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Etude Du Genocide Des Armeniens: L'Impact A Long Terme Du Traumatism

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  • Etude Du Genocide Des Armeniens: L'Impact A Long Terme Du Traumatism

    ETUDE DU GENOCIDE DES ARMENIENS: L'IMPACT A LONG TERME DU TRAUMATISME DE MASSE

    www.collectifvan.org
    Publie le : 10-05-2012

    Info Collectif VAN - www.collectifvan.org - Le Collectif VAN vous
    livre cette information traduite par Georges Festa et publiee sur le
    site Armenian Trends - Mes Armenies le 14 avril 2012.

    Legende photo: © Praeger, 2009

    Armenian Trends - Mes Armenies

    samedi 14 avril 2012

    L'impact a long terme du traumatisme de masse

    " Explorer l'impact a long terme du traumatisme de masse sur la sante
    physique, la resilience et le sens : etude du genocide des Armeniens
    perpetre par les Turcs ottomans "

    par A. Kalayjian, N. Moore et C. Aberson

    Publie in : Kalayjian, Ani et Eugene, Dominique. Mass Trauma and
    Emotional Healing around the World : Rituals and practices for
    resilience and meaning-making [Traumatisme de masse et guerison
    emotionnelle a travers le monde : rituels et pratiques de resilience
    et d'elaboration de sens]. New York, NY : ABC-CLIO Publishing, 2010,
    p. 287-306

    www.keghart.com

    Resume

    Au cours du 20ème siècle, le genocide a fait de nombreuses victimes
    a travers le monde. A elles seules, les politiques genocidaires
    gouvernementales se sont traduites par plus de 210 millions de morts
    - dont 80 % de victimes civiles et qui representent près de quatre
    fois le nombre d'etres humains tues au combat lors des conflits
    internationaux et internes durant la meme periode. Il y a près de 90
    ans, sous couvert de la Première Guerre mondiale, les forces armees
    turques se sont employees de manière systematique a exterminer la
    population armenienne de la Turquie.

    La presente etude s'interesse a la manière avec laquelle les survivants
    armeniens ont gere le genocide, a ce qui leur donna la force de s'en
    tirer, a leur niveau de trouble de stress post-traumatique (TSPT),
    a l'etendue de la symptomatologie physique et aux significations
    associees au traumatisme, tels qu'ils se manifestent dans certains
    aspects de recits de survivants emanant de 16 Americains armeniens
    (nes avant 1917), qui furent temoins du genocide des Armeniens perpetre
    par les Turcs ottomans.

    Les resultats preliminaires indiquent que, meme si ces survivants
    se sont adaptes et ont reussi dans leur vie en Amerique, certains
    niveaux de troubles de stress post-traumatique (TSPT) perdurent. Ceux
    qui ont trouve un sens positif a leur vecu s'en sortent mieux et leur
    niveau de TSPT et de symptomatologie physique est moins eleve. Ce
    projet de recherche fait suite a une etude dans laquelle des styles
    et des modèles de resilience de survivants armeniens ont ete etudies,
    80 ans après les evenements. Cette etude revèle que face a la toile
    de fond des pertes et des atrocites, en dehors de l'objectif d'une
    experience de vie conventionnelle, ces survivants âges temoignent
    d'un sens de la reussite tempere par une colère visant le deni des
    perpetrateurs quant aux modalites de leur victimisation.

    Introduction

    Bien que des genocides aient ete perpetres au cours des siècles, ce
    n'est qu'en 1948, en reponse au genocide des Juifs, que la Convention
    des Nations Unies pour la prevention et la repression du crime de
    genocide fit du genocide un " crime au regard du droit international "
    (Declaration Universelle des Droits de l'Homme, 2000-2008).

    Retrospectivement, le genocide aurait dû etre reconnu plus tôt a
    travers le monde en general. Le genocide perdure a ce jour, tandis
    que les auteurs redigent cet essai. Une des raisons de l'attention
    croissante portee au genocide est le genocide en cours au Soudan,
    perpetre contre la population du Darfour. Ce genocide a debute en
    2003, a fait au moins un million de victimes et deplace 2,3 millions
    d'habitants. Les enseignants renoncent a l'incantation " Plus jamais !

    " et retiennent l'idee que le genocide ne cesse de se produire. Un
    des objectifs corollaires de cette recherche est d'eduquer les jeunes
    quant aux modalites du genocide et de son apparition, pour qu'il
    y ait une chance de prevention. Le but des auteurs est de faire du
    genocide au Darfour l'ultime genocide du 21ème siècle.

    Environ 1,5 million d'Armeniens furent massacres entre 1915 et 1923
    dans l'empire turc ottoman, alors aux mains des Jeunes-Turcs. Henry
    Morgenthau, alors ambassadeur des Etats-Unis dans l'empire ottoman,
    fut temoin d'un des premiers exemples de genocide dans le monde "
    civilise ". Etant donne l'absence de toute legislation internationale
    prohibant l'extermination d'une race, Morgenthau fut incapable de
    mettre un terme au genocide armenien, en depit de plusieurs telegrammes
    adresses au Departement d'Etat des Etats-Unis. Aucune mesure ne fut
    prise par l'empire ottoman afin d'empecher le genocide.

    L'histoire etait donc vouee a se repeter. Adolf Hitler declara un
    jour : " Qui parle aujourd'hui de l'extermination des Armeniens ? "
    (Armenian National Institute [Institut National Armenien], 1998-2008).

    Galvanisant les soutiens pour sa " solution finale " du " problème "
    juif dans l'Allemagne nazie, Hitler capitalisa sur le genocide oublie
    des Armeniens.

    Le 25 mars 1915, appuye par les Jeunes-Turcs au pouvoir, le ministre
    de l'Interieur, Talaat Pacha, ordonna sa " solution finale " pour les
    Armeniens vivant dans la Turquie ottomane : " Le devoir de chacun
    est de contribuer le plus largement possible a la realisation du
    noble projet d'eradiquer l'existence d'elements bien connus qui,
    durant des siècles, ont fait obstacle au progrès de l'empire vers la
    civilisation. " (The First World War, 2000-2007).

    La langue employee dans cet ordre livre nombre d'apercus quant aux
    intentions, aux circonstances et a la signification du genocide
    des Armeniens. Les Armeniens incarnaient une menace concurrente et
    un problème ethnique pour l'empire ottoman, a mesure que ce meme
    empire retrecissait et perdait sa stabilite politique. Les Armeniens,
    premier groupe a avoir adopte le christianisme, se heurtèrent aux
    Turcs musulmans nationalistes. Bien avant le genocide armenien,
    les Armeniens representaient une menace coloniale pour la Russie en
    Transcaucasie, et auparavant ils furent envahis par la Perse.

    Traditionnellement, les Armeniens etaient des marchands prospères qui
    constituaient une large secteur de la bourgeoisie en Transcaucasie
    russe. Les Russes tiraient benefice et contrôlaient le negoce
    armenien. Or les Turcs ne se soucièrent pas de profiter du commerce
    armenien, y voyant une menace. Ces memes Turcs voulurent donc eliminer
    totalement les Armeniens et s'etendre en direction des territoires
    armeniens. " Les Turcs voulaient ecarter les Armeniens de leur route ;
    ils convoitaient aussi les richesses des Armeniens et se preparèrent
    a tuer, torturer et mutiler pour les obtenir. Leurs motifs etaient
    anciens ; les moyens pour y parvenir furent nouveaux et effrayants. "
    (Winter, 2003, p. 209-210).

    En 1914, la combinaison de la forte identite chretienne des Armeniens,
    leurs liens avec la Russie (que la Turquie avait combattue en Armenie)
    et leur omnipresence dans la bourgeoisie incitèrent les Turcs a vouloir
    eliminer ce qu'ils percevaient comme une menace armenienne. De fait,
    Talaat Pacha reprochait aux Armeniens d'entraver l'expansion de la
    Turquie. Via ses ordres de deportation, il reproche clairement aux
    Armeniens le fait de constituer un obstacle aux progrès de l'empire
    vers la civilisation (voir plus haut). Les Jeunes-Turcs n'auraient pas
    tolere un empire multiethnique. En realite, c'est l'essence meme de
    l'identite armenienne chretienne qui menacait l'empire turc. D'après
    Vahakn N. Dadrian (1994), la deportation et le meurtre d'un million
    et demi d'Armeniens visaient a debarrasser la Turquie orientale
    d'une ancienne et prospère communaute, dont les habitants armeniens
    suscitaient de la jalousie et qui etaient percus comme ennemis en temps
    de guerre. En consequence, lorsque les deportations commencèrent, les
    Turcs deportèrent les representants les plus influents et les plus
    puissants de la communaute armenienne, âges de 18 a 45 ans, parmi
    lesquels des dirigeants, des ecclesiastiques, des intellectuels,
    des hommes d'affaires et des journalistes. Les Armeniens etaient
    craints des Jeunes-Turcs du fait de leur identite intellectuelle et
    culturelle, qui menacait l'empire turc ottoman.

    Le christianisme constitue une part centrale de l'identite armenienne ;
    aussi les perpetrateurs s'en prirent-ils au christianisme armenien.

    Balakian (2004) rapporte qu'une Armenienne se vit remettre les
    vetements ensanglantes de son fils decede ; un Turc la conduisit
    alors vers une eglise - en clair, un element significatif de la
    religion armenienne. " Dans cette eglise, le Turc designa la croix
    et lui dit : 'Agenouille-toi et prie ! On te fera ca, comme vous
    l'avez fait au Christ ! He la mère ! Prie pour ton fils ! N'as-tu
    pas foi en la resurrection ?' " Ce genre de souffrance psychologique,
    que tant d'Armeniens connurent lors du genocide, hantera a jamais les
    survivants. Membre de la diaspora armenienne, Balakian medite sur la
    nature catastrophique du genocide :

    " Qu'est-ce que cela signifie, lorsqu'un peuple aimant, travailleur,
    qui bâtit une culture sur la terre où il vecut durant trois mille ans,
    est detruit ? Qu'est-ce que cela signifie pour la transmission de la
    culture ? Qu'est-ce que cela signifie pour la race humaine ?

    Lorsqu'une civilisation est effacee, de nouvelles tenèbres s'abattent
    sur la terre. Je puis sentir la poussière souffler sur la terre sèche,
    la où maintenant le sang fait partie des rochers, et où plus jamais
    une eau claire ne s'ecoulera. " (p. 253)

    Balakian pose nombre de questions importantes quant a l'impact du
    genocide sur les survivants. De fait, les Turcs, a l'instar de tous
    les perpetrateurs, cherchèrent a " detruire le sentiment d'autonomie
    de la victime " (Herman, 1997, p. 77). Il importe donc de saisir
    et de comprendre les repercussions de l'elimination de l'autonomie
    personnelle, en particulier ses ramifications psychologiques.

    Dans son ouvrage, Trauma and Recovery [Traumatisme et guerison] (1997),
    Herman souligne l'importance d'un environnement social positif, suite
    a un traumatisme de masse. Dans les cas de genocide, le trouble de
    stress post-traumatique est prevalent chez les survivants, du fait
    du traumatisme de masse a long terme suscite par le fait d'avoir
    ete temoin de morts, de destructions, de famine, de tortures et de
    deplacement force.

    Recensions

    Durant le 20ème siècle, le genocide a coûte d'innombrables vies a
    travers le monde. Les Juifs d'Europe Orientale lors de la Shoah, les
    Armeniens dans l'empire turc ottoman et les Africains du Rwanda et du
    Soudan ne sont que quelques-uns de ceux qui en ont souffert. A elles
    seules, les politiques genocidaires gouvernementales ont entraîne
    plus de 210 millions de morts - dont 80 % de victimes civiles (170
    millions) - un chiffre qui represente près de quatre fois le nombre
    d'individus tues lors de combats, durant les conflits internationaux
    et internes pour cette meme periode (Robinson, 1998 ; Rummel, 1996).

    Ces statistiques n'incluent pas les violations des droits de l'homme
    et sous-estiment notablement le coût additionnel en terme de vies
    humaines, lie aux cicatrices physiques et psychologiques.

    Bien que comptant moins de dix ans, le 21ème siècle a deja demontre
    qu'il n'est pas plus exempt ou mieux protege du dechaînement macabre
    du genocide. La region du Darfour au Soudan est la dernière region
    qui abrite et subit quotidiennement des massacres motives au plan
    ethno-politique. Tandis que beaucoup de gens continuent de mourir,
    les survivants seront contraints de gerer les effets traumatiques,
    bien après la fin du conflit. En depit de cette sinistre realite,
    la psychologie est seule qualifiee pour traiter les consequences de
    telles atrocites (Woolf, 2000).

    Si les definitions particulières peuvent varier, le fil commun entre
    les genocides est la mort et l'intention de detruire en partie ou en
    totalite un groupe ethnique (Office du Haut-Commissariat des Nations
    Unies pour les Droits de l'homme, 2008). La mort resulte souvent
    des conditions de torture physique, que sont l'epuisement, la faim,
    la deshydratation et la maladie (Kalayjian, Shahinian, Gergerian
    et Saraydarian, 1996). En clair, ceci fait de l'etude scientifique
    des effets psychologiques du genocide une tâche plutôt ardue. De
    nombreuses victimes de genocide ne survivent pas, et souvent celles
    qui ont cette chance ne souhaitent pas revivre leur traumatisme a
    des fins de recherche scientifique. Outre le coût physique evident,
    les survivants de genocide sont aux prises avec de nombreux effets
    psychologiques durables lies a leur traumatisme (Kalayjian et al.,
    1996). En 1995, Athanase Hagengimana mena une enquete auprès de
    survivants du genocide tutsi au Rwanda et decouvrit deux ensembles
    communs de symptômes :

    1. Le trouble de stress post-traumatique (TSPT) - Ihahamuka, mot que
    les Rwandais ont cree après le genocide, est principalement utilise
    pour les enfants ou les personnes qui s'effraient facilement, ont
    des cauchemars lies au traumatisme et qui evitent souvent ceux qui
    leur rappellent des evenements traumatiques. Ce qui s'applique aux
    cas de nombreux enfants et adultes, qui ne peuvent supporter de voir
    des soldats en uniforme, car ils ont ete temoins de soldats tuant
    leurs proches lors du genocide de 1994.

    2. La douleur traumatique chronique - La douleur traumatique s'est
    revelee très repandue. Comme 91 % des survivants n'ont pas eu la chance
    d'enterrer leurs proches ou d'accomplir des rituels funeraires, cela
    a affecte leur processus de deuil. Parmi les survivants interviewes,
    88 % n'avaient pas encore vu les cadavres de leurs proches.

    Hagengimana (1995) decouvrit que les habitudes des survivants, suite
    au genocide, sont elles aussi appelees ihahamuka. Celles-ci incluent
    des comportements asociaux chez les jeunes (a savoir, promiscuite
    pour les jeunes filles et les veuves), addiction a la boisson qui
    n'existait pas avant le genocide, agressivite et irritabilite notables
    envers autrui. Guerison des blessures et justice pour les survivants
    semblent etre des exigences incontournables pour toute reconciliation.

    Schiraldi (2000) voit dans le trouble de stress post-traumatique
    (TSPT) une reaction normale de gens normaux a des situations
    anormales. Si le TSPT peut succeder a des desastres commis tant
    par la nature que par l'homme, ces derniers peuvent etre plus
    difficiles a gerer. Frequemment, les perpetrateurs continuent
    de vivre dans une grande proximite avec les victimes - rappelant
    ainsi constamment le passe, tout en menacant l'avenir. Meme si la
    source immediate du traumatisme est supprimee, le temps n'apaise
    pas necessairement toutes les blessures. Le survivant peut, en
    fait, continuer a souffrir, apparaître comme " fige dans le temps "
    (Brahm, 2003-2007). La culpabilite du survivant constitue elle aussi
    un symptôme douloureux, associe aux genocides et au TSPT (Niederland,
    1981). Danieli (1988) a decrit des fonctions de resilience vis-a-vis
    de ce genre de culpabilite parmi des survivants de la Shoah sous la
    forme de commemorations. La culpabilite des survivants, soutient-elle,
    preserve une loyaute envers les non-survivants, proposant un cimetière
    symbolique a l'attention de ceux qui se sont vus refuser a jamais
    un lieu legitime de repos. Du fait de la profonde colère suscitee
    par le deni de la Turquie, la nature de la culpabilite du survivant
    armenien n'est pas necessairement identique (Kupelian, Kalayjian et
    Kassabian, 1998). La comorbidite accompagne habituellement le TSPT,
    tandis qu'entre 62 et 92 % des patients souffrant de TSPT connaissent
    un trouble psychiatrique anterieur ou parallèle, contre une fourchette
    allant seulement de 15 a 33 % des groupes comparables, exempts de TSPT
    (Helzer, Robins et McEvoy, 1987).

    Dans une etude menee en 1996 sur des adultes plus âges, survivants du
    genocide armenien, Kalayjian et al. decouvrirent que les survivants
    identifiaient destruction de la vie, harcèlement physique, deportation,
    pillage et perte du statut social comme les principaux vecteurs
    de stress qu'ils etaient obliges de subir. La profondeur d'un tel
    traumatisme peut avoir ete modulee par la decision de nombreux
    survivants de ne pas parler de leur vecu avant cette enquete. Aucun
    consensus n'existe quant a savoir pourquoi les survivants choisissent
    de garder le silence. Certains estiment que cela resulte de sentiments
    d'humiliation, de faiblesse et de peur (Mazor, Gampel, Enright et
    Orenstein, 1990). D'autres restent silencieux par crainte d'etre
    tortures a nouveau (Kalayjian et Shahinian, 1998). Danieli (1982) a
    mis en evidence le fait que la peur et l'isolement inhibent le deuil
    des survivants d'un genocide. Ceci est particulièrement important,
    du fait de la correlation positive entre la capacite des survivants
    d'un genocide a communiquer leur vecu d'evenements traumatisants et
    leur sante post-traumatique (Cahn, 1987). Les methodes de resilience
    passent habituellement par la religion, la famille, le travail et le
    deni (Kalayjian et al., 1996).

    D'après Herman (1997), le stress post-traumatique se manifeste
    habituellement de trois manières :

    - premièrement : l'hyperemotivite, issue d'une vigilance continuelle
    dans l'espoir que l'experience vecue ne revienne pas - deuxièmement :
    le souvenir traumatisant est omnipresent dans l'esprit de la personne
    traumatisee. Ce souvenir survient a repetitions, a la manière d'un
    flashback, pouvant survenir a tout moment, et la victime est incapable
    de distinguer le souvenir du fait de vivre effectivement l'evenement
    a nouveau.

    - troisièmement : les individus traumatises semblent indifferents,
    afin de dissimuler un sentiment de vulnerabilite et d'impuissance.

    Ce genre de traumatisme affecte autant les individus que les
    communautes. Un accroissement dans la prevalence du traumatisme peut
    conduire a une diminution de confiance au sein d'un groupe social. Le
    traumatisme evolue souvent hors de contrôle dans un cycle pervers. Les
    violations des droits de l'homme creent un traumatisme massif,
    lequel peut, en retour, alimenter de nouvelles violations des droits
    de l'homme, et ainsi de suite. Des sentiments de traumatisme peuvent
    susciter des sentiments de frustration et de revanche, lesquels peuvent
    produire ce cycle de violence et perpetuer des sentiments d'identite de
    victime des deux côtes du conflit. Le traumatisme partage engendre un "
    nous ressentons ", mais cree aussi une mentalite du " nous contre eux "
    (United States Institute of Peace, 2001).

    Les hommes, les femmes et les enfants sont-ils affectes differemment ?

    Les femmes risquent très souvent d'etre marginalisees, après que maris
    et enfants aient ete tues lors d'un conflit (Kalayjian et al., 1996).

    Elles sont souvent humiliees, ayant le sentiment qu'elles ne peuvent
    rien faire pour endiguer la violence. Qui plus est, la perte d'un
    mari ou enfant peut entraver la possibilite pour elles de subvenir
    a leur famille, aggravant ainsi l'humiliation. Les enfants eux aussi
    font face a un traumatisme particulièrement difficile. Ils manquent
    d'un developpement emotionnel et d'un vecu susceptible de donner sens
    au traumatisme, plus souvent meme que les adultes (Brahm, 203-2007).

    Jarman (2001) note en Tchetchenie que des evenements traumatisants
    suscitent souvent une colère extreme parmi les adolescents, dont les
    existences ont ete devastees et qui ont ete, de fait, prives de leur
    jeunesse. Sans surprise, les enfants devenus orphelins du fait d'un
    genocide sont souvent recrutes immediatement en tant que soldats.

