LA LOI SUR LE NEGATIONNISME N'EST PAS REMISE EN CAUSE, SELON DES HISTORIENS
Ara
armenews.com
jeudi 1er mars 2012
PARIS, 29 fev 2012 - La decision du Conseil constitutionnel de censurer
la loi sanctionnant la negation des genocides, dont celui des Armeniens
en 1915, ne remet pas en cause la loi Gayssot sur le negationnisme et
doit etre l'occasion de contraindre la Turquie a ouvrir ses archives,
estiment des historiens interroges par l'AFP.
Pour autant, cette decision, qui rejoint celle de la Cour europeenne
des droits de l'homme s'appuyant sur la liberte d'expression, sonne
"la fin des lois memorielles" dictees par le parlement, estiment
plusieurs d'entre eux a l'instar de Robert Badinter, ancien senateur
PS, garde des Sceaux et ancien president du Conseil constitutionnel.
"Elle ne remet absolument pas en cause la loi Gayssot (1990, qui
fait de la contestation des crimes contre l'humanite un delit),
au contraire, elle la met a l'abri", estime Pierre Nora, membre
de l'Academie francaise et president de l'association "Liberte pour
l'histoire". "C'est très habile, car cette decision enterine la loi de
2001 reconnaissant le genocide armenien par la France tout en disant
qu'elle ne peut penaliser sa contestation, ce qui serait contraire
a la liberte d'expression", ajoute M. Nora.
Le negationniste Robert Faurisson, rappelle au passage M. Nora,
"a ete condamne sur la base des lois de 1881 (reprimant notamment
l'encouragement a la haine raciale), anterieures a loi Gayssot". "Le
devoir des politiques est de s'occuper du passe mais pas de faire des
lois qui le qualifient, empechent de le discuter et qui brisent tout
travail historique", ajoute-t-il.
Annette Becker, professeur a Paris-ouest Nanterre, ne voit pas non plus
de danger pour la loi Gayssot, "basee sur le jugement du tribunal de
Nuremberg (autorite de la chose jugee) a laquelle a souscrit le droit
francais après la Seconde guerre mondiale". Elle l'oppose a "la loi
declarative de 2001", lorsque la France a reconnu officiellement le
genocide armenien. L'historienne, qui en janvier avait denonce "une loi
mal ficelee", recuse le qualificatif de "loi memorielle". Pour elle,
si "la loi peut dire qu'il y a eu un genocide, qu'on va punir ceux qui
nient le genocide, elle ne peut en aucun cas obliger a la memoire du
genocide". "L'idee des lois memorielles est extremement restrictive
car ces sujets relèvent de questions ethiques et politiques sur la
negation de l'etre humain", ajoute-t-elle.
Annette Wieworka, specialiste de la memoire de la Shoah, rappelle "le
consensus" et le "contexte" qui entouraient le vote de la loi Gayssot,
"très differents" de ceux de la loi votee le 23 janvier dernier. "Dans
les annees 80, c'est une extreme droite antisemite qui s'emparait de
cette negation (...). Les historiens ne se sont pas prononces contre
cette loi et elle n'a jamais ete appliquee a aucun travail historique
qui donnait des interpretations differentes de ce qui s'est passe".
"La loi Gayssot n'est pas de meme nature que les autres lois. Je ne
voudrais pas que l'on pense qu'il y a deux poids, deux mesures entre
les Juifs et les autres, mais s'il faut la relire pour assurer une
liberte de la recherche, eh bien relisons la", dit-elle.
Si "l'hypothèque que cette loi faisait peser sur l'histoire est
balayee", dit Pierre Nora, "Paris doit exiger du gouvernement turc la
constitution d'une commission internationale d'historiens, patronnee
par exemple par l'Unesco, dont Ankara s'engagerait a accepter d'avance
les conclusions".
Annette Wieworka souscrit a cette idee. Elle suggère d'engager "Ankara
a ouvrir ses archives et a faire la lumière sur le genocide de 1915"
a l'occasion des futures commemorations du centième anniversaire du
debut de la Grande guerre.
Ara
armenews.com
jeudi 1er mars 2012
PARIS, 29 fev 2012 - La decision du Conseil constitutionnel de censurer
la loi sanctionnant la negation des genocides, dont celui des Armeniens
en 1915, ne remet pas en cause la loi Gayssot sur le negationnisme et
doit etre l'occasion de contraindre la Turquie a ouvrir ses archives,
estiment des historiens interroges par l'AFP.
Pour autant, cette decision, qui rejoint celle de la Cour europeenne
des droits de l'homme s'appuyant sur la liberte d'expression, sonne
"la fin des lois memorielles" dictees par le parlement, estiment
plusieurs d'entre eux a l'instar de Robert Badinter, ancien senateur
PS, garde des Sceaux et ancien president du Conseil constitutionnel.
"Elle ne remet absolument pas en cause la loi Gayssot (1990, qui
fait de la contestation des crimes contre l'humanite un delit),
au contraire, elle la met a l'abri", estime Pierre Nora, membre
de l'Academie francaise et president de l'association "Liberte pour
l'histoire". "C'est très habile, car cette decision enterine la loi de
2001 reconnaissant le genocide armenien par la France tout en disant
qu'elle ne peut penaliser sa contestation, ce qui serait contraire
a la liberte d'expression", ajoute M. Nora.
Le negationniste Robert Faurisson, rappelle au passage M. Nora,
"a ete condamne sur la base des lois de 1881 (reprimant notamment
l'encouragement a la haine raciale), anterieures a loi Gayssot". "Le
devoir des politiques est de s'occuper du passe mais pas de faire des
lois qui le qualifient, empechent de le discuter et qui brisent tout
travail historique", ajoute-t-il.
Annette Becker, professeur a Paris-ouest Nanterre, ne voit pas non plus
de danger pour la loi Gayssot, "basee sur le jugement du tribunal de
Nuremberg (autorite de la chose jugee) a laquelle a souscrit le droit
francais après la Seconde guerre mondiale". Elle l'oppose a "la loi
declarative de 2001", lorsque la France a reconnu officiellement le
genocide armenien. L'historienne, qui en janvier avait denonce "une loi
mal ficelee", recuse le qualificatif de "loi memorielle". Pour elle,
si "la loi peut dire qu'il y a eu un genocide, qu'on va punir ceux qui
nient le genocide, elle ne peut en aucun cas obliger a la memoire du
genocide". "L'idee des lois memorielles est extremement restrictive
car ces sujets relèvent de questions ethiques et politiques sur la
negation de l'etre humain", ajoute-t-elle.
Annette Wieworka, specialiste de la memoire de la Shoah, rappelle "le
consensus" et le "contexte" qui entouraient le vote de la loi Gayssot,
"très differents" de ceux de la loi votee le 23 janvier dernier. "Dans
les annees 80, c'est une extreme droite antisemite qui s'emparait de
cette negation (...). Les historiens ne se sont pas prononces contre
cette loi et elle n'a jamais ete appliquee a aucun travail historique
qui donnait des interpretations differentes de ce qui s'est passe".
"La loi Gayssot n'est pas de meme nature que les autres lois. Je ne
voudrais pas que l'on pense qu'il y a deux poids, deux mesures entre
les Juifs et les autres, mais s'il faut la relire pour assurer une
liberte de la recherche, eh bien relisons la", dit-elle.
Si "l'hypothèque que cette loi faisait peser sur l'histoire est
balayee", dit Pierre Nora, "Paris doit exiger du gouvernement turc la
constitution d'une commission internationale d'historiens, patronnee
par exemple par l'Unesco, dont Ankara s'engagerait a accepter d'avance
les conclusions".
Annette Wieworka souscrit a cette idee. Elle suggère d'engager "Ankara
a ouvrir ses archives et a faire la lumière sur le genocide de 1915"
a l'occasion des futures commemorations du centième anniversaire du
debut de la Grande guerre.