" L'ILE DE LA DEMOCRATIE ", LE NOUVEAU PROJET QUI FACHE LA TURQUIE
turquie
Après le projet d'amenagement du parc Gezi a Istanbul, a l'origine
en juin d'une vague de protestations sans precedent en Turquie,
le gouvernement turc a relance les polemiques avec un nouveau plan
d'urbanisation conteste : " l'Île de la democratie ". Yassiada :
pour les Turcs, un nom de sinistre memoire. C'est sur cette petite
île inhabitee de 10 hectares, faisant partie de l'archipel des îles
des Princes, a quelques kilomètres a peine du centre d'Istanbul,
qu'ont ete internes pendant des mois et juges les membres du Parti
democrate (DP), après le putsch du 27 mai 1960.
Oppose a la ligne etatiste et laïque du fondateur de la Turquie
moderne, Mustafa Kemal Ataturk, le DP avait remporte en 1950 les
premières elections multipartites de la Republique turque.
Plusieurs des accuses ont ete condamnes a mort par pendaison, dont
le premier ministre Adnan Menderes, ainsi que deux ministres de son
cabinet, Hasan Polatkan (Finances) et Fatin Rustu Zorlu (Affaires
etrangères).
Grand admirateur de Menderes, l'actuel premier ministre
islamo-conservateur Recep Tayyip Erdogan a lance il y a trois ans
l'idee de transformer Yassiada en " Île de la democratie ", en y
erigeant un musee.
Mais les modifications apportees en juin aux plans d'occupation
des sols (POS) de Yassiada et de la petite île voisine de Sivriada,
que l'AFP a pu consulter, montrent un projet immobilier d'une toute
autre ampleur.
Jusque-la considerees comme zones militaires et interdites au public,
Yassiada et Sivriada -neuf hectares, où se trouvent des ruines romaines
et byzantines- sont desormais constructibles respectivement a 65%
et 40%.
Le POS de Yassiada prevoit notamment la construction d'un hôtel, de
bungalows, d'un cafe, d'un restaurant, d'un heliport et de salles de
conference, tandis que celui de Sivriada comprend un centre de congrès
et de foires, un espace de prière, un terrain de sport et une marina.
Le projet soulève l'indignation a Istanbul.
Dimanche, plusieurs centaines de personnes ont investi les deux îles
pour clamer leur opposition au " betonnage " des îles des Princes,
un des rares espaces naturels proteges de la metropole turque aux 15
millions d'habitants.
" Nous nous adressons a ceux qui veulent ruiner nos existences en
ouvrant nos espaces de vie a la construction : vos centres commerciaux,
vos hôtels et vos residences, vous pouvez vous les garder ", a
harangue Hasret Goler, une habitante de l'île de Buyukada, accusant
le gouvernement d'agir pour le benefice d'entreprises " amies ".
Meme la veuve d'un des politiciens executes s'est opposee a l'idee. "
De grandes souffrances ont ete vecues a Yassiada, elle doit rester
un endroit de deuil (...) L'île ne peut etre consacree au loisir ", a
estime Mutahhare Polatkan, 93 ans, interrogee par le journal Hurriyet.
Le tolle est d'autant plus vif que le pays se remet a peine de trois
semaines de manifestations et de heurts avec la police autour d'un
autre plan d'urbanisation gouvernemental, concernant le parc Gezi,
au coeur d'Istanbul.
La violente repression par la police, le 31 mai, des manifestants
ecologistes qui tentaient de defendre les arbres du parc contre
le projet de construction d'un centre commercial s'est mue en un
vaste mouvement de contestation antigouvernementale accusant Erdogan
d'autoritarisme et de vouloir " islamiser " le pays.
Les heurts ont fait cinq morts et plus de 8.000 blesses, selon l'Union
des medecins.
A la mairie d'arrondissement des îles des Princes, tenue par
l'opposition sociale-democrate, ce sont les methodes autant que les
objectifs du gouvernement qu'on denonce.
Après avoir abaisse le niveau de protection des deux îles au regard
de leur valeur historique et naturelle, le gouvernement a fait voter
en avril 2013 une loi specifique y autorisant les " investissements
et services a but culturel et touristique ", souligne le maire,
Mustafa Farsakoglu.
" Cette loi va a l'encontre de toutes les legislations sur la
preservation des côtes, la protection des biens culturels et naturels,
les forets, la construction, les municipalites... Le message qu'ils
envoient, c'est " On fait ce qui nous plaît " ", accuse M. Farsakoglu,
qui denonce aussi l'absence totale de consultation des elus locaux
et de la societe civile.
Le ministre de l'Environnement et de la Planification urbaine,
Erdogan Bayraktar, a tente samedi de desamorcer la contestation en
assurant que hormis le musee et un centre culturel, seul " un petit
quelque chose comme un hôtel-boutique pourrait etre construit pour
les gens qui voudraient passer la nuit " sur Yassiada, a rapporte le
quotidien Radikal.
Mais les opposants restent dubitatifs. " Un hôtel-boutique, ca
represente tout au plus 400 mètres carres. A Yassiada, c'est plus
de 50.000 mètres carres qui ont ete ouverts a la construction ",
commente une urbaniste parlant sous le couvert de l'anonymat.
Nicolas CHEVIRON
Agence France-Presse
ISTANBUL
jeudi 8 août 2013, Stephane ©armenews.com
From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress
turquie
Après le projet d'amenagement du parc Gezi a Istanbul, a l'origine
en juin d'une vague de protestations sans precedent en Turquie,
le gouvernement turc a relance les polemiques avec un nouveau plan
d'urbanisation conteste : " l'Île de la democratie ". Yassiada :
pour les Turcs, un nom de sinistre memoire. C'est sur cette petite
île inhabitee de 10 hectares, faisant partie de l'archipel des îles
des Princes, a quelques kilomètres a peine du centre d'Istanbul,
qu'ont ete internes pendant des mois et juges les membres du Parti
democrate (DP), après le putsch du 27 mai 1960.
Oppose a la ligne etatiste et laïque du fondateur de la Turquie
moderne, Mustafa Kemal Ataturk, le DP avait remporte en 1950 les
premières elections multipartites de la Republique turque.
Plusieurs des accuses ont ete condamnes a mort par pendaison, dont
le premier ministre Adnan Menderes, ainsi que deux ministres de son
cabinet, Hasan Polatkan (Finances) et Fatin Rustu Zorlu (Affaires
etrangères).
Grand admirateur de Menderes, l'actuel premier ministre
islamo-conservateur Recep Tayyip Erdogan a lance il y a trois ans
l'idee de transformer Yassiada en " Île de la democratie ", en y
erigeant un musee.
Mais les modifications apportees en juin aux plans d'occupation
des sols (POS) de Yassiada et de la petite île voisine de Sivriada,
que l'AFP a pu consulter, montrent un projet immobilier d'une toute
autre ampleur.
Jusque-la considerees comme zones militaires et interdites au public,
Yassiada et Sivriada -neuf hectares, où se trouvent des ruines romaines
et byzantines- sont desormais constructibles respectivement a 65%
et 40%.
Le POS de Yassiada prevoit notamment la construction d'un hôtel, de
bungalows, d'un cafe, d'un restaurant, d'un heliport et de salles de
conference, tandis que celui de Sivriada comprend un centre de congrès
et de foires, un espace de prière, un terrain de sport et une marina.
Le projet soulève l'indignation a Istanbul.
Dimanche, plusieurs centaines de personnes ont investi les deux îles
pour clamer leur opposition au " betonnage " des îles des Princes,
un des rares espaces naturels proteges de la metropole turque aux 15
millions d'habitants.
" Nous nous adressons a ceux qui veulent ruiner nos existences en
ouvrant nos espaces de vie a la construction : vos centres commerciaux,
vos hôtels et vos residences, vous pouvez vous les garder ", a
harangue Hasret Goler, une habitante de l'île de Buyukada, accusant
le gouvernement d'agir pour le benefice d'entreprises " amies ".
Meme la veuve d'un des politiciens executes s'est opposee a l'idee. "
De grandes souffrances ont ete vecues a Yassiada, elle doit rester
un endroit de deuil (...) L'île ne peut etre consacree au loisir ", a
estime Mutahhare Polatkan, 93 ans, interrogee par le journal Hurriyet.
Le tolle est d'autant plus vif que le pays se remet a peine de trois
semaines de manifestations et de heurts avec la police autour d'un
autre plan d'urbanisation gouvernemental, concernant le parc Gezi,
au coeur d'Istanbul.
La violente repression par la police, le 31 mai, des manifestants
ecologistes qui tentaient de defendre les arbres du parc contre
le projet de construction d'un centre commercial s'est mue en un
vaste mouvement de contestation antigouvernementale accusant Erdogan
d'autoritarisme et de vouloir " islamiser " le pays.
Les heurts ont fait cinq morts et plus de 8.000 blesses, selon l'Union
des medecins.
A la mairie d'arrondissement des îles des Princes, tenue par
l'opposition sociale-democrate, ce sont les methodes autant que les
objectifs du gouvernement qu'on denonce.
Après avoir abaisse le niveau de protection des deux îles au regard
de leur valeur historique et naturelle, le gouvernement a fait voter
en avril 2013 une loi specifique y autorisant les " investissements
et services a but culturel et touristique ", souligne le maire,
Mustafa Farsakoglu.
" Cette loi va a l'encontre de toutes les legislations sur la
preservation des côtes, la protection des biens culturels et naturels,
les forets, la construction, les municipalites... Le message qu'ils
envoient, c'est " On fait ce qui nous plaît " ", accuse M. Farsakoglu,
qui denonce aussi l'absence totale de consultation des elus locaux
et de la societe civile.
Le ministre de l'Environnement et de la Planification urbaine,
Erdogan Bayraktar, a tente samedi de desamorcer la contestation en
assurant que hormis le musee et un centre culturel, seul " un petit
quelque chose comme un hôtel-boutique pourrait etre construit pour
les gens qui voudraient passer la nuit " sur Yassiada, a rapporte le
quotidien Radikal.
Mais les opposants restent dubitatifs. " Un hôtel-boutique, ca
represente tout au plus 400 mètres carres. A Yassiada, c'est plus
de 50.000 mètres carres qui ont ete ouverts a la construction ",
commente une urbaniste parlant sous le couvert de l'anonymat.
Nicolas CHEVIRON
Agence France-Presse
ISTANBUL
jeudi 8 août 2013, Stephane ©armenews.com
From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress