REVUE DE PRESSE
Insolent et rebelle
Commencée en prison sous le Second Empire, achevée aux lendemains de
la première guerre mondiale, la carrière politique de Clemenceau fut
longue et passionnée. Elle est celle d'un homme de convictions dont le
seul dessein fut de rendre plus forte et plus vivante la devise
`Liberté, Egalité Fraternité`, comme en témoignent les textes réunis
dans cette anthologie. Dès 1861, opposant à Napoléon III, il s'engage
par la critique littéraire et tourne en dérision l'hypocrisie des
nantis, les romanciers mondains, la prétention du style académique.
Devenu député de Paris en 1876, au côté de Victor Hugo, il fait ses
premières armes à la Chambre en militant pour l'amnistie des
communards.
En 1880, désireux de maintenir son indépendance politique, il fonde
son propre journal, La Justice, pour mieux proposer mais aussi
s'opposer aux républicains modérés qui dirigent alors le pays. Le
quotidien radical dénonce l'affairisme des élites politiques, réclame
l'impôt sur le revenu, fustige le `cléricalisme`.
Chef incontesté de l'opposition de gauche, Georges Clemenceau fait
perpétuellement acte de vigilance et n'a de cesse de refuser toute
décision irrespectueuse des droits de l'homme et du citoyen.
Parallèlement, il travaille pour que la République se dote
d'institutions plus démocratiques.
En 1884, contestant la légitimité du Sénat, il s'engage pour la
réforme constitutionnelle. En juillet 1885, après un discours
mémorable contre la colonisation, il fait tomber le ministère Ferry.
Habité par une très haute idée de l'exercice du pouvoir, il critique
sans détour les hommes politiques peu investis dans leur mandat.
Soucieux de lutter contre les inégalités et la misère, il inscrit la
question sociale au coeur de son action. Son premier ouvrage, La Mêlée
sociale, publié en 1895, est consacré à `ceux d'en bas` qu'il défend
contre `ceux d'en haut`. Favorable au droit de grève, il se bat pour
le recul de la pauvreté, met en cause l'intolérable domination
patronale, réclame des mesures urgentes de solidarité et oeuvre à
l'amélioration des conditions de travail des ouvriers.
En 1904, devenu sénateur, il s'élève contre l'utilisation de la
céruse, pigment qui entre dans la composition des peintures et
empoisonne les travailleurs du btiment.
La clé de voûte de son idéal politique ? L'accès à l'éducation et à la
culture pour tous et pour toutes. En conséquence, malgré sa forte
antipathie pour Jules Ferry, il vote les lois scolaires qu'il souhaite
voir appliquées dans un Etat laïque. Il lutte, au Parlement comme dans
la presse, pour la laïcité, la liberté de conscience, contre
l'intolérance.
Il manifeste son hostilité à tout obscurantisme et à tout fanatisme
religieux, en apportant par exemple son soutien aux Arméniens
persécutés. A partir de 1897, son engagement total dans l'affaire
Dreyfus concrétise de façon exemplaire l'exigence de justice et
d'humanité dont témoigne aussi son combat, ancien, contre la peine de
mort.
La Grande Guerre réveille la fibre patriotique du républicain jacobin
et autoritaire que fut aussi Georges Clemenceau. Dans ses écrits, dans
ses discours, il exhorte la France et ses soldats à dire non à la
défaite. Avec courage et détermination, devenu président du Conseil en
novembre 1917, il remplit sa mission et conduit le pays à la victoire.
Insolent et rebelle, Clemenceau le fut tout au long de sa vie. Par ses
mots et ses actes, il a lutté sans répit pour construire une
république idéale, digne d'être laissée aux générations à venir.
Sylvie Brodziak (Livre du jour)
Georges Clemenceau, la liberté à tout prix, anthologie présentée par
Sylvie Brodziak, 224 p., 5,90
LE MONDE | 23.10.2012 à 15h02
Par Sylvie Brodziak (Livre du jour)
dimanche 28 octobre 2012,
Stéphane ©armenews.com
Insolent et rebelle
Commencée en prison sous le Second Empire, achevée aux lendemains de
la première guerre mondiale, la carrière politique de Clemenceau fut
longue et passionnée. Elle est celle d'un homme de convictions dont le
seul dessein fut de rendre plus forte et plus vivante la devise
`Liberté, Egalité Fraternité`, comme en témoignent les textes réunis
dans cette anthologie. Dès 1861, opposant à Napoléon III, il s'engage
par la critique littéraire et tourne en dérision l'hypocrisie des
nantis, les romanciers mondains, la prétention du style académique.
Devenu député de Paris en 1876, au côté de Victor Hugo, il fait ses
premières armes à la Chambre en militant pour l'amnistie des
communards.
En 1880, désireux de maintenir son indépendance politique, il fonde
son propre journal, La Justice, pour mieux proposer mais aussi
s'opposer aux républicains modérés qui dirigent alors le pays. Le
quotidien radical dénonce l'affairisme des élites politiques, réclame
l'impôt sur le revenu, fustige le `cléricalisme`.
Chef incontesté de l'opposition de gauche, Georges Clemenceau fait
perpétuellement acte de vigilance et n'a de cesse de refuser toute
décision irrespectueuse des droits de l'homme et du citoyen.
Parallèlement, il travaille pour que la République se dote
d'institutions plus démocratiques.
En 1884, contestant la légitimité du Sénat, il s'engage pour la
réforme constitutionnelle. En juillet 1885, après un discours
mémorable contre la colonisation, il fait tomber le ministère Ferry.
Habité par une très haute idée de l'exercice du pouvoir, il critique
sans détour les hommes politiques peu investis dans leur mandat.
Soucieux de lutter contre les inégalités et la misère, il inscrit la
question sociale au coeur de son action. Son premier ouvrage, La Mêlée
sociale, publié en 1895, est consacré à `ceux d'en bas` qu'il défend
contre `ceux d'en haut`. Favorable au droit de grève, il se bat pour
le recul de la pauvreté, met en cause l'intolérable domination
patronale, réclame des mesures urgentes de solidarité et oeuvre à
l'amélioration des conditions de travail des ouvriers.
En 1904, devenu sénateur, il s'élève contre l'utilisation de la
céruse, pigment qui entre dans la composition des peintures et
empoisonne les travailleurs du btiment.
La clé de voûte de son idéal politique ? L'accès à l'éducation et à la
culture pour tous et pour toutes. En conséquence, malgré sa forte
antipathie pour Jules Ferry, il vote les lois scolaires qu'il souhaite
voir appliquées dans un Etat laïque. Il lutte, au Parlement comme dans
la presse, pour la laïcité, la liberté de conscience, contre
l'intolérance.
Il manifeste son hostilité à tout obscurantisme et à tout fanatisme
religieux, en apportant par exemple son soutien aux Arméniens
persécutés. A partir de 1897, son engagement total dans l'affaire
Dreyfus concrétise de façon exemplaire l'exigence de justice et
d'humanité dont témoigne aussi son combat, ancien, contre la peine de
mort.
La Grande Guerre réveille la fibre patriotique du républicain jacobin
et autoritaire que fut aussi Georges Clemenceau. Dans ses écrits, dans
ses discours, il exhorte la France et ses soldats à dire non à la
défaite. Avec courage et détermination, devenu président du Conseil en
novembre 1917, il remplit sa mission et conduit le pays à la victoire.
Insolent et rebelle, Clemenceau le fut tout au long de sa vie. Par ses
mots et ses actes, il a lutté sans répit pour construire une
république idéale, digne d'être laissée aux générations à venir.
Sylvie Brodziak (Livre du jour)
Georges Clemenceau, la liberté à tout prix, anthologie présentée par
Sylvie Brodziak, 224 p., 5,90
LE MONDE | 23.10.2012 à 15h02
Par Sylvie Brodziak (Livre du jour)
dimanche 28 octobre 2012,
Stéphane ©armenews.com