EDITORIAL
2013, l'année de tous les défis, par Ara Toranian
Pour un Etat comme l'Arménie, en butte à la menace permanente du
panturquisme, chaque année écoulée est autant de gagné sur
l'adversité. Dans ce qui devient désormais une tradition, celle à
venir ne fera pas exception à la règle. A ceci près cependant qu'aux
risques classiques pesant sur ses frontières, s'ajoutent les
préoccupations liées à sa conjoncture politique. Certes, la
présidentielle du 18 février 2013, la première depuis les événements
catastrophiques qui avaient endeuillé l'élection de 2008, se présente
en terme de paix civile sous de meilleurs auspices que la précédente.
Pour autant, il serait erroné d'attribuer la cause de cette apparente
embellie à une quelconque résolution des dysfonctionnements
démocratiques qui avaient provoqué la violence de l'époque. Il faut
plutôt en chercher l'explication dans d'autres facteurs au nombre
desquels on citera pêle-mêle : la résignation qui a gagné une
population toujours sonnée par la tournure meurtrière du 1er mars 2008
(10 morts), la crise politique de l'opposition en panne de leader
crédible et de programme, la menace extérieure et enfin la force
d'inertie du pouvoir actuel qui s'est employé à consolider son assise,
jusqu'à pétrifié un système aujourd'hui immunisé contre toute forme
d'alternative.
En témoigne, l'attitude des grandes organisations de l'opposition qui
renoncent les unes après les autres à présenter des candidats à la
présidentielle. Pourquoi en jouerait-elle en effet le jeu, alors
qu'elles pensent que les dés y sont pipés, le parti républicain
majoritaire s'étant mis en travers de toute les réformes visant à
garantir l'équité et la transparence du scrutin, y compris celles
émanant d'Arménie prospère, membre de la coalition pro-gouvernementale
? Cette attitude négative pèse d'ores et déjà sur l'image de ces
élections qui, avant même d'avoir eu lieu, sont entachées d'un soupçon
d'irrégularité. Il résulte de cette situation que Serge Sarkissian,
qui se présentera dans un cadre législatif verrouillé face à des
faire-valoir, se destine à vaincre sans péril et donc à triompher sans
gloire. Il n'aurait pourtant pas pris beaucoup de risque à ouvrir le
jeu, tant l'opposition paraît aujourd'hui désorganisée.
Cette configuration, révélatrice d'un système bloqué, témoigne de la
fin d'un certain cycle politique qui voit, symptôme éloquent, ses
acteurs atteints par la limite d'ge. Elle n'annonce rien de rassurant
au moment où la sécurité du pays exigerait au contraire une forte
cohésion interne et un regain de confiance en lui. Il est dommage que
Serge Sarkissian, qui sait déployer en certaines circonstances de
vraies qualités de chef d'Etat, ait fait montre d'aussi peu de panache
en la circonstance et qu'il ne se soit pas donné les moyens de ses
ambitions démocratiques proclamées. Ses promesses de lutter contre les
fraudes électorales ou la corruption restent en tout cas pour
l'instant en souffrance, échouées quelque part sur les obstacles
dressés par sa propre organisation politique.
Pourtant, en défendant mordicus, et malgré les pressions de Moscou, le
partenariat économique avec l'Union Européenne plutôt qu'avec l'Union
Eurasiatique que veut lui imposer Poutine, Sarkissian prend clairement
une option sur l'avenir démocratique de la société arménienne. Alors,
quelle cohérence entre cette orientation audacieuse, riche d'espoir
quant à l'assainissement du système, et la résistance manifestée au
quotidien par son parti - peut-être plus encore que par son
gouvernement - aux réformes qui poursuivent ces mêmes objectifs ?
Double langage ? Machiavélisme de bas étage ? Mais pourquoi ? Dans
quel but ? Si Sarkissian n'obéissait qu'à la seule logique de la
pérennisation de son propre pouvoir, pourquoi s'aventurerait-il ainsi
à se mettre en délicatesse avec l'allié stratégique russe, lequel
possède en Arménie et donc sur sa présidence, un certain nombre de
leviers dont l'influence n'est plus à démontrer ?
En tout état de cause, l'année qui s'annonce apportera bien quelques
éclairages sur ces mystères. A deux ans désormais du centième
anniversaire du génocide, ces questions invitent en tout cas à la
mobilisation et à l'engagement. Car face aux écueils évoqués, les
victoires sur le long chemin de notre renaissance restent à ce prix.