    Les enfants de survivants sont susceptibles de reprendre des
    comportements d'adultes au cours de leur vie, donnant ainsi au
    traumatisme la possibilite d'etre transmis au fil des generations. Si
    les parents tentent parfois de couvrir et de proteger leurs enfants
    de la connaissance du traumatisme, les enfants qui percoivent le
    fait qu'un parent est incapable de tolerer certains effets, cesseront
    d'en faire l'experience et de les exprimer, dans une tentative pour
    proteger le lien avec le parent concerne (Kalayjian, 2002).

    Il y a plus d'un demi-siècle, Sullivan a souligne l'importance de la
    " validation " d'un traumatisme, afin de parvenir a sa resolution
    et y mettre un terme (Sullivan, 1953). Une expression explicite de
    remords, de la part d'un perpetrateur a l'egard d'une victime, peut
    revetir une grande valeur d'apaisement (Staub, 1990). A l'oppose, le
    deni perpetue le traumatisme et permet aux perpetrateurs d'esquiver
    les consequences de leurs actes (Hovannisian, 1987). Dans le cas des
    Turcs et des Armeniens, il n'y a jamais eu reconnaissance officielle
    du genocide perpetre par le gouvernement turc. Des Pres voit a juste
    titre dans la souffrance des Armeniens une souffrance empreinte d'
    " une perte permanente et de la souffrance d'une memoire tournee en
    derision par le deni " (Des Pres, 1987, p. 17). Outre les dommages
    qu'un tel deni cause aux victimes concernees et a leurs familles, il
    peut clairement instituer un precedent dangereux pour des massacres
    genocidaires ulterieurs (Smith, Markusen et Lifton, 1995). La preuve
    la plus recente en est toute cette serie de genocides qui continuent a
    se produire dans plusieurs pays d'Afrique subsaharienne. La violence
    au Darfour s'est deployee moins de dix ans après le genocide survenu
    chez son voisin, le Rwanda. Apparemment, le genocide peut engendrer un
    genocide. " Une fois l'extermination des Armeniens rendue negligeable,
    les exterminations de la Shoah furent rendue possibles. " (Kupelian
    et al., 1998, p. 206).

    Stanton (1996) enumère les huit etapes du genocide : classification,
    symbolisation, deshumanisation, organisation, polarisation,
    preparation, extermination et negation. Chacune de ces etapes decline
    l'extermination d'une population humaine.

    Le premier auteur de cette etude a propose huit phases de guerison,
    suite a un genocide, a savoir : la reconnaissance, la validation,
    la reparation, affronter des sentiments negatifs (tels que la
    colère, la peur, la honte et l'humiliation), affronter le deni et le
    revisionnisme, parvenir a l'acceptation, au pardon, a la decouverte
    d'un sens nouveau, des enseignements appris et la clôture (Kalayjian,
    2005).

    Methode

    Participants

    Les participants a cette recherche etaient des Americains armeniens
    âges, nes avant 1917, qui avaient ete temoins du genocide armenien et
    qui etaient volontaires pour participer a cette etude. Les participants
    etaient au nombre de 16 (9 femmes et 7 hommes). L'âge des participants
    allait de 79 a 93 ans, pour une moyenne de 85,3 ans. Dans ce groupe,
    50 % avaient fait des etudes superieures ; 43 % avaient immigre aux
    Etats-Unis entre 1912 et 1952 ; 56 % etaient arrives après 1966. Tous
    les participants etaient maries, 56 % etaient devenus ensuite veufs
    et 87 % avaient eu des enfants. Au plan professionnel, le groupe le
    plus nombreux (31 %) avait travaille dans l'industrie du vetement
    (retouchage, sur mesure et confection). Le second groupe le plus
    nombreux (25 %) comprenait soit des proprietaires, soit des gerants
    d'un magasin. Le troisième groupe en importance se composait de femmes
    au foyer (12 %) et de dentistes (12 %). Une personne avait travaille
    dans l'enseignement, une autre dans la pharmacie et une troisième
    standardiste. Concernant la religion, 87 % etaient de confession
    apostolique et 12 % de confession catholique.

    Durant la periode 1995-2005, tous les participants furent interviewes
    chez eux dans la region metropolitaine de New York. La langue première
    de certains participants etant l'armenien, les questions qui leur
    furent posees et les formulaires remis le furent en armenien.

    Formulaires qui furent traduits, puis traduits a nouveau.

    Procedure

    Le formulaire de l'entretien consistait en 23 questions visant
    a rassembler des donnees demographiques factuelles. La duree de
    l'entretien s'etalait de 30 minutes a quatre heures. Un formulaire de
    mini-examen de l'etat mental (MMSE - Examen de Folstein sur l'etat
    mental) fut remis afin d'evaluer l'etat cognitif et son eventuelle
    deterioration. Ce formulaire evalue l'orientation, la memoire
    immediate et a court terme, le langage et la capacite a suivre des
    commandes verbales simples. Le MMSE a demontre sa validite et sa
    fiabilite en psychiatrie, en neurologie, en geriatrie et dans d'autres
    populations medicales (Folstein, Folstein et McHugh, 1975). Bien que
    ce formulaire n'exige qu'une trentaine de minutes pour etre renseigne,
    de nombreux survivants voulurent parler longuement, faisant durer
    l'interview jusqu'a quatre heures. L'Inventaire Bref des Symptômes
    (Brief Symptom Inventory - BSI) est un inventaire de symptômes
    signales par le patient, constitue de 53 questions, dans le but de
    refleter les modalites de symptômes psychologique des patients en
    psychiatrie et en medecine, ainsi que des personnes interrogees, non
    patients, appartenant a une communaute (Derogatis, 1993). Le BSI est
    une echelle de Likert qui comprend des resultats bruts allant de 0 a
    212. Ces resultats bruts sont ensuite convertis en scores-T [resultats
    standardises] pour chaque niveau. Cet inventaire enregistre le profil
    de neuf dimensions symptomatiques primaires et trois indices globaux
    de detresse (Derogatis). Les dimensions symptomatiques primaires
    sont : 1) la somatisation, 2) l'etat obsessif-compulsif (O-C), 3)
    la sensibilite interpersonnelle (I-S), 4) la depression (DEP), 5)
    l'anxiete (ANX), 6) l'hostilite (HOS), 7) l'anxiete phobique (PHOB),
    8) l'ideation paranoïaque (PAR), 9) l'etat psychotique (PSY). Les
    participants donnèrent des scores-T en SOM de 41 a 80, O-C de 38 a
    72, I-S de 38 a 74, DEP de 41 a 61, ANX de 38 a 72, HOS de 39 a 70,
    PHOB de 44 a 72, PAR de 43 a 80, et PSY de 46 a 67.

    Les indices globaux sont : Index General de Severite (IGS), Total
    des symptômes positifs (TSP) et Index de detresse des symptômes
    positifs (IDSP). Les participants donnèrent des scores-T en IGS
    allant de 33 a 73, en TSP de 30 a 70, et en IDSP de 30 a 65. Cet
    outil fut choisi, du fait de la fiabilite elevee de sa coherence
    interne. Les coefficients alpha pour les 9 dimensions du BSI vont
    d'une valeur basse .71 pour l'etat psychotique a celle haute .85 pour
    la depression (Derogatis, 1993). Le questionnaire sur l'objet de la
    vie [Life Purpose Questionnaire - LPQ] fut utilise afin d'evaluer
    l'appreciation personnelle du sens de l'existence. Il s'agit d'un
    questionnaire qui produit des resultats allant de 0 a 20. Ces resultats
    vont de ne voir aucun sens a la vie a une signification precise donnee
    a la vie. Les participants donnèrent des resultats allant de 13 a
    19. Ce questionnaire fut choisi du fait de sa fiabilite test-retest,
    laquelle se traduit par une correlation .90. En outre, les questions
    du LPQ sont concues pour etre aisement comprises et renseignees par
    certaines personnes (Hutzell, 1987, cite in Derogatis).

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    Mes Armenies

    Source : http://www.keghart.com/Kalayjian-et-al-PTSD Article publie
    en mars 2012.

    Traduction : © Georges Festa - 04.2012.

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    Source/Lien : Armenian Trends - Mes Armenies

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