TURQUIE : L'ABSURDE LOGIQUE DE LA MACHINE JUDICIAIRE
http://www.collectifvan.org/article.php?r=0&id=69309
Publie le : 28-11-2012
Info Collectif VAN - www.collectifvan.org - Le Collectif VAN vous
invite a lire cette information publie sur le site des Amities kurdes
de Bretagne le 26 novembre 2012.
lundi 26 novembre 2012 par Amities kurdes de Bretagne
Les audiences se suivent et se ressemblent : les procureurs reclament
contre des prevenus, accuses d'etre des terroristes, des peines
dementielles se chiffrant par dizaines d'annees d'emprisonnement. Les
preuves sont imaginaires, les dossiers vides, les plaidoiries
interrompues et les audiences suspendues. Dans l'attente d'une
prochaine audience, repoussee a plusieurs mois, voire sine die, les
prevenus restent en detention provisoire, comme c'est le cas pour la
plupart des elus et des cadres du BDP, des journalistes et des avocats,
certains depuis avril 2009. D'autres restent en liberte provisoire,
comme l'etudiante franco-kurde Sevil Sevimli ou Osman Baydemir,
maire de Diyarbakir, avec interdiction de quitter le territoire
de Turquie. D'autres encore sont condamnes a l'exil comme Pinar
Selek. C'est la logique du pourrissement pousse jusqu'a l'absurde
et voulu par le pouvoir politique. Un danger plus grand qu'on ne le
pense en cas d'integration de la Turquie dans l'Union europeenne.
Sevil Sevimli, Pinar Selek, deux "dangereuses terroristes"
L'etudiante franco-kurde Sevil Sevimli, accusee d'etre membre d'une
organisation terroriste, s'est donc presentee le 19 novembre a une
nouvelle audience devant la cour criminelle de Bursa. Arretee le 10
mai et incarceree, elle a ete remise en liberte le 6 août, assignee
a residence avec interdiction de quitter le territoire de la Turquie.
Les motifs ? Ce sont les memes que ceux qui servent de pretexte
a maintenir en prison plus de 700 etudiants, coupables de vouloir
user de la liberte d'expression qui vaut accusation de terrorisme si
l'opinion exprimee n'est pas conforme a la pensee unique. La Turquie
comptait au 31 janvier 2012, selon le ministère turc de la Justice,
2 824 etudiants emprisonnes (1 046 condamnes et 1 778 en detention
preventive) dont 787 pour "appartenance a une organisation terroriste
armee". Une nouvelle fois le tribunal a rejete la demande de levee du
contrôle judiciaire de la jeune Sevil qui risque une peine maximale
de trente-deux ans de prison, selon les requisitions du procureur. Sa
seule faute, c'est d'etre venue en Turquie comme etudiante avec des
idees de gauche. La prochaine audience est fixee au 16 janvier 2013.
Pinar Selek est poursuivie par la justice turque pour un crime qu'elle
n'a pas commis. Elle est accusee d'avoir participe a un attentat dont
elle a ete deja acquittee a trois reprises, et pour cause ! Il n'a
jamais existe. Mais a chaque fois, la Cour de cassation a invalide la
decision. La dernière audience du procès de Pinar Selek s'est achevee
sur une decision scandaleuse. Reuni le 22 novembre, le tribunal de
la Cour penale n° 12 d'Istanbul est revenu sur l'acquittement qu'il
avait lui-meme prononce le 9 fevrier 2011. Il a estime que le dernier
arret rendu par la Cour de cassation, qui invalidait l'acquittement
de l'accusee, etait recevable. La reouverture du procès de Pinar
Selek est fixee au 13 decembre prochain. En fait on reproche a cette
scientifique, qui vit desormais en exil a Strasbourg, d'avoir refuse
de donner a la police les noms de rebelles qu'elle avait rencontres
dans le cadre de ses recherches sur le conflit kurde. Placee en
detention preventive en 1998, torturee, condamnee a la prison a vie,
elle avait ete liberee en 2000 après 36 mois d'emprisonnement.
Les journalistes dans le collimateur d'une justice aux ordres
Le procès de quarante quatre journalistes a repris le 12 novembre
dernier après deux mois d'interruption. Les prevenus, dont 34 sont
incarceres depuis onze mois, sont accuses de liens avec le KCK (Union
des Communautes du Kurdistan). Reporters sans frontières, qui a assiste
a l'audience devant la 15ème chambre de la Cour d'Assises d'Istanbul,
exige a nouveau leur remise en liberte. Selon un rapport publie
par le Comite pour la Protection des Journalistes (CPJ), la Turquie
detenait au 1er août 2012, avec 76 incarcerations, le record mondial
des journalistes emprisonnes, dont " 61 au moins etaient detenus en
relation directe avec leurs travaux publies ou leurs activites de
collecte d'information ". Et ce devant l'Iran, l'Erythree et la Chine.
Et si la Turquie europeenne possedait l'arme du mandat d'arret
europeen ?
On peut lire sur le site du ministère francais des Affaires etrangères
une brève concernant la rencontre recente (5 novembre) entre les deux
ministres francais et turc, Bernard Cazeneuve et Alaattin Buyukkaya,
charges, chacun pour son pays respectif, des Affaires europeennes.
Cet entretien, dit le communique, a ete l'occasion d'evoquer les
negociations d'adhesion de la Turquie a l'Union europeenne et a
permis discuter de la mise en ~\uvre de l'accord de readmission entre
la Turquie et l'UE dans le domaine de la justice et des affaires
interieures. Ceci n'est pas sans nous inquieter au vu du spectacle
que donne une machine judiciaire au service d'un regime de plus en
plus autocrate. La Turquie europeenne possederait alors l'arme du
mandat d'arret europeen qui lui permettrait de se faire remettre
toute personne poursuivie par la justice turque, la nationalite
francaise n'etant meme plus un obstacle a l'extradition. Certes,
l'article 695-22 du code francais de procedure penale indique bien que
le mandat d'arret europeen est refuse dans le cas où il est emis dans
le but de poursuivre une personne en raison de ses opinions politiques,
mais on n'imagine pas la Turquie formaliser un mandat d'arret europeen
pour delit d'opinion. Et quand bien meme les faits reproches seraient
consideres comme tels par la France, c'est le droit du pays qui emet
le mandat europeen qui s'imposerait. On pourrait se trouver dans la
situation ubuesque de voir la justice francaise livrer a la justice
turque Pinar Selek, Sevil Sevimli et bien d'autres, comme ce fut le
cas recemment pour la militante basque Aurore Martin, extradee vers
l'Espagne pour des faits consideres legaux en France mais "terroristes"
en Espagne.
Andre Metayer
Retour a la rubrique
Source/Lien : Amities kurdes de Bretagne
http://www.collectifvan.org/article.php?r=0&id=69309
Publie le : 28-11-2012
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invite a lire cette information publie sur le site des Amities kurdes
de Bretagne le 26 novembre 2012.
lundi 26 novembre 2012 par Amities kurdes de Bretagne
Les audiences se suivent et se ressemblent : les procureurs reclament
contre des prevenus, accuses d'etre des terroristes, des peines
dementielles se chiffrant par dizaines d'annees d'emprisonnement. Les
preuves sont imaginaires, les dossiers vides, les plaidoiries
interrompues et les audiences suspendues. Dans l'attente d'une
prochaine audience, repoussee a plusieurs mois, voire sine die, les
prevenus restent en detention provisoire, comme c'est le cas pour la
plupart des elus et des cadres du BDP, des journalistes et des avocats,
certains depuis avril 2009. D'autres restent en liberte provisoire,
comme l'etudiante franco-kurde Sevil Sevimli ou Osman Baydemir,
maire de Diyarbakir, avec interdiction de quitter le territoire
de Turquie. D'autres encore sont condamnes a l'exil comme Pinar
Selek. C'est la logique du pourrissement pousse jusqu'a l'absurde
et voulu par le pouvoir politique. Un danger plus grand qu'on ne le
pense en cas d'integration de la Turquie dans l'Union europeenne.
Sevil Sevimli, Pinar Selek, deux "dangereuses terroristes"
L'etudiante franco-kurde Sevil Sevimli, accusee d'etre membre d'une
organisation terroriste, s'est donc presentee le 19 novembre a une
nouvelle audience devant la cour criminelle de Bursa. Arretee le 10
mai et incarceree, elle a ete remise en liberte le 6 août, assignee
a residence avec interdiction de quitter le territoire de la Turquie.
Les motifs ? Ce sont les memes que ceux qui servent de pretexte
a maintenir en prison plus de 700 etudiants, coupables de vouloir
user de la liberte d'expression qui vaut accusation de terrorisme si
l'opinion exprimee n'est pas conforme a la pensee unique. La Turquie
comptait au 31 janvier 2012, selon le ministère turc de la Justice,
2 824 etudiants emprisonnes (1 046 condamnes et 1 778 en detention
preventive) dont 787 pour "appartenance a une organisation terroriste
armee". Une nouvelle fois le tribunal a rejete la demande de levee du
contrôle judiciaire de la jeune Sevil qui risque une peine maximale
de trente-deux ans de prison, selon les requisitions du procureur. Sa
seule faute, c'est d'etre venue en Turquie comme etudiante avec des
idees de gauche. La prochaine audience est fixee au 16 janvier 2013.
Pinar Selek est poursuivie par la justice turque pour un crime qu'elle
n'a pas commis. Elle est accusee d'avoir participe a un attentat dont
elle a ete deja acquittee a trois reprises, et pour cause ! Il n'a
jamais existe. Mais a chaque fois, la Cour de cassation a invalide la
decision. La dernière audience du procès de Pinar Selek s'est achevee
sur une decision scandaleuse. Reuni le 22 novembre, le tribunal de
la Cour penale n° 12 d'Istanbul est revenu sur l'acquittement qu'il
avait lui-meme prononce le 9 fevrier 2011. Il a estime que le dernier
arret rendu par la Cour de cassation, qui invalidait l'acquittement
de l'accusee, etait recevable. La reouverture du procès de Pinar
Selek est fixee au 13 decembre prochain. En fait on reproche a cette
scientifique, qui vit desormais en exil a Strasbourg, d'avoir refuse
de donner a la police les noms de rebelles qu'elle avait rencontres
dans le cadre de ses recherches sur le conflit kurde. Placee en
detention preventive en 1998, torturee, condamnee a la prison a vie,
elle avait ete liberee en 2000 après 36 mois d'emprisonnement.
Les journalistes dans le collimateur d'une justice aux ordres
Le procès de quarante quatre journalistes a repris le 12 novembre
dernier après deux mois d'interruption. Les prevenus, dont 34 sont
incarceres depuis onze mois, sont accuses de liens avec le KCK (Union
des Communautes du Kurdistan). Reporters sans frontières, qui a assiste
a l'audience devant la 15ème chambre de la Cour d'Assises d'Istanbul,
exige a nouveau leur remise en liberte. Selon un rapport publie
par le Comite pour la Protection des Journalistes (CPJ), la Turquie
detenait au 1er août 2012, avec 76 incarcerations, le record mondial
des journalistes emprisonnes, dont " 61 au moins etaient detenus en
relation directe avec leurs travaux publies ou leurs activites de
collecte d'information ". Et ce devant l'Iran, l'Erythree et la Chine.
Et si la Turquie europeenne possedait l'arme du mandat d'arret
europeen ?
On peut lire sur le site du ministère francais des Affaires etrangères
une brève concernant la rencontre recente (5 novembre) entre les deux
ministres francais et turc, Bernard Cazeneuve et Alaattin Buyukkaya,
charges, chacun pour son pays respectif, des Affaires europeennes.
Cet entretien, dit le communique, a ete l'occasion d'evoquer les
negociations d'adhesion de la Turquie a l'Union europeenne et a
permis discuter de la mise en ~\uvre de l'accord de readmission entre
la Turquie et l'UE dans le domaine de la justice et des affaires
interieures. Ceci n'est pas sans nous inquieter au vu du spectacle
que donne une machine judiciaire au service d'un regime de plus en
plus autocrate. La Turquie europeenne possederait alors l'arme du
mandat d'arret europeen qui lui permettrait de se faire remettre
toute personne poursuivie par la justice turque, la nationalite
francaise n'etant meme plus un obstacle a l'extradition. Certes,
l'article 695-22 du code francais de procedure penale indique bien que
le mandat d'arret europeen est refuse dans le cas où il est emis dans
le but de poursuivre une personne en raison de ses opinions politiques,
mais on n'imagine pas la Turquie formaliser un mandat d'arret europeen
pour delit d'opinion. Et quand bien meme les faits reproches seraient
consideres comme tels par la France, c'est le droit du pays qui emet
le mandat europeen qui s'imposerait. On pourrait se trouver dans la
situation ubuesque de voir la justice francaise livrer a la justice
turque Pinar Selek, Sevil Sevimli et bien d'autres, comme ce fut le
cas recemment pour la militante basque Aurore Martin, extradee vers
l'Espagne pour des faits consideres legaux en France mais "terroristes"
en Espagne.
Andre Metayer
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