TURQUIE: LE GOUVERNEMENT REFORME SA LEGISLATION ANTITERRORISTE
http://www.collectifvan.org/article.php?r=0&id=71488
Publie le : 20-02-2013
Info Collectif VAN - www.collectifvan.org - Le Collectif VAN vous
invite a lire ce Communique de Presse de Reporters Sans Frontières
publie sur son site le mercredi 13 fevrier 2013.
Legende photo: DAILY NEWS photo / Selahattin SONMEZ
Reporters Sans Frontières
Turquie
Legislation antiterroriste : la reforme annoncee doit etre a la mesure
des enjeux
Publie le mercredi 13 fevrier 2013.
Reporters sans frontières salue la volonte affichee par le gouvernement
turc de reformer la legislation antiterroriste en vigueur dans le pays,
et l'encourage a aller jusqu'au bout de cette demarche.
Le projet de loi en preparation, qui prevoit de modifier certains
articles du code penal, de la loi antiterroriste et de la loi sur la
presse, pourrait representer un pas important dans la bonne direction.
Mais pour marquer un reel tournant, il faut qu'il soit suffisamment
complet et precis pour que l'esprit de la reforme soit effectivement
mis en pratique par la justice. Et qu'il soit rapidement suivi
par l'annulation de toutes les autres dispositions legislatives
attentatoires a la liberte d'expression (retrouver les recommandations
de RSF a ce sujet).
" Nous le repetons depuis des annees : la legislation antiterroriste
figure au premier rang des dispositions archaïques et liberticides qui
entravent le travail des journalistes et de l'ensemble de la societe
civile en Turquie. La Cour europeenne des droits de l'homme (CEDH)
ne s'y trompe pas, qui en fait le premier motif de condamnation de ce
pays. La reformer est donc un imperatif essentiel pour que la liberte
de l'information - et les autres libertes - progressent dans ce pays.
Si la philosophie du projet de loi est bien de lier dorenavant les
accusations de terrorisme a la commission d'actes violents, et non
plus a l'expression d'opinions derangeantes, il va dans le bon sens.
Mais il ne s'agit que de la première etape ", a declare Christophe
Deloire, directeur general de Reporters sans frontières.
" Outre la legislation antiterroriste, ce nouveau 'paquet de reformes'
s'attaque enfin a quelques-uns des articles liberticides du code
penal. Mais il ne doit pas s'arreter en si bon chemin : qu'en est-il
des articles 125, 299, 300 et 305 qui criminalisent la critique des
institutions d'Etat ? Quid de la loi n°5816 penalisant l'atteinte a la
memoire du fondateur de la Republique turque, Mustafa Kemal Ataturk ?
Quid de la loi n°5651 sur Internet, qui autorise un large usage de
la cybercensure et le blocage administratif de sites ? "
" Tout dependra donc de l'etendue concrète des reformes proposees. Et
bien sûr, de la facon dont elles seront appliquees par la justice. La
portee du dernier paquet de reformes judiciaires, adopte en juillet
2012, s'est revelee assez limitee : malgre des avancees, il n'a
pas empeche le maintien en detention de dizaines de journalistes,
ni le lancement de nombreux autres procès de presse. La plupart
des journalistes actuellement emprisonnes en Turquie sont accuses
d'appartenir a une organisation terroriste sur la base d'accusations
mal etayees. Quand la justice sera-t-elle enfin obligee de mieux
justifier inculpations et placements en detention preventive ? Il
est primordial que les nouveaux textes soient suffisamment precis
pour laisser la marge d'interpretation la plus faible possible aux
parquets et aux magistrats ", a conclu Christophe Deloire.
Annonce depuis plusieurs mois, le " quatrième paquet de reformes
judiciaires " a ete presente au gouvernement par le ministre de la
Justice, Sadullah Ergin, lors d'un seminaire le 12 fevrier 2013. Il
devrait etre rapidement finalise et soumis au vote du parlement. Cette
initiative s'inscrit dans le cadre du renouveau des negociations de
paix entre le gouvernement et la rebellion kurde du PKK, visant a
mettre un terme a vingt ans de conflit arme.
Le projet de loi viserait a dissocier l'expression d'un soutien a une
organisation illegale, l'incitation a la violence et la commission
d'actes terroristes. Parmi les dispositions envisagees, ne seraient
plus assimiles a des " membres d'une organisation terroriste " ceux qui
sont censes lui avoir " prete main forte ", avoir " commis des crimes
en son nom " ou en avoir " fait la propagande ". L'article 215 du code
penal (" apologie d'un crime ou d'un criminel "), passible de trois
ans d'emprisonnement, serait assoupli. Cet article est actuellement
utilise de telle sorte que designer le chef du PKK par l'expression "
Monsieur Ocalan " passe souvent pour une marque de respect, assimilee
a l'eloge d'un criminel.
La peine de six mois a deux ans d'emprisonnement prevue pour ceux qui
" decouragent la population d'accomplir le service militaire " (article
318 du code penal), serait remplacee par une amende administrative. Le
fait que le delit ait ete commis a travers un media n'entraînerait
plus le doublement de la peine.
Par ailleurs, les faits de torture ne seraient plus prescrits. Le
projet de loi entend egalement faciliter la possibilite pour les
prevenus de faire appel d'un placement en detention preventive, et
inciterait la justice turque a mieux prendre en compte les decisions
de la CEDH.
Des ONG turques, dont l'eminente association de defense des droits
de l'homme IHD, ont deplore le manque de concertation lors de
l'elaboration de ce projet de loi.
" Comite des medias du KCK " : vingt-six journalistes toujours en
detention
Vingt-six collaborateurs de medias pro-kurdes restent en prison dans
le procès du presume " comite des medias du KCK ". Sept de leurs
collègues ont ete remis en liberte conditionnelle a l'issue de la
dernière audience dans cette affaire, le 8 fevrier 2013.
La 15ème chambre de la cour d'Assises d'Istanbul a ordonne
l'elargissement d'Ismail Yildiz, reporter de l'agence de presse
ANF (Euphrate), Pervin Yerlikaya, comptable de l'agence de presse
Diha (Tigre), Zuhal Tekiner, co-proprietaire privilegie de Diha,
Ziya Cicekci, co-proprietaire du quotidien Ozgur Gundem (Agenda
libre), Cagdas Kaplan, reporter de Diha a Istanbul, Omer Ciftci,
co-proprietaire de l'hebdomadaire Demokratik Modernite (Modernite
democratique) et Saffet Orman, employe de ce dernier titre. Les sept
prevenus, liberes " compte tenu de la duree deja passee en detention
" et de " l'etat des pièces a conviction ", etaient incarceres depuis
le 21 decembre 2011. Ils restent soumis a une interdiction de sortie
du territoire.
Les vingt-six incarceres resteront en prison jusqu'a la prochaine
audience, fixee au 22 avril 2013. La cour a explique sa decision par
le fait que " la duree actuelle de la detention preventive respecte
pour le moment les normes definies par la Cour europeenne des droits
de l'homme, qu'il existe toujours des soupcons plausibles a l'encontre
des accuses, et que des mesures alternatives de contrôle judiciaire
s'avèreraient insuffisantes ". Le tribunal statuera a nouveau le 26
avril sur la possibilite de les remettre en liberte.
D'ici la prochaine audience, la cour verifiera les dates d'entree et
de sortie du territoire des prevenus accuses d'avoir assiste a des
reunions du KCK dans le nord de l'Irak. Les accuses n'ont toujours pas
pu s'exprimer en langue kurde pour se defendre, mais ils devraient
pouvoir le faire une fois que le dernier acte d'accusation aura ete
lu. Enfin, conformement a la demande du parquet, le jury a porte
plainte contre les avocats de la defense, qui avaient critique l'acte
d'accusation en le qualifiant de " document calomnieux ", " absurde ",
" comique ", et qui rendrait la presse " captive ".
Par ailleurs, dix-sept procès ont ete ouverts a l'encontre d'Ibrahim
Guvenc, le redacteur en chef du seul quotidien en langue kurde, Azadiya
Welat (Pays Libre), sur le fondement d'articles et de chroniques
publies du 10 juin 2012 au 4 novembre 2012, accuses de faire la "
propagande du PKK ". Comme ses predecesseurs Vedat Kursun et Ozan
Kilinc, Ibrahim Guvenc est aujourd'hui menace de prison en raison de
la couverture par son journal de la question kurde.
Helène Flautre : " Encourager les reformes legislatives et le dialogue
politique sur la question kurde "
C'est avec le thème de la liberte de l'information en Turquie que
Reporters sans frontières a ouvert la saison 2013 de ses entretiens
radiophoniques mensuels au sein du Parlement europeen de Bruxelles.
L'organisation recevait le 24 janvier 2013 Helène Flautre, eurodeputee
francaise (Verts/ALE), membre de la commission Affaires etrangères
et presidente de sa delegation a la Commission parlementaire mixte
UE-Turquie. De retour d'une visite en Turquie, Helène Flautre met
l'accent sur la necessite de reformer la loi antiterroriste et les
procedures judiciaires, et souligne l'importance des negociations de
paix en cours. Elle plaide pour que l'Union europeenne fasse preuve
de sincerite dans les negociations d'adhesion de manière a encourager
la democratisation de la Turquie.
Ecouter l'emission ICI
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Source/Lien : Reporters Sans Frontières
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Publie le : 20-02-2013
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publie sur son site le mercredi 13 fevrier 2013.
Legende photo: DAILY NEWS photo / Selahattin SONMEZ
Reporters Sans Frontières
Turquie
Legislation antiterroriste : la reforme annoncee doit etre a la mesure
des enjeux
Publie le mercredi 13 fevrier 2013.
Reporters sans frontières salue la volonte affichee par le gouvernement
turc de reformer la legislation antiterroriste en vigueur dans le pays,
et l'encourage a aller jusqu'au bout de cette demarche.
Le projet de loi en preparation, qui prevoit de modifier certains
articles du code penal, de la loi antiterroriste et de la loi sur la
presse, pourrait representer un pas important dans la bonne direction.
Mais pour marquer un reel tournant, il faut qu'il soit suffisamment
complet et precis pour que l'esprit de la reforme soit effectivement
mis en pratique par la justice. Et qu'il soit rapidement suivi
par l'annulation de toutes les autres dispositions legislatives
attentatoires a la liberte d'expression (retrouver les recommandations
de RSF a ce sujet).
" Nous le repetons depuis des annees : la legislation antiterroriste
figure au premier rang des dispositions archaïques et liberticides qui
entravent le travail des journalistes et de l'ensemble de la societe
civile en Turquie. La Cour europeenne des droits de l'homme (CEDH)
ne s'y trompe pas, qui en fait le premier motif de condamnation de ce
pays. La reformer est donc un imperatif essentiel pour que la liberte
de l'information - et les autres libertes - progressent dans ce pays.
Si la philosophie du projet de loi est bien de lier dorenavant les
accusations de terrorisme a la commission d'actes violents, et non
plus a l'expression d'opinions derangeantes, il va dans le bon sens.
Mais il ne s'agit que de la première etape ", a declare Christophe
Deloire, directeur general de Reporters sans frontières.
" Outre la legislation antiterroriste, ce nouveau 'paquet de reformes'
s'attaque enfin a quelques-uns des articles liberticides du code
penal. Mais il ne doit pas s'arreter en si bon chemin : qu'en est-il
des articles 125, 299, 300 et 305 qui criminalisent la critique des
institutions d'Etat ? Quid de la loi n°5816 penalisant l'atteinte a la
memoire du fondateur de la Republique turque, Mustafa Kemal Ataturk ?
Quid de la loi n°5651 sur Internet, qui autorise un large usage de
la cybercensure et le blocage administratif de sites ? "
" Tout dependra donc de l'etendue concrète des reformes proposees. Et
bien sûr, de la facon dont elles seront appliquees par la justice. La
portee du dernier paquet de reformes judiciaires, adopte en juillet
2012, s'est revelee assez limitee : malgre des avancees, il n'a
pas empeche le maintien en detention de dizaines de journalistes,
ni le lancement de nombreux autres procès de presse. La plupart
des journalistes actuellement emprisonnes en Turquie sont accuses
d'appartenir a une organisation terroriste sur la base d'accusations
mal etayees. Quand la justice sera-t-elle enfin obligee de mieux
justifier inculpations et placements en detention preventive ? Il
est primordial que les nouveaux textes soient suffisamment precis
pour laisser la marge d'interpretation la plus faible possible aux
parquets et aux magistrats ", a conclu Christophe Deloire.
Annonce depuis plusieurs mois, le " quatrième paquet de reformes
judiciaires " a ete presente au gouvernement par le ministre de la
Justice, Sadullah Ergin, lors d'un seminaire le 12 fevrier 2013. Il
devrait etre rapidement finalise et soumis au vote du parlement. Cette
initiative s'inscrit dans le cadre du renouveau des negociations de
paix entre le gouvernement et la rebellion kurde du PKK, visant a
mettre un terme a vingt ans de conflit arme.
Le projet de loi viserait a dissocier l'expression d'un soutien a une
organisation illegale, l'incitation a la violence et la commission
d'actes terroristes. Parmi les dispositions envisagees, ne seraient
plus assimiles a des " membres d'une organisation terroriste " ceux qui
sont censes lui avoir " prete main forte ", avoir " commis des crimes
en son nom " ou en avoir " fait la propagande ". L'article 215 du code
penal (" apologie d'un crime ou d'un criminel "), passible de trois
ans d'emprisonnement, serait assoupli. Cet article est actuellement
utilise de telle sorte que designer le chef du PKK par l'expression "
Monsieur Ocalan " passe souvent pour une marque de respect, assimilee
a l'eloge d'un criminel.
