REVUE DE PRESSE
À Istanbul, le pouvoir turc rêve d'islamiser Sainte-Sophie
Le vice-premier ministre, Bülent Arinç, souhaite reconvertir le
célèbre musée-basilique en mosquée.
Le vice-premier ministre turc a profité samedi de la cérémonie
d'ouverture d'un Musée du tapis, dans le quartier historique de
Sultanahmet, pour exprimer son souhait de voir la basilique
Sainte-Sophie qui se trouve juste à côté reconvertie en lieu de culte
musulman. « La mosquée Sainte-Sophie, a espéré Bülent Arinç, sourira
bientôt de nouveau », selon les médias. Cette déclaration intervient
dans un contexte tendu où le Parti de la justice et du développement
au pouvoir (AKP) est accusé d'islamiser la société et l'espace public
turcs en multipliant les réformes en faveur d'une certaine conception
de la religion.
Pour étayer sa démonstration, le numéro deux du gouvernement a
critiqué le statut actuel de l'édifice religieux, transformé en musée
par un décret de 1934. Selon lui, « un lieu de culte ne peut pas
servir à une autre fonction que celle initiale ». Et à sa grande
satisfaction, c'est fort de ce précepte que deux églises-musées
également nommées Sainte-Sophie, l'une à Trabzon, sur les rives de la
mer Noire, l'autre à Iznik, dans l'ouest du pays, ont été enregistrées
comme des mosquées ces derniers mois.
Attraction touristique phare d'Istanbul, Sainte-Sophie est un joyau
architectural avec son immense coupole de trente mètres de diamètre et
ses mosaïques recouvertes de feuilles d'or. Édifiée au VIe siècle
après Jésus-Christ par l'empereur Justinien, la btisse qui fut le
siège du patriarche orthodoxe de Constantinople, a été mise à sac au
cours de la quatrième croisade puis changée en mosquée lors de la
prise de la ville par les Ottomans en 1453. Les demandes de
transformation de Sainte-Sophie en mosquée se multiplient
Sa reconversion en mosquée est une vieille revendication de l'extrême
droite et des islamistes turcs. L'année dernière, au mois d'octobre,
le jour de la fête du sacrifice, une centaine de membres du Parti de
la grande unité (BBP), des islamo-nationalistes, a ainsi prié devant
le musée-basilique. Mais ces derniers mois, les demandes se
multiplient. Une pétition de particuliers réclamant sa transformation
est ainsi étudiée par une commission parlementaire depuis le mois de
février. Le numéro d'août de Skylife, le magazine de la compagnie
aérienne Turkish Airlines, dont l'actionnaire majoritaire est l'État
turc, consacrait sa couverture à « La mosquée des sultans ». Sans
faire mention de l'origine chrétienne de « cet héritage en grande
partie ottoman », le dossier met en doute la légalité du statut de
musée. Mosquée Sainte-Sophie... « Comment ce nom résonne-t-il à vos
oreilles ?, fait mine de s'interroger l'éditorialiste Burak Bekdil
dans le Hürriyet Daily News. (...) Que signifierait la synagogue al-Aqsa
ou l'église Sultanahmet pour les musulmans ? Défaite et injustice
n'est-ce pas ? Cela serait exact. »
Les propos de Bülent Arinç sur l'avenir de Sainte-Sophie suivent de
quelques jours son opposition à un projet du premier ministre. Début
novembre, Recep Tayyip Erdogan s'en était pris aux dortoirs mixtes
pour étudiants, au motif que certains « modes de vie » ne sont pas «
légitimes ». Des descentes de police dans des colocations avaient
suivi dans des immeubles de plusieurs grandes villes de Turquie. Cette
prise de position morale, vécue comme une violation de la vie privée
par une grande partie de la population, avait également été critiquée
par le vice-premier ministre. Mais le statut de Sainte-Sophie s'ajoute
à une liste, qui ne cesse de s'allonger ces derniers mois, de mesures
en faveur d'une présence plus visible de l'islam, qu'il s'agisse de
restrictions de la vente d'alcool ou de l'introduction de cours
supplémentaires sur la religion sunnite dans le cursus scolaire.
Par Laure Marchand
LE FIGARO
dimanche 8 décembre 2013,
Stéphane ©armenews.com
From: Baghdasarian
À Istanbul, le pouvoir turc rêve d'islamiser Sainte-Sophie
Le vice-premier ministre, Bülent Arinç, souhaite reconvertir le
célèbre musée-basilique en mosquée.
Le vice-premier ministre turc a profité samedi de la cérémonie
d'ouverture d'un Musée du tapis, dans le quartier historique de
Sultanahmet, pour exprimer son souhait de voir la basilique
Sainte-Sophie qui se trouve juste à côté reconvertie en lieu de culte
musulman. « La mosquée Sainte-Sophie, a espéré Bülent Arinç, sourira
bientôt de nouveau », selon les médias. Cette déclaration intervient
dans un contexte tendu où le Parti de la justice et du développement
au pouvoir (AKP) est accusé d'islamiser la société et l'espace public
turcs en multipliant les réformes en faveur d'une certaine conception
de la religion.
Pour étayer sa démonstration, le numéro deux du gouvernement a
critiqué le statut actuel de l'édifice religieux, transformé en musée
par un décret de 1934. Selon lui, « un lieu de culte ne peut pas
servir à une autre fonction que celle initiale ». Et à sa grande
satisfaction, c'est fort de ce précepte que deux églises-musées
également nommées Sainte-Sophie, l'une à Trabzon, sur les rives de la
mer Noire, l'autre à Iznik, dans l'ouest du pays, ont été enregistrées
comme des mosquées ces derniers mois.
Attraction touristique phare d'Istanbul, Sainte-Sophie est un joyau
architectural avec son immense coupole de trente mètres de diamètre et
ses mosaïques recouvertes de feuilles d'or. Édifiée au VIe siècle
après Jésus-Christ par l'empereur Justinien, la btisse qui fut le
siège du patriarche orthodoxe de Constantinople, a été mise à sac au
cours de la quatrième croisade puis changée en mosquée lors de la
prise de la ville par les Ottomans en 1453. Les demandes de
transformation de Sainte-Sophie en mosquée se multiplient
Sa reconversion en mosquée est une vieille revendication de l'extrême
droite et des islamistes turcs. L'année dernière, au mois d'octobre,
le jour de la fête du sacrifice, une centaine de membres du Parti de
la grande unité (BBP), des islamo-nationalistes, a ainsi prié devant
le musée-basilique. Mais ces derniers mois, les demandes se
multiplient. Une pétition de particuliers réclamant sa transformation
est ainsi étudiée par une commission parlementaire depuis le mois de
février. Le numéro d'août de Skylife, le magazine de la compagnie
aérienne Turkish Airlines, dont l'actionnaire majoritaire est l'État
turc, consacrait sa couverture à « La mosquée des sultans ». Sans
faire mention de l'origine chrétienne de « cet héritage en grande
partie ottoman », le dossier met en doute la légalité du statut de
musée. Mosquée Sainte-Sophie... « Comment ce nom résonne-t-il à vos
oreilles ?, fait mine de s'interroger l'éditorialiste Burak Bekdil
dans le Hürriyet Daily News. (...) Que signifierait la synagogue al-Aqsa
ou l'église Sultanahmet pour les musulmans ? Défaite et injustice
n'est-ce pas ? Cela serait exact. »
Les propos de Bülent Arinç sur l'avenir de Sainte-Sophie suivent de
quelques jours son opposition à un projet du premier ministre. Début
novembre, Recep Tayyip Erdogan s'en était pris aux dortoirs mixtes
pour étudiants, au motif que certains « modes de vie » ne sont pas «
légitimes ». Des descentes de police dans des colocations avaient
suivi dans des immeubles de plusieurs grandes villes de Turquie. Cette
prise de position morale, vécue comme une violation de la vie privée
par une grande partie de la population, avait également été critiquée
par le vice-premier ministre. Mais le statut de Sainte-Sophie s'ajoute
à une liste, qui ne cesse de s'allonger ces derniers mois, de mesures
en faveur d'une présence plus visible de l'islam, qu'il s'agisse de
restrictions de la vente d'alcool ou de l'introduction de cours
supplémentaires sur la religion sunnite dans le cursus scolaire.
Par Laure Marchand
LE FIGARO
dimanche 8 décembre 2013,
Stéphane ©armenews.com
From: Baghdasarian