GéNOCIDE ARMéNIEN : LA TURQUIE SE PRéPARE POUR 2015
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Publié le : 03-08-2012
Info Collectif VAN - www.collectifvan.org - Le Collectif VAN vous
propose la traduction des extraits d'un article en anglais publiée
sur le site Chroniques Diplomatiques.
Chroniques Diplomatiques
Traduction Gérard Merdjanian
Une des dimensions les plus malheureuses de la question arménienne
en Turquie est que le débat politique national porte presque
exclusivement dans le cadre des tentatives occidentales de légiférer
sur le génocide.
C'est parce que le sujet est abordé au Congrès américain ou au
Parlement francais que nous débattons de notre propre histoire.
Le résultat est souvent une réaction nationaliste : 'Ils ont toujours
tort et nous sommes toujours dans notre droit'. Depuis, il existe une
tension dans l'air, et aucune tentative n'est faite pour comprendre
pourquoi le monde entier a une interprétation très différente de
la nôtre sur ce qui est arrivé aux Arméniens en 1915.
D'ici trois ans, la Turquie va se trouver face a un dilemme similaire.
Encore une fois, c'est la dynamique externe qui conduira le débat
national. La Turquie réagira probablement de manière acerbe et
nationaliste face aux tentatives occidentales a commémorer le
centenaire du génocide arménien.
Que peut-on faire pour éviter une telle épreuve ? La réponse
évidente est de commencer a réfléchir dès maintenant aux relations
arméno-turques, avant que la pression du tic-tac de l'horloge entre
en jeu. Dans le cas contraire, un sentiment d'urgence et d'alarme
domineront a nouveau le débat national. Toute mesure prise a la
veille de 2015 sera également percu par l'Arménie et la communauté
internationale comme une tentative désespérée de conjurer les
accusations de génocide.
Au lieu de paniquer la veille cette date, le gouvernement turc doit
adopter a partir de maintenant une stratégie multidimensionnelle. La
première dimension doit concerner l'ouverture de la frontière avec
l'Arménie. Ce doit être un geste unilatéral montrant la bonne
volonté turque, indépendamment du processus gelé des protocoles.
Comme on le sait, le Parti Justice et Développement (AKP) a décidé
de lier la ratification des protocoles (visant a une normalisation
complète avec l'Arménie) au conflit du Haut-Karabakh. Une telle
politique a pratiquement bloqué l'ensemble du processus depuis
qu'il est devenu impossible pour le président arménien Serge
Sarkissian de convaincre son opinion publique (et notamment les
millions d'Arméniens de la diaspora) que la Turquie est sérieuse
au sujet de la normalisation des relations sans conditions préalables.
La décision turque de poser une condition préalable a la
normalisation avec l'Arménie relève de la myopie. Toute tentative
de ratifier les protocoles est systématiquement attaquée par les
milieux nationalistes pro-azerbaïdjanais de Turquie au motif qu'aucun
progrès n'a été fait dans le conflit du Haut-Karabakh. C'est
pourquoi la Turquie a besoin d'agir sans aucune référence a des
protocoles. L'ouverture de la frontière avec l'Arménie doit être
présentée a l'opinion publique turque comme l'initiative de la
Turquie et montrer que Ankara veut créer une dynamique pour la
normalisation des relations avec l'Arménie et ce faisant, réaliser
une percée sur l'avenir du Haut-Karabakh.
La deuxième dimension de la stratégie turque avant 2015 devra
être de parler de 1915 dans le cadre de ce que le ministre des
Affaires étrangères, Ahmet Davutoglu, appelle "la mémoire
équitable." Davutoglu veut rapporter ce qui s'est passé en 1915
dans le cadre plus large d'une catastrophe humanitaire provoquée
par l'effondrement de l'Empire ottoman. En plus des souffrances
arméniennes, il veut se référer a des pertes turques dans les
Balkans et au Caucase, où des millions de musulmans furent tués
ou arrachés a leurs terres avant et pendant la Première Guerre
mondiale, les pertes a Gallipoli et a SarıkamıÅ~_ étant "notre
tragédie commune." Davutoglu semble prêt, comme il a indiqué a
un groupe de journalistes turcs la semaine dernière, a montrer de
l'empathie pour les événements de 1915 tant que le contexte est
défini comme un cadre plus large d'une Â"tragédie partagéeÂ",
où il y aurait aussi l'empathie arménienne pour pertes turques.
Bien que problématique, il s'agit d'un pas dans la bonne direction.
Parler d'une tragédie commune est mieux que de nier ce qui est arrivé
aux Arméniens en 1915. Cependant, une chose doit être claire :
cela n'est pas une excuse officielle turque pour la tragédie de 1915
(pas besoin d'appeler cela un génocide), semblable a celui que le
Premier ministre Recep Tayyip Erdogan a déclaré pour Dersim il y a
quelques mois, un tel récit sur Â"la mémoire justeÂ" tombera dans
l'oreille d'un sourd.
C'est peu probable de s'attendre a ce que l'Arménie fasse preuve de
beaucoup d'empathie pour les pertes turques. Après tout, l'Arménie et
les Arméniens ne sont pas responsables de l'agonie turque a Gallipoli,
dans les Balkans sous tutelle ottomane ou des pertes au cours de la
Première Guerre mondiale. Pourtant, il est impossible de nier le
sentiment turc sur la responsabilité de la tragédie de 1915. Ce que
la Turquie appelle la déportation ou le déplacement des Arméniens
peut très bien avoir été en réaction a un sentiment de menace
percu comme étant le nationalisme arménien. Oui, les Arméniens ont
aussi tué des Turcs. Mais "la mémoire justeÂ" exige aujourd'hui un
regard honnête sur l'Anatolie. Nous ne pouvons pas aujourd'hui nous
contenter sans aucunes excuses de l'absence totale des Arméniens en
Anatolie orientale. Commencons a penser a 1915 et ce qui peut être
fait en vue de 2015 avant que d'autres commencent a penser pour nous.
OMER TAÅ~^PINAR - Zaman
***
A la fin de l'ère Sarkozy, le ministre des Affaires étrangères
turc, Ahmet Davutoglu, avait décrit la politique entre Ankara et
Paris comme Â"cauchemardesqueÂ".
La France, nous l'espérons du moins, a abordé une nouvelle facon
de penser, tout en reconnaissant qu'une approche différente de la
Turquie renforcera son statut de puissance dans l'UE, tandis que la
Turquie avec l'administration du président Francois Hollande peut
trouver une contrepartie amicale et suffisamment bienveillante pour
résoudre certains problèmes clés entre les deux nations.
La question la plus importante qui a existé entre les deux capitales,
empoisonnant les relations, c'est le sort tragique des Arméniens en
1915. L'ex-président Nicolas Sarkozy était personnellement engagé
pour verser du sel sur la plaie ouverte, calculant froidement la
réaction de la Turquie, et insistant sur une loi pénalisant la
négation du génocide arménien. Il a subit un échec, en voulant
pousser la constitution francaise dans la mauvaise direction. Des
questions demeurent : qu'en est-il de la douleur des Arméniens dans
le monde entier, de la liberté d'expression, ou du désir des Turcs
d'adhérer a l'UE ? Probablement toutes aussi importantes les unes
que les autres.
La nouvelle ère sous Hollande envoie des signaux mixtes, pendant que
la Turquie continue de mener une recherche, au ralenti, sur les moyens
de faire face a cette partie horrible de son passé. Le ministre des
Affaires étrangères francais, Laurent Fabius, a déclaré après sa
rencontre avec M. Davutoglu qu'il n'y aurait aucune tentative pour
raviver la loi sur les dénis de génocides. Toutefois, d'autres
sources laissent a penser que le président Hollande n'est pas en
total accord avec cette position. Suite a des contacts avec certains
organismes influents de la diaspora, il a promis que la question
restera a l'ordre du jour de la France.
Si la position de Hollande est telle que rapportée, cela engendrera
des maux pour la simple raison que, ce que Sarkozy a essayé de faire
a poussé la Turquie a se mettre en mode défensif, comme il est de
règle pour l'AKP qui est en mode de recherche constante. Les lecons
de cette période sont claires : Si vous voulez le bien de la Turquie,
ce n'est absolument pas le chemin a suivre.
Hollande est assez intelligent pour comprendre cela, mais il sait
aussi que beaucoup de ses camarades de premier plan dans l'UE - dans
les deux camps socialistes et chez les Verts - sont restés plutôt
ferme sur les aspects positifs de l'AKP, l'emportant sur les aspects
négatifs du passé. En d'autres termes, ce n'est pas tant de punir la
Turquie pour la négation du génocide qui est important mais la facon
dont l'Etat turc sera aidé pour venir a bout de ce problème, avec
des excuses, des regrets ou quelle que soit la réponse appropriée,
concernant les crimes commis par la junte militaire de l'Empire
ottoman. La manière de se comporter montre la différence entre le
cynisme et la démarche amicale.
Le mode de recherche d'Ankara est indéniable, Davutoglu l'a
réaffirmé lors de sa visite a Paris. Sur le chemin du retour,
il a profondément étudié la question en envoyant des signaux a
Paris. Voici ce qu'il a dit :
"Primo. Je souhaitais vraiment que les protocoles [entre la Turquie et
l'Arménie] soient mis en Å"uvre ! Mais ... c'était l'équilibre dans
le Caucase qui l'a empêchée. Si l'Arménie avait été en mesure
de se retirer d'un seul des sept districts qu'elle occupe dans le
Karabakh, la frontière aurait été ouverte. J'avais convaincu le
président azerbaïdjanais Ilham Aliev pour ce faire. L'Azerbaïdjan
aurait également ouvert sa frontière. Je le regrette amèrement,
parce que nous étions tous sur le point de réussir. J'avais demandé
au président Serge Sarkissian: "Retirez-vous d'un seul [district]
et Erevan sera la plus belle ville dans la région. C'est l'avantage
d'être un voisin de la Turquie." Il ne pouvait pas a cause d'obstacles
internes. Mais la proposition est toujours valable et les conditions
de mise en Å"uvre peuvent reprendre. Nous recherchons, nous savons
que cela allégera le fardeau de 2015.
Deusio, nous recherchons un nouveau langage de communication. Nous
mettons en place de nouvelles relations, différentes, avec la
diaspora. Nous devons nous asseoir et parler. Notre objectif est de
briser la glace. Maintenant, il y a et y aura quelqu'un qui s'assiéra
en face des Arméniens et les écoutera. Je ne suis pas un ministre
des Affaires étrangères qui les garde en leur disant : Â"non,
il ne s'est rien passé en 1915Â".
Tercio, nous nous préparons de nouveaux messages concernant 2015. Nous
sommes a la recherche d'un nouveau langage autour du terme Â"mémoire
justeÂ". Je travaille également sur un nouveau livre sur l'histoire
ottomane. Je n'appelle pas cela un génocide, mais je ne dis rien
quand quelqu'un d'autre dit que c'en est un."
Ce ne sont pas des nouveautés qu'exprime Davutoglu. Quoi qu'il en
soit, c'est un exemple de recherche, mais cela n'aurait pas de sens
si Paris continuait la méthode Sarkozy.
La clé réside dans la coopération entre la "nouvelle" France et la
"nouvelle" Turquie. Comme l'avait déclaré Alain Juppé, l'ancien
ministre francais des Affaires étrangères, les deux gouvernements
peuvent faciliter les pourparlers exploratoires par la création
d'une commission d'historiens indépendants, dans le but de guider la
Turquie a trouver la paix avec les événements de 1915. Après tout,
la France est le pays d'Europe avec le "pouvoir protecteur" le plus
grand vis-a-vis de l'Arménie, et elle entretient des relations
approfondies avec la Turquie. Un autre moyen serait en effet de
nous aider a surmonter les obstacles nauséabonds, et les nombreuses
décennies purulentes de honte et de déni enterrés.
YAVUZ BAYDAR - Zaman
***
Extrait de Todays-Zaman
Retour a la rubrique
Source/Lien : Chroniques Diplomatiques
http://www.collectifvan.org/article.php?r=0&id=66143
Publié le : 03-08-2012
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propose la traduction des extraits d'un article en anglais publiée
sur le site Chroniques Diplomatiques.
Chroniques Diplomatiques
Traduction Gérard Merdjanian
Une des dimensions les plus malheureuses de la question arménienne
en Turquie est que le débat politique national porte presque
exclusivement dans le cadre des tentatives occidentales de légiférer
sur le génocide.
C'est parce que le sujet est abordé au Congrès américain ou au
Parlement francais que nous débattons de notre propre histoire.
Le résultat est souvent une réaction nationaliste : 'Ils ont toujours
tort et nous sommes toujours dans notre droit'. Depuis, il existe une
tension dans l'air, et aucune tentative n'est faite pour comprendre
pourquoi le monde entier a une interprétation très différente de
la nôtre sur ce qui est arrivé aux Arméniens en 1915.
D'ici trois ans, la Turquie va se trouver face a un dilemme similaire.
Encore une fois, c'est la dynamique externe qui conduira le débat
national. La Turquie réagira probablement de manière acerbe et
nationaliste face aux tentatives occidentales a commémorer le
centenaire du génocide arménien.
Que peut-on faire pour éviter une telle épreuve ? La réponse
évidente est de commencer a réfléchir dès maintenant aux relations
arméno-turques, avant que la pression du tic-tac de l'horloge entre
en jeu. Dans le cas contraire, un sentiment d'urgence et d'alarme
domineront a nouveau le débat national. Toute mesure prise a la
veille de 2015 sera également percu par l'Arménie et la communauté
internationale comme une tentative désespérée de conjurer les
accusations de génocide.
Au lieu de paniquer la veille cette date, le gouvernement turc doit
adopter a partir de maintenant une stratégie multidimensionnelle. La
première dimension doit concerner l'ouverture de la frontière avec
l'Arménie. Ce doit être un geste unilatéral montrant la bonne
volonté turque, indépendamment du processus gelé des protocoles.
Comme on le sait, le Parti Justice et Développement (AKP) a décidé
de lier la ratification des protocoles (visant a une normalisation
complète avec l'Arménie) au conflit du Haut-Karabakh. Une telle
politique a pratiquement bloqué l'ensemble du processus depuis
qu'il est devenu impossible pour le président arménien Serge
Sarkissian de convaincre son opinion publique (et notamment les
millions d'Arméniens de la diaspora) que la Turquie est sérieuse
au sujet de la normalisation des relations sans conditions préalables.
La décision turque de poser une condition préalable a la
normalisation avec l'Arménie relève de la myopie. Toute tentative
de ratifier les protocoles est systématiquement attaquée par les
milieux nationalistes pro-azerbaïdjanais de Turquie au motif qu'aucun
progrès n'a été fait dans le conflit du Haut-Karabakh. C'est
pourquoi la Turquie a besoin d'agir sans aucune référence a des
protocoles. L'ouverture de la frontière avec l'Arménie doit être
présentée a l'opinion publique turque comme l'initiative de la
Turquie et montrer que Ankara veut créer une dynamique pour la
normalisation des relations avec l'Arménie et ce faisant, réaliser
une percée sur l'avenir du Haut-Karabakh.
La deuxième dimension de la stratégie turque avant 2015 devra
être de parler de 1915 dans le cadre de ce que le ministre des
Affaires étrangères, Ahmet Davutoglu, appelle "la mémoire
équitable." Davutoglu veut rapporter ce qui s'est passé en 1915
dans le cadre plus large d'une catastrophe humanitaire provoquée
par l'effondrement de l'Empire ottoman. En plus des souffrances
arméniennes, il veut se référer a des pertes turques dans les
Balkans et au Caucase, où des millions de musulmans furent tués
ou arrachés a leurs terres avant et pendant la Première Guerre
mondiale, les pertes a Gallipoli et a SarıkamıÅ~_ étant "notre
tragédie commune." Davutoglu semble prêt, comme il a indiqué a
un groupe de journalistes turcs la semaine dernière, a montrer de
l'empathie pour les événements de 1915 tant que le contexte est
défini comme un cadre plus large d'une Â"tragédie partagéeÂ",
où il y aurait aussi l'empathie arménienne pour pertes turques.
Bien que problématique, il s'agit d'un pas dans la bonne direction.
Parler d'une tragédie commune est mieux que de nier ce qui est arrivé
aux Arméniens en 1915. Cependant, une chose doit être claire :
cela n'est pas une excuse officielle turque pour la tragédie de 1915
(pas besoin d'appeler cela un génocide), semblable a celui que le
Premier ministre Recep Tayyip Erdogan a déclaré pour Dersim il y a
quelques mois, un tel récit sur Â"la mémoire justeÂ" tombera dans
l'oreille d'un sourd.
C'est peu probable de s'attendre a ce que l'Arménie fasse preuve de
beaucoup d'empathie pour les pertes turques. Après tout, l'Arménie et
les Arméniens ne sont pas responsables de l'agonie turque a Gallipoli,
dans les Balkans sous tutelle ottomane ou des pertes au cours de la
Première Guerre mondiale. Pourtant, il est impossible de nier le
sentiment turc sur la responsabilité de la tragédie de 1915. Ce que
la Turquie appelle la déportation ou le déplacement des Arméniens
peut très bien avoir été en réaction a un sentiment de menace
percu comme étant le nationalisme arménien. Oui, les Arméniens ont
aussi tué des Turcs. Mais "la mémoire justeÂ" exige aujourd'hui un
regard honnête sur l'Anatolie. Nous ne pouvons pas aujourd'hui nous
contenter sans aucunes excuses de l'absence totale des Arméniens en
Anatolie orientale. Commencons a penser a 1915 et ce qui peut être
fait en vue de 2015 avant que d'autres commencent a penser pour nous.
OMER TAÅ~^PINAR - Zaman
***
A la fin de l'ère Sarkozy, le ministre des Affaires étrangères
turc, Ahmet Davutoglu, avait décrit la politique entre Ankara et
Paris comme Â"cauchemardesqueÂ".
La France, nous l'espérons du moins, a abordé une nouvelle facon
de penser, tout en reconnaissant qu'une approche différente de la
Turquie renforcera son statut de puissance dans l'UE, tandis que la
Turquie avec l'administration du président Francois Hollande peut
trouver une contrepartie amicale et suffisamment bienveillante pour
résoudre certains problèmes clés entre les deux nations.
La question la plus importante qui a existé entre les deux capitales,
empoisonnant les relations, c'est le sort tragique des Arméniens en
1915. L'ex-président Nicolas Sarkozy était personnellement engagé
pour verser du sel sur la plaie ouverte, calculant froidement la
réaction de la Turquie, et insistant sur une loi pénalisant la
négation du génocide arménien. Il a subit un échec, en voulant
pousser la constitution francaise dans la mauvaise direction. Des
questions demeurent : qu'en est-il de la douleur des Arméniens dans
le monde entier, de la liberté d'expression, ou du désir des Turcs
d'adhérer a l'UE ? Probablement toutes aussi importantes les unes
que les autres.
La nouvelle ère sous Hollande envoie des signaux mixtes, pendant que
la Turquie continue de mener une recherche, au ralenti, sur les moyens
de faire face a cette partie horrible de son passé. Le ministre des
Affaires étrangères francais, Laurent Fabius, a déclaré après sa
rencontre avec M. Davutoglu qu'il n'y aurait aucune tentative pour
raviver la loi sur les dénis de génocides. Toutefois, d'autres
sources laissent a penser que le président Hollande n'est pas en
total accord avec cette position. Suite a des contacts avec certains
organismes influents de la diaspora, il a promis que la question
restera a l'ordre du jour de la France.
Si la position de Hollande est telle que rapportée, cela engendrera
des maux pour la simple raison que, ce que Sarkozy a essayé de faire
a poussé la Turquie a se mettre en mode défensif, comme il est de
règle pour l'AKP qui est en mode de recherche constante. Les lecons
de cette période sont claires : Si vous voulez le bien de la Turquie,
ce n'est absolument pas le chemin a suivre.
Hollande est assez intelligent pour comprendre cela, mais il sait
aussi que beaucoup de ses camarades de premier plan dans l'UE - dans
les deux camps socialistes et chez les Verts - sont restés plutôt
ferme sur les aspects positifs de l'AKP, l'emportant sur les aspects
négatifs du passé. En d'autres termes, ce n'est pas tant de punir la
Turquie pour la négation du génocide qui est important mais la facon
dont l'Etat turc sera aidé pour venir a bout de ce problème, avec
des excuses, des regrets ou quelle que soit la réponse appropriée,
concernant les crimes commis par la junte militaire de l'Empire
ottoman. La manière de se comporter montre la différence entre le
cynisme et la démarche amicale.
Le mode de recherche d'Ankara est indéniable, Davutoglu l'a
réaffirmé lors de sa visite a Paris. Sur le chemin du retour,
il a profondément étudié la question en envoyant des signaux a
Paris. Voici ce qu'il a dit :
"Primo. Je souhaitais vraiment que les protocoles [entre la Turquie et
l'Arménie] soient mis en Å"uvre ! Mais ... c'était l'équilibre dans
le Caucase qui l'a empêchée. Si l'Arménie avait été en mesure
de se retirer d'un seul des sept districts qu'elle occupe dans le
Karabakh, la frontière aurait été ouverte. J'avais convaincu le
président azerbaïdjanais Ilham Aliev pour ce faire. L'Azerbaïdjan
aurait également ouvert sa frontière. Je le regrette amèrement,
parce que nous étions tous sur le point de réussir. J'avais demandé
au président Serge Sarkissian: "Retirez-vous d'un seul [district]
et Erevan sera la plus belle ville dans la région. C'est l'avantage
d'être un voisin de la Turquie." Il ne pouvait pas a cause d'obstacles
internes. Mais la proposition est toujours valable et les conditions
de mise en Å"uvre peuvent reprendre. Nous recherchons, nous savons
que cela allégera le fardeau de 2015.
Deusio, nous recherchons un nouveau langage de communication. Nous
mettons en place de nouvelles relations, différentes, avec la
diaspora. Nous devons nous asseoir et parler. Notre objectif est de
briser la glace. Maintenant, il y a et y aura quelqu'un qui s'assiéra
en face des Arméniens et les écoutera. Je ne suis pas un ministre
des Affaires étrangères qui les garde en leur disant : Â"non,
il ne s'est rien passé en 1915Â".
Tercio, nous nous préparons de nouveaux messages concernant 2015. Nous
sommes a la recherche d'un nouveau langage autour du terme Â"mémoire
justeÂ". Je travaille également sur un nouveau livre sur l'histoire
ottomane. Je n'appelle pas cela un génocide, mais je ne dis rien
quand quelqu'un d'autre dit que c'en est un."
Ce ne sont pas des nouveautés qu'exprime Davutoglu. Quoi qu'il en
soit, c'est un exemple de recherche, mais cela n'aurait pas de sens
si Paris continuait la méthode Sarkozy.
La clé réside dans la coopération entre la "nouvelle" France et la
"nouvelle" Turquie. Comme l'avait déclaré Alain Juppé, l'ancien
ministre francais des Affaires étrangères, les deux gouvernements
peuvent faciliter les pourparlers exploratoires par la création
d'une commission d'historiens indépendants, dans le but de guider la
Turquie a trouver la paix avec les événements de 1915. Après tout,
la France est le pays d'Europe avec le "pouvoir protecteur" le plus
grand vis-a-vis de l'Arménie, et elle entretient des relations
approfondies avec la Turquie. Un autre moyen serait en effet de
nous aider a surmonter les obstacles nauséabonds, et les nombreuses
décennies purulentes de honte et de déni enterrés.
YAVUZ BAYDAR - Zaman
***
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