REVUE DE PRESSE
« Sans le génocide arménien, la Shoah n'aurait pas eu lieu »
InterviewSerge Klarsfeld, avocat, coauteur de l'appel « Respect pour
les victimes du génocide arménien », est favorable au vote de la loi :
Par ELSA SABADO
L'avocat Serge Klarsfeld est coauteur de l'appel « Respect pour les
victimes du génocide arménien », avec Charles Aznavour, Robert
Guédiguian, Bernard-Henri Lévy, Michel Onfray ou encore Erol Ozkoray.
Pourquoi cet appel ?
Une loi reconnaissant le génocide arménien existe depuis dix ans. Mais
si le déni de la Shoah est puni, celui du génocide arménien ne l'est
pas. Je défends donc ce rééquilibrage, d'autant que ce négationnisme
n'est pas le fait d'un individu, d'un mouvement, mais d'un Etat, la
Turquie. La France est, depuis mai 1915, à l'avant-garde du combat
contre ce génocide. C'est à ce moment qu'est née l'idée d'un tribunal
pénal international pour juger ce crime de « lèse-humanité ». Le
tribunal de Nuremberg s'en est inspiré. Hitler ordonnait à ses troupes
d'être impitoyables car « personne ne se souvient du massacre arménien
». Mon intime conviction est que, sans ce génocide, la Shoah n'aurait
pas eu lieu. Il a fallu que les Etats-Unis, la France et le
Royaume-Uni rééduquent l'Allemagne pour qu'elle reconnaisse la Shoah.
Il y a plus de chances de faire changer les choses de l'extérieur que
de l'intérieur. A l'intérieur, ceux qui disent la vérité risquent leur
vie et, en France, on n'aurait pas le droit de punir les mensonges sur
le génocide ?
Certains critiquent des visées purement électoralistes destinées à
rallier les 500 000 Arméniens vivant en France...
Ce qui est important, c'est l'unanimité politique autour de cette loi.
Les Arméniens ne s'y trompent pas : ils voient bien que le clivage
traverse les partis, car certains craignent de froisser les Turcs, qui
sont des partenaires commerciaux importants.
Pourtant, la commission des lois du Sénat a rejeté la proposition...
La commission des lois est sensible à l'influence de son rapporteur,
Robert Badinter, mais ne reflète pas l'équilibre de la Chambre. Nous
avons le droit d'être en désaccord avec M. Badinter, nous l'avons déjà
été à propos du discours du Vel d'Hiv. Il a promulgué une loi
[destinée à faciliter la libération des détenus gés, ndlr] pour
libérer Papon et je ne l'ai pas vu comme avocat contre Bousquet ou
Touvier. Par ailleurs, pendant que les socialistes votaient contre la
proposition à la commission des lois du Sénat, la majorité socialiste
tenait une réunion appelant à voter pour. Du reste, Jean-Pierre Bel,
le président du Sénat (PS) va voter en faveur de la loi.
Des historiens tels que Pierre Nora se positionnent contre cette loi,
au nom du fait que le Parlement n'a pas à donner de vision de
l'histoire. Qu'en dites-vous ?
Le lobby des historiens refuse que d'autres qu'eux-mêmes fassent
l'histoire. Pour ma part, je pense qu'il est positif que le Parlement
dise l'histoire, que c'est son rôle. Je trouve qu'il le fait rarement,
mais bien. D'ailleurs, la France commémore le 14 Juillet ou le 8 Mai
par des lois mémorielles. Le Parlement doit donner des repères aux
Français quant à la morale politique. Rien n'empêche les historiens de
faire un travail sérieux. Les juges ont réclamé ces lois. Désormais,
ils ne devront plus juger en fonction de l'histoire, mais en fonction
d'une loi.
http://www.liberation.fr/societe/01012385079-sans-le-genocide-armenien-la-shoah-n-aurait-pas-eu-lieu
samedi 28 janvier 2012,
Stéphane ©armenews.com
From: A. Papazian
« Sans le génocide arménien, la Shoah n'aurait pas eu lieu »
InterviewSerge Klarsfeld, avocat, coauteur de l'appel « Respect pour
les victimes du génocide arménien », est favorable au vote de la loi :
Par ELSA SABADO
L'avocat Serge Klarsfeld est coauteur de l'appel « Respect pour les
victimes du génocide arménien », avec Charles Aznavour, Robert
Guédiguian, Bernard-Henri Lévy, Michel Onfray ou encore Erol Ozkoray.
Pourquoi cet appel ?
Une loi reconnaissant le génocide arménien existe depuis dix ans. Mais
si le déni de la Shoah est puni, celui du génocide arménien ne l'est
pas. Je défends donc ce rééquilibrage, d'autant que ce négationnisme
n'est pas le fait d'un individu, d'un mouvement, mais d'un Etat, la
Turquie. La France est, depuis mai 1915, à l'avant-garde du combat
contre ce génocide. C'est à ce moment qu'est née l'idée d'un tribunal
pénal international pour juger ce crime de « lèse-humanité ». Le
tribunal de Nuremberg s'en est inspiré. Hitler ordonnait à ses troupes
d'être impitoyables car « personne ne se souvient du massacre arménien
». Mon intime conviction est que, sans ce génocide, la Shoah n'aurait
pas eu lieu. Il a fallu que les Etats-Unis, la France et le
Royaume-Uni rééduquent l'Allemagne pour qu'elle reconnaisse la Shoah.
Il y a plus de chances de faire changer les choses de l'extérieur que
de l'intérieur. A l'intérieur, ceux qui disent la vérité risquent leur
vie et, en France, on n'aurait pas le droit de punir les mensonges sur
le génocide ?
Certains critiquent des visées purement électoralistes destinées à
rallier les 500 000 Arméniens vivant en France...
Ce qui est important, c'est l'unanimité politique autour de cette loi.
Les Arméniens ne s'y trompent pas : ils voient bien que le clivage
traverse les partis, car certains craignent de froisser les Turcs, qui
sont des partenaires commerciaux importants.
Pourtant, la commission des lois du Sénat a rejeté la proposition...
La commission des lois est sensible à l'influence de son rapporteur,
Robert Badinter, mais ne reflète pas l'équilibre de la Chambre. Nous
avons le droit d'être en désaccord avec M. Badinter, nous l'avons déjà
été à propos du discours du Vel d'Hiv. Il a promulgué une loi
[destinée à faciliter la libération des détenus gés, ndlr] pour
libérer Papon et je ne l'ai pas vu comme avocat contre Bousquet ou
Touvier. Par ailleurs, pendant que les socialistes votaient contre la
proposition à la commission des lois du Sénat, la majorité socialiste
tenait une réunion appelant à voter pour. Du reste, Jean-Pierre Bel,
le président du Sénat (PS) va voter en faveur de la loi.
Des historiens tels que Pierre Nora se positionnent contre cette loi,
au nom du fait que le Parlement n'a pas à donner de vision de
l'histoire. Qu'en dites-vous ?
Le lobby des historiens refuse que d'autres qu'eux-mêmes fassent
l'histoire. Pour ma part, je pense qu'il est positif que le Parlement
dise l'histoire, que c'est son rôle. Je trouve qu'il le fait rarement,
mais bien. D'ailleurs, la France commémore le 14 Juillet ou le 8 Mai
par des lois mémorielles. Le Parlement doit donner des repères aux
Français quant à la morale politique. Rien n'empêche les historiens de
faire un travail sérieux. Les juges ont réclamé ces lois. Désormais,
ils ne devront plus juger en fonction de l'histoire, mais en fonction
d'une loi.
http://www.liberation.fr/societe/01012385079-sans-le-genocide-armenien-la-shoah-n-aurait-pas-eu-lieu
samedi 28 janvier 2012,
Stéphane ©armenews.com
From: A. Papazian