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Oui, Les Lois Memorielles

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    OUI, LES LOIS MEMORIELLES

    Le Monde
    4 janvier 2012 mercredi
    France

    Dans les principaux quotidiens, on assiste a un deferlement de
    points de vue hostiles aux lois memorielles et a la penalisation
    des negationnismes auxquels elles font barrage. Claude Lanzmann a eu
    raison recemment de denoncer l'offensive plus ou moins dissimulee au
    sein de l'education nationale contre l'usage du mot " Shoah " pour
    designer specifiquement l'extermination systematique des juifs. Pierre
    Nora, president de l'association Liberte pour l'Histoire, se devoile
    (Le Monde du 28 decembre 2011): " Tous les historiens serieux sont
    reticents a utiliser le mot genocide, lui preferant selon les cas
    "aneantissement", "extermination", "crime de masse" "... Et certains
    " points de detail ".

    Les lois memorielles ne font pourtant peser aucune menace sur la
    recherche historique : j'en ai fait l'experience, puisque j'ai ramene
    sans problème aucun le bilan etabli par le ministère des victimes de
    guerre des juifs deportes de France de plus de cent mille deportes
    raciaux a soixante-quinze mille. Si la loi Gayssot n'avait pas ete
    adoptee, on assisterait depuis vingt ans a une avalanche d'articles
    et d'ouvrages niant la Shoah, alors que cette loi, arme contre
    l'antisemitisme, a musele l'historien Robert Faurisson et ses emules,
    sauf sur Internet où les opinions exprimees en ce sens n'ont pas a
    etre plus prises en consideration que les lettres anonymes.

    Concernant la loi qui sanctionne penalement la negation des
    genocides contemporains et, en particulier, celui des Armeniens,
    le principal argument des opposants a cette loi est que la France
    n'est pas concernee par ce genocide. C'est oublier que lorsqu'il a
    ete perpetre, la France etait en guerre contre l'Empire ottoman et
    qu'elle a condamne les terribles massacres visant a l'extermination
    systematique des Armeniens.

    La France, a l'epoque, reclamait deja des sanctions contre les auteurs
    turcs et leurs complices allemands de cette abomination. La France
    ouvrait ses portes aux rescapes et facilitait leur immigration. Les
    descendants de ces survivants sont confrontes en permanence a un
    negationnisme d'Etat. S'imagine-t-on quelle aurait ete la reaction
    des juifs si l'Allemagne avait adopte un pareil comportement ? Ceux
    qui, en France, condamnent cette nouvelle loi au nom de la liberte
    de l'histoire, ne veulent pas savoir qu'en Turquie ceux qui luttent
    pour la reconnaissance de ce genocide, Armeniens ou Turcs, risquent
    leur liberte et leur vie et parfois les perdent.

    Morale politique

    Militant du projet Aladin qui s'oppose au negationnisme en terre
    d'islam, je reconnais l'intervention en faveur de juifs turcs vivant en
    France de consuls turcs qui sont alles a l'encontre de la politique
    restrictive et hostile de la Turquie envers les juifs pendant la
    seconde guerre mondiale. La recherche de la verite historique m'a
    engage depuis longtemps au côte de ceux qui reclament de la Turquie
    une veritable confrontation avec son passe.

    Quant a notre Parlement, il ne s'arroge pas le droit de dire l'histoire
    ; il a toujours pose des bornes de morale politique, ne serait-ce
    qu'en commemorant par des jours feries la Revolution du 14-Juillet,
    la victoire du 11-Novembre, la chute du nazisme le 8-Mai.

    Il ne s'agit pas de regenter l'histoire mais, a la suite d'evenements
    exceptionnellement tragiques et a partir du travail des historiens
    serieux, d'indiquer aux citoyens la route a suivre dans l'histoire
    en tenant compte de ce qui est juste et de ce qui ne l'est pas.

    Le genocide des Armeniens representait un acte de barbarie reflechi
    et d'une ampleur plus grande que le massacre de Chios (perpetre par
    les Ottomans contre la population grecque en avril 1822), qui avait
    indigne l'Europe au XIXe siècle. Si ce genocide avait ete sanctionne
    internationalement comme la France le souhaitait alors, la Shoah
    n'aurait probablement pas eu lieu.

    Si la negation des genocides contemporains n'etait pas sanctionnee,
    en application de la decision-cadre de l'Union europeenne du
    28 novembre 2008, cette lacune handicaperait moralement l'espace
    politique europeen, qui repose sur l'opposition aux nationalismes
    chauvins, a tous les totalitarismes et aux paroxysmes de violence
    qu'ils entraînent necessairement.

    Serge Klarsfeld

    President de l'Association des fils et filles des juifs deportes
    de France



    From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress
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