Turquie : La question kurde reste toujours d'actualité
http://www.collectifvan.org/article.php?r=0&id=67340
Publié le : 21-09-2012
Info Collectif VAN - www.collectifvan.org - Le Collectif VAN publie
ici un article d'Ahmet Dere, journaliste et écrivain kurde de
Belgique, publié le 15 septembre 2012.
En Turquie, ce sont les problèmes autour de la question kurde qui
constituent l'ordre du jour. Cette question est au c`ur des enjeux
politiques et stratégiques du pays. Elle est ainsi présente au c`ur du
débat identitaire dans ce pays.
La situation actuelle en Turquie ne présage pas d'une sortie
démocratique rapide de l'impasse constituée par la question kurde.
Depuis ces 3 dernières années, surtout depuis les élections
législatives du 12 juin 2011, le gouvernement de l'AKP a durci de plus
en plus sa position à l'encontre des efforts en faveur d'une solution
politique de la question kurde.
Ces derniers mois, les affrontements entre l'armée turque et la
guérilla kurde ont fait des dizaines de morts, soit du côté de la
guérilla, soit du côté des militaires. Depuis le début du mois de
juillet, les forces armées turques ont lancé quelques centaines
d'opérations contre les militants du PKK. Le but de ces opérations est
d'écraser la force du PKK qui intensifie les attaques contre les bases
militaires. La Turquie mène ces opérations avec la participation de
milliers de soldats y compris avec l'appui d'hélicoptères et d'avions
de guerre. Des opérations de même nature sont parfois menées sur les
territoires de la région kurde irakienne. Ces derniers jours, de
violents combats se concentrent dans les districts de Semdinli et
Beytusebap.
Le pouvoir AKP engage une lourde répression contre les Kurdes. Les
arrestations contre les politiques kurdes, surtout membres du BDP,
deviennent quotidiennes. Les procès des avocats, des représentants de
diverses associations, des défenseurs des droits humains, des
journalistes, des syndicalistes, des étudiants, des intellectuels
ainsi que des élus locaux, sont de véritables atteintes à la
démocratie. On compte à ce jour plus de 6000 détenus dans les prisons
turques, arrêtés et jugés pour appartenance à une organisation
clandestine (KCK- Union des Communautés du Kurdistan-). C'est donc une
répression accrue contre les militants kurdes qui menace tout le
peuple kurde. L'escalade de la répression et de la militarisation est
devenue la règle.
Je me demande si les responsables européens suivent vraiment ce qui se
passe actuellement en Turquie ?
Je me permets de rappeler que les années précédant et suivant 1980, la
démocratie en Turquie n'était pas une préoccupation pour les pays
occidentaux, qui ont réagi favorablement au coup d'Etat. Pour ces
pays, la priorité était alors seulement de garantir la stabilité de la
Turquie dans un contexte de guerre froide.
La perspective européenne apparaît-elle toujours comme une possibilité
de sortie de l'impasse pour les Kurdes ? Oui, je pense une forme de
reconnaissance des différents groupes ethniques au sein de la
République de Turquie permettrait l'ancrage et la stabilisation de la
démocratie dans le cadre des principes européens. Il faut souligner
que les Kurdes sont d'ailleurs favorables à la perspective européenne
concernant la Turquie.
Selon ce que je vois, la perspective européenne concernant la Turquie
est actuellement bloquée. Il est toutefois impératif de la maintenir
car elle peut toujours représenter une possible sortie de l'impasse
actuelle. La non-résolution, par la voie politique et démocratique, de
la question kurde en Turquie peut tuer le modèle turc, même si
celui-ci doit évoluer. D'autant que la tentation d'internationaliser
ou de régionaliser davantage la question kurde représente un fort
danger.
Tous les dérapages sont donc possibles, c'est pourquoi il est
impératif de ne pas céder aux potentielles tentations sécessionnistes
qui existent en Turquie et qui, aggraveraient les problèmes plutôt
qu'elles ne contribueraient à les résoudre.
Il est impératif que l'Union européenne réagisse contre cette
continuité de la situation de guerre. Si cette situation continue et
approfondit davantage les blessures existantes, l'UE aura également de
véritables pertes. Il est donc important de ne pas rester silencieux.
Ahmet DERE / 15.09.2012
Biographie :
Ahmet Gülabi Dere est un journaliste kurde né en 1971 dans le district
de Varto, dans le Kurdistan turc. Il vit depuis l'ge de 16 ans en
Europe comme réfugié politique.
Entre 2003 et 2009, Ahmet Gülabi Dere a été membre du Congrès national
kurde, chargé des relations internationales. Il a travaillé à
Bruxelles et à Strasbourg. Entre 2001 et 2009, il a écrit pour les
journaux kurdes, dont Azadiya Welat et Yeni Özgür Politika ; ses
articles ont été publiés sur divers sites web, en kurde, turc et
français.
Au mois de septembre 2009, il a démissionné du Congrès National du
Kurdistan et, depuis lors, il travaille comme journaliste indépendant.
Ahmet Gülabi Dere
http://www.collectifvan.org/article.php?r=0&id=67340
Publié le : 21-09-2012
Info Collectif VAN - www.collectifvan.org - Le Collectif VAN publie
ici un article d'Ahmet Dere, journaliste et écrivain kurde de
Belgique, publié le 15 septembre 2012.
En Turquie, ce sont les problèmes autour de la question kurde qui
constituent l'ordre du jour. Cette question est au c`ur des enjeux
politiques et stratégiques du pays. Elle est ainsi présente au c`ur du
débat identitaire dans ce pays.
La situation actuelle en Turquie ne présage pas d'une sortie
démocratique rapide de l'impasse constituée par la question kurde.
Depuis ces 3 dernières années, surtout depuis les élections
législatives du 12 juin 2011, le gouvernement de l'AKP a durci de plus
en plus sa position à l'encontre des efforts en faveur d'une solution
politique de la question kurde.
Ces derniers mois, les affrontements entre l'armée turque et la
guérilla kurde ont fait des dizaines de morts, soit du côté de la
guérilla, soit du côté des militaires. Depuis le début du mois de
juillet, les forces armées turques ont lancé quelques centaines
d'opérations contre les militants du PKK. Le but de ces opérations est
d'écraser la force du PKK qui intensifie les attaques contre les bases
militaires. La Turquie mène ces opérations avec la participation de
milliers de soldats y compris avec l'appui d'hélicoptères et d'avions
de guerre. Des opérations de même nature sont parfois menées sur les
territoires de la région kurde irakienne. Ces derniers jours, de
violents combats se concentrent dans les districts de Semdinli et
Beytusebap.
Le pouvoir AKP engage une lourde répression contre les Kurdes. Les
arrestations contre les politiques kurdes, surtout membres du BDP,
deviennent quotidiennes. Les procès des avocats, des représentants de
diverses associations, des défenseurs des droits humains, des
journalistes, des syndicalistes, des étudiants, des intellectuels
ainsi que des élus locaux, sont de véritables atteintes à la
démocratie. On compte à ce jour plus de 6000 détenus dans les prisons
turques, arrêtés et jugés pour appartenance à une organisation
clandestine (KCK- Union des Communautés du Kurdistan-). C'est donc une
répression accrue contre les militants kurdes qui menace tout le
peuple kurde. L'escalade de la répression et de la militarisation est
devenue la règle.
Je me demande si les responsables européens suivent vraiment ce qui se
passe actuellement en Turquie ?
Je me permets de rappeler que les années précédant et suivant 1980, la
démocratie en Turquie n'était pas une préoccupation pour les pays
occidentaux, qui ont réagi favorablement au coup d'Etat. Pour ces
pays, la priorité était alors seulement de garantir la stabilité de la
Turquie dans un contexte de guerre froide.
La perspective européenne apparaît-elle toujours comme une possibilité
de sortie de l'impasse pour les Kurdes ? Oui, je pense une forme de
reconnaissance des différents groupes ethniques au sein de la
République de Turquie permettrait l'ancrage et la stabilisation de la
démocratie dans le cadre des principes européens. Il faut souligner
que les Kurdes sont d'ailleurs favorables à la perspective européenne
concernant la Turquie.
Selon ce que je vois, la perspective européenne concernant la Turquie
est actuellement bloquée. Il est toutefois impératif de la maintenir
car elle peut toujours représenter une possible sortie de l'impasse
actuelle. La non-résolution, par la voie politique et démocratique, de
la question kurde en Turquie peut tuer le modèle turc, même si
celui-ci doit évoluer. D'autant que la tentation d'internationaliser
ou de régionaliser davantage la question kurde représente un fort
danger.
Tous les dérapages sont donc possibles, c'est pourquoi il est
impératif de ne pas céder aux potentielles tentations sécessionnistes
qui existent en Turquie et qui, aggraveraient les problèmes plutôt
qu'elles ne contribueraient à les résoudre.
Il est impératif que l'Union européenne réagisse contre cette
continuité de la situation de guerre. Si cette situation continue et
approfondit davantage les blessures existantes, l'UE aura également de
véritables pertes. Il est donc important de ne pas rester silencieux.
Ahmet DERE / 15.09.2012
Biographie :
Ahmet Gülabi Dere est un journaliste kurde né en 1971 dans le district
de Varto, dans le Kurdistan turc. Il vit depuis l'ge de 16 ans en
Europe comme réfugié politique.
Entre 2003 et 2009, Ahmet Gülabi Dere a été membre du Congrès national
kurde, chargé des relations internationales. Il a travaillé à
Bruxelles et à Strasbourg. Entre 2001 et 2009, il a écrit pour les
journaux kurdes, dont Azadiya Welat et Yeni Özgür Politika ; ses
articles ont été publiés sur divers sites web, en kurde, turc et
français.
Au mois de septembre 2009, il a démissionné du Congrès National du
Kurdistan et, depuis lors, il travaille comme journaliste indépendant.
Ahmet Gülabi Dere