DU NEGATIONNISME, PERSPECTIVE D'UN PSYCHANALYSTE ?
Stephane
armenews.com
lundi 6 fevrier 2012
Par Jean-Jacques Moscovitz - Membre fondateur de Psychanalyse Actuelle
Cet expose a ete fait lors du " The International Conference
'Operation 1005 : Nazi Attempts to Erase the Evidence of Mass Murder
in Eastern and Central Europe, 1942-1944' June 15-16, 2009 Paris,
France" co-organise par le Centre des hautes etudes sur l'Holocauste,
le Musee Memorial de l'Holocauste des Etats-Unis, Washington, D.C. ;
l'association Yahad-In Unum dirige par el père P.Desbois ; le Collège
des Bernardins, Paris l'Universite Paris IV-Sorbonne ; avec le soutien
de la Commission europeenne.
Face a l'irresponsabilite du peche par ignorance jusqu'alors prônee par
Jesus aux Chretiens, aujourd'hui du fait de la rupture de l'Histoire,
c'est l'inverse qui est a soutenir : " De nos jours, inversement,
enonce Gunther Anders, l'ignorance de ce que nous ne pouvons pas ne
pas savoir, l'ignorance est la faute elle-meme ".
Entendons : aujourd'hui, la responsabilite du sujet singulier face a
ce qu'il s'est passe est d'autant plus a mettre en evidence qu'elle
s'efface regulièrement. On veut l'effacer. Alors que Je est responsable
de son inconscient plus qu'avant. Car exiger de savoir ce que nous
avons " dans notre tète " est majeur.
C'est ainsi que Saint-Luc annonce, dit Gunther Anders, que " nous
ne savons pas ce que nous faisons ". Gunther Anders, lui, vise ici
la notion de refoulement au sens de Freud, en tant qu'ensemble des
processus symboliques de prise de conscience ou d'occultation : "
...le refoulement ne vise plus toute la verite d'aujourd'hui " . Car,
c'est mon propos, existe la necessite d'un autre operateur. Voila
pourquoi je propose la notion de forclusion construite, soit la
mise en ~\uvre d'un non-savoir voulu et ignore concernant l'acte,
le crime dans ses consequences actuelles. Et cela implique des lors
que la discipline psychanalytique en tant que pratique de parole,
est conduite a interroger son fondement, le refoulement, et tous les
processus de prise de conscience ou au contraire du refus de savoir.
Refus su certes mais aussi celui qui se veut non su .
Saluons ici la conduite au niveau collectif dont a fait preuve Vatican
II, en levant une telle occultation par un acte de repentance, en
particulier en France vis a vis de la complicite de l'Eglise dans
la Shoah. Voila le signe d'une prise de conscience europeenne de ce
qu'il s'est produit. Est-ce un vrai debut ?
Quant au psychanalyste, ici invite a donner son approche, disons que
dans l'intime de son ecoute et de ce qui le pousse a savoir, il a a
reperer les consequences de ce qu'i s'est passe au niveau de l'ensemble
des processus de symbolisation de la realite et de leurs avatars.
Gunther Anders, dans son approche du refoulement au sens de Freud,
montre comment se constitue l'ignorance, voulue et ignoree comme
telle, du cote du criminel : une telle ignorance voulue se produit,
selon lui, pendant, après et meme avant les actions de meurtres,
ce qui serait en quelque sorte leur condition prealable. Eichmann
n'etait pas criminel avant le crime, mais son crime pose la question :
a-t-il pu/voulu reconnaître au sein de son intime l'existence d'une
pensee de l'acte qu'il commettait ? C'est la la fonction de la "
non-pensee " avance Gunther Anders, pensee devenant alors strictement
technique, equivalente a une machine qui obeit aux ordres des lors
que le collectif, le politique promeut le genocide d'Etat.
L'occasion nous a ete donnee de nommer une telle non-pensee "
silenciation "[4]. Soit une deshumanisation de la parole.
A suivre cette hypothèse que j'adopte ici, cela signifie que dans
l'effectuation du crime dans l'extermination des juifs d'Europe,
le criminel construit en lui une deshumanisation de son rapport a la
realite, et cela deja avant le crime. Voila ce qui est different du
cas habituel où une fois le delit de crime commis, depuis son acte,
quelque chose change du cote de l'intime du criminel, de sa structure
psychique. La au contraire, se fabrique une sorte de non-pensee avant,
un non-changement de la perception de la realite après le crime. Et
ce serait deja le crime, sans que soit advenu du criminel. En tous
cas en tant que responsable dans le fait de le savoir. Coupable de
le commettre, il l'est infiniment plus a ne pas reconnaître qu'il a
construit en lui les conditions et de l'acte et de l'ignorer, disons
de le 'negationner' pour l'accomplir. Non pas tant qu'il s'agisse d'en
attendre l'aveu, soit la logique de le morale du droit qui humanise le
criminel, mais il n'y a pas la les conditions psychiques d'une parole
se sachant 'negationnante'. Forclusion construite, retranchement
voulu et ignore.
Apparaît la un point inherent a cette hypothèse, celui du changement
du statut de la mort : un meurtre de la mort . Dans une telle
effectuation, la mort devient un objet comme les autres : distribuable,
consommable, attribuable. Crime sans auteur en quelque sorte.
C'est dire que les negationnistes le sont avant le crime : les premiers
negationnistes sont les nazis eux-memes.
pour lire la suite cliquer sur le lien
https://sites.google.com/site/psychanalyseactuel/textes/du-negationnisme-perspective-d-un-psychanalyste
Stephane
armenews.com
lundi 6 fevrier 2012
Par Jean-Jacques Moscovitz - Membre fondateur de Psychanalyse Actuelle
Cet expose a ete fait lors du " The International Conference
'Operation 1005 : Nazi Attempts to Erase the Evidence of Mass Murder
in Eastern and Central Europe, 1942-1944' June 15-16, 2009 Paris,
France" co-organise par le Centre des hautes etudes sur l'Holocauste,
le Musee Memorial de l'Holocauste des Etats-Unis, Washington, D.C. ;
l'association Yahad-In Unum dirige par el père P.Desbois ; le Collège
des Bernardins, Paris l'Universite Paris IV-Sorbonne ; avec le soutien
de la Commission europeenne.
Face a l'irresponsabilite du peche par ignorance jusqu'alors prônee par
Jesus aux Chretiens, aujourd'hui du fait de la rupture de l'Histoire,
c'est l'inverse qui est a soutenir : " De nos jours, inversement,
enonce Gunther Anders, l'ignorance de ce que nous ne pouvons pas ne
pas savoir, l'ignorance est la faute elle-meme ".
Entendons : aujourd'hui, la responsabilite du sujet singulier face a
ce qu'il s'est passe est d'autant plus a mettre en evidence qu'elle
s'efface regulièrement. On veut l'effacer. Alors que Je est responsable
de son inconscient plus qu'avant. Car exiger de savoir ce que nous
avons " dans notre tète " est majeur.
C'est ainsi que Saint-Luc annonce, dit Gunther Anders, que " nous
ne savons pas ce que nous faisons ". Gunther Anders, lui, vise ici
la notion de refoulement au sens de Freud, en tant qu'ensemble des
processus symboliques de prise de conscience ou d'occultation : "
...le refoulement ne vise plus toute la verite d'aujourd'hui " . Car,
c'est mon propos, existe la necessite d'un autre operateur. Voila
pourquoi je propose la notion de forclusion construite, soit la
mise en ~\uvre d'un non-savoir voulu et ignore concernant l'acte,
le crime dans ses consequences actuelles. Et cela implique des lors
que la discipline psychanalytique en tant que pratique de parole,
est conduite a interroger son fondement, le refoulement, et tous les
processus de prise de conscience ou au contraire du refus de savoir.
Refus su certes mais aussi celui qui se veut non su .
Saluons ici la conduite au niveau collectif dont a fait preuve Vatican
II, en levant une telle occultation par un acte de repentance, en
particulier en France vis a vis de la complicite de l'Eglise dans
la Shoah. Voila le signe d'une prise de conscience europeenne de ce
qu'il s'est produit. Est-ce un vrai debut ?
Quant au psychanalyste, ici invite a donner son approche, disons que
dans l'intime de son ecoute et de ce qui le pousse a savoir, il a a
reperer les consequences de ce qu'i s'est passe au niveau de l'ensemble
des processus de symbolisation de la realite et de leurs avatars.
Gunther Anders, dans son approche du refoulement au sens de Freud,
montre comment se constitue l'ignorance, voulue et ignoree comme
telle, du cote du criminel : une telle ignorance voulue se produit,
selon lui, pendant, après et meme avant les actions de meurtres,
ce qui serait en quelque sorte leur condition prealable. Eichmann
n'etait pas criminel avant le crime, mais son crime pose la question :
a-t-il pu/voulu reconnaître au sein de son intime l'existence d'une
pensee de l'acte qu'il commettait ? C'est la la fonction de la "
non-pensee " avance Gunther Anders, pensee devenant alors strictement
technique, equivalente a une machine qui obeit aux ordres des lors
que le collectif, le politique promeut le genocide d'Etat.
L'occasion nous a ete donnee de nommer une telle non-pensee "
silenciation "[4]. Soit une deshumanisation de la parole.
A suivre cette hypothèse que j'adopte ici, cela signifie que dans
l'effectuation du crime dans l'extermination des juifs d'Europe,
le criminel construit en lui une deshumanisation de son rapport a la
realite, et cela deja avant le crime. Voila ce qui est different du
cas habituel où une fois le delit de crime commis, depuis son acte,
quelque chose change du cote de l'intime du criminel, de sa structure
psychique. La au contraire, se fabrique une sorte de non-pensee avant,
un non-changement de la perception de la realite après le crime. Et
ce serait deja le crime, sans que soit advenu du criminel. En tous
cas en tant que responsable dans le fait de le savoir. Coupable de
le commettre, il l'est infiniment plus a ne pas reconnaître qu'il a
construit en lui les conditions et de l'acte et de l'ignorer, disons
de le 'negationner' pour l'accomplir. Non pas tant qu'il s'agisse d'en
attendre l'aveu, soit la logique de le morale du droit qui humanise le
criminel, mais il n'y a pas la les conditions psychiques d'une parole
se sachant 'negationnante'. Forclusion construite, retranchement
voulu et ignore.
Apparaît la un point inherent a cette hypothèse, celui du changement
du statut de la mort : un meurtre de la mort . Dans une telle
effectuation, la mort devient un objet comme les autres : distribuable,
consommable, attribuable. Crime sans auteur en quelque sorte.
C'est dire que les negationnistes le sont avant le crime : les premiers
negationnistes sont les nazis eux-memes.
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