Tour de France-Turquie : prochaine étape au Quai d'Orsay
http://www.collectifvan.org/article.php?r=0&id=65329
Publié le : 05-07-2012
Info Collectif VAN - www.collectifvan.org - Cet article est une mise Ã
jour du texte de Séta Papazian, Présidente du Collectif VAN [Vigilance
Arménienne contre le Négationnisme], publié le 28/06/2012 sur le
Huffington Post et intitulé « Euro 2012 : Erdogan passe le ballon Ã
Hollande ». Y est analysé le réchauffement des relations
franco-turques, alors que M. Laurent Fabius recevra à dîner au Quai
d'Orsay M. Ahmet Davutoglu, ministre des Affaires étrangères de la
République de Turquie, ce jeudi 5 juillet à 20h. Un procès-fleuve a
débuté lundi 2 juillet dans le pénitencier de Silivri, Ã l'encontre de
205 opposants politiques turcs et kurdes, parmi lesquels l'éditeur
turc Ragip Zarakolu et l'universitaire Büsra Ersanli. En sera-t-il
question lors de cet entretien ?
Copyright photo : AA
Le Huffington Post
Euro 2012 : Erdogan passe le ballon à Hollande
Séta Papazian
Présidente du Collectif VAN [Vigilance Arménienne contre le Négationnisme]
Publication: 28/06/2012 23:42
Fidèle à son habitude, Recep Tayyip ErdoÄ?an donne le tempo des
nouvelles relations bilatérales qui se sont ouvertes entre la France
et la Turquie depuis l'élection de François Hollande. Il semblerait
que l'entretien - qui s'est tenu entre le Premier ministre de la
République de Turquie et le Président de la République française le
mercredi 20 juin 2012 en marge du Sommet de Rio - ait porté ses
fruits. Et Ankara attend beaucoup de la rencontre entre les chefs des
diplomaties turque et française ce 5 juillet à Paris.
"La nouvelle position de la France" dont il est fait mention dans les
déclarations officielles turques, mérite pour le moins d'être
explicitée par l'Elysée et le Quai d'Orsay afin qu'elle ne soit pas
interprétée comme une énième contorsion émanant du Kmasûtra de la
Real-Politik. Un recul des positions françaises serait un signal
fcheux alors que s'est ouvert le 2 juillet à Silivri, le procès [1]
de l'éditeur turc Ragip Zarakolu, défenseur de la liberté
d'expression, pressenti pour le Prix Nobel de la Paix 2012, qui avait
eu le courage d'intervenir, du fond de sa cellule, en faveur de la loi
française pénalisant le négationnisme de l'Etat turc.
Entre levée des sanctions et menaces d'Ankara
Ainsi donc, le Président français est invité officiellement en Turquie
pour tourner la page des vicissitudes dues à la loi pénalisant la
négation du génocide arménien. Ankara ayant annoncé avoir levé ses «
sanctions » contre la France, il importe de savoir si cette «
mansuétude » est due à une quelconque promesse diplomatique de ne pas
inscrire à l'ordre du jour un projet de loi pénalisant la négation du
génocide arménien en France.
Le candidat socialiste, qui avait pris, au cours de sa campagne
électorale,"l'engagement de reprendre ce dossier" [de la pénalisation
du négationnisme] "dans l'apaisement, dans la conciliation et en même
temps, dans la volonté d'aboutir", ne peut se situer, en la matière,
en deçà de Nicolas Sarkozy.
Que cela plaise ou non, l'ancien Président a laissé un héritage fort
avec des discours officiels que nul chef d'Etat au monde n'avait osé
tenir à ce jour. Ceux qui regrettent que cette posture courageuse
-concernant la négation du génocide arménien ou le génocide des Tutsi
au Rwanda- ait été tenue par un homme politique controversé, vont
devoir se poser la question suivante : François Hollande, héritier de
Jaurès, peut-il se permettre de brader les valeurs universelles des
droits de l'homme pour se soumettre à un lobby économico-politique
dédaigné par son prédécesseur, proche des milieux d'affaires ?
Dilemme...
Comme il l'avait promis le 24 avril dernier lors des commémorations
parisiennes du génocide arménien, le nouveau Président se doit de
mettre à l'ordre du jour un nouveau projet de loi pénalisant le
négationnisme. Et ce d'autant plus que le message adressé par le
ministre turc des Affaires étrangères, Ahmet DavutoÄ?lu - reçu ce 5
juillet par son homologue français Laurent Fabius - laisse
transparaître les agaçantes et inacceptables menaces qui identifient
la diplomatie néo-ottomane: "Les relations franco-turques ont
l'opportunité de prendre une meilleure tournure. Notre position
principale est claire. La Turquie, son Etat et son gouvernement
respecteront toutes les nations qui les respectent. Si on manque de
respect à la Turquie, les mesures nécessaires seront prises pour
l'honneur de notre pays, la dignité de notre nation, et les intérêts
nationaux".
Génocide arménien : une atteinte à l'honneur de la Turquie
Il n'a justement échappé Ã personne qu'évoquer le génocide arménien
est une atteinte à l'honneur de la Turquie. L'Article 301 du Code
pénal turc stipule que "Le dénigrement public de la nation turque
(...) sera puni de six mois à deux ans d'emprisonnement ": à ce titre,
affirmer l'existence du génocide arménien peut conduire tout citoyen
turc à la case "prison".
La Turquie ne reconnaissant pas la double nationalité, les poursuites
judiciaires peuvent également concerner des Franco-Turcs : l'affaire
de l'étudiante française d'origine turque, Sevil Sevimli [2], partie
en Turquie dans le cadre des échanges Erasmus [3] et emprisonnée pour
"terrorisme" depuis le 9 mai, vient rappeler que la violence du droit
turc peut frapper nos concitoyens sans que le Quai d'Orsay ne puisse
intervenir.
Fort heureusement, François Hollande ne risque pas de connaître le
sort des 7000 détenus politiques [4] turcs et kurdes qui attendent le
"printemps turc" en prison, dont 600 étudiants parmi lesquels Cihan
Kimizigül, étudiant de l'université franco-turque Galatasaray,
condamné Ã une peine de 11 ans et 3 mois de prison le 11 mai dernier
pour port d'un foulard kurde [5]. Arrêté Ã l'ge de 19 ans, Cihan a
déjà fait deux ans de prison et avait été fort opportunément mis en
libération conditionnelle la veille du Colloque organisé par Paris 1
et célébrant en avril 2012, les 20 ans de l'Université francophone
d'Istanbul.
M. Hollande ayant estimé que l'invitation à se rendre en Turquie était
pour lui "un privilège" [n'est-ce pas un peu trop pour honorer un Etat
qui glisse depuis trois ans vers un fascisme vert inquiétant ?],
souhaitons qu'il saisisse l'opportunité du réchauffement des relations
franco-turques pour adresser dès à présent un signal fort au
gouvernement turc et l'inciter à respecter les valeurs démocratiques
et morales supposées être en vigueur dans l'Union européenne.
Ragip Zarakolu, un futur Prix Nobel en prison ?
Car la situation est préoccupante : depuis le lundi 2 juillet 2012 Ã
9h du matin, se tiennent dans le pénitencier de Silivri, ville située
à 67 kilomètres à l'ouest d'Istanbul, les procès KCK impliquant de
nombreux intellectuels turcs, dont l'éminent éditeur Ragip Zarakolu.
Fondateur de l'Association turque des droits de l'homme [IHD],
pressenti pour le Prix Nobel 2012, celui-ci est le précurseur, en
Turquie, d'un courageux travail de mémoire sur le génocide arménien
[6]. Seule une pression internationale aboutira à sa libération ainsi
qu'Ã celle de tous les intellectuels - telle l'universitaire Büsra
Ersanli [7] - jugés ces jours-ci pour "terrorisme" , délit qui
correspond en Turquie à ce que l'on nomme, en France, en toute
simplicité, la liberté d'expression.
Notre Président, qui porte désormais la parole de la France sur la
scène internationale, aura-t-il le courage d'être le chef d'Etat qui
rendra hommage à ces opposants turcs et kurdes Å`uvrant pacifiquement
pour influer sur le cours de l'histoire de leur pays ? Se rendra-t-il
en Turquie pour appeler "ce grand pays" Ã suivre les traces d'un Ragip
Zarakolu et à regarder son histoire en face ?
Ce serait pour le moins, un immense service à rendre au peuple turc
pour l'encourager à se délivrer d'une schizophrénie nationaliste
injectée à haute dose depuis 97 ans, frein majeur à une réelle
démocratisation de la Turquie. Espérons que tel sera le message que
Laurent Fabius adressera au ministre turc des Affaires étrangères,
Ahmet DavutoÄ?lu, en visite jeudi à Paris, et ce, quelles que soient
les préoccupations engendrées par la crise syrienne.
Il importe de cadrer l'éthique des partenariats « culturels » signés
avec la Turquie. Car à travers divers instituts [8] et think tanks [9]
créés en France, c'est en fait une stratégie négationniste qu'Ankara
met en place pour 2015 et le centenaire du génocide arménien.
En tout état de cause, le négationnisme imposé [10] par Ankara - non
seulement en Turquie mais également dans le monde entier - ne peut
avoir droit de cité dans notre République, dans nos écoles et dans nos
universités.
C'est le sens du projet de loi que François Hollande se doit de porter.
Défendre la mémoire des Français blessés par un négationnisme
outrancier sera son véritable "privilège".
_________________________________
[1] Parmi les éminents intellectuels turcs et kurdes, accusés de «
terrorisme », outre l'universitaire Büsra Ersanli et l'éditeur Ragip
Zarakolu, se trouvent le fils de ce dernier, Deniz Zarakolu [de la
maison d'Edition Belge], la traductrice Ayse Berktay, Dursun Yildiz,
Aziz Tunç, Cengiz Kapmaz, Mahmut Alinak, Mehmet Güler et Yüksel Genç.
Le Quai d'Orsay se doit de demander leur acquittement et leur
libération.
[2] Sevil Sevimli, étudiante lyonnaise d'origine turque, est
emprisonnée depuis le 9 mai dernier en Turquie. On reproche à la jeune
femme d'avoir participé Ã la fête et au pique-nique du 1er mai,
assisté Ã un concert d'un groupe de gauche, placardé une affiche
réclamant la gratuité des études.
Turquie : une Française arrêtée pour terrorisme - Mobilisation pour
l'étudiante détenue en Turquie.
[3] Les programmes Erasmus sont utilisés par Ankara pour exporter son
négationnisme d'Etat en Europe : Erasmus : instrument de négationnisme
de la Turquie.
[4] Turquie : des procès inquiétants le 2 juillet à Silivri.
[5] La 14e cour d'assise d'Istanbul a commué la peine en 11 ans et 3
mois de prison, après avoir condamné le jeune étudiant à 33 ans et 9
mois. Le parquet avait demandé 45 ans de prison lors de la dernière
audience tenue le 23 mars dernier durant laquelle le juge avait
prononcé la libération conditionnelle de l'étudiant.
A l'université Galatasaray : l'étudiant Cihan, petit cousin éloigné du
capitaine Dreyfus...
Un étudiant kurde condamné Ã 33 ans de prison.
[6] Ragip Zarakolu : Dossier complet
[7] http://www.gitinitiative.com/
[8] « Le renouvellement de l'accord de 60 ans sur la coopération dans
le domaine de la culture est également important. La mise à jour de
cet accord permettra à la Turquie d'ouvrir des instituts culturels
Yunus Emre en France »
http://www.hurriyetdailynews.com/ankara-paris-to-open-new-page.aspx?PageID=238&NID=24684&NewsCatID=338
[9] L'Institut du Bosphore appelle les Députés à se mobiliser
[10] Observatoire du Négationnisme [Collectif VAN] : Cela se passe en
France ou cela vise des Français
Pour plus d'informations sur les procès d'opposants politiques en
cours en Turquie, écrire à : [email protected].
Lire aussi :
Les liaisons dangereuses de nos universités
Génocide arménien : l'argent du crime finance sa négation
Rencontre Fabius-Davotuglu : la Turquie place ses pions
Qui dénoncera le Goulag turc ?
Retour à la rubrique
Source/Lien : Le Huffington Post
http://www.collectifvan.org/article.php?r=0&id=65329
Publié le : 05-07-2012
Info Collectif VAN - www.collectifvan.org - Cet article est une mise Ã
jour du texte de Séta Papazian, Présidente du Collectif VAN [Vigilance
Arménienne contre le Négationnisme], publié le 28/06/2012 sur le
Huffington Post et intitulé « Euro 2012 : Erdogan passe le ballon Ã
Hollande ». Y est analysé le réchauffement des relations
franco-turques, alors que M. Laurent Fabius recevra à dîner au Quai
d'Orsay M. Ahmet Davutoglu, ministre des Affaires étrangères de la
République de Turquie, ce jeudi 5 juillet à 20h. Un procès-fleuve a
débuté lundi 2 juillet dans le pénitencier de Silivri, Ã l'encontre de
205 opposants politiques turcs et kurdes, parmi lesquels l'éditeur
turc Ragip Zarakolu et l'universitaire Büsra Ersanli. En sera-t-il
question lors de cet entretien ?
Copyright photo : AA
Le Huffington Post
Euro 2012 : Erdogan passe le ballon à Hollande
Séta Papazian
Présidente du Collectif VAN [Vigilance Arménienne contre le Négationnisme]
Publication: 28/06/2012 23:42
Fidèle à son habitude, Recep Tayyip ErdoÄ?an donne le tempo des
nouvelles relations bilatérales qui se sont ouvertes entre la France
et la Turquie depuis l'élection de François Hollande. Il semblerait
que l'entretien - qui s'est tenu entre le Premier ministre de la
République de Turquie et le Président de la République française le
mercredi 20 juin 2012 en marge du Sommet de Rio - ait porté ses
fruits. Et Ankara attend beaucoup de la rencontre entre les chefs des
diplomaties turque et française ce 5 juillet à Paris.
"La nouvelle position de la France" dont il est fait mention dans les
déclarations officielles turques, mérite pour le moins d'être
explicitée par l'Elysée et le Quai d'Orsay afin qu'elle ne soit pas
interprétée comme une énième contorsion émanant du Kmasûtra de la
Real-Politik. Un recul des positions françaises serait un signal
fcheux alors que s'est ouvert le 2 juillet à Silivri, le procès [1]
de l'éditeur turc Ragip Zarakolu, défenseur de la liberté
d'expression, pressenti pour le Prix Nobel de la Paix 2012, qui avait
eu le courage d'intervenir, du fond de sa cellule, en faveur de la loi
française pénalisant le négationnisme de l'Etat turc.
Entre levée des sanctions et menaces d'Ankara
Ainsi donc, le Président français est invité officiellement en Turquie
pour tourner la page des vicissitudes dues à la loi pénalisant la
négation du génocide arménien. Ankara ayant annoncé avoir levé ses «
sanctions » contre la France, il importe de savoir si cette «
mansuétude » est due à une quelconque promesse diplomatique de ne pas
inscrire à l'ordre du jour un projet de loi pénalisant la négation du
génocide arménien en France.
Le candidat socialiste, qui avait pris, au cours de sa campagne
électorale,"l'engagement de reprendre ce dossier" [de la pénalisation
du négationnisme] "dans l'apaisement, dans la conciliation et en même
temps, dans la volonté d'aboutir", ne peut se situer, en la matière,
en deçà de Nicolas Sarkozy.
Que cela plaise ou non, l'ancien Président a laissé un héritage fort
avec des discours officiels que nul chef d'Etat au monde n'avait osé
tenir à ce jour. Ceux qui regrettent que cette posture courageuse
-concernant la négation du génocide arménien ou le génocide des Tutsi
au Rwanda- ait été tenue par un homme politique controversé, vont
devoir se poser la question suivante : François Hollande, héritier de
Jaurès, peut-il se permettre de brader les valeurs universelles des
droits de l'homme pour se soumettre à un lobby économico-politique
dédaigné par son prédécesseur, proche des milieux d'affaires ?
Dilemme...
Comme il l'avait promis le 24 avril dernier lors des commémorations
parisiennes du génocide arménien, le nouveau Président se doit de
mettre à l'ordre du jour un nouveau projet de loi pénalisant le
négationnisme. Et ce d'autant plus que le message adressé par le
ministre turc des Affaires étrangères, Ahmet DavutoÄ?lu - reçu ce 5
juillet par son homologue français Laurent Fabius - laisse
transparaître les agaçantes et inacceptables menaces qui identifient
la diplomatie néo-ottomane: "Les relations franco-turques ont
l'opportunité de prendre une meilleure tournure. Notre position
principale est claire. La Turquie, son Etat et son gouvernement
respecteront toutes les nations qui les respectent. Si on manque de
respect à la Turquie, les mesures nécessaires seront prises pour
l'honneur de notre pays, la dignité de notre nation, et les intérêts
nationaux".
Génocide arménien : une atteinte à l'honneur de la Turquie
Il n'a justement échappé Ã personne qu'évoquer le génocide arménien
est une atteinte à l'honneur de la Turquie. L'Article 301 du Code
pénal turc stipule que "Le dénigrement public de la nation turque
(...) sera puni de six mois à deux ans d'emprisonnement ": à ce titre,
affirmer l'existence du génocide arménien peut conduire tout citoyen
turc à la case "prison".
La Turquie ne reconnaissant pas la double nationalité, les poursuites
judiciaires peuvent également concerner des Franco-Turcs : l'affaire
de l'étudiante française d'origine turque, Sevil Sevimli [2], partie
en Turquie dans le cadre des échanges Erasmus [3] et emprisonnée pour
"terrorisme" depuis le 9 mai, vient rappeler que la violence du droit
turc peut frapper nos concitoyens sans que le Quai d'Orsay ne puisse
intervenir.
Fort heureusement, François Hollande ne risque pas de connaître le
sort des 7000 détenus politiques [4] turcs et kurdes qui attendent le
"printemps turc" en prison, dont 600 étudiants parmi lesquels Cihan
Kimizigül, étudiant de l'université franco-turque Galatasaray,
condamné Ã une peine de 11 ans et 3 mois de prison le 11 mai dernier
pour port d'un foulard kurde [5]. Arrêté Ã l'ge de 19 ans, Cihan a
déjà fait deux ans de prison et avait été fort opportunément mis en
libération conditionnelle la veille du Colloque organisé par Paris 1
et célébrant en avril 2012, les 20 ans de l'Université francophone
d'Istanbul.
M. Hollande ayant estimé que l'invitation à se rendre en Turquie était
pour lui "un privilège" [n'est-ce pas un peu trop pour honorer un Etat
qui glisse depuis trois ans vers un fascisme vert inquiétant ?],
souhaitons qu'il saisisse l'opportunité du réchauffement des relations
franco-turques pour adresser dès à présent un signal fort au
gouvernement turc et l'inciter à respecter les valeurs démocratiques
et morales supposées être en vigueur dans l'Union européenne.
Ragip Zarakolu, un futur Prix Nobel en prison ?
Car la situation est préoccupante : depuis le lundi 2 juillet 2012 Ã
9h du matin, se tiennent dans le pénitencier de Silivri, ville située
à 67 kilomètres à l'ouest d'Istanbul, les procès KCK impliquant de
nombreux intellectuels turcs, dont l'éminent éditeur Ragip Zarakolu.
Fondateur de l'Association turque des droits de l'homme [IHD],
pressenti pour le Prix Nobel 2012, celui-ci est le précurseur, en
Turquie, d'un courageux travail de mémoire sur le génocide arménien
[6]. Seule une pression internationale aboutira à sa libération ainsi
qu'Ã celle de tous les intellectuels - telle l'universitaire Büsra
Ersanli [7] - jugés ces jours-ci pour "terrorisme" , délit qui
correspond en Turquie à ce que l'on nomme, en France, en toute
simplicité, la liberté d'expression.
Notre Président, qui porte désormais la parole de la France sur la
scène internationale, aura-t-il le courage d'être le chef d'Etat qui
rendra hommage à ces opposants turcs et kurdes Å`uvrant pacifiquement
pour influer sur le cours de l'histoire de leur pays ? Se rendra-t-il
en Turquie pour appeler "ce grand pays" Ã suivre les traces d'un Ragip
Zarakolu et à regarder son histoire en face ?
Ce serait pour le moins, un immense service à rendre au peuple turc
pour l'encourager à se délivrer d'une schizophrénie nationaliste
injectée à haute dose depuis 97 ans, frein majeur à une réelle
démocratisation de la Turquie. Espérons que tel sera le message que
Laurent Fabius adressera au ministre turc des Affaires étrangères,
Ahmet DavutoÄ?lu, en visite jeudi à Paris, et ce, quelles que soient
les préoccupations engendrées par la crise syrienne.
Il importe de cadrer l'éthique des partenariats « culturels » signés
avec la Turquie. Car à travers divers instituts [8] et think tanks [9]
créés en France, c'est en fait une stratégie négationniste qu'Ankara
met en place pour 2015 et le centenaire du génocide arménien.
En tout état de cause, le négationnisme imposé [10] par Ankara - non
seulement en Turquie mais également dans le monde entier - ne peut
avoir droit de cité dans notre République, dans nos écoles et dans nos
universités.
C'est le sens du projet de loi que François Hollande se doit de porter.
Défendre la mémoire des Français blessés par un négationnisme
outrancier sera son véritable "privilège".
_________________________________
[1] Parmi les éminents intellectuels turcs et kurdes, accusés de «
terrorisme », outre l'universitaire Büsra Ersanli et l'éditeur Ragip
Zarakolu, se trouvent le fils de ce dernier, Deniz Zarakolu [de la
maison d'Edition Belge], la traductrice Ayse Berktay, Dursun Yildiz,
Aziz Tunç, Cengiz Kapmaz, Mahmut Alinak, Mehmet Güler et Yüksel Genç.
Le Quai d'Orsay se doit de demander leur acquittement et leur
libération.
[2] Sevil Sevimli, étudiante lyonnaise d'origine turque, est
emprisonnée depuis le 9 mai dernier en Turquie. On reproche à la jeune
femme d'avoir participé Ã la fête et au pique-nique du 1er mai,
assisté Ã un concert d'un groupe de gauche, placardé une affiche
réclamant la gratuité des études.
Turquie : une Française arrêtée pour terrorisme - Mobilisation pour
l'étudiante détenue en Turquie.
[3] Les programmes Erasmus sont utilisés par Ankara pour exporter son
négationnisme d'Etat en Europe : Erasmus : instrument de négationnisme
de la Turquie.
[4] Turquie : des procès inquiétants le 2 juillet à Silivri.
[5] La 14e cour d'assise d'Istanbul a commué la peine en 11 ans et 3
mois de prison, après avoir condamné le jeune étudiant à 33 ans et 9
mois. Le parquet avait demandé 45 ans de prison lors de la dernière
audience tenue le 23 mars dernier durant laquelle le juge avait
prononcé la libération conditionnelle de l'étudiant.
A l'université Galatasaray : l'étudiant Cihan, petit cousin éloigné du
capitaine Dreyfus...
Un étudiant kurde condamné Ã 33 ans de prison.
[6] Ragip Zarakolu : Dossier complet
[7] http://www.gitinitiative.com/
[8] « Le renouvellement de l'accord de 60 ans sur la coopération dans
le domaine de la culture est également important. La mise à jour de
cet accord permettra à la Turquie d'ouvrir des instituts culturels
Yunus Emre en France »
http://www.hurriyetdailynews.com/ankara-paris-to-open-new-page.aspx?PageID=238&NID=24684&NewsCatID=338
[9] L'Institut du Bosphore appelle les Députés à se mobiliser
[10] Observatoire du Négationnisme [Collectif VAN] : Cela se passe en
France ou cela vise des Français
Pour plus d'informations sur les procès d'opposants politiques en
cours en Turquie, écrire à : [email protected].
Lire aussi :
Les liaisons dangereuses de nos universités
Génocide arménien : l'argent du crime finance sa négation
Rencontre Fabius-Davotuglu : la Turquie place ses pions
Qui dénoncera le Goulag turc ?
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