éducation
arménienne ne sont pas des réalités distantes, mais la même entité vue
sous différents aspects. L'éducation arménienne est éducation
religieuse et il n'est pas possible de dispenser l'éducation
religieuse sans éducation arménienne ; en d'autres termes, nos valeurs
religieuses et nos valeurs morales ne peuvent être dissociées de nos
valeurs nationales et vice-versa. Telle est l'identité de notre
église. Telle est l'identité arménienne. Par conséquent, la
coexistence à la fois de l'église et de l'école n'est pas fortuite.
L'école est le prolongement de l'église. C'est de cette façon qu'elle
doit être dans son environnement interne envers notre mission pour le
développement de nos fidèles comme êtres humains et comme Arméniens.
J'espère que cela rend évidentes les raisons pour lesquelles le
CATHOLICOSSAT DE LA GRANDE MAISON DE CILICIE a donné une importance
particulière aux écoles arméniennes, en insistant sur l'unicité de
l'entité constituée par l'église et l'école.
USA ARMENIAN LIFE : Selon vous, comment peut-on optimiser le niveau
d'organisation actuel de la Diaspora ? Pensez-vous que l'actuelle
quasi-organisation et l'absence d'harmonie interne, que l'inexistence
de direction élective facilite les visées de la Turquie et celles
d'autres forces anti-arméniennes ? Quelles solutions proposez-vous ?
SA SAINTETÉ ARAM I : Il n'est pas facile à la Diaspora d'entreprendre
un processus de réorganisation parce qu'existent aujourd'hui trois
Diasporas - la Diaspora classique, la Diaspora de l'espace
anciennement soviétique et la Diaspora apparue du fait de l'émigration
d'Arménie. En conséquence, aujourd'hui, le tableau est très coloré. La
création d'une intimité, d'un esprit de coopération et d'harmonie est
une priorité pour ces trois diasporas. L'Eglise et les organisations
communautaires ont un rôle important à jouer dans ce processus. Elles
doivent servi de passerelle, et constituer des lieux de rencontres où
tous les enfants de notre peuple - en termes tangibles, se sentiront
appartenir à la même nation, à la même culture et à la même patrie.
Même si la création d'une harmonie est un processus long, nous
considérons comme urgente et primordiale la coopération sur les
questions affectant notre peuple, notre patrie ou l'une de nos
communautés. Tout comme nous y avons insisté dans notre message à
l'Arménie, nous devons développer une pensée pan-arménienne. La
coopération peut grandement contribuer au développement d'une pensée
pan-arménienne.
USA ARMENIAN LIFE : LE CATHOLICOSSAT DE LA GRANDE MAISON DE CILICIE a
toujours été l'avocat du bien être de l'Eglise Arménienne et du peuple
arménien. Est-il possible d'évoquer quelques unes des actions
concrètes entreprises à cet égard ?
SA SAINTETÉ ARAM I : Il y a un instant, alors que nous parlions de la
mission du CATHOLICOSSAT DE LA GRANDE MAISON DE CILICIE, nous
décrivions ses aspects religieux et nationaux. C'est cela que devrait
être la mission de notre église. Elle devrait être non seulement
l'avocate mais aussi l'initiatrice, la dirigeante de toutes les
actions qui renforcent l'unité de notre peuple ; la consolidation de
notre patrie ; l'épanouissement de notre culture ; et la poursuite de
nos aspirations et des droits de notre nation. En d'autres termes,
notre église, en tant qu'institution nationale, doit être à l'affût et
en quête des intérêts collectifs de notre nation - naturellement en
tant que structure spirituelle, uniquement guidée par une approche
unique et indépendante de ces questions. Veillons à ne pas oublier
qu'à l'instar d'autres organisations qui influent sur notre vie, la
nature de l'église n'est pas seulement religieuse. Une telle vision de
l'église n'est pas acceptable. L'église est le lieu de la foi ; c'est
la présence de Dieu dans nos vies ; c'est la voix de Dieu, et les
membres du clergé sont les ambassadeurs du Christ. C'est sur une telle
conception de soi que doit fonctionner l'église et devenir l'avocate
de la vérité dans nos vies, et certainement pas rester silencieuse en
face du mensonge. Elle doit être le défenseur du pauvre, et non le
protecteur du riche et de l'exploiteur. Elle doit être l'évangéliste
de la justice, et non un compagnon indifférent de la justice. Jésus
n'a-t-il pas accompagné les déshérités ?
USA ARMENIAN LIFE : Récemment, une très importante conférence
consacrée à l'Arménien Occidental s'est déroulée au Séminaire Bikfaya
du Liban sous vos Hauts Auspices et organisé par le CATHOLICOSSAT DE
LA GRANDE MAISON DE CILICIE. Selon plusieurs articles parus dans les
media, les idées ont amplement été exprimées au cours de cette
conférence de trois jours et parmi elles, celle unanime de la
conférence de créer un corps qui préserverait l'Arménien Occidental.
L'idée est merveilleuse, mais quelles actions pratiques et sur quelle
sorte de mandat ce corps pourrait-il prendre les dispositions qui
s'imposent ?
SA SAINTETÉ ARAM I : Nous en avons discuté en profondeur, et les
media ont abondamment fait état de la tenue de cette conférence sur
l'Arménien Occidental qui a eu lieu au Catholicossat, sur notre
initiative et sous notre patronage. Nous voudrions éviter de répéter
les discussions. Mais nous tenons cependant à souligner quelques
points importants.
A) L'Arménien Occidental est en crise. Si nous ne prenons pas les
mesures appropriées pour empêcher qu'elle se prolonge, nous pourrions
perdre rapidement notre langue. C'est pour cela que nous avons
organisé la conférence. La conférence a permis d'attirer l'attention
sur l'urgence et le caractère impératif des mesures efficaces à
prendre ;
B) L'une de ces mesures concrètes proposée par la conférence est la
constitution d'un Conseil de Préservation de l'Arménien Occidental à
l'initiative du CATHOLICOSSAT DE LA GRANDE MAISON DE CILICIE, auquel
participeraient d'érudits en études de l'Arménien qui pourraient faire
avancer la cause. Nous allons passer des consultations pour la
composition du Conseil après l'achèvement de notre Visite Pontificale
à la Prélature de l'Ouest des Etats-Unis ;
C) Organiser des conférences et proposer des idées n'est pas
suffisant. Il est essentiel que nous mettions en pratique les idées et
les plans dans nos communautés. C'est sur ce plan que nous échouons
régulièrement. La préservation de l'Arménien Occidental doit se faire
à l'échelon local - dans les églises, les écoles, les maisons, les
clubs. Notre travail est donc collectif et résulter d'une prise de
conscience qui repose sur nos épaules à tous.
USA ARMENIAN LIFE : La conférence sur l'Arménien Occidental a-t-elle
identifié le rôle des media arméniens de la Diaspora, et a-t-elle
souligné l'importance d'employer un Arménien Occidental clair, précis
et fluide dans les media qui favorisent la qualité pour le bénéfice de
l'Arménien Occidental ? Des discussions ont-elles eu lieu sur la
recherche de moyens pour assister la presse arménienne de la Diaspora
à la fois moralement et financièrement en sorte que les media puissent
emplir leur rôle ?
SA SAINTETÉ ARAM I : La presse a occupé une place importante dans la
conférence. Beaucoup de reportages y ont été présentés et tous les
participants ont abondamment insisté sur le rôle des media dans la
préservation de l'Arménien Occidental et dans la diffusion des valeurs
culturelles, et pour le maintien de l'identité arménienne dans son
ensemble. Nous considérons que les media ont une mission à remplir.
C'est avec une telle prise de conscience que les dirigeants des media
devraient remplir leur mission et c'est avec la même dévotion que les
enfants de notre nation devraient soutenir les media arméniens.
Propos recueillis par Appo Jabarian, Directeur de publication et
Rédacteur en chef d'USA Armenian Life Magazine
dimanche 9 octobre 2011,
Jean Eckian ©armenews.com
From: A. Papazian