CourrierInternational.com
Mardi 30 Octobre 2012
Génocide arménien: Repentons-nous comme les Français sur l'Algérie
by Murat Bardakci, Habertürk (Istanbul)
A l'approche du centenaire de la "déportation des Arméniens", la
Turquie doit sortir de sa léthargie, soutient ce chroniqueur turc. Et
elle ne peut plus renvoyer à la France l'argument algérien, puisque
Paris a fait un pas vers la demande de pardon.
Il s'est passé en France, il y a peu, un événement qui devrait
davantage nous intéresser. En effet, le président François Hollande a
fait savoir qu'il "commémorait avec respect le souvenir des Algériens
assassinés à Paris le 17 octobre 1961". Cet épisode sanglant, qui
s'est déroulé il y a cinquante et un ans, s'inscrit dans le cadre de
la guerre d'Algérie. Alors que le sang coulait encore, les Algériens
de France organisèrent une manifestation violemment réprimée par la
police française. Des centaines d'Algériens périrent.
Maurice Papon, le chef de la police parisienne de l'époque, fut jugé
non pas pour sa responsabilité dans la mort de ces Algériens, mais
pour avoir livré des Juifs français aux autorités allemandes pendant
la Seconde Guerre mondiale. Il ne fut donc jamais inquiété pour son
rôle dans la mort de ces centaines d'Algériens, même si cette affaire
refit surface pendant son procès sur sa période vichyste. Les
présidents de la République française et les gouvernements français
refusèrent toujours de demander pardon pour ce qui s'était passé le 17
octobre 1961, et Nicolas Sarkozy alla même jusqu'à déclarer [lors
d'une visite d'Etat] en 2007 qu'il ne demanderait jamais pardon à
l'Algérie.
On vient toutefois d'assister à un changement d'orientation en la
matière, et c'est ainsi que le président François Hollande a rendu
"hommage à ceux qui avaient perdu la vie au cours du drame du 17
octobre 1961". S'il ne s'agit pas encore d'excuses, le communiqué du
président français constitue néanmoins un premier pas dans cette
direction. Par cette déclaration, la France vient de briser un tabou
sur l'Algérie et semble ainsi s'être engagée sur la voie d'une demande
de pardon. Il s'agit là d'une évolution qui nous concerne, nous les
Turcs, directement.
Le projet de loi sur le génocide arménien, qui avait été adopté par le
Parlement français puis rejeté par le Conseil constitutionnel [en
février 2012], va repasser devant le Parlement et sera très
probablement adopté. Dans ce contexte, ce que nous pensons être notre
meilleure arme pour discréditer ce type de résolution, à savoir les
arguments bizarres du genre "Eux aussi ont tué des millions
d'Algériens", n'auront donc plus aucun sens vis-à-vis d'une France qui
a pris le chemin d'une demande de pardon par rapport à l'Algérie.
D'autant plus qu'approche l'année 2015, qui coïncidera avec le
centième anniversaire de la déportation [des Arméniens] et qui est
annonciatrice de bien des difficultés pour la Turquie. Concernant ces
événements de 1915, il convient donc de sortir de notre léthargie et
de mettre sur pied une politique d'Etat plus sérieuse. Le temps
presse.
From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress
Mardi 30 Octobre 2012
Génocide arménien: Repentons-nous comme les Français sur l'Algérie
by Murat Bardakci, Habertürk (Istanbul)
A l'approche du centenaire de la "déportation des Arméniens", la
Turquie doit sortir de sa léthargie, soutient ce chroniqueur turc. Et
elle ne peut plus renvoyer à la France l'argument algérien, puisque
Paris a fait un pas vers la demande de pardon.
Il s'est passé en France, il y a peu, un événement qui devrait
davantage nous intéresser. En effet, le président François Hollande a
fait savoir qu'il "commémorait avec respect le souvenir des Algériens
assassinés à Paris le 17 octobre 1961". Cet épisode sanglant, qui
s'est déroulé il y a cinquante et un ans, s'inscrit dans le cadre de
la guerre d'Algérie. Alors que le sang coulait encore, les Algériens
de France organisèrent une manifestation violemment réprimée par la
police française. Des centaines d'Algériens périrent.
Maurice Papon, le chef de la police parisienne de l'époque, fut jugé
non pas pour sa responsabilité dans la mort de ces Algériens, mais
pour avoir livré des Juifs français aux autorités allemandes pendant
la Seconde Guerre mondiale. Il ne fut donc jamais inquiété pour son
rôle dans la mort de ces centaines d'Algériens, même si cette affaire
refit surface pendant son procès sur sa période vichyste. Les
présidents de la République française et les gouvernements français
refusèrent toujours de demander pardon pour ce qui s'était passé le 17
octobre 1961, et Nicolas Sarkozy alla même jusqu'à déclarer [lors
d'une visite d'Etat] en 2007 qu'il ne demanderait jamais pardon à
l'Algérie.
On vient toutefois d'assister à un changement d'orientation en la
matière, et c'est ainsi que le président François Hollande a rendu
"hommage à ceux qui avaient perdu la vie au cours du drame du 17
octobre 1961". S'il ne s'agit pas encore d'excuses, le communiqué du
président français constitue néanmoins un premier pas dans cette
direction. Par cette déclaration, la France vient de briser un tabou
sur l'Algérie et semble ainsi s'être engagée sur la voie d'une demande
de pardon. Il s'agit là d'une évolution qui nous concerne, nous les
Turcs, directement.
Le projet de loi sur le génocide arménien, qui avait été adopté par le
Parlement français puis rejeté par le Conseil constitutionnel [en
février 2012], va repasser devant le Parlement et sera très
probablement adopté. Dans ce contexte, ce que nous pensons être notre
meilleure arme pour discréditer ce type de résolution, à savoir les
arguments bizarres du genre "Eux aussi ont tué des millions
d'Algériens", n'auront donc plus aucun sens vis-à-vis d'une France qui
a pris le chemin d'une demande de pardon par rapport à l'Algérie.
D'autant plus qu'approche l'année 2015, qui coïncidera avec le
centième anniversaire de la déportation [des Arméniens] et qui est
annonciatrice de bien des difficultés pour la Turquie. Concernant ces
événements de 1915, il convient donc de sortir de notre léthargie et
de mettre sur pied une politique d'Etat plus sérieuse. Le temps
presse.
From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress