LA LOI SUR LES GENOCIDES ATTAQUEE DEVANT LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL
La Croix
http://www.la-croix.com/Actualite/S-informer/France/La-loi-sur-les-genocides-attaquee-devant-le-Conseil-constitutionnel-_NG_-2012-01-31-763961
31 janvier 2012
France
Plus de 70 senateurs et plus de 60 deputes ont depose un recours
contre la proposition de loi reprimant la contestation des genocides.
Les parlementaires, issus de tous les partis, demandent au Conseil
constitutionnel de censurer le texte qui vise principalement le
genocide armenien.
Qui a saisi le Conseil constitutionnel ?
La proposition de loi visant a reprimer la contestation des genocides,
ciblant implicitement le genocide armenien, n'a pas acheve son long
et chaotique parcours. Le texte avait ete definitivement vote le
23 janvier dernier lors d'un vote au Senat par 127 voix contre 86,
suscitant une très vive reaction des autorites turques.
Les opposants au texte, repartis a droite et a gauche, semblaient
alors trop disperses et trop opposes politiquement pour reussir a
se regrouper et atteindre la barre des 60 signataires necessaire
pour formuler un recours devant le Conseil constitutionnel. Mais,
a la surprise generale, le rassemblement a fonctionne.
Et meme deux fois plutôt qu'une. La première saisine emane ainsi de
77 senateurs de tous les groupes (du PCF a l'UMP en passant par les
ecologistes), sous l'impulsion du groupe RDSE constitue notamment des
radicaux de gauche. La seconde rassemble 65 deputes, membres pour
beaucoup de l'UMP, mais avec le renfort d'une douzaine de deputes
de l'opposition.
Ce rebondissement a jete un froid aussi bien au PS qu'a l'UMP, qui
avaient tous deux appele a soutenir la proposition de loi. " En ne
votant pas le texte, nous avions deja transgresse les consignes,
il etait naturel de poursuivre jusqu'au Conseil constitutionnel ",
justifie Bariza Khiari, vice-presidente PS du Senat et signataire
du recours.
Nicolas Sarkozy, qui s'etait implique pour faire aboutir la proposition
de loi, sort lui aussi affaibli de cet affront fait par une partie de
ces amis. Recevant hier les parlementaires de sa majorite a l'Elysee,
le chef de l'Etat a juge que ceux qui avaient signe ces recours "
ne lui facilitaient pas la tâche ", raconte un elu UMP.
Il se serait aussi inquiete qu'une censure de la proposition de loi
puisse conduire a la disparition de toute la legislation similaire,
notamment celle de la loi reprimant la negation de la Shoah.
Quels arguments sont mis en avant ?
Les recours reprennent les arguments defendus depuis le depart par
les opposants au texte. Evidemment, rappellent ainsi les senateurs
signataires, il n'est pas question " de remettre en cause de quelque
manière que ce soit l'existence du genocide armenien ".
C'est sur le fondement juridique du texte que portent leurs griefs,
avec un argument fondamental : il ne revient pas au Parlement " de
determiner une sorte de verite officielle ", de decider quel massacre
est un genocide, quel autre ne l'est pas.
Le cas du genocide armenien est très different de celui de la Shoah,
reconnue par une convention internationale et une juridiction
internationale (le tribunal de Nuremberg), avait deja insiste lors
de la discussion en seance le senateur socialiste Jean-Pierre Sueur.
" Au-dela de nos differences politiques, explique le depute UMP
Jean-Paul Garraud, c'est cette question de fond qui rassemble tous
les signataires de ces recours. Nous estimons que l'on a assez a
faire avec le present et l'avenir pour ne pas se perdre dans les
debats autour de lois memorielles. " Avec ce recours, rencherit la
socialiste Bariza Khiari, " le Conseil constitutionnel va enfin dire,
une fois pour toutes, ce qu'il pense de ce genre de textes et s'il
revient aux parlementaires de s'occuper des questions d'histoire ".
Les recours deposes hier ciblent d'autres points. Ils contestent
le fait que le texte soit necessaire pour transposer une directive
europeenne, puisque celle-ci ciblait les situations pouvant conduire
" a la violence ou a la haine a l'egard d'un groupe de personnes
", ce qui n'est pas le cas de la communaute armenienne en France,
font-ils valoir.
De meme, ils pointent le fait que la loi vise non seulement la
negation, mais aussi la " minimisation outrancière " d'un genocide.
Une notion jugee trop floue pour etre penalement applicable.
Le Conseil constitutionnel a un mois maximum pour trancher.
La Croix
http://www.la-croix.com/Actualite/S-informer/France/La-loi-sur-les-genocides-attaquee-devant-le-Conseil-constitutionnel-_NG_-2012-01-31-763961
31 janvier 2012
France
Plus de 70 senateurs et plus de 60 deputes ont depose un recours
contre la proposition de loi reprimant la contestation des genocides.
Les parlementaires, issus de tous les partis, demandent au Conseil
constitutionnel de censurer le texte qui vise principalement le
genocide armenien.
Qui a saisi le Conseil constitutionnel ?
La proposition de loi visant a reprimer la contestation des genocides,
ciblant implicitement le genocide armenien, n'a pas acheve son long
et chaotique parcours. Le texte avait ete definitivement vote le
23 janvier dernier lors d'un vote au Senat par 127 voix contre 86,
suscitant une très vive reaction des autorites turques.
Les opposants au texte, repartis a droite et a gauche, semblaient
alors trop disperses et trop opposes politiquement pour reussir a
se regrouper et atteindre la barre des 60 signataires necessaire
pour formuler un recours devant le Conseil constitutionnel. Mais,
a la surprise generale, le rassemblement a fonctionne.
Et meme deux fois plutôt qu'une. La première saisine emane ainsi de
77 senateurs de tous les groupes (du PCF a l'UMP en passant par les
ecologistes), sous l'impulsion du groupe RDSE constitue notamment des
radicaux de gauche. La seconde rassemble 65 deputes, membres pour
beaucoup de l'UMP, mais avec le renfort d'une douzaine de deputes
de l'opposition.
Ce rebondissement a jete un froid aussi bien au PS qu'a l'UMP, qui
avaient tous deux appele a soutenir la proposition de loi. " En ne
votant pas le texte, nous avions deja transgresse les consignes,
il etait naturel de poursuivre jusqu'au Conseil constitutionnel ",
justifie Bariza Khiari, vice-presidente PS du Senat et signataire
du recours.
Nicolas Sarkozy, qui s'etait implique pour faire aboutir la proposition
de loi, sort lui aussi affaibli de cet affront fait par une partie de
ces amis. Recevant hier les parlementaires de sa majorite a l'Elysee,
le chef de l'Etat a juge que ceux qui avaient signe ces recours "
ne lui facilitaient pas la tâche ", raconte un elu UMP.
Il se serait aussi inquiete qu'une censure de la proposition de loi
puisse conduire a la disparition de toute la legislation similaire,
notamment celle de la loi reprimant la negation de la Shoah.
Quels arguments sont mis en avant ?
Les recours reprennent les arguments defendus depuis le depart par
les opposants au texte. Evidemment, rappellent ainsi les senateurs
signataires, il n'est pas question " de remettre en cause de quelque
manière que ce soit l'existence du genocide armenien ".
C'est sur le fondement juridique du texte que portent leurs griefs,
avec un argument fondamental : il ne revient pas au Parlement " de
determiner une sorte de verite officielle ", de decider quel massacre
est un genocide, quel autre ne l'est pas.
Le cas du genocide armenien est très different de celui de la Shoah,
reconnue par une convention internationale et une juridiction
internationale (le tribunal de Nuremberg), avait deja insiste lors
de la discussion en seance le senateur socialiste Jean-Pierre Sueur.
" Au-dela de nos differences politiques, explique le depute UMP
Jean-Paul Garraud, c'est cette question de fond qui rassemble tous
les signataires de ces recours. Nous estimons que l'on a assez a
faire avec le present et l'avenir pour ne pas se perdre dans les
debats autour de lois memorielles. " Avec ce recours, rencherit la
socialiste Bariza Khiari, " le Conseil constitutionnel va enfin dire,
une fois pour toutes, ce qu'il pense de ce genre de textes et s'il
revient aux parlementaires de s'occuper des questions d'histoire ".
Les recours deposes hier ciblent d'autres points. Ils contestent
le fait que le texte soit necessaire pour transposer une directive
europeenne, puisque celle-ci ciblait les situations pouvant conduire
" a la violence ou a la haine a l'egard d'un groupe de personnes
", ce qui n'est pas le cas de la communaute armenienne en France,
font-ils valoir.
De meme, ils pointent le fait que la loi vise non seulement la
negation, mais aussi la " minimisation outrancière " d'un genocide.
Une notion jugee trop floue pour etre penalement applicable.
Le Conseil constitutionnel a un mois maximum pour trancher.