MONSIEUR BADINTER, DEFENDEZ LA JUSTICE !
Jean Eckian
armenews.com
mardi 31 janvier 2012
loi Contre la Negation du Genocide des Armeniens
par Jean-Claude Parcot, professeur d'histoire, Chevalier de la legion
d'honneur, adjoint au maire du Vème arrondissement de Lyon
La position de Robert Badinter exprimee dans sa tribune " Le Parlement
n'est pas un tribunal " (Le Monde du 16 janvier) au sujet de la
loi votee par l'Assemblee Nationale le 22 decembre 2011 portant
sur la lutte contre le racisme et repression de la contestation de
l'existence des genocides reconnus par la loi, est très surprenante a
plus d'un titre. La facon dont il interprète les evenements historiques
concernant le genocide des Armeniens est erronee et partisane.
La difference faite entre la loi Gayssot et celle du 22 decembre 2011
est fort contestable, comme est contestable de ramener le Parlement
a un tribunal. De plus, les contorsions pour dire que cette loi est
excessive et anticonstitutionnelle mettent en doute sa bonne foi
et de ce fait le rend complice des negationnistes turcs. Il est a
esperer que les Senateurs ne seront pas abuses par ses propos et
qu'ils voteront cette loi.
Les contextes historiques dans lesquels ont ete perpetres les deux
genocides, celui en Turquie des Armeniens de confession chretienne et
celui en Europe des Europeens de confession juive, sont naturellement
differents. Mais dire qu'il n'y a rien de comparable est une
interpretation fallacieuse de l'Histoire. En effet au cours de la
deuxième moitie du XIXe siècle, dans le sillage des divers mouvements
des Balkans, les Armeniens demandent des reformes, las des brimades
qu'ils subissent.
Au Congrès de Berlin en 1878, les grandes puissances, la France,
la Grande-Bretagne et la Russie, s'engagent a faire appliquer a
l'Empire ottoman, dont le sultan est Abdulhamid, les reformes de
la nouvelle Constitution qui accorde les memes droits a tous les
sujets de l'Empire, y compris aux minorites chretiennes. Le sultan
s'y refuse et ordonne, entre 1894 et 1896, le massacre des Armeniens
(300 000 victimes). Et il a fallu, le 22 août 1896, qu'un commando du
Parti Dachnag occupât le siège de la banque ottomane, prît en otage
140 personnes, pour que le sultan, menace d'une intervention de la
France, de la Grande-Bretagne et de la Russie, mît fin aux massacres.
A Paris naît alors un mouvement armenophile compose d'ecrivains,
d'artistes et d'hommes politiques : Anatole France, Charles Peguy,
Romain Roland, Frederic Mistral, Jean Jaurès, Georges Clemenceau,
Marc Sangnier... Durant la Première Guerre Mondiale, la France,
la Grande-Bretagne, la Russie etant en guerre contre l'Allemagne,
l'Autriche-Hongrie, l'Italie (jusqu'en 1915) et la Turquie, les
" Jeunes Turcs " au pouvoir trouvèrent les conditions ideales pour
appliquer les plans de deportation et d'extermination de la population
armenienne, en vue de realiser leurs objectifs : le panturquisme et
le panislamisme.
Et c'est ainsi que purent etre tues un million et demi d'Armeniens
en Turquie entre 1915 et 1918, ce qui constitue le premier genocide
de l'histoire du XXe siècle.
En 1920, avec ses allies, la France participa a l'elaboration du traite
de Sèvres, qui etablissait l'existence, sur la partie orientale de la
Turquie, d'un Etat armenien et d'un Kurdistan autonome, puis en 1923,
a celui de Lausanne, qui annula les accords de Sèvres, reduisant le
territoire armenien a une peau de chagrin et supprimant l'autonomie du
Kurdistan. Parallèlement la France abandonna a la Turquie, en 1921,
la Cilicie et plus tard, en 1939, la region d'Alexandrette, qu'elle
avait obtenues auparavant comme mandat au meme titre que le Liban et
la Syrie.
Les Francais, qui ont effectivement ete " ni victime, ni bourreau "
lors de la tragedie armenienne, mais protecteurs des Armeniens dans
l'Empire ottoman, ont ete cependant presents a Sèvres et a Lausanne
dans le cadre des relations internationales. Il va donc de soi que
les propos de Robert Badinter, " s'agissant du genocide des Armeniens
qui n'a fait l'objet d'aucune decision emanant d'une juridiction
internationale ou nationale dont l'autorite s'imposerait a la France
", ne tiennent pas au regard de l'Histoire.
La loi votee par l'Assemblee Nationale elargit, d'une part les
dispositions legislatives de la loi Gayssot de 1990 puisqu'elle
punit ceux qui " contestent ou minimisent de facon outrancière un
genocide reconnu comme tel par la loi francaise " et, d'autre part,
elle entre dans le cadre d'une decision de l'Union europeenne de
2008. La loi Gayssot, qui concerne le genocide des citoyens europeens
de confession juive, ayant ete votee en son temps n'a pas pose de
problème particulier de constitutionnalite. Je ne vois pas pourquoi
la loi votee par l'Assemblee Nationale, le 22 decembre 2011, sur la
proposition du depute Valerie Boyer, en poserait et ne pourrait pas
etre adoptee par le Senat puisqu'elle presente les memes garanties.
A ce sujet, M. Badinter fait reference au procès de Nuremberg. Le
procès des responsables du genocide des Armeniens a eu lieu en 1919 a
Constantinople, organise par les autorites liberales turques sous le
contrôle des allies et celui des nazis, a Nuremberg, par un tribunal
militaire international. Si on recuse le premier sous pretexte qu'il
se tint sous la coupe des vainqueurs, que dire alors de Nuremberg
où pas un Allemand ne siegeait au tribunal. Les criminels nazis ont
ete condamnes a mort ou a la prison et leur jugement n'est pas remis
en cause.
Quant aux criminels turcs condamnes en 1919 a mort par contumace,
puisqu'ils s'etaient sauves de Turquie, ont ete rehabilites par la
Republique kemaliste qui, après leur mort, leur a edifie un mausolee a
Istanbul. Accepterait-on aujourd'hui a Berlin un mausolee a la gloire
d'Himmler ?
Le Parlement francais ne se constitue pas en tribunal de l'Histoire
mondiale en ayant vote la loi Gayssot et en s'appretant a voter la
loi Boyer. Les historiens peuvent dire l'histoire sans pour autant
avoir le monopole de l'objectivite. Ils ont le droit d'etre pour ou
contre les lois memorielles. En revanche, les elus de la Nation ont le
devoir d'elaborer, dans un projet politique, une orientation ethique
conforme a la Declaration universelle des Droits de l'Homme. C'est
le cas de la loi Boyer.
Quant au Conseil constitutionnel, il apparaît comme une institution
qui peut interpreter les lois en manipulant la jurisprudence,
alors que celle-ci a pour but normalement de rechercher l'esprit
qui a inspire les auteurs des lois, comme de determiner l'exacte
portee de l'application de leurs dispositions. M. Vincent
Coussirat-Coustère, agrege de droit public, dans Le Monde du 18
decembre 2012, explique parfaitement comment sortir du problème d'une
eventuelle inconstitutionnalite et de la question prioritaire de
constitutionnalite (QPC) que poserait la loi du 22 decembre 2011. Un
vrai labyrinthe duquel on ne peut sortir sans fil d'Ariane.
lire la suite ICI
autre article voir lien plus bas
From: Baghdasarian
Jean Eckian
armenews.com
mardi 31 janvier 2012
loi Contre la Negation du Genocide des Armeniens
par Jean-Claude Parcot, professeur d'histoire, Chevalier de la legion
d'honneur, adjoint au maire du Vème arrondissement de Lyon
La position de Robert Badinter exprimee dans sa tribune " Le Parlement
n'est pas un tribunal " (Le Monde du 16 janvier) au sujet de la
loi votee par l'Assemblee Nationale le 22 decembre 2011 portant
sur la lutte contre le racisme et repression de la contestation de
l'existence des genocides reconnus par la loi, est très surprenante a
plus d'un titre. La facon dont il interprète les evenements historiques
concernant le genocide des Armeniens est erronee et partisane.
La difference faite entre la loi Gayssot et celle du 22 decembre 2011
est fort contestable, comme est contestable de ramener le Parlement
a un tribunal. De plus, les contorsions pour dire que cette loi est
excessive et anticonstitutionnelle mettent en doute sa bonne foi
et de ce fait le rend complice des negationnistes turcs. Il est a
esperer que les Senateurs ne seront pas abuses par ses propos et
qu'ils voteront cette loi.
Les contextes historiques dans lesquels ont ete perpetres les deux
genocides, celui en Turquie des Armeniens de confession chretienne et
celui en Europe des Europeens de confession juive, sont naturellement
differents. Mais dire qu'il n'y a rien de comparable est une
interpretation fallacieuse de l'Histoire. En effet au cours de la
deuxième moitie du XIXe siècle, dans le sillage des divers mouvements
des Balkans, les Armeniens demandent des reformes, las des brimades
qu'ils subissent.
Au Congrès de Berlin en 1878, les grandes puissances, la France,
la Grande-Bretagne et la Russie, s'engagent a faire appliquer a
l'Empire ottoman, dont le sultan est Abdulhamid, les reformes de
la nouvelle Constitution qui accorde les memes droits a tous les
sujets de l'Empire, y compris aux minorites chretiennes. Le sultan
s'y refuse et ordonne, entre 1894 et 1896, le massacre des Armeniens
(300 000 victimes). Et il a fallu, le 22 août 1896, qu'un commando du
Parti Dachnag occupât le siège de la banque ottomane, prît en otage
140 personnes, pour que le sultan, menace d'une intervention de la
France, de la Grande-Bretagne et de la Russie, mît fin aux massacres.
A Paris naît alors un mouvement armenophile compose d'ecrivains,
d'artistes et d'hommes politiques : Anatole France, Charles Peguy,
Romain Roland, Frederic Mistral, Jean Jaurès, Georges Clemenceau,
Marc Sangnier... Durant la Première Guerre Mondiale, la France,
la Grande-Bretagne, la Russie etant en guerre contre l'Allemagne,
l'Autriche-Hongrie, l'Italie (jusqu'en 1915) et la Turquie, les
" Jeunes Turcs " au pouvoir trouvèrent les conditions ideales pour
appliquer les plans de deportation et d'extermination de la population
armenienne, en vue de realiser leurs objectifs : le panturquisme et
le panislamisme.
Et c'est ainsi que purent etre tues un million et demi d'Armeniens
en Turquie entre 1915 et 1918, ce qui constitue le premier genocide
de l'histoire du XXe siècle.
En 1920, avec ses allies, la France participa a l'elaboration du traite
de Sèvres, qui etablissait l'existence, sur la partie orientale de la
Turquie, d'un Etat armenien et d'un Kurdistan autonome, puis en 1923,
a celui de Lausanne, qui annula les accords de Sèvres, reduisant le
territoire armenien a une peau de chagrin et supprimant l'autonomie du
Kurdistan. Parallèlement la France abandonna a la Turquie, en 1921,
la Cilicie et plus tard, en 1939, la region d'Alexandrette, qu'elle
avait obtenues auparavant comme mandat au meme titre que le Liban et
la Syrie.
Les Francais, qui ont effectivement ete " ni victime, ni bourreau "
lors de la tragedie armenienne, mais protecteurs des Armeniens dans
l'Empire ottoman, ont ete cependant presents a Sèvres et a Lausanne
dans le cadre des relations internationales. Il va donc de soi que
les propos de Robert Badinter, " s'agissant du genocide des Armeniens
qui n'a fait l'objet d'aucune decision emanant d'une juridiction
internationale ou nationale dont l'autorite s'imposerait a la France
", ne tiennent pas au regard de l'Histoire.
La loi votee par l'Assemblee Nationale elargit, d'une part les
dispositions legislatives de la loi Gayssot de 1990 puisqu'elle
punit ceux qui " contestent ou minimisent de facon outrancière un
genocide reconnu comme tel par la loi francaise " et, d'autre part,
elle entre dans le cadre d'une decision de l'Union europeenne de
2008. La loi Gayssot, qui concerne le genocide des citoyens europeens
de confession juive, ayant ete votee en son temps n'a pas pose de
problème particulier de constitutionnalite. Je ne vois pas pourquoi
la loi votee par l'Assemblee Nationale, le 22 decembre 2011, sur la
proposition du depute Valerie Boyer, en poserait et ne pourrait pas
etre adoptee par le Senat puisqu'elle presente les memes garanties.
A ce sujet, M. Badinter fait reference au procès de Nuremberg. Le
procès des responsables du genocide des Armeniens a eu lieu en 1919 a
Constantinople, organise par les autorites liberales turques sous le
contrôle des allies et celui des nazis, a Nuremberg, par un tribunal
militaire international. Si on recuse le premier sous pretexte qu'il
se tint sous la coupe des vainqueurs, que dire alors de Nuremberg
où pas un Allemand ne siegeait au tribunal. Les criminels nazis ont
ete condamnes a mort ou a la prison et leur jugement n'est pas remis
en cause.
Quant aux criminels turcs condamnes en 1919 a mort par contumace,
puisqu'ils s'etaient sauves de Turquie, ont ete rehabilites par la
Republique kemaliste qui, après leur mort, leur a edifie un mausolee a
Istanbul. Accepterait-on aujourd'hui a Berlin un mausolee a la gloire
d'Himmler ?
Le Parlement francais ne se constitue pas en tribunal de l'Histoire
mondiale en ayant vote la loi Gayssot et en s'appretant a voter la
loi Boyer. Les historiens peuvent dire l'histoire sans pour autant
avoir le monopole de l'objectivite. Ils ont le droit d'etre pour ou
contre les lois memorielles. En revanche, les elus de la Nation ont le
devoir d'elaborer, dans un projet politique, une orientation ethique
conforme a la Declaration universelle des Droits de l'Homme. C'est
le cas de la loi Boyer.
Quant au Conseil constitutionnel, il apparaît comme une institution
qui peut interpreter les lois en manipulant la jurisprudence,
alors que celle-ci a pour but normalement de rechercher l'esprit
qui a inspire les auteurs des lois, comme de determiner l'exacte
portee de l'application de leurs dispositions. M. Vincent
Coussirat-Coustère, agrege de droit public, dans Le Monde du 18
decembre 2012, explique parfaitement comment sortir du problème d'une
eventuelle inconstitutionnalite et de la question prioritaire de
constitutionnalite (QPC) que poserait la loi du 22 decembre 2011. Un
vrai labyrinthe duquel on ne peut sortir sans fil d'Ariane.
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