ALEXIS GOVCIYAN : " AU NOM DES ARMENIENS DE FRANCE "
Jean Eckian
armenews.com
mardi 17 janvier 2012
Alexis Govciyan est le president du CCAF, Conseil de Coordination
des organisations Armeniennes de France et egalement le president
de l'UGAB-Europe (Union Generale Armenienne de Bienfaisance). Il
repond aux questions de la Newsletter du CRIF, notamment a propos du
recent vote, le 22 decembre 2011 par l'Assemblee nationale, d'une loi
penalisant la negation des genocides reconnus par la France dont,
bien entendu, celui des Armeniens. Il va sans dire que les propos
tenus par Monsieur Govciyan n'engagent aucunement le CRIF.
La France a reconnu le genocide des Armeniens en 2001. Pourquoi,
depuis de nombreuses annees, luttez-vous pour une loi de penalisation
? La reconnaissance ne suffisait-elle pas ?
La France a toujours ete a la pointe du combat pour la dignite,
les droits de l'homme et la lutte contre le negationnisme. Elle le
prouve encore une fois avec cette proposition de loi qui n'est que
la transposition d'une directive-cadre adoptee en 2008 par Bruxelles
alors sous presidence francaise de l'Union europeenne. Effectivement,
en 2001, la France a vote une loi reconnaissant le genocide
armenien de 1915. Une loi forte mais seulement declarative de
portee symbolique forte. Une loi connaissant la realite historique,
mais non-contraignante envers ceux qui font de la falsification de
l'Histoire leur fond de commerce abject. Or, nous devons faire face
a une veritable politique de negationnisme collectif, et croyez-moi,
nous n'en pouvons plus de subir de telles insultes a la memoire des
victimes et aussi a la dignite de leurs descendants. De nos jours,
de telles situations, des attaques revisionnistes et negationnistes
ne sont plus tolerables et ,dans l'espace public, la loi est
necessaire pour proteger les citoyens dans leur dignite, premier droit
fondamental. Aussi, avec ce texte vote en decembre 2011 et bientôt,
le 23 janvier prochain, j'espère, par le Senat, nous passerons de la
reconnaissance au respect de la dignite humaine. C'est pourquoi, nous
sommes extremement attentifs a l'evolution de la situation. Cela n'a
rien a voir avec l'Histoire, car elle a ete ecrite depuis longtemps
par les historiens et la loi de 2001 a deja reconnu le genocide. Bref,
l'Histoire a deja juge depuis 1915. Cela n'a rien a voir non plus
avec la liberte d'expression. Dans notre Republique, on n'a pas le
droit de diffuser du racisme, de l'antisemitisme, de la xenophobie
dans l'espace public. Fort heureusement car nous devons assurer les
conditions du vivre-ensemble, principe de base de notre Republique.
Desormais, on n'aura pas le droit dans l'espace public de diffuser
son negationnisme.
Le Senat examinera a son tour la loi proposee par la deputee des
Bouches-du-Rhône, Valerie Boyer et adoptee par l'Assemblee nationale.
Croyez-vous a son adoption par la " chambre haute " ?
Toutes les conditions sont a priori remplies pour que le texte soit
adopte par le Senat. Le consensus droite-gauche, l'implication du
chef de l'Etat, Nicolas Sarkozy et du candidat socialiste, Francois
Hollande, y compris l'investissement du gouvernement. La question
armenienne a la noblesse de rassembler droite, centre et gauche sur
le terrain de la defense des droits de l'homme et du respect de la
dignite humaine.
Certains pretendent que le depôt de cette loi repond a des
considerations electoralistes. Qu'en pensez-vous ?
Il faut arreter avec cette consideration... Il s'agit, au contraire de
depolitiser, de ne pas etre l'enjeu d'approches politiciennes. Comme
je vous l'ai dit, cette question est universelle et n'appartient pas
a un camp ou a un autre. Nous sommes donc dans un cadre politique
au sens etymologique du terme où il est question de la protection
de citoyens qui sont sans arret insultes. Par ailleurs, qu'est-ce
qui n'est pas electoral aujourd'hui ? Tout peut etre considere comme
electoraliste car la demande de politique est très forte et que l'on
attend beaucoup du Parlement et de ceux qui nous gouvernent. C'est
après tout la où la Republique et la democratie prennent tout leur
sens. Il faut donc se rejouir de cette forte activite parlementaire,
de ce respect des travaux du Parlement qui sait ce qu'il fait. La,
dans cette loi, il faut bien rappeler que le legislateur est dans sa
fonction : cadrer le debat, sans atteindre la liberte d'expression.
De nombreux historiens et commentateurs considèrent que ce n'est
pas au legislateur de dire l'Histoire mais aux chercheurs. Que leur
repondez-vous ?
Excusez-moi, mais c'est une ineptie. On n'est pas sur le terrain de
l'Histoire dans cette affaire, on est sur le terrain du Droit. Par
ailleurs, les parlementaires votent a juste titre des textes pour
interdire le clonage en France, par exemple. Et pourtant ils ne sont
pas scientifiques. Et pourtant ils ne sont pas competents si l'on
reprend l'argumentaire approximatif des partisans hostiles a la loi
sur la penalisation des genocides. Au nom d'un principe de precaution
morale, les legislateurs, de droite comme de gauche, decident ce qui
est intolerable dans l'espace public. C'est aussi simple que cela. En
outre, c'est au Parlement de veiller au respect de la dignite humaine.
Et comme le genocide constitue le crime des crimes contre l'humanite,
il revient aux Etats, garants de la securite de l'humanite de
denoncer la où ils le peuvent les menaces a son encontre. D'hier
comme de demain.
Jean Eckian
armenews.com
mardi 17 janvier 2012
Alexis Govciyan est le president du CCAF, Conseil de Coordination
des organisations Armeniennes de France et egalement le president
de l'UGAB-Europe (Union Generale Armenienne de Bienfaisance). Il
repond aux questions de la Newsletter du CRIF, notamment a propos du
recent vote, le 22 decembre 2011 par l'Assemblee nationale, d'une loi
penalisant la negation des genocides reconnus par la France dont,
bien entendu, celui des Armeniens. Il va sans dire que les propos
tenus par Monsieur Govciyan n'engagent aucunement le CRIF.
La France a reconnu le genocide des Armeniens en 2001. Pourquoi,
depuis de nombreuses annees, luttez-vous pour une loi de penalisation
? La reconnaissance ne suffisait-elle pas ?
La France a toujours ete a la pointe du combat pour la dignite,
les droits de l'homme et la lutte contre le negationnisme. Elle le
prouve encore une fois avec cette proposition de loi qui n'est que
la transposition d'une directive-cadre adoptee en 2008 par Bruxelles
alors sous presidence francaise de l'Union europeenne. Effectivement,
en 2001, la France a vote une loi reconnaissant le genocide
armenien de 1915. Une loi forte mais seulement declarative de
portee symbolique forte. Une loi connaissant la realite historique,
mais non-contraignante envers ceux qui font de la falsification de
l'Histoire leur fond de commerce abject. Or, nous devons faire face
a une veritable politique de negationnisme collectif, et croyez-moi,
nous n'en pouvons plus de subir de telles insultes a la memoire des
victimes et aussi a la dignite de leurs descendants. De nos jours,
de telles situations, des attaques revisionnistes et negationnistes
ne sont plus tolerables et ,dans l'espace public, la loi est
necessaire pour proteger les citoyens dans leur dignite, premier droit
fondamental. Aussi, avec ce texte vote en decembre 2011 et bientôt,
le 23 janvier prochain, j'espère, par le Senat, nous passerons de la
reconnaissance au respect de la dignite humaine. C'est pourquoi, nous
sommes extremement attentifs a l'evolution de la situation. Cela n'a
rien a voir avec l'Histoire, car elle a ete ecrite depuis longtemps
par les historiens et la loi de 2001 a deja reconnu le genocide. Bref,
l'Histoire a deja juge depuis 1915. Cela n'a rien a voir non plus
avec la liberte d'expression. Dans notre Republique, on n'a pas le
droit de diffuser du racisme, de l'antisemitisme, de la xenophobie
dans l'espace public. Fort heureusement car nous devons assurer les
conditions du vivre-ensemble, principe de base de notre Republique.
Desormais, on n'aura pas le droit dans l'espace public de diffuser
son negationnisme.
Le Senat examinera a son tour la loi proposee par la deputee des
Bouches-du-Rhône, Valerie Boyer et adoptee par l'Assemblee nationale.
Croyez-vous a son adoption par la " chambre haute " ?
Toutes les conditions sont a priori remplies pour que le texte soit
adopte par le Senat. Le consensus droite-gauche, l'implication du
chef de l'Etat, Nicolas Sarkozy et du candidat socialiste, Francois
Hollande, y compris l'investissement du gouvernement. La question
armenienne a la noblesse de rassembler droite, centre et gauche sur
le terrain de la defense des droits de l'homme et du respect de la
dignite humaine.
Certains pretendent que le depôt de cette loi repond a des
considerations electoralistes. Qu'en pensez-vous ?
Il faut arreter avec cette consideration... Il s'agit, au contraire de
depolitiser, de ne pas etre l'enjeu d'approches politiciennes. Comme
je vous l'ai dit, cette question est universelle et n'appartient pas
a un camp ou a un autre. Nous sommes donc dans un cadre politique
au sens etymologique du terme où il est question de la protection
de citoyens qui sont sans arret insultes. Par ailleurs, qu'est-ce
qui n'est pas electoral aujourd'hui ? Tout peut etre considere comme
electoraliste car la demande de politique est très forte et que l'on
attend beaucoup du Parlement et de ceux qui nous gouvernent. C'est
après tout la où la Republique et la democratie prennent tout leur
sens. Il faut donc se rejouir de cette forte activite parlementaire,
de ce respect des travaux du Parlement qui sait ce qu'il fait. La,
dans cette loi, il faut bien rappeler que le legislateur est dans sa
fonction : cadrer le debat, sans atteindre la liberte d'expression.
De nombreux historiens et commentateurs considèrent que ce n'est
pas au legislateur de dire l'Histoire mais aux chercheurs. Que leur
repondez-vous ?
Excusez-moi, mais c'est une ineptie. On n'est pas sur le terrain de
l'Histoire dans cette affaire, on est sur le terrain du Droit. Par
ailleurs, les parlementaires votent a juste titre des textes pour
interdire le clonage en France, par exemple. Et pourtant ils ne sont
pas scientifiques. Et pourtant ils ne sont pas competents si l'on
reprend l'argumentaire approximatif des partisans hostiles a la loi
sur la penalisation des genocides. Au nom d'un principe de precaution
morale, les legislateurs, de droite comme de gauche, decident ce qui
est intolerable dans l'espace public. C'est aussi simple que cela. En
outre, c'est au Parlement de veiller au respect de la dignite humaine.
Et comme le genocide constitue le crime des crimes contre l'humanite,
il revient aux Etats, garants de la securite de l'humanite de
denoncer la où ils le peuvent les menaces a son encontre. D'hier
comme de demain.