LA PENALISATION DU GENOCIDE ARMENIEN EN DEBAT
Nonfiction.fr
http://www.nonfiction.fr/article-5418-la_penalisation_du_genocide_armenien_en_debat.htm
26 janvier 2012
France
Ce lundi 23 janvier, le Parlement francais vient d'enteriner la
proposition de loi deposee par la deputee (UMP) Valerie Boyer
(rapporteur du texte), visant a reprimer la negation de tous les
genocides reconnus par la France dont le genocide armenien de 1915.
L'Assemblee nationale avait d'ors et deja adopte la proposition le 22
decembre dernier. Après une onde de critiques de la part de personnages
publics francais et de menaces diplomatiques provenant de la Turquie,
le Senat ratifie la proposition par 127 voix pour et 86 voix contre.
Mais de quoi s'agit-il ? Cette proposition de loi qui a tant fait
debat ces derniers temps ne constitue pas une nouveaute. Deja en
2001, les parlementaires francais ont integre dans la legislation,
la reconnaissance du genocide armenien perpetre en 1915 par
l'Empire Ottoman. Cette première etape fut secondee par le depôt
d'une proposition de loi a l'Assemblee nationale en 2006, visant la
penalisation de la negation de ce genocide. La ratification n'avait
jamais vu le jour jusqu'a ce lundi 23 janvier 2012. Il convient de
savoir quel est le contenu de cette proposition de loi qui a provoque
tant de remous a la fois sur les bancs des assemblees et au niveau
des relations entre Etats (France-Turquie). Le point de discorde
de cette proposition se situe dans l'insertion d'un nouvel article
dans la loi du 29 juillet 1881 sur la liberte de la presse. Ce nouvel
article permet de penaliser la contestation de l'existence du genocide
armenien, autrement dit une repression de la negation de ce genocide,
quiconque s'y risquerait, sera soumis a une amende de 45 000 ~@
et une peine d'emprisonnement d'un an.
La ratification de cette proposition ne s'est faite ni dans la
douceur, ni a l'unanimite. La gauche senatoriale s'est dechiree sur
le positionnement a suivre lors du vote, le Ministre des affaires
etrangères et europeennes ne soutient pas la proposition. Autre
reproche, la nouvelle legislation intervient a seulement trois mois
des elections presidentielles et legislatives, ainsi les objectifs
electoralistes - et peut-etre le sabotage de la candidature de la
Turquie a l'entree dans l'Union Europeenne - apparaissent comme
des leitmotiv de l'urgence de la ratification. L'electorat armenien
representerait environ 500 000 personnes en France et la candidature
de la Turquie patine. En periode de campagne, l'interrogation ne
parait pas si denuee de sens.
Cependant le debat se situe egalement en dehors du champ politique,
il a notamment des implications dans le champ intellectuel. Les
"luttes" scientifiques autour des problematiques concernant les
(re-)constructions du passe et les incidences des lois dites
"memorielles" (terme qui ne fait pas consensus) agitent toujours
la communaute des specialistes (historiens, politistes). Dans
un article publie le 27 decembre 2011 dans le journal Le Monde :
"Lois memorielles : pour en finir avec ce sport legislatif purement
francais", Pierre Nora, historien et president de l'association
Liberte pour l'histoire, rappelait l'importance de s'eriger contre
l'ingerence des pouvoirs legislatif et judiciaire dans le domaine de
la recherche scientifique, car ce qui est en jeu c'est l'independance
meme de la recherche. Toutefois, l'ensemble de la communaute des
historiens ne s'inscrit pas dans cette trajectoire, Gerard Noiriel
et le Comite de vigilance face aux usages publics de l'histoire se
distinguent des positions de Liberte pour l'histoire. Divergence sur
le fond, G. Noiriel et le CVUH refutent l'idee de "lois memorielles
", divergence sur la forme, ils privilegient le combat civique
a l'imposition d'une opinion sous-couvert de la competence de
l'"historien". Le CVUH et ses membres sont davantage animes par la
denonciation du "politiquement correct" de certains de leurs collègues.
Avec les differentes contestations que peuvent, ici où la, soulever
la penalisation de la negation du genocide armenien, une interrogation
reste en suspens : quelle menace pèse sur l'autonomie de la recherche,
ces lois memorielles entraîneront-elle son musellement. Avec la
ratification de cette proposition de loi, nous assistons a un echec
cuisant des mobilisations pour l'independance de cette recherche,
qui ne demande qu'a etre epargnee de la prescription historique
From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress
Nonfiction.fr
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26 janvier 2012
France
Ce lundi 23 janvier, le Parlement francais vient d'enteriner la
proposition de loi deposee par la deputee (UMP) Valerie Boyer
(rapporteur du texte), visant a reprimer la negation de tous les
genocides reconnus par la France dont le genocide armenien de 1915.
L'Assemblee nationale avait d'ors et deja adopte la proposition le 22
decembre dernier. Après une onde de critiques de la part de personnages
publics francais et de menaces diplomatiques provenant de la Turquie,
le Senat ratifie la proposition par 127 voix pour et 86 voix contre.
Mais de quoi s'agit-il ? Cette proposition de loi qui a tant fait
debat ces derniers temps ne constitue pas une nouveaute. Deja en
2001, les parlementaires francais ont integre dans la legislation,
la reconnaissance du genocide armenien perpetre en 1915 par
l'Empire Ottoman. Cette première etape fut secondee par le depôt
d'une proposition de loi a l'Assemblee nationale en 2006, visant la
penalisation de la negation de ce genocide. La ratification n'avait
jamais vu le jour jusqu'a ce lundi 23 janvier 2012. Il convient de
savoir quel est le contenu de cette proposition de loi qui a provoque
tant de remous a la fois sur les bancs des assemblees et au niveau
des relations entre Etats (France-Turquie). Le point de discorde
de cette proposition se situe dans l'insertion d'un nouvel article
dans la loi du 29 juillet 1881 sur la liberte de la presse. Ce nouvel
article permet de penaliser la contestation de l'existence du genocide
armenien, autrement dit une repression de la negation de ce genocide,
quiconque s'y risquerait, sera soumis a une amende de 45 000 ~@
et une peine d'emprisonnement d'un an.
La ratification de cette proposition ne s'est faite ni dans la
douceur, ni a l'unanimite. La gauche senatoriale s'est dechiree sur
le positionnement a suivre lors du vote, le Ministre des affaires
etrangères et europeennes ne soutient pas la proposition. Autre
reproche, la nouvelle legislation intervient a seulement trois mois
des elections presidentielles et legislatives, ainsi les objectifs
electoralistes - et peut-etre le sabotage de la candidature de la
Turquie a l'entree dans l'Union Europeenne - apparaissent comme
des leitmotiv de l'urgence de la ratification. L'electorat armenien
representerait environ 500 000 personnes en France et la candidature
de la Turquie patine. En periode de campagne, l'interrogation ne
parait pas si denuee de sens.
Cependant le debat se situe egalement en dehors du champ politique,
il a notamment des implications dans le champ intellectuel. Les
"luttes" scientifiques autour des problematiques concernant les
(re-)constructions du passe et les incidences des lois dites
"memorielles" (terme qui ne fait pas consensus) agitent toujours
la communaute des specialistes (historiens, politistes). Dans
un article publie le 27 decembre 2011 dans le journal Le Monde :
"Lois memorielles : pour en finir avec ce sport legislatif purement
francais", Pierre Nora, historien et president de l'association
Liberte pour l'histoire, rappelait l'importance de s'eriger contre
l'ingerence des pouvoirs legislatif et judiciaire dans le domaine de
la recherche scientifique, car ce qui est en jeu c'est l'independance
meme de la recherche. Toutefois, l'ensemble de la communaute des
historiens ne s'inscrit pas dans cette trajectoire, Gerard Noiriel
et le Comite de vigilance face aux usages publics de l'histoire se
distinguent des positions de Liberte pour l'histoire. Divergence sur
le fond, G. Noiriel et le CVUH refutent l'idee de "lois memorielles
", divergence sur la forme, ils privilegient le combat civique
a l'imposition d'une opinion sous-couvert de la competence de
l'"historien". Le CVUH et ses membres sont davantage animes par la
denonciation du "politiquement correct" de certains de leurs collègues.
Avec les differentes contestations que peuvent, ici où la, soulever
la penalisation de la negation du genocide armenien, une interrogation
reste en suspens : quelle menace pèse sur l'autonomie de la recherche,
ces lois memorielles entraîneront-elle son musellement. Avec la
ratification de cette proposition de loi, nous assistons a un echec
cuisant des mobilisations pour l'independance de cette recherche,
qui ne demande qu'a etre epargnee de la prescription historique
From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress