L'EXEMPLE TURC NE FAIT PLUS REVER
www.collectifvan.org
Publie le : 15-05-2012
Info Collectif VAN - www.collectifvan.org - Le Collectif VAN vous
livre cette information publiee sur le site des Amities kurdes de
Bretagne le 14 mai 2012.
Le temps où la Turquie etait presentee comme un veritable modèle de
pays musulman, democratique et moderne est-il revolu ? C'est peut-etre
aller vite en besogne mais les lignes peuvent incontestablement bouger
en France et, si c'etait le cas, cette evolution ne serait pas sans
influence sur les pays europeens. Les questions kurde et armenienne
sont des echardes qui finissent par dechirer le voile de respectabilite
du parti au pouvoir AKP, un parti islamiste conservateur mais de
moins en moins modere, place sous la houlette d'un Premier ministre
de plus en plus autoritaire qui, jusqu'a present, a beneficie de la
mansuetude de l'Union europeenne et du soutien des Etats-Unis.
L'effet boomerang de l'arret du conseil constitutionnel.
Les arrets du Conseil constitutionnel où la forme prime sur le fond,
le droit sur la morale, sont de plus en plus sujets a caution, comme
celui abrogeant le delit de harcèlement sexuel. L'arret invalidant
la loi punissant la negation du genocide armenien a suscite maintes
reactions, des debats d'idees, certes, sur l'exercice de la liberte
d'expression mais aussi d'autres commentaires où le droit n'est pas
la preoccupation première : " Briser des liens d'amitie avec ce pays
laïc [la Turquie] emblematique d'une esperance d'un islam moderne
est lamentable." peut-on lire sur le blog du depute Jean Michel
Boucheron, en date du 6 fevrier 2012, signataire du recours au Conseil
Constitutionnel et très attache aux liens qui unissent nos deux pays,
surtout aux liens commerciaux : " C'est un partenaire commercial
fondamental pour la France et l'Europe. [...] L'Union europeenne a
une croissance 1,5 %, celle de la Turquie est de 10 %. Qui a le plus
besoin de l'autre ? [...] Ce pays souffre de cliches vehicules par des
demagogues ou des ignorants." (Intervention a l'Assemblee Nationale
le 9 novembre 2010).
Le nouveau president de la Republique francaise, Francois Hollande,
n'est pas sur cette ligne, Il a au contraire confirme qu'il voulait
engager, en debut de mandat, dans la serenite, un processus, qui
devra aboutir a la penalisant du negationnisme :
"J'ai cette conviction qu'il relève de la responsabilite des
Etats de reconnaître les genocides, lorsqu'ils sont averes par la
recherche historique, comme l'est le genocide armenien, et que le
negationnisme est une expression de violence qui n'a pas sa place
dans notre Republique".
C'est fâcheux pour le depute sortant, Jean-Michel Boucheron qui
justifie sa candidature sur la 1ere circonscription d'Ille-et-Vilaine
en tant que depute independant - le Parti socialiste ayant prefere
donner son investiture a M-A Chapdelaine, adjointe au maire de Rennes
- en arguant sur le fait que le nouveau president aura besoin de son
experience et de ses competences.
La derive autocrate d'un dictateur en puissance
C'etait un lieu commun il y a quelques mois : les animateurs du
printemps arabe, tunisiens ou egyptiens, s'inspireraient a coup sûr de
l'exemple turc. C'est a dire de cet islamisme modere de la Turquie
qui pouvait coexister avec la democratie et qu'on citait un peu
partout en exemple... et pas uniquement dans les pays musulmans. Il
faut aujourd'hui dechanter : non seulement parce que la victoire
electorale des islamistes, tant au Caire qu'a Tunis, inspire les
plus grandes craintes en matière de Droits de l'Homme - et surtout de
droits des femmes - mais aussi parce que l'exemple turc ne fait plus
autant rever. Le regime d'Ankara se durcit. Le pouvoir n'hesite plus a
s'attaquer a la liberte de la presse, les arrestations de complotistes
ou de personnes presentees comme telles, se multiplient et, comme aux
pires moments de la dictature militaire, la repression anti-kurde est
a nouveau a l'ordre du jour. Bref, pour les observateurs les plus
aguerris, on est en train de passer d'un Etat kemaliste a un Etat
AKP, du nom du parti au pouvoir du Premier ministre, Recep Erdogan,
qui semble proceder a une islamisation progressive de son pays.
Le journaliste Patrick Pesnot, dans le cadre particulier de son
emission hebdomadaire du samedi sur France inter, "rendez-vous avec M.
X" fait decouvrir, sous la forme de fausses confidences de son
mysterieux correspondant, le vrai visage de la Turquie qui est passee
"d'un Etat kemaliste a un Etat AKP".
Non la Turquie n'est pas victime de cliches et vous faites erreur, M.
Boucheron, quand vous declarez, le 9 novembre 2010 a l'Assemblee
Nationale, que ce pays reformait fondamentalement ses institutions
ou qu'il etait "un veritable modèle de pays musulman, democratique
et moderne" qui "se construit rapidement", ou encore que "le
processus democratique progresse". Nous ne sommes ni "demagogues ni
ignorants", nos informations sont verifiees et verifiables. Près de
7 000 membres actifs du parti kurde BDP sont aujourd'hui en prison
dans le cadre d'une campagne de repression lancee en avril 2009,
quelques semaines après le succès historique du parti kurde lors des
elections municipales, sans compter des milliers d'autres qui ont ete
arretes sous pretexte lutter contre le terrorisme. Chaque semaine,
des dizaines de personnes s'ajoutent a cette liste. Le rapport annuel
de l'association turque des droits de l'Homme (IHD) pour 2011 vient
de nous donner malheureusement raison : les violations des droits de
l'homme ont atteint un niveau record en Turquie au cours de l'annee
2011, avec plus de 12 600 arrestations et 3 252 cas de torture et
de mauvais traitements, soit cinq fois plus que 2007. IHD denonce
aussi l'institutionnalisation de l'Etat policier. Quant a la reforme
constitutionnelle, personne n'en attend grand-chose si ce n'est un
renforcement des pouvoirs autocratiques du futur president Erdogan.
Par contre le GABB (l'Union des municipalites du sud-est anatolien
dont le president est Osman Baydemir, maire de Diyarbakir) a publie
un projet de nouvelle constitution democratique ecologique et non
sexiste (que nous tenons a disposition) visant, dans un esprit de
reconciliation, a reconnaître le caractère pluraliste de la societe
turque d'un point de vue ethique, linguistique, culturel et religieux.
Nous publierons prochainement le rapport de la mission que les Amities
kurdes de Bretagne ont envoyee, pour la 18ème fois, au Kurdistan. Elle
revient avec des temoignages, des chiffres, toujours des chiffres.
Mais derrière les chiffres, combien de drames humains ? Combien de
vies brisees ?
Quelle sera la politique du nouveau gouvernement francais envers la
Turquie ?
Estimant qu'aucune condition majeure n'etait reunie, le
candidat-president, Francois Hollande, avait declare le 11 avril, sur
le plateau de France 2, "Des paroles et des actes", qu'il n'y aurait
donc pas, dans le prochain quinquennat, d'adhesion de la Turquie a
l'Union europeenne.
Peut-on alors esperer une politique avec la Turquie, basee non sur
les interets economiques et politiques mais sur les principes et
les valeurs humaines ? "On ne peut pas dialoguer avec un pays qui ne
respecte pas les minorites" affirme Francois Pupponi, le depute-maire
socialiste de Sarcelles, dans une interview accordee a Actukurde.
Nous esperons, pour le moins, que les accords securitaires passes
entre Erdogan et Gueant, ministre de l'interieur du gouvernement
Sarkozy, seront caducs : il s'agit d'accords signes en octobre 2011
qui, d'après Claude Gueant, "vont bien au dela des accords que la
France signe habituellement dans le domaine de la securite." Ils
doivent permettre aux forces de securite turques et francaises de
pourchasser en France, sous pretexte de lutter contre le terrorisme,
les militants kurdes et faciliter leur extradition vers la Turquie.
Francois Pupponi persiste et signe quand il s'agit de dialogue :
"La condition obligatoire est qu'on respecte democratiquement les
Kurdes dans ce pays. Leurs revendications sont legitimes. On connait le
peuple kurde, on connait sa revendication en termes de reconnaissance
et de protection de la langue, on connait ses revendications
institutionnelles. Nous soutenons son combat car il est juste".
Andre Metayer
Retour a la rubrique
Source/Lien : Amities kurdes de Bretagne
From: Baghdasarian
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livre cette information publiee sur le site des Amities kurdes de
Bretagne le 14 mai 2012.
Le temps où la Turquie etait presentee comme un veritable modèle de
pays musulman, democratique et moderne est-il revolu ? C'est peut-etre
aller vite en besogne mais les lignes peuvent incontestablement bouger
en France et, si c'etait le cas, cette evolution ne serait pas sans
influence sur les pays europeens. Les questions kurde et armenienne
sont des echardes qui finissent par dechirer le voile de respectabilite
du parti au pouvoir AKP, un parti islamiste conservateur mais de
moins en moins modere, place sous la houlette d'un Premier ministre
de plus en plus autoritaire qui, jusqu'a present, a beneficie de la
mansuetude de l'Union europeenne et du soutien des Etats-Unis.
L'effet boomerang de l'arret du conseil constitutionnel.
Les arrets du Conseil constitutionnel où la forme prime sur le fond,
le droit sur la morale, sont de plus en plus sujets a caution, comme
celui abrogeant le delit de harcèlement sexuel. L'arret invalidant
la loi punissant la negation du genocide armenien a suscite maintes
reactions, des debats d'idees, certes, sur l'exercice de la liberte
d'expression mais aussi d'autres commentaires où le droit n'est pas
la preoccupation première : " Briser des liens d'amitie avec ce pays
laïc [la Turquie] emblematique d'une esperance d'un islam moderne
est lamentable." peut-on lire sur le blog du depute Jean Michel
Boucheron, en date du 6 fevrier 2012, signataire du recours au Conseil
Constitutionnel et très attache aux liens qui unissent nos deux pays,
surtout aux liens commerciaux : " C'est un partenaire commercial
fondamental pour la France et l'Europe. [...] L'Union europeenne a
une croissance 1,5 %, celle de la Turquie est de 10 %. Qui a le plus
besoin de l'autre ? [...] Ce pays souffre de cliches vehicules par des
demagogues ou des ignorants." (Intervention a l'Assemblee Nationale
le 9 novembre 2010).
Le nouveau president de la Republique francaise, Francois Hollande,
n'est pas sur cette ligne, Il a au contraire confirme qu'il voulait
engager, en debut de mandat, dans la serenite, un processus, qui
devra aboutir a la penalisant du negationnisme :
"J'ai cette conviction qu'il relève de la responsabilite des
Etats de reconnaître les genocides, lorsqu'ils sont averes par la
recherche historique, comme l'est le genocide armenien, et que le
negationnisme est une expression de violence qui n'a pas sa place
dans notre Republique".
C'est fâcheux pour le depute sortant, Jean-Michel Boucheron qui
justifie sa candidature sur la 1ere circonscription d'Ille-et-Vilaine
en tant que depute independant - le Parti socialiste ayant prefere
donner son investiture a M-A Chapdelaine, adjointe au maire de Rennes
- en arguant sur le fait que le nouveau president aura besoin de son
experience et de ses competences.
La derive autocrate d'un dictateur en puissance
C'etait un lieu commun il y a quelques mois : les animateurs du
printemps arabe, tunisiens ou egyptiens, s'inspireraient a coup sûr de
l'exemple turc. C'est a dire de cet islamisme modere de la Turquie
qui pouvait coexister avec la democratie et qu'on citait un peu
partout en exemple... et pas uniquement dans les pays musulmans. Il
faut aujourd'hui dechanter : non seulement parce que la victoire
electorale des islamistes, tant au Caire qu'a Tunis, inspire les
plus grandes craintes en matière de Droits de l'Homme - et surtout de
droits des femmes - mais aussi parce que l'exemple turc ne fait plus
autant rever. Le regime d'Ankara se durcit. Le pouvoir n'hesite plus a
s'attaquer a la liberte de la presse, les arrestations de complotistes
ou de personnes presentees comme telles, se multiplient et, comme aux
pires moments de la dictature militaire, la repression anti-kurde est
a nouveau a l'ordre du jour. Bref, pour les observateurs les plus
aguerris, on est en train de passer d'un Etat kemaliste a un Etat
AKP, du nom du parti au pouvoir du Premier ministre, Recep Erdogan,
qui semble proceder a une islamisation progressive de son pays.
Le journaliste Patrick Pesnot, dans le cadre particulier de son
emission hebdomadaire du samedi sur France inter, "rendez-vous avec M.
X" fait decouvrir, sous la forme de fausses confidences de son
mysterieux correspondant, le vrai visage de la Turquie qui est passee
"d'un Etat kemaliste a un Etat AKP".
Non la Turquie n'est pas victime de cliches et vous faites erreur, M.
Boucheron, quand vous declarez, le 9 novembre 2010 a l'Assemblee
Nationale, que ce pays reformait fondamentalement ses institutions
ou qu'il etait "un veritable modèle de pays musulman, democratique
et moderne" qui "se construit rapidement", ou encore que "le
processus democratique progresse". Nous ne sommes ni "demagogues ni
ignorants", nos informations sont verifiees et verifiables. Près de
7 000 membres actifs du parti kurde BDP sont aujourd'hui en prison
dans le cadre d'une campagne de repression lancee en avril 2009,
quelques semaines après le succès historique du parti kurde lors des
elections municipales, sans compter des milliers d'autres qui ont ete
arretes sous pretexte lutter contre le terrorisme. Chaque semaine,
des dizaines de personnes s'ajoutent a cette liste. Le rapport annuel
de l'association turque des droits de l'Homme (IHD) pour 2011 vient
de nous donner malheureusement raison : les violations des droits de
l'homme ont atteint un niveau record en Turquie au cours de l'annee
2011, avec plus de 12 600 arrestations et 3 252 cas de torture et
de mauvais traitements, soit cinq fois plus que 2007. IHD denonce
aussi l'institutionnalisation de l'Etat policier. Quant a la reforme
constitutionnelle, personne n'en attend grand-chose si ce n'est un
renforcement des pouvoirs autocratiques du futur president Erdogan.
Par contre le GABB (l'Union des municipalites du sud-est anatolien
dont le president est Osman Baydemir, maire de Diyarbakir) a publie
un projet de nouvelle constitution democratique ecologique et non
sexiste (que nous tenons a disposition) visant, dans un esprit de
reconciliation, a reconnaître le caractère pluraliste de la societe
turque d'un point de vue ethique, linguistique, culturel et religieux.
Nous publierons prochainement le rapport de la mission que les Amities
kurdes de Bretagne ont envoyee, pour la 18ème fois, au Kurdistan. Elle
revient avec des temoignages, des chiffres, toujours des chiffres.
Mais derrière les chiffres, combien de drames humains ? Combien de
vies brisees ?
Quelle sera la politique du nouveau gouvernement francais envers la
Turquie ?
Estimant qu'aucune condition majeure n'etait reunie, le
candidat-president, Francois Hollande, avait declare le 11 avril, sur
le plateau de France 2, "Des paroles et des actes", qu'il n'y aurait
donc pas, dans le prochain quinquennat, d'adhesion de la Turquie a
l'Union europeenne.
Peut-on alors esperer une politique avec la Turquie, basee non sur
les interets economiques et politiques mais sur les principes et
les valeurs humaines ? "On ne peut pas dialoguer avec un pays qui ne
respecte pas les minorites" affirme Francois Pupponi, le depute-maire
socialiste de Sarcelles, dans une interview accordee a Actukurde.
Nous esperons, pour le moins, que les accords securitaires passes
entre Erdogan et Gueant, ministre de l'interieur du gouvernement
Sarkozy, seront caducs : il s'agit d'accords signes en octobre 2011
qui, d'après Claude Gueant, "vont bien au dela des accords que la
France signe habituellement dans le domaine de la securite." Ils
doivent permettre aux forces de securite turques et francaises de
pourchasser en France, sous pretexte de lutter contre le terrorisme,
les militants kurdes et faciliter leur extradition vers la Turquie.
Francois Pupponi persiste et signe quand il s'agit de dialogue :
"La condition obligatoire est qu'on respecte democratiquement les
Kurdes dans ce pays. Leurs revendications sont legitimes. On connait le
peuple kurde, on connait sa revendication en termes de reconnaissance
et de protection de la langue, on connait ses revendications
institutionnelles. Nous soutenons son combat car il est juste".
Andre Metayer
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