TURQUIE : APRES DEBATS EN VUE POUR LA REDACTION D'UNE NOUVELLE CONSTITUTION
Stephane
armenews.com
jeudi 10 mai 2012
Le Parlement turc s'est lance dans la redaction d'une nouvelle
Constitution censee effacer toute empreinte des generaux putschistes,
un projet ambitieux devenu le nouveau champ de bataille entre le
pouvoir islamo-conservateur et l'opposition.
"La phase de redaction de la nouvelle constitution a debute", a annonce
lundi le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan. Et de reaffirmer son
intention de transformer le système parlementaire actuel en système
presidentiel, a l'oree des presidentielles de 2014.
Dominant la politique turque depuis dix ans, M. Erdogan, qui dirige
le Parti de la Justice et du developpement (AKP, issu de la mouvance
islamiste) a fait de la Turquie un acteur regional avec une croissance
economique vigoureuse (8,5% en 2011) qui fait pâlir d'envie l'Union
europeenne, a laquelle Ankara veut adherer.
Il a remporte trois elections legislatives successives depuis 2002 mais
ne pourra briguer un quatrième mandat, selon les statuts de l'AKP. Il
souhaiterait, selon les commentateurs, echanger son poste de Premier
ministre pour celui d'un president disposant de vrais pouvoirs,
et continuer a diriger le pays.
"Nous allons discuter de tout cela, qu'il s'agisse d'un système
presidentiel ou semi-presidentiel", a-t-il dit lundi, ajoutant que
le dernier mot reviendrait au Parlement, où l'AKP est très majoritaire.
Deja accuse d'autoritarisme par l'opposition - les arrestations de
journalistes se sont multipliees ces derniers mois - M. Erdogan et
ses ambitions provoquent la controverse.
"On vit deja sous un semi-diktat, allons nous vers une dictature
constitutionnelle ?" s'est interroge Riza Turmen, depute du principal
parti pro-laïc CHP (Parti republicain du peuple), et ex-juge a la
Cour europeenne des droits de l'Homme.
"Nous ne sommes pas favorables a un système presidentiel", averti
Devlet Bahceli, le chef de file des nationalistes au Parlement. "Si
tout se passe comme il (Erdogan) le souhaite, et qu'il devient le
premier President de Turquie avec des pouvoirs a l'americaine ou a la
francaise, il y aura debat sur la separation des pouvoirs", estime
Murat Yetkin, redacteur en chef du journal Hurriyet Daily News. Une
commission parlementaire speciale a consulte la societe civile et les
minorites religieuses pour bâtir un texte qui sera le quatrième depuis
la creation de la Republique turque, en 1923. L'objectif est d'elaborer
un texte plus democratique remplacant l'actuelle constitution heritee
des generaux qui avaient pris le pouvoir en 1980.
M. Erdogan s'est dit favorable a un texte qui "mettra en avant le
citoyen et non l'Etat". Le projet serait acheve d'ici la fin de
l'annee et soumis a referendum.
Des reformes introduites par l'AKP ont considerablement reduit
l'influence des militaires, jadis acteurs politiques majeurs
et gardiens auto-proclames de la laïcite. Des dizaines de hauts
grades sont en prison, accuses de complots contre le regime. Mais
la constitution de 1982 est restee en vigueur, en depit de nombreux
amendements.
D'âpres batailles sont a prevoir au Parlement sur le nouveau texte
: le parti pro-kurde de la paix et de la democratie (BDP) veut des
droits accrus pour les 12 a 15 millions de Kurdes (sur une population
de 73 millions), ce a quoi sont opposees les autres formations.
Et le CHP, qui denonce une derive islamiste du pouvoir, exige que les
references au fondateur de la Turquie moderne, Mustafa Kemal Ataturk,
et a son heritage laïc soient maintenues dans le nouveau texte. "De
serieuses interrogations subsistent sur la methode a adopter. Ce
processus peut a tout moment s'enliser", previent Ibrahim Kaboglu
de l'Universite stambouliote de Marmara, qui fait partie des experts
consultes.
From: A. Papazian
Stephane
armenews.com
jeudi 10 mai 2012
Le Parlement turc s'est lance dans la redaction d'une nouvelle
Constitution censee effacer toute empreinte des generaux putschistes,
un projet ambitieux devenu le nouveau champ de bataille entre le
pouvoir islamo-conservateur et l'opposition.
"La phase de redaction de la nouvelle constitution a debute", a annonce
lundi le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan. Et de reaffirmer son
intention de transformer le système parlementaire actuel en système
presidentiel, a l'oree des presidentielles de 2014.
Dominant la politique turque depuis dix ans, M. Erdogan, qui dirige
le Parti de la Justice et du developpement (AKP, issu de la mouvance
islamiste) a fait de la Turquie un acteur regional avec une croissance
economique vigoureuse (8,5% en 2011) qui fait pâlir d'envie l'Union
europeenne, a laquelle Ankara veut adherer.
Il a remporte trois elections legislatives successives depuis 2002 mais
ne pourra briguer un quatrième mandat, selon les statuts de l'AKP. Il
souhaiterait, selon les commentateurs, echanger son poste de Premier
ministre pour celui d'un president disposant de vrais pouvoirs,
et continuer a diriger le pays.
"Nous allons discuter de tout cela, qu'il s'agisse d'un système
presidentiel ou semi-presidentiel", a-t-il dit lundi, ajoutant que
le dernier mot reviendrait au Parlement, où l'AKP est très majoritaire.
Deja accuse d'autoritarisme par l'opposition - les arrestations de
journalistes se sont multipliees ces derniers mois - M. Erdogan et
ses ambitions provoquent la controverse.
"On vit deja sous un semi-diktat, allons nous vers une dictature
constitutionnelle ?" s'est interroge Riza Turmen, depute du principal
parti pro-laïc CHP (Parti republicain du peuple), et ex-juge a la
Cour europeenne des droits de l'Homme.
"Nous ne sommes pas favorables a un système presidentiel", averti
Devlet Bahceli, le chef de file des nationalistes au Parlement. "Si
tout se passe comme il (Erdogan) le souhaite, et qu'il devient le
premier President de Turquie avec des pouvoirs a l'americaine ou a la
francaise, il y aura debat sur la separation des pouvoirs", estime
Murat Yetkin, redacteur en chef du journal Hurriyet Daily News. Une
commission parlementaire speciale a consulte la societe civile et les
minorites religieuses pour bâtir un texte qui sera le quatrième depuis
la creation de la Republique turque, en 1923. L'objectif est d'elaborer
un texte plus democratique remplacant l'actuelle constitution heritee
des generaux qui avaient pris le pouvoir en 1980.
M. Erdogan s'est dit favorable a un texte qui "mettra en avant le
citoyen et non l'Etat". Le projet serait acheve d'ici la fin de
l'annee et soumis a referendum.
Des reformes introduites par l'AKP ont considerablement reduit
l'influence des militaires, jadis acteurs politiques majeurs
et gardiens auto-proclames de la laïcite. Des dizaines de hauts
grades sont en prison, accuses de complots contre le regime. Mais
la constitution de 1982 est restee en vigueur, en depit de nombreux
amendements.
D'âpres batailles sont a prevoir au Parlement sur le nouveau texte
: le parti pro-kurde de la paix et de la democratie (BDP) veut des
droits accrus pour les 12 a 15 millions de Kurdes (sur une population
de 73 millions), ce a quoi sont opposees les autres formations.
Et le CHP, qui denonce une derive islamiste du pouvoir, exige que les
references au fondateur de la Turquie moderne, Mustafa Kemal Ataturk,
et a son heritage laïc soient maintenues dans le nouveau texte. "De
serieuses interrogations subsistent sur la methode a adopter. Ce
processus peut a tout moment s'enliser", previent Ibrahim Kaboglu
de l'Universite stambouliote de Marmara, qui fait partie des experts
consultes.
From: A. Papazian