DIYARBAKIR: ACTUALITE DES ARMENIENS ASSIMILES EN TURQUIE
Collectif VAN
www.collectifvan.org
21-09-2011
Le Collectif VAN vous invite a lire cette information traduite par
Georges Festa et publiee sur le site 'Armenian Trends - Mes Armenies'
le 20 septembre 2011.
Armenian Trends - Mes Armenies
mardi 20 septembre 2011
Murailles de Diyarbakir, 2003 © Gerry Lynch -
http://commons.wikimedia.org
par Ruben Melkonyan
Noravank Foundation, 28.07.2011
La ville de Diyarbakir, où vivaient de nombreux Armeniens, continue
de jouer de nos jours un rôle important en Turquie dans le contexte
du developpement de l'identite ethnique. Aujourd'hui, selon diverses
sources, des generations d'Armeniens islamises de force vivent
dans cette ville, peuplee principalement de Kurdes. Autrefois,
en 1894-95, lors des massacres hamidiens, quelque 25 000 Armeniens
furent islamises de force a Diyarbakir. Meme si une partie d'entre
eux revint au christianisme plus tard, certains continuèrent a vivre
sous le voile de l'islam. En 1915, durant le genocide armenien,
la conversion forcee d'un grand nombre d'Armeniens, qui aboutira
ensuite a une kurdisation, eut aussi lieu a Diyarbakir. Differentes
sources nous apprennent qu'aujourd'hui encore, la societe musulmane
a Diyarbakir fait la difference entre les generations d'Armeniens
d'Armeniens islamises, qualifies de " fila " (Armeniens).
Les recents processus lies a l'identite ethnique en Turquie se sont
aussi manifestes avec vivacite a Diyarbakir. Rappelons qu'après
la reouverture de l'eglise Sourp Khatch [Sainte-Croix] sur l'île
d'Akhtamar au lac de Van, plusieurs familles originaires de Diyarbakir
declarèrent qu'elles etaient armeniennes et exprimèrent le souhait
d'etre baptisees en tant que chretiens armeniens. Les travaux actuels
de restauration de l'eglise de Sourp Giragos - la plus grande eglise
armenienne au Moyen-Orient, situee a Diyarbakir - se poursuivent
avec le soutien du maire kurde de Diyarbakir, très connu pour ses
declarations positives au sujet des Armeniens. Autant d'elements
encourageant les generations d'Armeniens convertis, vivant dans cette
ville peuplee de Kurdes, a reaffirmer leur identite.
Il y a plusieurs annees, une Kurde originaire de Diyarbakir, venue
a Erevan participer a un colloque, reconnut lors d'un entretien
prive avoir des racines armeniennes. Son histoire, dit-elle, est
caracteristique de nombre d'Armeniens convertis de Diyarbakir, ce que
nos recherches ont ensuite prouve. Cette Kurde d'origine armenienne
precisa : " J'ai toujours su que mon grand-père du côte de mon père
etait Armenien. Nous le savions tous, mais nous n'en parlions jamais.
Naturellement, il ne pouvait vivre en tant qu'Armenien et faisait
semblant d'etre Kurde. Il n'a jamais parle en armenien a quiconque,
mais quand on lui posait des questions, il repondait parfois en
armenien. " Chose remarquable, le grand-père raconta a sa famille
le genocide de manière detaillee et leur confia : " Il s'agit d'une
souffrance que meme cent ans ne pourront apaiser. "
Recemment, des Armeniens convertis de Diyarbakir ont eux aussi
accepte de parler d'eux dans les grands medias et les debats sur
l'identite ethnique ont ete stimules par des elements nouveaux. Un
article sur les crypto-Armeniens [Armeniens caches] de Diyarbakir
a ainsi ete publie dans le journal turc Radikal. Marie Eskici, qui
vit maintenant a Istanbul, raconte quelques episodes de leur vie a
Diyarbakir : " Nous etions très souvent obliges de vivre comme des
musulmans. Des centaines de familles armeniennes faisaient semblant
d'etre musulmanes, tout comme nous. Nous allions prier et nous signer
dans notre cave. " Son recit demontre aussi que les Armeniens convertis
ont parfois preserve leur langue armenienne et parlaient entre eux
dans leur langue maternelle. Nous decouvrons de nos jours nombre de
faits et de temoignages qui demontrent qu'après le genocide armenien,
les eclats d'armenite qui ont survecu dans la republique de Turquie
furent islamises de force au milieu du 20ème siècle.
Il est interessant de noter que les Armeniens qui se convertirent plus
tôt, a la fin du 19ème siècle et au debut du 20ème, connurent des
problèmes avec ceux qui adoptèrent l'islam dans les annees 1950. Un
climat de mefiance reciproque s'installa, lequel fut attribue pour une
large part a la peur ambiante d'alors en Turquie, mais comme Marie
Eskici le relève, durant differentes periodes le motif de cette
mefiance mutuelle parmi les Armeniens convertis fut le suivant :
" Et si untel est reellement devenu musulman ? " Selon elle, nombre
d'Armeniens convertis, originaires de Diyarbakir, eurent aussi des
problèmes avec la communaute armenienne d'Istanbul ; en particulier,
lorsqu'ils partaient a Istanbul, ils etaient pris par les Armeniens
de cette ville pour des Kurdes et ne pouvaient meme pas envoyer leurs
enfants dans les ecoles armeniennes.
Un article interessant, dû a la journaliste Vercihan Ziflioglu,
d'origine armenienne, a ete recemment publie par l'influent journal
turc Hurriyet Daily News. Le personnage central de l'article est un
autre Armenien converti de Diyarbakir, Gyafur Turkal, qui y vit et
declare ouvertement : " Je suis un musulman sunnite, mais je suis
Armenien. " Le père de Gyafur etait un musulman convaincu, il fit
meme le pèlerinage a La Mecque et eduqua ses enfants en tant que
musulmans sunnites. Neanmoins, lorsque Gyafur eut 15 ans, il apprit
qu'en realite ils etaient Armeniens et que leur veritable patronyme
etait Ohanian. Comme cela arrive frequemment, cette double identite lui
causa de nombreux problèmes psychologiques, l'amena a se questionner,
si bien qu'il en est arrive a prendre la decision suivante : " Je vis
en tant que musulman, mais je ne renie ni mes racines ni ma culture.
La religion n'est pas le problème et j'aimerais apprendre et parler
ma langue maternelle. " D'après Gyafur, l'identite armenienne
devrait proceder de l'identite ethnique et non de la religion. Il
ajoute que les generations d'Armeniens convertis vivant a Diyarbakir
se connaissent et echangent entre eux. Mais, lorsqu'il evoque les
Armeniens chretiens, il note qu'il existe un problème de comprehension
reciproque et meme plus : " Les Armeniens chretiens nous meprisent,
comme si nous avions choisi volontairement cet etat de fait. "
Rappelons que les Armeniens de Diyarbakir sont dans une situation
singulière, subissant un climat de mefiance generale - pour les Kurdes
ils restent des Armeniens, pour l'Etat turc ce sont des convertis
douteux, et pour les Armeniens chretiens des Kurdes etrangers.
Les developpements en cours revèlent des realites et des problèmes
nouveaux qui, neanmoins, illustrent nombre de standardisations
concernant la question des Armeniens convertis, ainsi que des
differences elles-memes conditionnees par un environnement specifique,
cruciales si l'on veut mener correctement des etudes.
Source : http://noravank.am/eng/articles/detail.php?ELEMENT_ID=5957
Traduction : © Georges Festa - 09.2011
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Source/Lien : Armenian Trends - Mes Armenies
Collectif VAN
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21-09-2011
Le Collectif VAN vous invite a lire cette information traduite par
Georges Festa et publiee sur le site 'Armenian Trends - Mes Armenies'
le 20 septembre 2011.
Armenian Trends - Mes Armenies
mardi 20 septembre 2011
Murailles de Diyarbakir, 2003 © Gerry Lynch -
http://commons.wikimedia.org
par Ruben Melkonyan
Noravank Foundation, 28.07.2011
La ville de Diyarbakir, où vivaient de nombreux Armeniens, continue
de jouer de nos jours un rôle important en Turquie dans le contexte
du developpement de l'identite ethnique. Aujourd'hui, selon diverses
sources, des generations d'Armeniens islamises de force vivent
dans cette ville, peuplee principalement de Kurdes. Autrefois,
en 1894-95, lors des massacres hamidiens, quelque 25 000 Armeniens
furent islamises de force a Diyarbakir. Meme si une partie d'entre
eux revint au christianisme plus tard, certains continuèrent a vivre
sous le voile de l'islam. En 1915, durant le genocide armenien,
la conversion forcee d'un grand nombre d'Armeniens, qui aboutira
ensuite a une kurdisation, eut aussi lieu a Diyarbakir. Differentes
sources nous apprennent qu'aujourd'hui encore, la societe musulmane
a Diyarbakir fait la difference entre les generations d'Armeniens
d'Armeniens islamises, qualifies de " fila " (Armeniens).
Les recents processus lies a l'identite ethnique en Turquie se sont
aussi manifestes avec vivacite a Diyarbakir. Rappelons qu'après
la reouverture de l'eglise Sourp Khatch [Sainte-Croix] sur l'île
d'Akhtamar au lac de Van, plusieurs familles originaires de Diyarbakir
declarèrent qu'elles etaient armeniennes et exprimèrent le souhait
d'etre baptisees en tant que chretiens armeniens. Les travaux actuels
de restauration de l'eglise de Sourp Giragos - la plus grande eglise
armenienne au Moyen-Orient, situee a Diyarbakir - se poursuivent
avec le soutien du maire kurde de Diyarbakir, très connu pour ses
declarations positives au sujet des Armeniens. Autant d'elements
encourageant les generations d'Armeniens convertis, vivant dans cette
ville peuplee de Kurdes, a reaffirmer leur identite.
Il y a plusieurs annees, une Kurde originaire de Diyarbakir, venue
a Erevan participer a un colloque, reconnut lors d'un entretien
prive avoir des racines armeniennes. Son histoire, dit-elle, est
caracteristique de nombre d'Armeniens convertis de Diyarbakir, ce que
nos recherches ont ensuite prouve. Cette Kurde d'origine armenienne
precisa : " J'ai toujours su que mon grand-père du côte de mon père
etait Armenien. Nous le savions tous, mais nous n'en parlions jamais.
Naturellement, il ne pouvait vivre en tant qu'Armenien et faisait
semblant d'etre Kurde. Il n'a jamais parle en armenien a quiconque,
mais quand on lui posait des questions, il repondait parfois en
armenien. " Chose remarquable, le grand-père raconta a sa famille
le genocide de manière detaillee et leur confia : " Il s'agit d'une
souffrance que meme cent ans ne pourront apaiser. "
Recemment, des Armeniens convertis de Diyarbakir ont eux aussi
accepte de parler d'eux dans les grands medias et les debats sur
l'identite ethnique ont ete stimules par des elements nouveaux. Un
article sur les crypto-Armeniens [Armeniens caches] de Diyarbakir
a ainsi ete publie dans le journal turc Radikal. Marie Eskici, qui
vit maintenant a Istanbul, raconte quelques episodes de leur vie a
Diyarbakir : " Nous etions très souvent obliges de vivre comme des
musulmans. Des centaines de familles armeniennes faisaient semblant
d'etre musulmanes, tout comme nous. Nous allions prier et nous signer
dans notre cave. " Son recit demontre aussi que les Armeniens convertis
ont parfois preserve leur langue armenienne et parlaient entre eux
dans leur langue maternelle. Nous decouvrons de nos jours nombre de
faits et de temoignages qui demontrent qu'après le genocide armenien,
les eclats d'armenite qui ont survecu dans la republique de Turquie
furent islamises de force au milieu du 20ème siècle.
Il est interessant de noter que les Armeniens qui se convertirent plus
tôt, a la fin du 19ème siècle et au debut du 20ème, connurent des
problèmes avec ceux qui adoptèrent l'islam dans les annees 1950. Un
climat de mefiance reciproque s'installa, lequel fut attribue pour une
large part a la peur ambiante d'alors en Turquie, mais comme Marie
Eskici le relève, durant differentes periodes le motif de cette
mefiance mutuelle parmi les Armeniens convertis fut le suivant :
" Et si untel est reellement devenu musulman ? " Selon elle, nombre
d'Armeniens convertis, originaires de Diyarbakir, eurent aussi des
problèmes avec la communaute armenienne d'Istanbul ; en particulier,
lorsqu'ils partaient a Istanbul, ils etaient pris par les Armeniens
de cette ville pour des Kurdes et ne pouvaient meme pas envoyer leurs
enfants dans les ecoles armeniennes.
Un article interessant, dû a la journaliste Vercihan Ziflioglu,
d'origine armenienne, a ete recemment publie par l'influent journal
turc Hurriyet Daily News. Le personnage central de l'article est un
autre Armenien converti de Diyarbakir, Gyafur Turkal, qui y vit et
declare ouvertement : " Je suis un musulman sunnite, mais je suis
Armenien. " Le père de Gyafur etait un musulman convaincu, il fit
meme le pèlerinage a La Mecque et eduqua ses enfants en tant que
musulmans sunnites. Neanmoins, lorsque Gyafur eut 15 ans, il apprit
qu'en realite ils etaient Armeniens et que leur veritable patronyme
etait Ohanian. Comme cela arrive frequemment, cette double identite lui
causa de nombreux problèmes psychologiques, l'amena a se questionner,
si bien qu'il en est arrive a prendre la decision suivante : " Je vis
en tant que musulman, mais je ne renie ni mes racines ni ma culture.
La religion n'est pas le problème et j'aimerais apprendre et parler
ma langue maternelle. " D'après Gyafur, l'identite armenienne
devrait proceder de l'identite ethnique et non de la religion. Il
ajoute que les generations d'Armeniens convertis vivant a Diyarbakir
se connaissent et echangent entre eux. Mais, lorsqu'il evoque les
Armeniens chretiens, il note qu'il existe un problème de comprehension
reciproque et meme plus : " Les Armeniens chretiens nous meprisent,
comme si nous avions choisi volontairement cet etat de fait. "
Rappelons que les Armeniens de Diyarbakir sont dans une situation
singulière, subissant un climat de mefiance generale - pour les Kurdes
ils restent des Armeniens, pour l'Etat turc ce sont des convertis
douteux, et pour les Armeniens chretiens des Kurdes etrangers.
Les developpements en cours revèlent des realites et des problèmes
nouveaux qui, neanmoins, illustrent nombre de standardisations
concernant la question des Armeniens convertis, ainsi que des
differences elles-memes conditionnees par un environnement specifique,
cruciales si l'on veut mener correctement des etudes.
Source : http://noravank.am/eng/articles/detail.php?ELEMENT_ID=5957
Traduction : © Georges Festa - 09.2011
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