Dans cette perspective et à cette étape, le rôle de la diaspora
demeure important. Le collectif arménien se nourrissant comme tous les
autres des avancées réalisées par chacune de ses composantes, les
points marqués à sa périphérie renforcent aussi son centre, en
l'occurrence l'Etat, qui en a bien besoin. Contrairement à nombre de
ses dirigeants, qui eux, en sont à l'abri...du besoin.
mardi 1er janvier 2013,
Ara ©armenews.com
From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress
2013, l'année de tous les défis, par Ara Toranian
Pour un Etat comme l'Arménie, en butte à la menace permanente du
panturquisme, chaque année écoulée est autant de gagné sur
l'adversité. Dans ce qui devient désormais une tradition, celle à
venir ne fera pas exception à la règle. A ceci près cependant qu'aux
risques classiques pesant sur ses frontières, s'ajoutent les
préoccupations liées à sa conjoncture politique. Certes, la
présidentielle du 18 février 2013, la première depuis les événements
catastrophiques qui avaient endeuillé l'élection de 2008, se présente
en terme de paix civile sous de meilleurs auspices que la précédente.
Pour autant, il serait erroné d'attribuer la cause de cette apparente
embellie à une quelconque résolution des dysfonctionnements
démocratiques qui avaient provoqué la violence de l'époque. Il faut
plutôt en chercher l'explication dans d'autres facteurs au nombre
desquels on citera pêle-mêle : la résignation qui a gagné une
population toujours sonnée par la tournure meurtrière du 1er mars 2008
(10 morts), la crise politique de l'opposition en panne de leader
crédible et de programme, la menace extérieure et enfin la force
d'inertie du pouvoir actuel qui s'est employé à consolider son assise,
jusqu'à pétrifié un système aujourd'hui immunisé contre toute forme
d'alternative.
En témoigne, l'attitude des grandes organisations de l'opposition qui
renoncent les unes après les autres à présenter des candidats à la
présidentielle. Pourquoi en jouerait-elle en effet le jeu, alors
qu'elles pensent que les dés y sont pipés, le parti républicain
majoritaire s'étant mis en travers de toute les réformes visant à
garantir l'équité et la transparence du scrutin, y compris celles
émanant d'Arménie prospère, membre de la coalition pro-gouvernementale
? Cette attitude négative pèse d'ores et déjà sur l'image de ces
élections qui, avant même d'avoir eu lieu, sont entachées d'un soupçon
d'irrégularité. Il résulte de cette situation que Serge Sarkissian,
qui se présentera dans un cadre législatif verrouillé face à des
faire-valoir, se destine à vaincre sans péril et donc à triompher sans
gloire. Il n'aurait pourtant pas pris beaucoup de risque à ouvrir le
jeu, tant l'opposition paraît aujourd'hui désorganisée.
Cette configuration, révélatrice d'un système bloqué, témoigne de la
fin d'un certain cycle politique qui voit, symptôme éloquent, ses
acteurs atteints par la limite d'ge. Elle n'annonce rien de rassurant
au moment où la sécurité du pays exigerait au contraire une forte
cohésion interne et un regain de confiance en lui. Il est dommage que
Serge Sarkissian, qui sait déployer en certaines circonstances de
vraies qualités de chef d'Etat, ait fait montre d'aussi peu de panache
en la circonstance et qu'il ne se soit pas donné les moyens de ses
ambitions démocratiques proclamées. Ses promesses de lutter contre les
fraudes électorales ou la corruption restent en tout cas pour
l'instant en souffrance, échouées quelque part sur les obstacles
dressés par sa propre organisation politique.
Pourtant, en défendant mordicus, et malgré les pressions de Moscou, le
partenariat économique avec l'Union Européenne plutôt qu'avec l'Union
Eurasiatique que veut lui imposer Poutine, Sarkissian prend clairement
une option sur l'avenir démocratique de la société arménienne. Alors,
quelle cohérence entre cette orientation audacieuse, riche d'espoir
quant à l'assainissement du système, et la résistance manifestée au
quotidien par son parti - peut-être plus encore que par son
gouvernement - aux réformes qui poursuivent ces mêmes objectifs ?
Double langage ? Machiavélisme de bas étage ? Mais pourquoi ? Dans
quel but ? Si Sarkissian n'obéissait qu'à la seule logique de la
pérennisation de son propre pouvoir, pourquoi s'aventurerait-il ainsi
à se mettre en délicatesse avec l'allié stratégique russe, lequel
possède en Arménie et donc sur sa présidence, un certain nombre de
leviers dont l'influence n'est plus à démontrer ?
En tout état de cause, l'année qui s'annonce apportera bien quelques
éclairages sur ces mystères. A deux ans désormais du centième
anniversaire du génocide, ces questions invitent en tout cas à la
mobilisation et à l'engagement. Car face aux écueils évoqués, les
victoires sur le long chemin de notre renaissance restent à ce prix.
Dans cette perspective et à cette étape, le rôle de la diaspora
demeure important. Le collectif arménien se nourrissant comme tous les
autres des avancées réalisées par chacune de ses composantes, les
points marqués à sa périphérie renforcent aussi son centre, en
l'occurrence l'Etat, qui en a bien besoin. Contrairement à nombre de
ses dirigeants, qui eux, en sont à l'abri...du besoin.
mardi 1er janvier 2013,
Ara ©armenews.com
From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress