ELIF SHAFAK CHEVALIER DES ARTS ET LETTRES
Jean Eckian
armenews.com
mercredi 11 juillet 2012
L'écrivaine turque Elif Shafak (Safak), auteur de romans a succès,
dont le fameux "La Bâtarde d'Istanbul" (2006) - qui lui a valu
d'être poursuivie en justice par le gouvernement turc en vertu de
l'article 301 du Code pénal turc pour "Insulte a l'identité turque"
- a recu, le 9 Juillet au Palais de France a Istanbul, des mains de
l'ambassadeur de France en Turquie, Laurent Bili, les insignes de
Chevalier dans l'Ordre des Arts et des Lettres pour sa contribution
intellectuelle au dialogue interculturel, a la liberté de parole et
d'expression et des droits de l'homme.
Ã~Ivoquant son inculpation en 2006 pour avoir dépeint le destin d'une
famille arménienne pendant le génocide, dont les descendants vivent
aux Etats Unis et en Turquie ; l'une turque et l'autre arménienne
qui ne veulent rien savoir l'une de l'autre, l'ambassadeur de France
aura ces mots Â" Ces poursuites obscurantistes seront heureusement
abandonnées, mais je sais que cette expérience vous a affecté
profondément. Pour notre plus grand bonheur, cette épreuve ne vous
décourage pas de poursuivre votre travail sur les subconscients de
la société turque. Â", a-t-il dit.
DISCOURS DE LAURENT BILI, AMBASSADEUR DE FRANCE EN TURQUIE
Â" Chère Elif Å~^AFAK,
Pour tous vos amis ici présents, cette décoration est une évidence.
Ils savent que la France rend aujourd'hui hommage a une actrice
majeure de la vie culturelle et intellectuelle en Turquie. Ils savent
que la France rend hommage a une militante engagée qui symbolise la
modernité de la Turquie.
Comme le veut la tradition, permettez-moi tout d'abord, de retracer
votre parcours exceptionnel.
Vous êtes née en France, a Strasbourg, d'une mère diplomate. Après
avoir habité Madrid, Ankara, Cologne, Aman, Boston, le Michigan et
l'Arizona, vous finissez par poser vos bagages a Istanbul, la ville
de votre cÅ"ur.
Dans votre jeunesse, vous pensez que la littérature francaise est
l'une de celle, avec la russe, qui vous a le plus marquée dans
votre jeunesse.
Docteur en Sciences politiques de l'Université du Moyen-Orient
(METU) a Ankara, vous y avez également obtenu un Master en Â" Etudes
sur le genre et le féminisme Â". Vos mémoires portaient sur la Â"
Compréhension des derviches hétérodoxes de l'Islam Â" d'une part
et sur Â" L'Analyse de la culture et de la modernité turque a travers
les discours des masculinités Â" d'autre part.
Ce parcours personnel cosmopolite et cette formation engagée et
humaniste imprégnée par le soufisme et la culture ottomane, ont
sans doute influencé votre Å"uvre littéraire. Vos premiers romans
en témoignent. Pinhan (Le Mystique), obtient en 1998 le Prix Rumi
de la meilleure Å"uvre littéraire mystique en Turquie, tandis que
Å~^ehrin Aynaları en 1999 entremêle les mysticismes du Judaïsme
et de l'Islam dans la Méditerranée du XVIIe siècle.
Avec Mahrem (Le Regard), couronné par le Prix du Meilleur Roman de
l'Union des Ecrivains turcs en 2000, puis avec Bit Palas (en francais
Â" Bonbon Palace Â") en 2002 vous confirmez vos premiers succès et
élargissez considérablement votre lectorat.
Enseignante aux Etats-Unis, vous y écrivez directement en anglais La
Bâtarde d'Istanbul (Baba Ve Pic), le livre le plus vendu en Turquie
en 2006, qui passionne de très nombreux lecteurs dans le monde,
dont près de 100 000 en France.
Des passages de ce roman, qui évoque avec finesse la question de
l'oubli du génocide arménien vous valent d'être poursuivie pour Â"
insultes a la turcicité Â". Ces poursuites obscurantistes seront
heureusement abandonnées, mais je sais que cette expérience vous
a affecté profondément.
Pour notre plus grand bonheur, cette épreuve ne vous décourage pas de
poursuivre votre travail sur les subconscients de la société turque.
Vos lecteurs, en Turquie et dans le monde, continuent de suivre votre
quête avec enthousiasme. En témoigne, les succès de vos dernières
Å"uvres Siyah Sut (Lait noir 2008), sur le dilemme entre maternité
et écriture, The fourty Rules of Love (AÅ~_k ou Soufi mon Amour),
tiré a plus de 500 000 exemplaires en Turquie en 2009, ou Iskender en
2011, sur le thème de l'identité, des traditions et de l'immigration.
Vous êtes aujourd'hui la romancière la plus lue en Turquie, votre
Å"uvre est traduite dans 25 langues. Vous collaborez par ailleurs
a divers quotidiens et mensuels turcs et internationaux, et vous
composez des paroles de chansons pour des groupes de Rock.
Vous êtes également invitée a intervenir dans le monde entier.
Récemment en France, dans le cadre de la Â" Saison de la Turquie Â"
ou au Centre National du Livre a Paris. Lors du 5ème Forum des Femmes
(Women's Forum) a Deauville en 2009, vous êtes nommée Â" nouveau
talent international Â" (international rising talent).
Ce soir, la France rend hommage une nouvelle fois a votre Å"uvre et
a votre engagement.
Elif Å~^AFAK, pour votre engagement intellectuel en faveur de la
liberté d'opinion et votre contribution au dialogue interculturel
et aux droits de l'homme, nous vous faisons, au nom du Ministre de la
Culture de la République francaise, Chevalier dans l'Ordre National
des Arts et des Lettres. Â"
Née a Strasbourg en 1971, fille d'un diplomate turc, elle est élevée
par sa mère après le divorce de ses parents. Elif Shafak a passé
son adolescence a Madrid puis a Amman, en Jordanie, avant de retourner
en Turquie. Diplômée en relations internationales de la Middle East
Technical University d'Ankara et titulaire d'un Master en Sciences
sur Gender and Women's Studies, elle est mariée au journaliste turc
Eyup Can, rédacteur en chef du quotidien Referans.
Jean Eckian
armenews.com
mercredi 11 juillet 2012
L'écrivaine turque Elif Shafak (Safak), auteur de romans a succès,
dont le fameux "La Bâtarde d'Istanbul" (2006) - qui lui a valu
d'être poursuivie en justice par le gouvernement turc en vertu de
l'article 301 du Code pénal turc pour "Insulte a l'identité turque"
- a recu, le 9 Juillet au Palais de France a Istanbul, des mains de
l'ambassadeur de France en Turquie, Laurent Bili, les insignes de
Chevalier dans l'Ordre des Arts et des Lettres pour sa contribution
intellectuelle au dialogue interculturel, a la liberté de parole et
d'expression et des droits de l'homme.
Ã~Ivoquant son inculpation en 2006 pour avoir dépeint le destin d'une
famille arménienne pendant le génocide, dont les descendants vivent
aux Etats Unis et en Turquie ; l'une turque et l'autre arménienne
qui ne veulent rien savoir l'une de l'autre, l'ambassadeur de France
aura ces mots Â" Ces poursuites obscurantistes seront heureusement
abandonnées, mais je sais que cette expérience vous a affecté
profondément. Pour notre plus grand bonheur, cette épreuve ne vous
décourage pas de poursuivre votre travail sur les subconscients de
la société turque. Â", a-t-il dit.
DISCOURS DE LAURENT BILI, AMBASSADEUR DE FRANCE EN TURQUIE
Â" Chère Elif Å~^AFAK,
Pour tous vos amis ici présents, cette décoration est une évidence.
Ils savent que la France rend aujourd'hui hommage a une actrice
majeure de la vie culturelle et intellectuelle en Turquie. Ils savent
que la France rend hommage a une militante engagée qui symbolise la
modernité de la Turquie.
Comme le veut la tradition, permettez-moi tout d'abord, de retracer
votre parcours exceptionnel.
Vous êtes née en France, a Strasbourg, d'une mère diplomate. Après
avoir habité Madrid, Ankara, Cologne, Aman, Boston, le Michigan et
l'Arizona, vous finissez par poser vos bagages a Istanbul, la ville
de votre cÅ"ur.
Dans votre jeunesse, vous pensez que la littérature francaise est
l'une de celle, avec la russe, qui vous a le plus marquée dans
votre jeunesse.
Docteur en Sciences politiques de l'Université du Moyen-Orient
(METU) a Ankara, vous y avez également obtenu un Master en Â" Etudes
sur le genre et le féminisme Â". Vos mémoires portaient sur la Â"
Compréhension des derviches hétérodoxes de l'Islam Â" d'une part
et sur Â" L'Analyse de la culture et de la modernité turque a travers
les discours des masculinités Â" d'autre part.
Ce parcours personnel cosmopolite et cette formation engagée et
humaniste imprégnée par le soufisme et la culture ottomane, ont
sans doute influencé votre Å"uvre littéraire. Vos premiers romans
en témoignent. Pinhan (Le Mystique), obtient en 1998 le Prix Rumi
de la meilleure Å"uvre littéraire mystique en Turquie, tandis que
Å~^ehrin Aynaları en 1999 entremêle les mysticismes du Judaïsme
et de l'Islam dans la Méditerranée du XVIIe siècle.
Avec Mahrem (Le Regard), couronné par le Prix du Meilleur Roman de
l'Union des Ecrivains turcs en 2000, puis avec Bit Palas (en francais
Â" Bonbon Palace Â") en 2002 vous confirmez vos premiers succès et
élargissez considérablement votre lectorat.
Enseignante aux Etats-Unis, vous y écrivez directement en anglais La
Bâtarde d'Istanbul (Baba Ve Pic), le livre le plus vendu en Turquie
en 2006, qui passionne de très nombreux lecteurs dans le monde,
dont près de 100 000 en France.
Des passages de ce roman, qui évoque avec finesse la question de
l'oubli du génocide arménien vous valent d'être poursuivie pour Â"
insultes a la turcicité Â". Ces poursuites obscurantistes seront
heureusement abandonnées, mais je sais que cette expérience vous
a affecté profondément.
Pour notre plus grand bonheur, cette épreuve ne vous décourage pas de
poursuivre votre travail sur les subconscients de la société turque.
Vos lecteurs, en Turquie et dans le monde, continuent de suivre votre
quête avec enthousiasme. En témoigne, les succès de vos dernières
Å"uvres Siyah Sut (Lait noir 2008), sur le dilemme entre maternité
et écriture, The fourty Rules of Love (AÅ~_k ou Soufi mon Amour),
tiré a plus de 500 000 exemplaires en Turquie en 2009, ou Iskender en
2011, sur le thème de l'identité, des traditions et de l'immigration.
Vous êtes aujourd'hui la romancière la plus lue en Turquie, votre
Å"uvre est traduite dans 25 langues. Vous collaborez par ailleurs
a divers quotidiens et mensuels turcs et internationaux, et vous
composez des paroles de chansons pour des groupes de Rock.
Vous êtes également invitée a intervenir dans le monde entier.
Récemment en France, dans le cadre de la Â" Saison de la Turquie Â"
ou au Centre National du Livre a Paris. Lors du 5ème Forum des Femmes
(Women's Forum) a Deauville en 2009, vous êtes nommée Â" nouveau
talent international Â" (international rising talent).
Ce soir, la France rend hommage une nouvelle fois a votre Å"uvre et
a votre engagement.
Elif Å~^AFAK, pour votre engagement intellectuel en faveur de la
liberté d'opinion et votre contribution au dialogue interculturel
et aux droits de l'homme, nous vous faisons, au nom du Ministre de la
Culture de la République francaise, Chevalier dans l'Ordre National
des Arts et des Lettres. Â"
Née a Strasbourg en 1971, fille d'un diplomate turc, elle est élevée
par sa mère après le divorce de ses parents. Elif Shafak a passé
son adolescence a Madrid puis a Amman, en Jordanie, avant de retourner
en Turquie. Diplômée en relations internationales de la Middle East
Technical University d'Ankara et titulaire d'un Master en Sciences
sur Gender and Women's Studies, elle est mariée au journaliste turc
Eyup Can, rédacteur en chef du quotidien Referans.