ERDOGAN A BERLIN : DES RELATIONS TURCO-ALLEMANDES GRINEANTES
http://www.collectifvan.org/article.php?r=0&id=68534
Publie le : 02-11-2012
Info Collectif VAN - www.collectifvan.org - " Les relations
turco-allemandes grincent et pas uniquement en ce qui concerne
l'Europe. Que ce soit le conflit syrien, la facon de gerer le parti
interdit des travailleurs du Kurdistan, le PKK, ou l'integration des
trois millions de personnes d'origine turque en Allemagne - il y a
de nombreuses differences d'opinions sur ces sujets, que les lieux
communs diplomatiques ont du mal a cacher. Angela Merkel supporte mal
les machos du genre Erdogan. Ce dernier n'a pas vu les 2 500 personnes
qui manifestaient contre sa politique a 500 mètres de la Chancellerie,
devant la Porte de Brandebourg. Une grande coalition de groupes de
gauche, de Kurdes et autres minorites de Turquie (dont les Armeniens)
a accuse le Premier ministre de pousser le pays vers l'islamisation
et de pietiner les droits de l'homme " Le Collectif VAN vous propose
la traduction d'un article en allemand paru sur le site Spiegel Online
le 31 octobre 2012.
Spiegel Online
Erdogan et Merkel : sourire distant
De Philipp Wittrock
Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a dit mercredi qu'il
voulait que la Turquie soit membre a part entière de l'UE avant 2023.
La Chancelière Angela Merkel l'a assure que les pourparlers seraient
" honnetes ". Leur rencontre a Berlin a de nouveau montre que les
relations entre la Turquie et l'Allemagne se sont compliquees.
31.10.2012
Berlin - À la fin de la conference de presse, Angela Merkel a fronce
les yeux et serre les lèvres. Mais de quoi parle-t-il, semble-t-elle
demander. À côte d'elle, Recep Tayyip Erdogan parlait du conflit
de Chypre. C'etait une erreur d'avoir integre " Chypre du Sud "
a l'Union Europeenne, a declare le Premier ministre turc. Et la
chancelière partage cette opinion, ajoute-t-il.
Ce n'est pas la première fois qu'Erdogan fait cette declaration :
il l'avait dit la veille, a l'occasion de l'ouverture de la nouvelle
ambassade turque a Berlin. Ce qui ne la rend pas plus veridique,
souligne l'entourage de Merkel. Certains pourront dire que ce n'etait
pas vraiment diplomatique de le repeter en sa presence. Mais peut-etre
que le Premier ministre en est convaincu. La chef du CDU est de toute
facon assez avisee pour ne pas contredire Erdogan en public. Elle
prefère le diriger vers la photo obligatoire devant les drapeaux des
deux pays. Une poignee de main, un sourire et ils partent.
Ce petit incident est symbolique : les relations turco-allemandes
grincent et pas uniquement en ce qui concerne l'Europe. Que ce soit le
conflit syrien, la facon de gerer le parti interdit des travailleurs du
Kurdistan, le PKK, ou l'integration des trois millions de personnes
d'origine turque en Allemagne - il y a de nombreuses differences
d'opinions sur ces sujets que les lieux communs diplomatiques ont du
mal a cacher.
Certes, a la Chancellerie mercredi, Merkel et Erdogan ont souligne
leurs liens proches et amicaux. Pourtant, on a vu peu de signes d'une
cordialite particulière. Finie l'epoque ou l'ex-Chancelier Gerhard
Schroder et Erdogan se tapaient sur l'epaule. Peut-etre aussi parce
que Merkel supporte mal les machos du genre Erdogan. L'agenda commun
s'est acheve poliment, mais souvent sans sourire.
Erdogan pose des delais pour l'adhesion a l'UE
La question epineuse de Chypre n'est qu'un des obstacles sur le chemin
de l'adhesion a l'UE. Les reticences ne sont pas de nature fondamentale
pour l'Allemagne uniquement. La Turquie a pose sa candidature en
1987, les negociations ont debute il y a 7 ans, et depuis 2010 elles
n'avancent plus. Le tout dernier rapport de l'UE sur les progrès de
la Turquie etait peu flatteur : il soulignait les violations de la
liberte d'expression et de libre rassemblement et la stagnation des
reformes democratiques. Cependant, mercredi, la Chancelière a assure
son invite que les negociations seraient " honnetes ".
De son côte, Erdogan a regrette le manque de progrès en general. Alors
que la Chancelière tentait d'expliquer le principe de partenariat
privilegie, que la CDU prefère a un statut de membre pour la Turquie,
mais ne s'oppose pas a " des resultats ouverts ", il sourit doucement.
Erdogan a clairement dit ce qu'il pensait de l'honnetete de l'UE, lors
d'une conference sur l'Europe qui avait eu lieu la veille a l'Institut
Berggruen : il a accuse l'Europe d'utiliser des tactiques permettant
de repousser l'echeance. À la question, est-ce que la Turquie serait
membre de l'UE en 2023, il a dit : " Ils ne vont pas nous faire
attendre aussi longtemps, non ? " Si c'etait le cas, il a ajoute "
Alors, c'est l'Europe qui perdra, du moins, elle perdra la Turquie. "
C'etait un avertissement lance aux dirigeants europeens. En Turquie,
l'euphorie liee a l'entree de la Turquie dans l'UE est retombee
depuis longtemps. L'economie continue de croître et Erdogan et son
parti conservateur-islamique AKP se sentent trop forts pour attendre
l'Europe. Le pays se reoriente et essaie systematiquement d'assoir
son influence dans le monde musulman. C'est une double strategie :
la Turquie veut rehausser sa position de puissance regionale et
de ce fait, indiquer a l'Europe combien le pays est important pour
l'Occident, en tant que pont avec le monde arabe islamique.
Merkel promet son soutien dans le conflit syrien
Dans ce contexte, le conflit syrien represente un defi particulier. La
Turquie s'est fermement positionnee du côte des rebelles dans le
pays voisin et elle exige des sanctions internationales plus dures
contre le regime d'Assad. En ce qui concerne la situation en Syrie,
Merkel a parle d'un " vrai fardeau "pour la Turquie et elle a loue
Ankara pour son niveau de ponderation etant donne les tirs syriens
et elle a promis plus de soutien au partenaire de l'OTAN. Cependant,
Ankara souhaite bien davantage d'aide que jusqu'a present, avant tout
en raison du flux continuel de refugies syriens arrivant dans le pays.
Et pareil dans sa lutte contre le PKK. Peu de temps avant sa visite
a Berlin, Erdogan s'etait plaint que le gouvernement federal ne
s'engageait pas assez contre les activites terroristes du parti
interdit, qui pouvait " en toute tranquillite " se procurer de
l'argent pour la lutte armee - un reproche que le gouvernement federal
a fermement rejete. Merkel a assure que l'Allemagne " aidait dans tous
les domaines ", en ce qui concerne les activites terroristes du PKK.
Erdogan l'a remercie pour son soutien. Pas de mots durs. Une belle
facade pour preserver les apparences.
C'etait aussi très opportun qu'Erdogan n'ait pas vu les 2 500
personnes qui manifestaient contre sa politique a 500 mètres de la
Chancellerie, devant la Porte de Brandebourg. Une grande coalition
de groupes de gauche, de Kurdes et autres minorites de Turquie (NdT
dont les Armeniens) a accuse le Premier ministre de pousser le pays
vers l'islamisation et de pietiner les droits de l'homme. Alors que
la manifestation se dispersait dans le calme en debut d'après-midi,
le cortège d'Erdogan roulait deja en direction de l'aeroport.
En collaboration avec Christoph Sydow.
©Traduction de l'allemand C.Gardon pour le Collectif VAN - 02 novembre
2012 - www.collectifvan.org
Lire aussi :
Manifestation anti-Erdogan a Berlin
Une manifestation anti-Erdogan a Berlin
Retour a la rubrique
Source/Lien : Spiegel Online
http://www.collectifvan.org/article.php?r=0&id=68534
Publie le : 02-11-2012
Info Collectif VAN - www.collectifvan.org - " Les relations
turco-allemandes grincent et pas uniquement en ce qui concerne
l'Europe. Que ce soit le conflit syrien, la facon de gerer le parti
interdit des travailleurs du Kurdistan, le PKK, ou l'integration des
trois millions de personnes d'origine turque en Allemagne - il y a
de nombreuses differences d'opinions sur ces sujets, que les lieux
communs diplomatiques ont du mal a cacher. Angela Merkel supporte mal
les machos du genre Erdogan. Ce dernier n'a pas vu les 2 500 personnes
qui manifestaient contre sa politique a 500 mètres de la Chancellerie,
devant la Porte de Brandebourg. Une grande coalition de groupes de
gauche, de Kurdes et autres minorites de Turquie (dont les Armeniens)
a accuse le Premier ministre de pousser le pays vers l'islamisation
et de pietiner les droits de l'homme " Le Collectif VAN vous propose
la traduction d'un article en allemand paru sur le site Spiegel Online
le 31 octobre 2012.
Spiegel Online
Erdogan et Merkel : sourire distant
De Philipp Wittrock
Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a dit mercredi qu'il
voulait que la Turquie soit membre a part entière de l'UE avant 2023.
La Chancelière Angela Merkel l'a assure que les pourparlers seraient
" honnetes ". Leur rencontre a Berlin a de nouveau montre que les
relations entre la Turquie et l'Allemagne se sont compliquees.
31.10.2012
Berlin - À la fin de la conference de presse, Angela Merkel a fronce
les yeux et serre les lèvres. Mais de quoi parle-t-il, semble-t-elle
demander. À côte d'elle, Recep Tayyip Erdogan parlait du conflit
de Chypre. C'etait une erreur d'avoir integre " Chypre du Sud "
a l'Union Europeenne, a declare le Premier ministre turc. Et la
chancelière partage cette opinion, ajoute-t-il.
Ce n'est pas la première fois qu'Erdogan fait cette declaration :
il l'avait dit la veille, a l'occasion de l'ouverture de la nouvelle
ambassade turque a Berlin. Ce qui ne la rend pas plus veridique,
souligne l'entourage de Merkel. Certains pourront dire que ce n'etait
pas vraiment diplomatique de le repeter en sa presence. Mais peut-etre
que le Premier ministre en est convaincu. La chef du CDU est de toute
facon assez avisee pour ne pas contredire Erdogan en public. Elle
prefère le diriger vers la photo obligatoire devant les drapeaux des
deux pays. Une poignee de main, un sourire et ils partent.
Ce petit incident est symbolique : les relations turco-allemandes
grincent et pas uniquement en ce qui concerne l'Europe. Que ce soit le
conflit syrien, la facon de gerer le parti interdit des travailleurs du
Kurdistan, le PKK, ou l'integration des trois millions de personnes
d'origine turque en Allemagne - il y a de nombreuses differences
d'opinions sur ces sujets que les lieux communs diplomatiques ont du
mal a cacher.
Certes, a la Chancellerie mercredi, Merkel et Erdogan ont souligne
leurs liens proches et amicaux. Pourtant, on a vu peu de signes d'une
cordialite particulière. Finie l'epoque ou l'ex-Chancelier Gerhard
Schroder et Erdogan se tapaient sur l'epaule. Peut-etre aussi parce
que Merkel supporte mal les machos du genre Erdogan. L'agenda commun
s'est acheve poliment, mais souvent sans sourire.
Erdogan pose des delais pour l'adhesion a l'UE
La question epineuse de Chypre n'est qu'un des obstacles sur le chemin
de l'adhesion a l'UE. Les reticences ne sont pas de nature fondamentale
pour l'Allemagne uniquement. La Turquie a pose sa candidature en
1987, les negociations ont debute il y a 7 ans, et depuis 2010 elles
n'avancent plus. Le tout dernier rapport de l'UE sur les progrès de
la Turquie etait peu flatteur : il soulignait les violations de la
liberte d'expression et de libre rassemblement et la stagnation des
reformes democratiques. Cependant, mercredi, la Chancelière a assure
son invite que les negociations seraient " honnetes ".
De son côte, Erdogan a regrette le manque de progrès en general. Alors
que la Chancelière tentait d'expliquer le principe de partenariat
privilegie, que la CDU prefère a un statut de membre pour la Turquie,
mais ne s'oppose pas a " des resultats ouverts ", il sourit doucement.
Erdogan a clairement dit ce qu'il pensait de l'honnetete de l'UE, lors
d'une conference sur l'Europe qui avait eu lieu la veille a l'Institut
Berggruen : il a accuse l'Europe d'utiliser des tactiques permettant
de repousser l'echeance. À la question, est-ce que la Turquie serait
membre de l'UE en 2023, il a dit : " Ils ne vont pas nous faire
attendre aussi longtemps, non ? " Si c'etait le cas, il a ajoute "
Alors, c'est l'Europe qui perdra, du moins, elle perdra la Turquie. "
C'etait un avertissement lance aux dirigeants europeens. En Turquie,
l'euphorie liee a l'entree de la Turquie dans l'UE est retombee
depuis longtemps. L'economie continue de croître et Erdogan et son
parti conservateur-islamique AKP se sentent trop forts pour attendre
l'Europe. Le pays se reoriente et essaie systematiquement d'assoir
son influence dans le monde musulman. C'est une double strategie :
la Turquie veut rehausser sa position de puissance regionale et
de ce fait, indiquer a l'Europe combien le pays est important pour
l'Occident, en tant que pont avec le monde arabe islamique.
Merkel promet son soutien dans le conflit syrien
Dans ce contexte, le conflit syrien represente un defi particulier. La
Turquie s'est fermement positionnee du côte des rebelles dans le
pays voisin et elle exige des sanctions internationales plus dures
contre le regime d'Assad. En ce qui concerne la situation en Syrie,
Merkel a parle d'un " vrai fardeau "pour la Turquie et elle a loue
Ankara pour son niveau de ponderation etant donne les tirs syriens
et elle a promis plus de soutien au partenaire de l'OTAN. Cependant,
Ankara souhaite bien davantage d'aide que jusqu'a present, avant tout
en raison du flux continuel de refugies syriens arrivant dans le pays.
Et pareil dans sa lutte contre le PKK. Peu de temps avant sa visite
a Berlin, Erdogan s'etait plaint que le gouvernement federal ne
s'engageait pas assez contre les activites terroristes du parti
interdit, qui pouvait " en toute tranquillite " se procurer de
l'argent pour la lutte armee - un reproche que le gouvernement federal
a fermement rejete. Merkel a assure que l'Allemagne " aidait dans tous
les domaines ", en ce qui concerne les activites terroristes du PKK.
Erdogan l'a remercie pour son soutien. Pas de mots durs. Une belle
facade pour preserver les apparences.
C'etait aussi très opportun qu'Erdogan n'ait pas vu les 2 500
personnes qui manifestaient contre sa politique a 500 mètres de la
Chancellerie, devant la Porte de Brandebourg. Une grande coalition
de groupes de gauche, de Kurdes et autres minorites de Turquie (NdT
dont les Armeniens) a accuse le Premier ministre de pousser le pays
vers l'islamisation et de pietiner les droits de l'homme. Alors que
la manifestation se dispersait dans le calme en debut d'après-midi,
le cortège d'Erdogan roulait deja en direction de l'aeroport.
En collaboration avec Christoph Sydow.
©Traduction de l'allemand C.Gardon pour le Collectif VAN - 02 novembre
2012 - www.collectifvan.org
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