La peine de six mois a deux ans d'emprisonnement prevue pour ceux qui
" decouragent la population d'accomplir le service militaire " (article
318 du code penal), serait remplacee par une amende administrative. Le
fait que le delit ait ete commis a travers un media n'entraînerait
plus le doublement de la peine.
Par ailleurs, les faits de torture ne seraient plus prescrits. Le
projet de loi entend egalement faciliter la possibilite pour les
prevenus de faire appel d'un placement en detention preventive, et
inciterait la justice turque a mieux prendre en compte les decisions
de la CEDH.
Des ONG turques, dont l'eminente association de defense des droits
de l'homme IHD, ont deplore le manque de concertation lors de
l'elaboration de ce projet de loi.
" Comite des medias du KCK " : vingt-six journalistes toujours en
detention
Vingt-six collaborateurs de medias pro-kurdes restent en prison dans
le procès du presume " comite des medias du KCK ". Sept de leurs
collègues ont ete remis en liberte conditionnelle a l'issue de la
dernière audience dans cette affaire, le 8 fevrier 2013.
La 15ème chambre de la cour d'Assises d'Istanbul a ordonne
l'elargissement d'Ismail Yildiz, reporter de l'agence de presse
ANF (Euphrate), Pervin Yerlikaya, comptable de l'agence de presse
Diha (Tigre), Zuhal Tekiner, co-proprietaire privilegie de Diha,
Ziya Cicekci, co-proprietaire du quotidien Ozgur Gundem (Agenda
libre), Cagdas Kaplan, reporter de Diha a Istanbul, Omer Ciftci,
co-proprietaire de l'hebdomadaire Demokratik Modernite (Modernite
democratique) et Saffet Orman, employe de ce dernier titre. Les sept
prevenus, liberes " compte tenu de la duree deja passee en detention
" et de " l'etat des pièces a conviction ", etaient incarceres depuis
le 21 decembre 2011. Ils restent soumis a une interdiction de sortie
du territoire.
Les vingt-six incarceres resteront en prison jusqu'a la prochaine
audience, fixee au 22 avril 2013. La cour a explique sa decision par
le fait que " la duree actuelle de la detention preventive respecte
pour le moment les normes definies par la Cour europeenne des droits
de l'homme, qu'il existe toujours des soupcons plausibles a l'encontre
des accuses, et que des mesures alternatives de contrôle judiciaire
s'avèreraient insuffisantes ". Le tribunal statuera a nouveau le 26
avril sur la possibilite de les remettre en liberte.
D'ici la prochaine audience, la cour verifiera les dates d'entree et
de sortie du territoire des prevenus accuses d'avoir assiste a des
reunions du KCK dans le nord de l'Irak. Les accuses n'ont toujours pas
pu s'exprimer en langue kurde pour se defendre, mais ils devraient
pouvoir le faire une fois que le dernier acte d'accusation aura ete
lu. Enfin, conformement a la demande du parquet, le jury a porte
plainte contre les avocats de la defense, qui avaient critique l'acte
d'accusation en le qualifiant de " document calomnieux ", " absurde ",
" comique ", et qui rendrait la presse " captive ".
Par ailleurs, dix-sept procès ont ete ouverts a l'encontre d'Ibrahim
Guvenc, le redacteur en chef du seul quotidien en langue kurde, Azadiya
Welat (Pays Libre), sur le fondement d'articles et de chroniques
publies du 10 juin 2012 au 4 novembre 2012, accuses de faire la "
propagande du PKK ". Comme ses predecesseurs Vedat Kursun et Ozan
Kilinc, Ibrahim Guvenc est aujourd'hui menace de prison en raison de
la couverture par son journal de la question kurde.
Helène Flautre : " Encourager les reformes legislatives et le dialogue
politique sur la question kurde "
C'est avec le thème de la liberte de l'information en Turquie que
Reporters sans frontières a ouvert la saison 2013 de ses entretiens
radiophoniques mensuels au sein du Parlement europeen de Bruxelles.
L'organisation recevait le 24 janvier 2013 Helène Flautre, eurodeputee
francaise (Verts/ALE), membre de la commission Affaires etrangères
et presidente de sa delegation a la Commission parlementaire mixte
UE-Turquie. De retour d'une visite en Turquie, Helène Flautre met
l'accent sur la necessite de reformer la loi antiterroriste et les
procedures judiciaires, et souligne l'importance des negociations de
paix en cours. Elle plaide pour que l'Union europeenne fasse preuve
de sincerite dans les negociations d'adhesion de manière a encourager
la democratisation de la Turquie.
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