TURQUIE
Quand les fonctionnaires turcs traquent l'obscénité en littérature
Ils sont médecin, spécialiste de l'économie agraire, imam ou encore
psychologue. Une mission réunit ces dix honorables citoyens turcs : la
lutte contre l'obscénité.
Le Comité de protection des mineurs contre les publications nuisibles
est convoqué par le ministère public à chaque fois qu'une oeuvre
littéraire est suspectée d'obscénité. Il traque aussi l'immoralité au
quotidien dans la presse turque.
Parmi les derniers écrivains dont un roman a été déclaré obscène et
sans mérite littéraire par ce comité figurent les Américains Chuck
Palahniuk, auteur de `Fight Club`, et William Burroughs, chef de file
de la Beat Generation.
Le procès de `La Machine molle` de Burroughs est imminent tandis que
l'enquête sur `Snuff` de Palahniuk est en cours.
Le mois dernier, le comité, qui dépend des services du Premier
ministre, a contraint un nouveau magazine de caricatures, Harakiri, à
mettre la clé sous la porte avec une forte amende pour obscénité.
L'institution a motivé sa décision en affirmant que le magazine
`encourage les relations hors mariage`, aussi bien que `la paresse et
l'aventurisme`, a rapporté la presse.
`Un magazine de caricatures n'encourage qu'une seule chose : la
lecture`, rétorque le dessinateur M. K. Perker, le fondateur de la
revue, aujourd'hui basé à New York, dont les dessins sont publiés dans
le New York Times et le Wall Street Journal.
Le comité peut aussi ordonner la vente des périodiques `obscènes` sous
un emballage en plastique noir.
`Il s'agit de tentatives pour dissuader les éditeurs. C'est une
attaque contre notre liberté d'expression`, martèle l'éditeur Irfan
Sanci au sujet du sort réservé par le comité à `La Machine Molle`.
Le comité a conclu que le roman de Burroughs `n'a pas de valeur
littéraire (...) en raison d'un manque d'intégrité de son contenu`, et
`n'a pas d'utilité pour le monde intellectuel des lecteurs`.
`Ce comité n'est pas qualifié pour prendre des décisions concernant la
littérature`, juge M. Sanci, récompensé en 2010 du Prix de la liberté
de l'Association internationale des éditeurs.
`Bien sûr qu'il existe des publications qui peuvent affecter
négativement les enfants. Le comité doit surveiller cela, mais (...)
il n'y a aucun pédagogue ou auteur pour enfant dans cette
institution`, estime le président de l'Union des éditeurs de Turquie,
Metin Celal Zeynioglu.
`Je n'ai jamais vu ce comité prendre une seule décision dans un
dossier concernant des enfants`, insiste M. Zeynioglu.
La plupart de ses membres proviennent de différents ministères
comprenant la Santé, la Justice, la Culture et l'Education, aux côtés
d'un imam nommé par la Direction des Affaires religieuses, d'un
universitaire et d'un journaliste.
Contacté par l'AFP, son président, Ruhi Özbilgiç, un expert en
économie agraire, a refusé de s'exprimer.
Pour Irfan Sanci, l'action du comité n'est pas liée à l'accession au
pouvoir en 2002 du Parti de la justice et du développement (AKP), issu
de la mouvance islamiste.
`Ce comité a été fondé en 1927. Il est lié à la philosophie fondatrice
de la République, commente l'éditeur, dont dix livres ont été
poursuivis en vingt ans.
`J'ai été poursuivi pour un roman de l'auteur français Jeanne
Cordelier avant l'arrivée de l'AKP`, indique-t-il. Le roman, `La
Dérobade`, un témoignage sur la prostitution, a été vendu sous
emballage plastique noir dans les années 1990.
Pour M. Zeynioglu cependant, la nature des publications censurées
évolue au gré de `l'atmosphère politique`.
`Dans le passé, les gens étaient poursuivis parce qu'ils faisaient de
la propagande religieuse. Plus tard, les procès ont été ouverts pour
insulte aux valeurs religieuses`, a-t-il observé.
dimanche 25 septembre 2011,
Sté[email protected]
Quand les fonctionnaires turcs traquent l'obscénité en littérature
Ils sont médecin, spécialiste de l'économie agraire, imam ou encore
psychologue. Une mission réunit ces dix honorables citoyens turcs : la
lutte contre l'obscénité.
Le Comité de protection des mineurs contre les publications nuisibles
est convoqué par le ministère public à chaque fois qu'une oeuvre
littéraire est suspectée d'obscénité. Il traque aussi l'immoralité au
quotidien dans la presse turque.
Parmi les derniers écrivains dont un roman a été déclaré obscène et
sans mérite littéraire par ce comité figurent les Américains Chuck
Palahniuk, auteur de `Fight Club`, et William Burroughs, chef de file
de la Beat Generation.
Le procès de `La Machine molle` de Burroughs est imminent tandis que
l'enquête sur `Snuff` de Palahniuk est en cours.
Le mois dernier, le comité, qui dépend des services du Premier
ministre, a contraint un nouveau magazine de caricatures, Harakiri, à
mettre la clé sous la porte avec une forte amende pour obscénité.
L'institution a motivé sa décision en affirmant que le magazine
`encourage les relations hors mariage`, aussi bien que `la paresse et
l'aventurisme`, a rapporté la presse.
`Un magazine de caricatures n'encourage qu'une seule chose : la
lecture`, rétorque le dessinateur M. K. Perker, le fondateur de la
revue, aujourd'hui basé à New York, dont les dessins sont publiés dans
le New York Times et le Wall Street Journal.
Le comité peut aussi ordonner la vente des périodiques `obscènes` sous
un emballage en plastique noir.
`Il s'agit de tentatives pour dissuader les éditeurs. C'est une
attaque contre notre liberté d'expression`, martèle l'éditeur Irfan
Sanci au sujet du sort réservé par le comité à `La Machine Molle`.
Le comité a conclu que le roman de Burroughs `n'a pas de valeur
littéraire (...) en raison d'un manque d'intégrité de son contenu`, et
`n'a pas d'utilité pour le monde intellectuel des lecteurs`.
`Ce comité n'est pas qualifié pour prendre des décisions concernant la
littérature`, juge M. Sanci, récompensé en 2010 du Prix de la liberté
de l'Association internationale des éditeurs.
`Bien sûr qu'il existe des publications qui peuvent affecter
négativement les enfants. Le comité doit surveiller cela, mais (...)
il n'y a aucun pédagogue ou auteur pour enfant dans cette
institution`, estime le président de l'Union des éditeurs de Turquie,
Metin Celal Zeynioglu.
`Je n'ai jamais vu ce comité prendre une seule décision dans un
dossier concernant des enfants`, insiste M. Zeynioglu.
La plupart de ses membres proviennent de différents ministères
comprenant la Santé, la Justice, la Culture et l'Education, aux côtés
d'un imam nommé par la Direction des Affaires religieuses, d'un
universitaire et d'un journaliste.
Contacté par l'AFP, son président, Ruhi Özbilgiç, un expert en
économie agraire, a refusé de s'exprimer.
Pour Irfan Sanci, l'action du comité n'est pas liée à l'accession au
pouvoir en 2002 du Parti de la justice et du développement (AKP), issu
de la mouvance islamiste.
`Ce comité a été fondé en 1927. Il est lié à la philosophie fondatrice
de la République, commente l'éditeur, dont dix livres ont été
poursuivis en vingt ans.
`J'ai été poursuivi pour un roman de l'auteur français Jeanne
Cordelier avant l'arrivée de l'AKP`, indique-t-il. Le roman, `La
Dérobade`, un témoignage sur la prostitution, a été vendu sous
emballage plastique noir dans les années 1990.
Pour M. Zeynioglu cependant, la nature des publications censurées
évolue au gré de `l'atmosphère politique`.
`Dans le passé, les gens étaient poursuivis parce qu'ils faisaient de
la propagande religieuse. Plus tard, les procès ont été ouverts pour
insulte aux valeurs religieuses`, a-t-il observé.
dimanche 25 septembre 2011,
Sté[email protected]