LA FOUGUE INTACTE D'UN RESISTANT DE 94 ANS, DERNIER SURVIVANT DU GROUPE MANOUCHIAN
Stephane
armenews.com
mardi 31 janvier 2012
Ne en Turquie en plein genocide armenien, il a connu le Front populaire
et combattu dans la Resistance au sein du "groupe Manouchian" dont
il est le dernier survivant : a 94 ans, Arsène Tchakarian reste un
militant dans l'âme, toujours revolte par le "système capitaliste".
"Ce que je dis ne plaît pas a tout le monde, mais je m'en moque" :
dans la veine d'un Stephane Hessel et de ses indignations, M.
Tchakarian soigne sa mise mais n'a rien renie des ideaux communistes
qui l'ont conduit a traverser le XXe siècle en faisant le coup de
poing contre les "fascistes" et l'occupant nazi.
Installe dans un pavillon de Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne) transforme
en centre d'archives, ce vieil homme alerte, qui paraît vingt ans de
moins que son âge, concède bien un certain "embourgeoisement" mais
se reprend aussitôt : "J'appartiendrai toujours a la classe ouvrière".
Son destin se feuillète comme un livre d'histoire dont l'auteur balaie
les chapitres avec gourmandise.
Arrive en 1930 a Paris, Arsène Tchakarian est un jeune apprenti
tailleur sous-paye lorqu'il croise le fer avec les ligues d'extreme
droite qui tentent de prendre d'assaut l'Assemblee en 1934. "Mon
patron m'avait promis 5 francs par semaine mais, meme ca, il ne me
le donnait pas."
Deux ans plus tard, sa conscience communiste s'aiguise encore avec
les grèves du Front Populaire et les premiers conges-payes.
"Nom de code : Charles"
Quand la guerre eclate en 1939, Arsène Tchakarian n'est pas encore
francais mais il est envoye sur le front d'un conflit qui tourne
court. De retour a Paris, c'est le choc. "Il y avait des Allemands
partout, le drapeau nazi sur la Tour Eiffel", raconte-t-il.
Il compte alors parmi ses amis un certain Missak Manouchian,
journaliste dont il partage les origines armeniennes et l'engagement
communiste. C'est lui qui lui fournit les premiers tracts anti-nazis
en 1942, premices d'un mouvement de resistance, regarde avec mefiance
par les gaullistes.
"Ils hesitaient a nous fournir des armes. L'URSS faisait peur et on
etait des bolcheviques pour eux", sourit M. Tchakarian.
Après l'unification de la Resistance, c'est en 1943 que naît le
"Groupe Manouchian", compose d'immigres (Italiens, Armeniens, juifs
polonais...) que les autorites allemandes tenteront de discrediter
dans la fameuse "Affiche rouge", en fustigeant une "armee du crime"
venue de l'etranger.
Arsène Tchakarian, "nom de code : Charles", a recense sur une carte
tous les faits d'armes de son groupe : attaque contre des gendarmes en
mars 1943, sabotage de lignes de haute tension... "La France c'etait
le pays des libertes mais on se battait aussi par anti-fascisme."
En fevrier 1944, son groupe est decime. 23 de ses camarades sont
arretes, juges et executes. Arsène Tchakarian, qui a echappe au coup
de filet, en est aujourd'hui le dernier survivant. "Je suis un peu
le dernier des Mohicans, comme on dit", glisse-t-il.
Cache a Paris grâce a un policier, M. Tchakarian est exfiltre vers
Bordeaux où il continuera a servir la Resistance jusqu'a la Liberation.
Barde de decorations après-guerre, il devra patienter jusqu'en 1958
pour etre naturalise francais et reprendra son activite de tailleur.
A bientôt 95 ans, il parcourt aujourd'hui lycees et collèges pour
temoigner, milite pour la reconnaissance du genocide armenien et
porte un oeil bienveillant sur le mouvement des Indignes.
"Avec la crise, on detruit des pays, on veut changer les regimes. Elle
est la maintenant, la vraie dictature", clame-t-il. Le "dernier des
Manouchian" n'a rien perdu de sa radicalite.
From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress
Stephane
armenews.com
mardi 31 janvier 2012
Ne en Turquie en plein genocide armenien, il a connu le Front populaire
et combattu dans la Resistance au sein du "groupe Manouchian" dont
il est le dernier survivant : a 94 ans, Arsène Tchakarian reste un
militant dans l'âme, toujours revolte par le "système capitaliste".
"Ce que je dis ne plaît pas a tout le monde, mais je m'en moque" :
dans la veine d'un Stephane Hessel et de ses indignations, M.
Tchakarian soigne sa mise mais n'a rien renie des ideaux communistes
qui l'ont conduit a traverser le XXe siècle en faisant le coup de
poing contre les "fascistes" et l'occupant nazi.
Installe dans un pavillon de Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne) transforme
en centre d'archives, ce vieil homme alerte, qui paraît vingt ans de
moins que son âge, concède bien un certain "embourgeoisement" mais
se reprend aussitôt : "J'appartiendrai toujours a la classe ouvrière".
Son destin se feuillète comme un livre d'histoire dont l'auteur balaie
les chapitres avec gourmandise.
Arrive en 1930 a Paris, Arsène Tchakarian est un jeune apprenti
tailleur sous-paye lorqu'il croise le fer avec les ligues d'extreme
droite qui tentent de prendre d'assaut l'Assemblee en 1934. "Mon
patron m'avait promis 5 francs par semaine mais, meme ca, il ne me
le donnait pas."
Deux ans plus tard, sa conscience communiste s'aiguise encore avec
les grèves du Front Populaire et les premiers conges-payes.
"Nom de code : Charles"
Quand la guerre eclate en 1939, Arsène Tchakarian n'est pas encore
francais mais il est envoye sur le front d'un conflit qui tourne
court. De retour a Paris, c'est le choc. "Il y avait des Allemands
partout, le drapeau nazi sur la Tour Eiffel", raconte-t-il.
Il compte alors parmi ses amis un certain Missak Manouchian,
journaliste dont il partage les origines armeniennes et l'engagement
communiste. C'est lui qui lui fournit les premiers tracts anti-nazis
en 1942, premices d'un mouvement de resistance, regarde avec mefiance
par les gaullistes.
"Ils hesitaient a nous fournir des armes. L'URSS faisait peur et on
etait des bolcheviques pour eux", sourit M. Tchakarian.
Après l'unification de la Resistance, c'est en 1943 que naît le
"Groupe Manouchian", compose d'immigres (Italiens, Armeniens, juifs
polonais...) que les autorites allemandes tenteront de discrediter
dans la fameuse "Affiche rouge", en fustigeant une "armee du crime"
venue de l'etranger.
Arsène Tchakarian, "nom de code : Charles", a recense sur une carte
tous les faits d'armes de son groupe : attaque contre des gendarmes en
mars 1943, sabotage de lignes de haute tension... "La France c'etait
le pays des libertes mais on se battait aussi par anti-fascisme."
En fevrier 1944, son groupe est decime. 23 de ses camarades sont
arretes, juges et executes. Arsène Tchakarian, qui a echappe au coup
de filet, en est aujourd'hui le dernier survivant. "Je suis un peu
le dernier des Mohicans, comme on dit", glisse-t-il.
Cache a Paris grâce a un policier, M. Tchakarian est exfiltre vers
Bordeaux où il continuera a servir la Resistance jusqu'a la Liberation.
Barde de decorations après-guerre, il devra patienter jusqu'en 1958
pour etre naturalise francais et reprendra son activite de tailleur.
A bientôt 95 ans, il parcourt aujourd'hui lycees et collèges pour
temoigner, milite pour la reconnaissance du genocide armenien et
porte un oeil bienveillant sur le mouvement des Indignes.
"Avec la crise, on detruit des pays, on veut changer les regimes. Elle
est la maintenant, la vraie dictature", clame-t-il. Le "dernier des
Manouchian" n'a rien perdu de sa radicalite.
From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress