Announcement

Collapse
No announcement yet.

Turquie Condamnee Par La Cour Europeenne Des Droits De L'Homme

Collapse
X
 
  • Filter
  • Time
  • Show
Clear All
new posts

  • Turquie Condamnee Par La Cour Europeenne Des Droits De L'Homme

    TURQUIE CONDAMNéE PAR LA COUR EUROPéENNE DES DROITS DE L'HOMME

    http://www.collectifvan.org/article.php?r=0&id=69945
    Publié le : 20-12-2012

    Info Collectif VAN - www.collectifvan.org - La Turquie a été
    condamnée mardi par la Cour européenne des droits de l'Homme pour
    avoir bloqué l'accès a Â" Google Sites Â". Dans l'affaire Ahmet
    Yildirim c. Turquie, la Cour a conclu a la violation de la liberté
    d'expression. L'affaire concernait la décision d'un tribunal de
    bloquer l'accès a Â" Google Sites Â" qui hébergeait un site internet
    dont le propriétaire faisait l'objet d'une procédure pénale pour
    outrage a la mémoire d'Ataturk. Le Collectif VAN vous présente ce
    Communiqué de Presse de la CEDH ( Cour européenne des droits de
    l'Homme) publié sur son site le 18 décembre 2012.

    Cour européenne des droits de l'Homme

    CEDH 458 (2012)

    18.12.2012

    Arrêt de chambre Ahmet Yildirim c. Turquie

    Une mesure de restriction de l'accès a Internet qui ne s'inscrit pas
    dans un cadre légal strict délimitant l'interdiction et offrant
    la garantie d'un contrôle juridictionnel contre d'éventuels abus
    constitue une violation de la liberté d'expression

    Dans son arrêt de chambre, non définitif1, rendu ce jour dans
    l'affaire Ahmet Yildirim c. Turquie (requête no 3111/10), la Cour
    européenne des droits de l'homme dit, a l'unanimité, qu'il y a eu :

    Violation de l'article 10 (liberté d'expression) de la Convention
    européenne des droits de l'homme

    L'affaire concerne la décision d'un tribunal de bloquer l'accès a Â"
    Google Sites Â" qui hébergeait un site internet dont le propriétaire
    faisait l'objet d'une procédure pénale pour outrage a la mémoire
    d'Ataturk. Cette mesure de blocage avait pour effet de verrouiller
    également l'accès a tous les autres sites hébergés par le serveur.

    Principaux faits

    Le requérant, M. Ahmet Yıldırım, est un ressortissant turc,
    né en 1983 et résidant a Istanbul.

    Il est propriétaire et gestionnaire d'un site web, hébergé par
    le service Â" Google Sites Â", sur lequel il publie ses travaux
    académiques et ses points de vue dans différents domaines.

    Le 23 juin 2009, le tribunal d'instance pénal de Denizli rendit une
    décision ordonnant le blocage de l'accès a un site internet, dont le
    propriétaire était accusé d'outrage a la mémoire d'Ataturk. Cette
    décision se présentait comme une mesure préventive adoptée dans
    le cadre d'une procédure pénale dirigée contre le propriétaire
    de ce site.

    La décision de blocage fut notifiée pour exécution a la Présidence
    de la télécommunication et de l'informatique (PTI). Celle-ci demanda
    peu après la révision de cette décision auprès du tribunal afin
    qu'elle soit étendue au blocage de l'accès a Â" Google Sites Â" qui
    hébergeait non seulement le site tiers mais aussi celui du requérant.

    La PTI indiquait que c'était la le seul moyen technique de bloquer
    le site litigieux, car son propriétaire résidait a l'étranger.

    La PTI bloqua totalement l'accès a Â" Google Sites Â" et
    M. Yıldırım se trouva dans l'impossibilité d'accéder a son propre
    site. Toutes ses tentatives de recours se heurtèrent a la décision
    de blocage prononcée par le tribunal. Par une lettre adressée au
    mois d'avril 2012, M.

    Yıldırım indiqua a la Cour qu'il ne pouvait toujours pas accéder
    a son site internet, alors même que la procédure pénale dirigée
    contre le propriétaire du site litigieux s'était conclue a
    sa connaissance par un non-lieu, du fait de l'impossibilité de
    déterminer l'identité et l'adresse de l'accusé qui résidait
    a l'étranger.

