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Alain Finkielkraut reprend Nora sur les « oublis » de certains intel

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    FRANCE CULTURE
    Alain Finkielkraut reprend Nora sur les « oublis » de certains intellectuels


    Alain Finkielkraut recevait de samedi 14 janvier Pierre Nora dans
    l'émission « Répliques » sur France Culture, sur le sujet « Mémoire et
    Histoire ».
    L'émission peut être réécoutée pendant 8 jours avec le lien suivant :
    http://www.franceculture.fr/emission-repliques-memoire-et-histoire-2012-01-14
    Synthèse et commentaires :
    Environ une vingtaine de minutes ont été consacrées à la loi
    pénalisant la contestation et la minimisation grossière des génocides
    reconnus par la loi française.
    En résumé, trois éléments nouveaux dans la dialectique développée par
    Pierre Nora :
    - une « innovation » pseudo historique pour le moins douteuse : «
    génocide au sens large », en pratique les massacres, opposé à «
    génocide au sens étroit » qui comporterait la notion d'intention, et
    qu'il dénie au cas arménien : en pratique, rejoignant en cela Jean
    Daniel, une négation pure et simple du caractère génocidaire du crime.
    - la « commission d'historiens » qui se transforme en un pompeux «
    tribunal international d'historiens » : curieuse notion pour quelqu'un
    affirme militer pour une séparation entre l'histoire et la loi, voici
    les historiens invités à être juges.
    - une reconnaissance du négationnisme de la Turquie, et une
    intéressante réflexion sur la différence entre l'Allemagne et la
    Turquie.
    Outre un rappel constant et sans la moindre concession de la vérité
    historique du génocide arménien, particulièrement précieux dans le
    contexte actuel, Alain Finkelkraut s'est livré pour sa part à une
    brillante démonstration sur les régressions et les compromissions d'un
    certain milieu intellectuel français vis-à-vis de la Turquie.
    Principaux points de l'entretien
    Alain Finkelkraut a ouvert la discussion en questionnant l'indignation
    de Pierre Nora. « Pourquoi cette indignation face à un Etat qui
    affiche son dédain des vérités factuelles et qui ne reconnaît toujours
    pas le génocide arménien. N'est-ce pas défendre conjointement la
    mémoire d'une communauté et le travail historique que de réprimer le
    négationnisme ? » a interrogé Alain Finkelkraut .
    * Pierre Nora a développé plusieurs thématiques
    « Habitude française »
    Pierre Nora est revenu sur la tribune publiée dans le Monde en
    décembre dernier, s'élevant contre l'habitude qu'a pris la France de
    dire l'histoire par la loi, et rappelant son opposition à toute
    ingérence législative.
    « Loi Gayssot : j'étais contre mais puisqu'elle là gardons-la ».
    Il a indiqué qu'il était hostile à la loi Gayssot, car il pensait que
    sanctuariser la mémoire d'une partie de la population ne pouvait
    qu'amener toute une série de revendications mémorielles., évoquant les
    Vendéens, la Saint Barthélémy, ou les Croisades. Toutefois, il a
    indiqué que puisque la loi Gayssot était là, il était favorable à ce
    qu'on la garde.
    La transposition de la directive européenne lui paraît fallacieuse,
    car l'objectif initial de cette décision était de rendre la loi
    Gayssot européenne, et non d'introduire la contestation d'autres
    génocides dans le droit national. D'après lui, la loi Gayssot n'était
    pas nécessaire pour lutter contre la contestation de la Shoah.


    « Probablement pas d'intention d'extermination »
    Concernant les événements historiques eux-mêmes, Pierre Nora a affirmé
    « qu'au sens large », il y a eu génocide, mais « au sens étroit »
    (sic) non, car il n'y a probablement pas eu d'intention
    d'extermination. Le mot génocide est un mot désormais piégé, il est
    devenu un mot presque magique.


    « Le négationnisme d'Etat de la Turquie est constitutif de son
    identité » Pierre Nora s'est également exprimé sur le négationnisme de
    la Turquie, affirmant qu'il est évident qu'il y a un négationnisme
    d'Etat de la Turquie. La grande différence entre l'Allemagne et la
    Turquie est que l'Allemagne a été vaincue alors que la Turquie est
    finalement sortie vainqueur, et elle a incorporée la négation de
    génocide dans son identité fondatrice. Quelle aurait été l'attitude de
    l'Allemagne vis-à-vis de la reconnaissance de la Shoah si elle n'était
    pas sortie de la guerre en vaincue, s'est-il interrogé. Il a dit
    comprendre que la mémoire du génocide soit constitutive de l'identité
    arménienne, pour observer ensuite qu'il y a maintenant deux blocs
    identitaires qui s'affrontent, et que la loi Boyer ne fait que
    renforcer cet affrontement.


    « Tribunal international d'historiens »
    La solution selon lui serait la mise en place d'un « tribunal
    international d'historiens » dont la Turquie accepterait par avance la
    décision.
    Il a observé que des pas ont été faits sur ce sujet, notant au passage
    les dizaines d'opposants turcs emprisonnés à l'heure actuelle, et
    mentionnant les manifestations organisées à Istanbul le 24 avril.
    Les progrès enregistrés de la société civile vont être stoppés net
    avec la loi française, a-t-il estimé.


    Considérations politiques
    Cette loi est revenue au Sénat car il y a une majorité de gauche au
    Sénat et que Sarkozy a pris cette initiative pour couper l'herbe sous
    le pied de la gauche.
    Par ailleurs, tout cela se passait il y a un siècle. Avons-nous
    intérêt politiquement à nous aliéner la Turquie au nom de la vérité
    historique, s'est-il interrogé.


    Alain Finkelkraut pour sa part a souligné son opposition à cette loi
    qui lui paraît indéfendable en raison de sa formulation « minimisation
    outrancière », et non seulement la contestation, formulation qui fait
    peser de son point de vue une épée de Damoclès sur la recherche
    historique.
    L'essentiel de ses interventions toutefois a porté sur la nécessaire
    reconnaissance du génocide, sur les effets pernicieux du négationnisme
    turc en France, et sur l'imposture, à ses yeux, incarnée par l'AKP.


    « Faire respecter la frontière entre opinion et vérité des faits » En
    contradiction avec Pierre Nora, il a souligné qu'on pouvait exiger de
    la loi qu'elle permettre de respecter la vérité des faits, citant les
    réflexions de Hannah Arendt. Avec le négationnisme, la frontière entre
    opinion et vérité des faits est franchie, et c'est à la loi de
    garantir cette frontière.
    Concernant la loi Gayssot, il a indiqué qu'initialement il était
    plutôt contre, mais que Maître Zaoui (qui plaida notamment au procès
    Barbie) lui avait expliqué que cette loi était nécessaire pour lutter
    contre le négationnisme.
    Les Juifs, a-t-il souligné, sont demandeurs d'histoire et construisent
    leur mémoire sur l'histoire, et les Arméniens aussi.


    « Régression dans le monde intellectuel sous la pression turque »
    Concernant le génocide arménien, il a rappelé qu'on savait beaucoup de
    choses, et que sous la pression turque il y a une régression dans le
    monde intellectuel. Tout se passe comme si on voulait tellement faire
    confianceà l'AKP, qu'on en vient à adopter subrepticement certaines de
    leurs positions.
    Il a notamment cité l'étude par André Mandelstam des télégrammes
    allemands envoyés pendant les massacres comme l'une des preuves à
    l'appui de l'intention exterminatrice. Nous savons qu'il y a eu
    intention d'extermination, mais comme on veut négocier avec la
    Turquie, alors on oublie l'intention d'extermination, a-t-il dénoncé.
    Les intellectuels français se devraient être plus lucides.


    « Le passé est à discrétion du pouvoir turc, qui en fait ce qu'il veut »
    Cette loi a le mérité politique de nous ouvrir les yeux sur
    l'imposture de l'AKP. La violence des réactions turques et les
    allégations de « génocide algérien » mettent en évidence le mépris de
    la vérité des faits : le passé est à discrétion du pouvoir, qui en
    fait ce qu'il veut. L'incapacité de la Turquie à se confronter à son
    passé, confrontation au passé qui est devenu constitutif de la
    civilisation européenne, démontre, au moins actuellement, la «
    non-européanité » de la Turquie politique d'aujourd'hui.


    Paul Hagiarian

    dimanche 15 janvier 2012,
    Ara ©armenews.com


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