    Griefs, procédure et composition de la Cour

    Invoquant l'article 10 (liberté d'expression), M. Yıldırım se
    plaignait de l'impossibilité d'accéder a son site internet du
    fait d'une mesure ordonnée dans le cadre d'une affaire pénale qui
    n'avait aucun rapport ni avec lui, ni avec son site. Il voyait dans
    cette mesure une atteinte a son droit a la liberté de recevoir et
    communiquer des informations et des idées.

    La requête a été introduite devant la Cour européenne des droits
    de l'homme le 12 janvier 2010.

    L'arrêt a été rendu par une chambre de sept juges composée de :

    Guido Raimondi (Italie), président, DanutÄ- JoÄ~MienÄ- (Lituanie),
    Dragoljub PopoviÄ~G (Serbie), András Sajó (Hongrie), IÅ~_ıl
    KarakaÅ~_ (Turquie), Paulo Pinto de Albuquerque (Portugal), Helen
    Keller (Suisse), ainsi que de Stanley Naismith, greffier de section.

    Décision de la Cour

    Article 10

    L'article 10 garantit la liberté d'expression Â" a toute personne Â",
    et concerne non seulement le contenu des informations mais aussi les
    moyens de diffusion de ces informations.

    La Cour observe que le blocage de l'accès au site internet du
    requérant avait pour origine une décision du tribunal de Denizli
    qui conduisait une procédure pénale contre le propriétaire d'un
    autre site internet, accusé d'outrage a la mémoire d'Ataturk. Le
    tribunal avait tout d'abord ordonné le blocage de l'accès a ce
    site. Cependant, l'organe administratif (la PTI) chargé d'exécuter
    cette mesure demanda au tribunal que soit ordonné un blocage total de
    l'accès a Â" Google Sites Â" qui hébergeait le site litigieux mais
    aussi le site du requérant. Le tribunal fit droit a cette demande
    en considérant que le seul moyen de bloquer le site litigieux était
    de bloquer intégralement l'accès a Â" Google Sites Â".

    Bien que ni Â" Google Sites Â", ni le site de M. Yıldırım ne fussent
    concernés par cette procédure, la PTI bloqua techniquement l'accès
    a ces sites afin d'exécuter la mesure ordonnée par le tribunal
    de Denizli.

    La Cour admet qu'il ne s'agit certes pas d'une interdiction totale
    mais d'une restriction de l'accès a Internet. Cependant, l'effet
    limité de la restriction n'amoindrit pas son importance, d'autant
    que l'internet est devenu aujourd'hui l'un des principaux moyens
    d'exercice du droit a la liberté d'expression et d'information. La
    mesure en cause est par conséquent constitutive d'une ingérence
    des autorités publiques dans le droit du requérant a la liberté
    d'expression. Pareille ingérence enfreint l'article 10 si elle n'est
    pas prévue par la loi, inspirée par un ou des buts légitimes et
    nécessaire dans une société démocratique pour atteindre ce ou ces
    buts. Or, une norme est prévisible lorsqu'elle est rédigée avec
    assez de précision pour permettre a toute personne, en s'entourant
    au besoin de personnes éclairées, de régler sa conduite.

    En vertu de la loi no 5651, le juge peut ordonner le blocage de
    l'accès aux publications diffusées sur Internet s'il y a des
    motifs suffisants de soupconner que, par leur contenu, elles sont
    constitutives d'infractions. Or, ni Â" Google Sites Â" ni le site de M.

    Yıldırım n'étaient l'objet d'une procédure judiciaire. Bien que,
    dans la décision du 24 juin 2009, Â" Google Sites Â" est tenu pour
    responsable du site qu'il hébergeait, il n'est nulle part question,
    dans la loi no 5651 invoquée, d'envisager un blocage intégral de
    l'accès tel qu'il a été ordonné par le tribunal.

    Pas plus que la loi n'autorise le blocage de l'ensemble d'un domaine
    internet, tel Â" Google Sites Â", rien dans le dossier ne permet de
    conclure que Â" Google Sites Â" ait été informé qu'il hébergeait
    un contenu jugé illicite, ni qu'il ait refusé de se conformer a une
    mesure provisoire concernant un site a l'encontre duquel une procédure
    pénale avait été engagée. La Cour observe que la loi a permis a
    un organe administratif, la PTI, de jouir d'un pouvoir étendu dans
    le cadre de l'exécution d'une mesure de blocage qui avait été
    a l'origine décidée pour un site particulier. Les faits montrent
    que la PTI a facilement pu demander l'élargissement d'une mesure,
    limitée a l'origine, de blocage d'accès.

    La Cour rappelle qu'une restriction d'accès a une source d'information
    n'est compatible avec la Convention, qu'a la condition de s'inscrire
    dans un cadre légal strict délimitant l'interdiction et offrant la
    garantie d'un contrôle juridictionnel contre d'éventuels abus.

    Or, lorsque le tribunal de Denizli a décidé de bloquer totalement
    l'accès a Â" Google Sites Â", il s'est contenté de se référer a un
    avis émanant de la PTI, sans rechercher si une mesure moins lourde
    pÃ"t être adoptée pour bloquer spécifiquement le site visé. La
    Cour observe également que rien ne montre que les juges aient
    cherché a soupeser les divers intérêts en présence, en appréciant
    notamment la nécessité d'un blocage total de l'accès a Â" Google
    Sites Â". Aux yeux de la Cour, ce défaut est une conséquence de
    la loi interne qui ne comportait aucune obligation pour les juges
    d'examiner le bien-fondé d'un blocage total de l'accès a Â" Google
    Sites Â". Les juges auraient dÃ" avoir égard au fait qu'une telle
    mesure rendait inaccessible une grande quantité d'informations,
    ce qui affectait directement les droits des internautes et avait un
    effet collatéral important.

    Or, l'ingérence a laquelle a donné lieu l'article 8 de la loi no
    5651 ne répond pas a la condition de prévisibilité voulue par
    la Convention et n'a pas permis au requérant de jouir du degré
    de protection suffisant qu'exige la prééminence du droit dans une
    société démocratique. De plus, la Cour rappelle que l'article 10
    § 1 de la Convention stipule que le droit a la liberté d'expression
    vaut Â" sans considération de frontière Â".

    La mesure en cause a donc eu des effets arbitraires et le contrôle
    juridictionnel du blocage d'accès n'a pas réuni les conditions
    suffisantes pour éviter les abus. Il y a eu violation de l'article
    10 de la Convention.

    Satisfaction équitable (Article 41)

    La Cour dit que la Turquie doit verser au requérant 7 500 euros
    (EUR) pour dommage moral, et 1 000 EUR pour frais et dépens.

    Contacts pour la presse [email protected]

    La Cour européenne des droits de l'homme a été créée a Strasbourg
    par les Etats membres du Conseil de l'Europe en 1959 pour connaître
    des allégations de violation de la Convention européenne des droits
    de l'homme de 1950.

    ****************

    1. Conformément aux dispositions des articles 43 et 44 de la
    Convention, cet arrêt de chambre n'est pas définitif. Dans un délai
    de trois mois a compter de la date de son prononcé, toute partie peut
    demander le renvoi de l'affaire devant la Grande Chambre de la Cour.

    En pareil cas, un collège de cinq juges détermine si l'affaire
    mérite plus ample examen. Si tel est le cas, la Grande Chambre se
    saisira de l'affaire et rendra un arrêt définitif. Si la demande
    de renvoi est rejetée, l'arrêt de chambre deviendra définitif a
    la date de ce rejet.

    Dès qu'un arrêt devient définitif, il est transmis au
    Comité des Ministres du Conseil de l'Europe qui en surveille
    l'exécution. Des renseignements supplémentaires sur le
    processus d'exécution sont consultables a l'adresse suivante :
    http://www.coe.int/t/dghl/monitoring/execution.

    Lire aussi:

    CEDH: Donation de la Turquie

    La Turquie condamnée a Strasbourg pour sa censure du net trop sévère

    Blocage de site Internet : la Turquie sanctionnée par la CEDH

    Turquie : la CEDH donne raison a Halil Savda

    En 52 ans, la Turquie a été condamnée a 2404 reprises par la CEDH

    La CEDH recoit le ministre de la Justice de Turquie

    Taner Akcam vs. Turquie

    CEDH : la Turquie viole la liberté d'expression sur le génocide
    arménien

    Retour a la rubrique

    TÃ~ILÃ~ICHARGER : Arrêt de chambre Ahmet Yildirim c. Turquie



    From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress
Working...
X