Palestine Solidarité
1 juin 2013
Caucase : La guerre "gelée" du Nagorno-Karabakh
Luc Michel
Luc MICHEL pour EODE Think Tank /
Avec Le Monde - Libération - Palgrave Macmillan / 2013 06 01 /
Un nouveau livre - EUROPE'S NEXT AVOIDABLE WAR: NAGORNO-KARABAKH
(la prochaine guerre évitable de l'Europe: le Haut-Karabakh, chez
Palgrave Macmillan) - nous rappelle le conflit entre l'Arménie et
l'Azerbaïdjan sur ce territoire caucasien contesté, l'une des «guerres
gelées» des anciennes frontières de l'Union soviétique.
J'étais en Arménie à la fin de février 2013 pour les élections
présidentielles. La question du Haut-Karabakh était encore l'un des
principaux thèmes de la campagne électorale. Et ce n'est pas un hasard
si le président arménien Sarkissian, qui a encore gagné un nouveau
mandat, était longtemps avant le chef des milices du Karabakh dans les
années 1990...
I : LE CONTEXTE GEOPOLITIQUE
Un des points chauds de la confrontation OTAN-Russie, ce sont les
Républiques auto-proclamées de Pridnestrovie, Abkhazie et Ossétie du
Sud, que l'on appelle aussi la « CEI-2 ». En outre, dans une
confrontation similaire, c'est le Haut-Karabkh, soutenu par l'Arménie
- l'allié le plus proche de la Russie au Caucase, contre
l'Azerbaïdjan, membre du GUAM pro-OTAN. C'est là que la confrontation
entre l'OTAN et la Russie s'exprime directement, aux frontières
caucasiennes et aux marches européennes de la Russie.
« LES REPUBLIQUES VENUES DU FROID »
L'Abkhazie (capitale Soukhoumi), ex-république autonome de la Géorgie
soviétique depuis 1931, a combattu les forces géorgiennes de 1992 à
1994, au lendemain de la dissolution de l'URSS en décembre 1991.
Soukhoumi ne reconnaît pas la souveraineté de Tbilissi sur son
territoire et applique une politique visant à accéder à une
indépendance reconnue par la communauté internationale.
Ex-région autonome de la Géorgie d'après la division administrative de
l'URSS, l'Ossétie du Sud (capitale Tskhinvali) a proclamé son
indépendance le 20 septembre 1990. Tbilissi a alors riposté et les
opérations militaires ont fait des milliers de morts de part et
d'autre de 1990 à 1992. Lors du premier référendum de janvier 1992, au
lendemain de la disparition de l'URSS, l'Ossétie du Sud s'est
massivement exprimée en faveur de son indépendance envers la Géorgie.
Les Sud-Ossètes mettent le cap sur le rapprochement avec l'Ossétie du
Nord, république du Caucase du Nord russe, notant que les Ossètes, du
Nord comme du Sud, ont bénévolement intégré la Russie en 1774, une
bonne trentaine d'années avant la Géorgie. Près de 99% des Sud-Ossètes
ont dit « oui » au référendum organisé ce 12 novembre 2006 par les
autorités séparatistes et proposant de faire de la région un Etat
indépendant. Tskhinvali ne cache pas son objectif stratégique de
réunification avec l'Ossétie du Nord, une république russe du Caucase
du Nord, et refuse catégoriquement de reconnaître la souveraineté
géorgienne sur son territoire.
La Pridnestrovie (la PMR, capitale Tiraspol), zone la plus
industrialisée de l'ancienne République soviétique de Moldavie et
peuplée aux deux tiers par des Slaves, a proclamé son indépendance
envers Kichinev en 1992, après la dislocation de l'URSS et à l'issue
de plusieurs mois de combats contre les forces moldaves pro-roumaines.
Depuis, Tiraspol refuse de reconnaître la souveraineté moldave sur son
territoire et applique une politique indépendante, renforcée après le
référendum sur l'indépendance de septembre 2006, très largement
remporté par les partisans du rapprochement avec la Russie. Le 17
septembre 2006, un référendum a eu lieu en effet en République Moldave
de Pridnestrovie (PMR), et, dans le cadre de cette consultation
nationale, la majorité écrasante de la population de cette république
autoproclamée s'est prononcée pour la poursuite de la politique
d'indépendance de la Pridnestrovie et de son union avec la Russie.
Enfin le Nagorny-Karabakh (capitale Stepanakert), qui se veut « le
deuxième Etat arménien », enclave à majorité arménienne en
Azerbaïdjan, a fait sécession de Bakou au terme d'un conflit armé qui
a fait, entre 1988 et 1994, des milliers de morts. Le Haut-Karabakh
bénéficiait, au sein de la république soviétique d'Azerbaïdjan, du
statut de région autonome. En 1988, à la faveur de la perestroïka
gorbatchévienne, la population locale a exigé la réunification de
l'enclave à la république soviétique d'Arménie. Malgré de multiples
tentatives de Moscou de faire revenir le calme dans le pays, une
véritable guerre a éclaté entre la région et l'Azerbaïdjan après la
chute de l'URSS en 1991. Le 2 septembre 1991, les autorités
séparatistes ont proclamé l'indépendance de la République du
Haut-Karabakh englobant la région autonome du Haut-Karabakh et le
district de Chaoumian. Un cessez-le-feu est intervenu en 1994 mais la
situation reste tendue, malgré des efforts de médiation du groupe de
Minsk de l'OSCE. Depuis, des négociations sont en cours à différents
échelons entre Bakou et Erevan.
QUATRE « CONFLITS GELES »
Quatre « conflits gelés » perdurent autour de ces quatre républiques,
que l'on tente, avec l'appui de l'OTAN et de Washington, d'annihiler
par la force. En Abkhazie et en Ossétie du Sud agressées par la
Géorgie, les combats n'ont cessé qu'après l'intervention d'une force
internationale de maintien de la paix. Après l'agression de l'Ossétie
du Sud par la Géorgie en août 2008 et la courte guerre entre la Russie
et la Géorgie, Moscou a reconnu les deux républiques caucasiennes.
La situation reste tendue dans le Haut-Karabakh, malgré le
cessez-le-feu et les efforts de médiation de l'OSCE. La Pridnestrovie
réclame depuis 16 ans son indépendance par rapport à la Moldavie, au
travers de plusieurs referendum, et abrite un contingent de paix russe
malgré l'opposition moldave.
A noter que le 30 septembre 2006, les présidents des parlements de
trois de ces républiques auto-proclamées - mais néanmoins en Droit
international reconnues comme « sujets de droit international » en
tant que parties à des conflits - (Abkhazie, Ossétie du Sud,
Pridnestrovie) ont signé un accord instituant l'Assemblée
parlementaire de la Communauté « Pour la démocratie et les droits des
peuples ». Cette Communauté, qualifiée depuis de « CEI-2 », a été
instituée en juin 2006 par les leaders des trois républiques et le
Traité d'amitié prévoit une assistance mutuelle au niveau politique et
économique, mais aussi, en cas d'agression, une assistance militaire.
II : « LA PROCHAINE GUERRE EUROPEENNE EVITABLE : LE NAGORNO-KARABAKH » ?
C'est la thèse du livre EUROPE'S NEXT AVOIDABLE WAR: NAGORNO-KARABAKH
de Michael Kambeck (Editeur) et Sargis Ghazaryan (Editeur) (*) pour
Palgrave MacMillan.
"Le Nagorno-Karabakh est le plus périlleux des conflits dits gelés en
Europe de l'Est. Dans une région presque libre d'observateurs, les
conséquences d'une nouvelle guerre dans le Haut-Karabakh sont
largement sous-estimés », explique l'éditeur.
Les éditeurs, en capitalisant sur leur expérience au sein de l'ONG Les
Amis Européens de l'Arménie, rassemblent les voix à partir d'un large
éventail de perspectives interdisciplinaires au sein des sciences
sociales et des praticiens travaillant dans le domaine. Ils mettent en
lumière la situation actuelle dans le Haut-Karabakh, comment elle a
évolué, et les scénarios probables, compte tenu de l'évolution du
paysage y compris les nouveaux instruments de la politique étrangère
de l'UE. Le livre comprend des propositions concrètes en vue de faire
de la guerre, un résultat moins probable.
"Le conflit du Haut-Karabakh entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan définit
presque l'insoluble dans les soi-disant conflits ethniques insolubles.
Depuis l'éclatement de l'Union soviétique, il a pourri sans beaucoup
de progrès vers un règlement. Ce livre est le premier à aborder le
conflit à travers ses différentes dimensions et de suggérer des
approches à son amélioration. Ce qui est le plus rafraîchissant sur
l'ensemble de la collection est l'attitude que, s'il doit être résolu
le conflit doit être considéré comme inéluctablement politique et que
les solutions militaires seraient tout sauf ça ", écrit John Agnew
(University of California, Los Angeles).
Il faut noter, comme l'écrit un des auteurs, que sa «participation à
ce projet est venu au milieu de fortes pressions de l'aile
pro-gouvernementale de la diaspora azerbaïdjanaise aux Etats-Unis de
se retirer de la publication".
VOICI QUELQUES EXTRAITS DU LIVRE, EXPOSANT LA THESE DES AUTEURS:
"Le livre expose la situation actuelle dans le conflit du
Haut-Karabakh et ses implications, et a un fort accent
interdisciplinaire. Par accent interdisciplinaire, nous entendons à la
fois l'éventail des disciplines au sein des sciences sociales
utilisées pour aborder le thème général du livre et de la combinaison
des contributeurs qui sont des praticiens et des universitaires ayant
une forte connaissance de ce domaine, apportant un large éventail de
compétences pour le volume ".
"D'autre part, nous devons reconnaître que, malgré les efforts
déployés, il n'a pas été possible de convaincre un plus grand nombre
d'auteurs azerbaïdjanais à contribuer au volume. La principale raison
du rejet de contribuer était sans doute la peur de la répression par
l'Etat azerbaïdjanais, à l'intérieur et même à l'extérieur de
l'Azerbaïdjan.
Les éditeurs ont abordé la question de l'équilibre de cinq façons:
(1) en invitant des auteurs azéris qui sont connus pour fournir un
point de vue indépendant azerbaïdjanais des prépositions de Bakou
(Gourbanov offre un tel point de vue);
(2) en veillant à ce que plusieurs auteurs sont invités, qui sont
connus pour défendre plus les points de vue pro-azéris, bien que
n'étant pas d'origine azérie (sans différenciation forte, un peu moins
d'un tiers des contributeurs tombent dans ce groupe);
(3) en limitant le nombre de contributeurs qui sont connus pour
défendre plus des points de vue pro-arméniens (à peu près la même
taille que le groupe mentionné ci-dessus);
(4) en invitant un grand nombre de contributeurs qui sont
explicitement neutres dans leur contexte et points de vue (plus d'un
tiers) [...]. "
"Geysar Gourbanov (blogueur militant Azerbaïdjanais des droits
civiques et ancien directeur du Centre d'information de l'OTAN à
Bakou, qui vit actuellement à Seattle) révèle dans un mode unique la
genèse et l'évolution conséquente du conflit: à travers le prisme du
mythe grec de la Pomme d'or de discorde, qui a conduit à la guerre de
Troie. En approfondissant son analyse, fondée sur des approches
véritablement novatrices au conflit, l'auteur applique les moyens de
la psychologie collective pour faire la lumière sur la dimension
sociétale du conflit. En outre, il applique cette boîte à outils pour
les obstacles apparemment les plus insurmontables à la résolution du
conflit. Il fait valoir que la solution au conflit réside au-delà de
la realpolitik des acteurs étatiques. En fait, il soutient que la paix
ne peut être réalisée que si une plus grande partie des sociétés
touchées participent, en partie, grce aux médias sociaux, et si la
démocratie, la tolérance et l'intégration sont appliquées au niveau
régional ".
III: DEBATTRE LES THESES DU LIVRE
Ce livre intéressant sur ce conflit et sur la géopolitique du
Caucase devrait susciter un large débat. Notre critique, précisément,
est que ce débat est absent du livre lui même. Ce livre présente en
effet les thèses sur ce conflit qui sont celles de la diplomatie de
l'Union Européenne. Il y a ici en filigrane les illusions de la
politique étrangère de l'UE, puissance soft sans leadership et sans
réel pouvoir, qui apparaissent.
Les thèses du grand acteur de ce conflit, la Russie, sont quasi
absentes. Sans parler des positions eurasistes sur la Grande-Europe.
C'est pourtant de Moscou bien plus que de Bruxelles que peut venir la
solution définitive, dans cet "étranger proche" où l'UE a la
prétention de défier la Russie.
Un autre grand acteur, l'OTAN, est trop peu mentionné. Voir les rares
12 mentions de l'Alliance Atlantique dans l'index. Et l'absence du
GUAM, alliance anti-russe pilotée par l'OTAN, dans ce même index.
C'est pourtant l'expansion de l'OTAN à l'Est qui est, selon notre
analyse, l'une des causes de la persistance du conflit depuis deux
décennies. Washington, qui domine l'agenda géopolitique de la région,
et y arme le bellicisme de Tbilissi ou de Bakou, est aussi quasi
absente.
Depuis 40 ans nous affirmons que l'OTAN c'est la guerre et le
militarisme. Et les conflits de la « CEI-2 » le démontrent à nouveau.
Ma thèse est que c'est l'OTAN qui pousse à la pérennisation de ces
conflits, à l'hostilité entre les peuples voisins. Parce que l'OTAN a
intérêt à créer des abcès de fixation, à entretenir la logique de
guerre pour laquelle elle a été créée. Parce que l'OTAN soutient
directement les thèses extrémistes anti-russes des radicaux à Kichinev
(Moldavie) et Tbilissi (comme elle le fait aussi dans les pays baltes
en soutenant étroitement les extrémistes baltes dans leur haineuse
xénophobie anti-russe), contre les partisans de la paix.
Moscou a proposé divers plans de paix, sur base de la fédéralisation
des Etats concernés, comme le plan Kozac pour la Moldavie, tous
torpillés par les extrémistes soutenus par l'OTAN.
Luc MICHEL
http://www.eode.org/eode-think-tank-geopolitique-caucase-la-guerre-gelee-du-nagorno-karabakh/
English version on :
http://www.eode.org/eode-think-tank-geopolitics-caucasus-the-frozen-war-of-nagorno-karabakh/
# APPENDICE 1 / LE LIVRE
Europe's Next Avoidable War: Nagorno-Karabakh
Dr Michael Kambeck (Editeur), Dr Sargis Ghazaryan (Editeur)
Incluant des contributions de Elmar Brok, Bernard Coulie, Andrew
Cooper, Baronne Caroline Cox, Frank Engel, Geysar Gurbanov, Richard
Giragosian, Uwe Halbach, Paryur Hovhannisyan, Otto Luchterhandt,
Sergey Markedonov, Arpine Martirosyan, Katherine Morris, Tevan
Poghosyan, Dirk Rochtus, Dennis Sammut, Peter Semneby et Charles
Tannock.
Editeur: Palgrave Macmillan (5 Mar 2013)
Hardcover: 296 pages
Langue: anglais
ISBN-10: 0230300669
Le DR MICHAEL KAMBECK est le co-fondateur de European Friends of
Armenia (EuFoA) et est aussi son Secrétaire-général. Il a travaillé
comme Directeur pour les Relations gouvernementales
(Burson-Marsteller) et Chef du Personnel pour le député européen Elmar
Brok (Parlement européen). Il a un doctorat en Science politique
(Université de Bonn) et un Master of Arts en Etudes européennes
(Université de Leeds).
Le DR SARGIS GHAZARIAN est membre de Recherche de haut niveau de
European Friends of Armenia (EuFoA). Il a été Professeur adjoint
d'Analyse de conflits et de Méthodologie de Résolution de conflits au
Caucase à l'Ecole de Relations internationales et de Diplomatie
(Université de Trieste) et membre de recherche post-Doc au Département
de Sciences politiques (Université de Trieste). Il a un doctorat en
Géographie politique et Géopolitique et un Master of Arts en Relations
internationales et Diplomatie (Université de Trieste)
# APPENDICE 2 / SOMMAIRE DU LIVRE
Introduction: Setting the Geopolitical Stage; S.Ghazaryan
PART I: APPROACHING THE CONFLICT: THE INTERNAL RATIONALE
The Quintessential Conflict: A Cultural and Historic Analysis of
Nagorno-Karabakh; B.Coulie
A Case Sui Generis: Nagorno-Karabakh in Comparison with Other Ethnic
Conflicts in Eastern Europe; U.Halbach
What the People Think: Town Hall Meetings Reveal the EU's Potential
and Limits in the Nagorno-Karabakh Conflict; T.Poghosyan &
A.Martirosyan
What the People Think: Key Findings and Observations of a Town Hall
Meeting Project in Azerbaijan, Armenia and Nagorno-Karabakh;
T.Poghosyan & A.Martirosyan
Nagorno-Karabakh: Learning from the Flemish Experience within
Belgium?; D.Rochtus
The Nagorno-Karabakh Conflict in Light of Polls in Armenia and
Nagorno-Karabakh; A.Cooper and K. Morris
PART II: THE INTERNATIONAL COMMUNITY AS FOREIGN POLICY ACTORS IN N-K:
THE EXTERNAL RATIONALE
The EU's New Foreign Policy and Its Impact on the Nagorno-Karabakh
Conflict; E.Brok
Soft and Hard Security in the South Caucasus and Nagorno Karabakh: A
Euro Atlantic Perspective; R.Giragosian
The Cold War Legacy in Nagorno-Karabakh: Visions from Russia, The USA
and Regional Actors; S.Markedonov
An Eye Witness' View: Human Suffering in Nagorno-Karabakh and the
Possible Role of the UK in Preventing New Violence; C.Cox
Evolution of the EU Position Vis-A-Vis the Nagorno-Karabakh Conflict;
P.Hovhannisyan
PART III: EUROPE'S NEXT AVOIDABLE WAR: THE PEACE RATIONALE
Conflict and Security in Nagorno-Karabakh: What Contribution from the
EU; P.Semneby
Nagorno-Karabakh Conflict: the Golden Apple of Discord or a Toy that
Two Have Failed to Share; G.Gurbanov
The EU'S Commitment in Nagorno Karabakh and the Required Steps Ahead;
C.Tannock Building a 'Consensus for Peace' in Armenia and Azerbaijan;
D.Sammut
The Karabakh Dilemma: Right to Self-Determination, Imperative of
Territorial Integrity, or a Caucasian New Deal?; F.Engel
Learning from Georgia: A Non-Use-of-Force Treaty for Nagorno-Karabakh;
O.Luchterhandt
Conclusion: Realistic Scenarios and How to Avoid a War in
Nagorno-Karabakh; M.Kambeck
http://www.palestine-solidarite.org/analyses.Luc_Michel.010613.htm
1 juin 2013
Caucase : La guerre "gelée" du Nagorno-Karabakh
Luc Michel
Luc MICHEL pour EODE Think Tank /
Avec Le Monde - Libération - Palgrave Macmillan / 2013 06 01 /
Un nouveau livre - EUROPE'S NEXT AVOIDABLE WAR: NAGORNO-KARABAKH
(la prochaine guerre évitable de l'Europe: le Haut-Karabakh, chez
Palgrave Macmillan) - nous rappelle le conflit entre l'Arménie et
l'Azerbaïdjan sur ce territoire caucasien contesté, l'une des «guerres
gelées» des anciennes frontières de l'Union soviétique.
J'étais en Arménie à la fin de février 2013 pour les élections
présidentielles. La question du Haut-Karabakh était encore l'un des
principaux thèmes de la campagne électorale. Et ce n'est pas un hasard
si le président arménien Sarkissian, qui a encore gagné un nouveau
mandat, était longtemps avant le chef des milices du Karabakh dans les
années 1990...
I : LE CONTEXTE GEOPOLITIQUE
Un des points chauds de la confrontation OTAN-Russie, ce sont les
Républiques auto-proclamées de Pridnestrovie, Abkhazie et Ossétie du
Sud, que l'on appelle aussi la « CEI-2 ». En outre, dans une
confrontation similaire, c'est le Haut-Karabkh, soutenu par l'Arménie
- l'allié le plus proche de la Russie au Caucase, contre
l'Azerbaïdjan, membre du GUAM pro-OTAN. C'est là que la confrontation
entre l'OTAN et la Russie s'exprime directement, aux frontières
caucasiennes et aux marches européennes de la Russie.
« LES REPUBLIQUES VENUES DU FROID »
L'Abkhazie (capitale Soukhoumi), ex-république autonome de la Géorgie
soviétique depuis 1931, a combattu les forces géorgiennes de 1992 à
1994, au lendemain de la dissolution de l'URSS en décembre 1991.
Soukhoumi ne reconnaît pas la souveraineté de Tbilissi sur son
territoire et applique une politique visant à accéder à une
indépendance reconnue par la communauté internationale.
Ex-région autonome de la Géorgie d'après la division administrative de
l'URSS, l'Ossétie du Sud (capitale Tskhinvali) a proclamé son
indépendance le 20 septembre 1990. Tbilissi a alors riposté et les
opérations militaires ont fait des milliers de morts de part et
d'autre de 1990 à 1992. Lors du premier référendum de janvier 1992, au
lendemain de la disparition de l'URSS, l'Ossétie du Sud s'est
massivement exprimée en faveur de son indépendance envers la Géorgie.
Les Sud-Ossètes mettent le cap sur le rapprochement avec l'Ossétie du
Nord, république du Caucase du Nord russe, notant que les Ossètes, du
Nord comme du Sud, ont bénévolement intégré la Russie en 1774, une
bonne trentaine d'années avant la Géorgie. Près de 99% des Sud-Ossètes
ont dit « oui » au référendum organisé ce 12 novembre 2006 par les
autorités séparatistes et proposant de faire de la région un Etat
indépendant. Tskhinvali ne cache pas son objectif stratégique de
réunification avec l'Ossétie du Nord, une république russe du Caucase
du Nord, et refuse catégoriquement de reconnaître la souveraineté
géorgienne sur son territoire.
La Pridnestrovie (la PMR, capitale Tiraspol), zone la plus
industrialisée de l'ancienne République soviétique de Moldavie et
peuplée aux deux tiers par des Slaves, a proclamé son indépendance
envers Kichinev en 1992, après la dislocation de l'URSS et à l'issue
de plusieurs mois de combats contre les forces moldaves pro-roumaines.
Depuis, Tiraspol refuse de reconnaître la souveraineté moldave sur son
territoire et applique une politique indépendante, renforcée après le
référendum sur l'indépendance de septembre 2006, très largement
remporté par les partisans du rapprochement avec la Russie. Le 17
septembre 2006, un référendum a eu lieu en effet en République Moldave
de Pridnestrovie (PMR), et, dans le cadre de cette consultation
nationale, la majorité écrasante de la population de cette république
autoproclamée s'est prononcée pour la poursuite de la politique
d'indépendance de la Pridnestrovie et de son union avec la Russie.
Enfin le Nagorny-Karabakh (capitale Stepanakert), qui se veut « le
deuxième Etat arménien », enclave à majorité arménienne en
Azerbaïdjan, a fait sécession de Bakou au terme d'un conflit armé qui
a fait, entre 1988 et 1994, des milliers de morts. Le Haut-Karabakh
bénéficiait, au sein de la république soviétique d'Azerbaïdjan, du
statut de région autonome. En 1988, à la faveur de la perestroïka
gorbatchévienne, la population locale a exigé la réunification de
l'enclave à la république soviétique d'Arménie. Malgré de multiples
tentatives de Moscou de faire revenir le calme dans le pays, une
véritable guerre a éclaté entre la région et l'Azerbaïdjan après la
chute de l'URSS en 1991. Le 2 septembre 1991, les autorités
séparatistes ont proclamé l'indépendance de la République du
Haut-Karabakh englobant la région autonome du Haut-Karabakh et le
district de Chaoumian. Un cessez-le-feu est intervenu en 1994 mais la
situation reste tendue, malgré des efforts de médiation du groupe de
Minsk de l'OSCE. Depuis, des négociations sont en cours à différents
échelons entre Bakou et Erevan.
QUATRE « CONFLITS GELES »
Quatre « conflits gelés » perdurent autour de ces quatre républiques,
que l'on tente, avec l'appui de l'OTAN et de Washington, d'annihiler
par la force. En Abkhazie et en Ossétie du Sud agressées par la
Géorgie, les combats n'ont cessé qu'après l'intervention d'une force
internationale de maintien de la paix. Après l'agression de l'Ossétie
du Sud par la Géorgie en août 2008 et la courte guerre entre la Russie
et la Géorgie, Moscou a reconnu les deux républiques caucasiennes.
La situation reste tendue dans le Haut-Karabakh, malgré le
cessez-le-feu et les efforts de médiation de l'OSCE. La Pridnestrovie
réclame depuis 16 ans son indépendance par rapport à la Moldavie, au
travers de plusieurs referendum, et abrite un contingent de paix russe
malgré l'opposition moldave.
A noter que le 30 septembre 2006, les présidents des parlements de
trois de ces républiques auto-proclamées - mais néanmoins en Droit
international reconnues comme « sujets de droit international » en
tant que parties à des conflits - (Abkhazie, Ossétie du Sud,
Pridnestrovie) ont signé un accord instituant l'Assemblée
parlementaire de la Communauté « Pour la démocratie et les droits des
peuples ». Cette Communauté, qualifiée depuis de « CEI-2 », a été
instituée en juin 2006 par les leaders des trois républiques et le
Traité d'amitié prévoit une assistance mutuelle au niveau politique et
économique, mais aussi, en cas d'agression, une assistance militaire.
II : « LA PROCHAINE GUERRE EUROPEENNE EVITABLE : LE NAGORNO-KARABAKH » ?
C'est la thèse du livre EUROPE'S NEXT AVOIDABLE WAR: NAGORNO-KARABAKH
de Michael Kambeck (Editeur) et Sargis Ghazaryan (Editeur) (*) pour
Palgrave MacMillan.
"Le Nagorno-Karabakh est le plus périlleux des conflits dits gelés en
Europe de l'Est. Dans une région presque libre d'observateurs, les
conséquences d'une nouvelle guerre dans le Haut-Karabakh sont
largement sous-estimés », explique l'éditeur.
Les éditeurs, en capitalisant sur leur expérience au sein de l'ONG Les
Amis Européens de l'Arménie, rassemblent les voix à partir d'un large
éventail de perspectives interdisciplinaires au sein des sciences
sociales et des praticiens travaillant dans le domaine. Ils mettent en
lumière la situation actuelle dans le Haut-Karabakh, comment elle a
évolué, et les scénarios probables, compte tenu de l'évolution du
paysage y compris les nouveaux instruments de la politique étrangère
de l'UE. Le livre comprend des propositions concrètes en vue de faire
de la guerre, un résultat moins probable.
"Le conflit du Haut-Karabakh entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan définit
presque l'insoluble dans les soi-disant conflits ethniques insolubles.
Depuis l'éclatement de l'Union soviétique, il a pourri sans beaucoup
de progrès vers un règlement. Ce livre est le premier à aborder le
conflit à travers ses différentes dimensions et de suggérer des
approches à son amélioration. Ce qui est le plus rafraîchissant sur
l'ensemble de la collection est l'attitude que, s'il doit être résolu
le conflit doit être considéré comme inéluctablement politique et que
les solutions militaires seraient tout sauf ça ", écrit John Agnew
(University of California, Los Angeles).
Il faut noter, comme l'écrit un des auteurs, que sa «participation à
ce projet est venu au milieu de fortes pressions de l'aile
pro-gouvernementale de la diaspora azerbaïdjanaise aux Etats-Unis de
se retirer de la publication".
VOICI QUELQUES EXTRAITS DU LIVRE, EXPOSANT LA THESE DES AUTEURS:
"Le livre expose la situation actuelle dans le conflit du
Haut-Karabakh et ses implications, et a un fort accent
interdisciplinaire. Par accent interdisciplinaire, nous entendons à la
fois l'éventail des disciplines au sein des sciences sociales
utilisées pour aborder le thème général du livre et de la combinaison
des contributeurs qui sont des praticiens et des universitaires ayant
une forte connaissance de ce domaine, apportant un large éventail de
compétences pour le volume ".
"D'autre part, nous devons reconnaître que, malgré les efforts
déployés, il n'a pas été possible de convaincre un plus grand nombre
d'auteurs azerbaïdjanais à contribuer au volume. La principale raison
du rejet de contribuer était sans doute la peur de la répression par
l'Etat azerbaïdjanais, à l'intérieur et même à l'extérieur de
l'Azerbaïdjan.
Les éditeurs ont abordé la question de l'équilibre de cinq façons:
(1) en invitant des auteurs azéris qui sont connus pour fournir un
point de vue indépendant azerbaïdjanais des prépositions de Bakou
(Gourbanov offre un tel point de vue);
(2) en veillant à ce que plusieurs auteurs sont invités, qui sont
connus pour défendre plus les points de vue pro-azéris, bien que
n'étant pas d'origine azérie (sans différenciation forte, un peu moins
d'un tiers des contributeurs tombent dans ce groupe);
(3) en limitant le nombre de contributeurs qui sont connus pour
défendre plus des points de vue pro-arméniens (à peu près la même
taille que le groupe mentionné ci-dessus);
(4) en invitant un grand nombre de contributeurs qui sont
explicitement neutres dans leur contexte et points de vue (plus d'un
tiers) [...]. "
"Geysar Gourbanov (blogueur militant Azerbaïdjanais des droits
civiques et ancien directeur du Centre d'information de l'OTAN à
Bakou, qui vit actuellement à Seattle) révèle dans un mode unique la
genèse et l'évolution conséquente du conflit: à travers le prisme du
mythe grec de la Pomme d'or de discorde, qui a conduit à la guerre de
Troie. En approfondissant son analyse, fondée sur des approches
véritablement novatrices au conflit, l'auteur applique les moyens de
la psychologie collective pour faire la lumière sur la dimension
sociétale du conflit. En outre, il applique cette boîte à outils pour
les obstacles apparemment les plus insurmontables à la résolution du
conflit. Il fait valoir que la solution au conflit réside au-delà de
la realpolitik des acteurs étatiques. En fait, il soutient que la paix
ne peut être réalisée que si une plus grande partie des sociétés
touchées participent, en partie, grce aux médias sociaux, et si la
démocratie, la tolérance et l'intégration sont appliquées au niveau
régional ".
III: DEBATTRE LES THESES DU LIVRE
Ce livre intéressant sur ce conflit et sur la géopolitique du
Caucase devrait susciter un large débat. Notre critique, précisément,
est que ce débat est absent du livre lui même. Ce livre présente en
effet les thèses sur ce conflit qui sont celles de la diplomatie de
l'Union Européenne. Il y a ici en filigrane les illusions de la
politique étrangère de l'UE, puissance soft sans leadership et sans
réel pouvoir, qui apparaissent.
Les thèses du grand acteur de ce conflit, la Russie, sont quasi
absentes. Sans parler des positions eurasistes sur la Grande-Europe.
C'est pourtant de Moscou bien plus que de Bruxelles que peut venir la
solution définitive, dans cet "étranger proche" où l'UE a la
prétention de défier la Russie.
Un autre grand acteur, l'OTAN, est trop peu mentionné. Voir les rares
12 mentions de l'Alliance Atlantique dans l'index. Et l'absence du
GUAM, alliance anti-russe pilotée par l'OTAN, dans ce même index.
C'est pourtant l'expansion de l'OTAN à l'Est qui est, selon notre
analyse, l'une des causes de la persistance du conflit depuis deux
décennies. Washington, qui domine l'agenda géopolitique de la région,
et y arme le bellicisme de Tbilissi ou de Bakou, est aussi quasi
absente.
Depuis 40 ans nous affirmons que l'OTAN c'est la guerre et le
militarisme. Et les conflits de la « CEI-2 » le démontrent à nouveau.
Ma thèse est que c'est l'OTAN qui pousse à la pérennisation de ces
conflits, à l'hostilité entre les peuples voisins. Parce que l'OTAN a
intérêt à créer des abcès de fixation, à entretenir la logique de
guerre pour laquelle elle a été créée. Parce que l'OTAN soutient
directement les thèses extrémistes anti-russes des radicaux à Kichinev
(Moldavie) et Tbilissi (comme elle le fait aussi dans les pays baltes
en soutenant étroitement les extrémistes baltes dans leur haineuse
xénophobie anti-russe), contre les partisans de la paix.
Moscou a proposé divers plans de paix, sur base de la fédéralisation
des Etats concernés, comme le plan Kozac pour la Moldavie, tous
torpillés par les extrémistes soutenus par l'OTAN.
Luc MICHEL
http://www.eode.org/eode-think-tank-geopolitique-caucase-la-guerre-gelee-du-nagorno-karabakh/
English version on :
http://www.eode.org/eode-think-tank-geopolitics-caucasus-the-frozen-war-of-nagorno-karabakh/
# APPENDICE 1 / LE LIVRE
Europe's Next Avoidable War: Nagorno-Karabakh
Dr Michael Kambeck (Editeur), Dr Sargis Ghazaryan (Editeur)
Incluant des contributions de Elmar Brok, Bernard Coulie, Andrew
Cooper, Baronne Caroline Cox, Frank Engel, Geysar Gurbanov, Richard
Giragosian, Uwe Halbach, Paryur Hovhannisyan, Otto Luchterhandt,
Sergey Markedonov, Arpine Martirosyan, Katherine Morris, Tevan
Poghosyan, Dirk Rochtus, Dennis Sammut, Peter Semneby et Charles
Tannock.
Editeur: Palgrave Macmillan (5 Mar 2013)
Hardcover: 296 pages
Langue: anglais
ISBN-10: 0230300669
Le DR MICHAEL KAMBECK est le co-fondateur de European Friends of
Armenia (EuFoA) et est aussi son Secrétaire-général. Il a travaillé
comme Directeur pour les Relations gouvernementales
(Burson-Marsteller) et Chef du Personnel pour le député européen Elmar
Brok (Parlement européen). Il a un doctorat en Science politique
(Université de Bonn) et un Master of Arts en Etudes européennes
(Université de Leeds).
Le DR SARGIS GHAZARIAN est membre de Recherche de haut niveau de
European Friends of Armenia (EuFoA). Il a été Professeur adjoint
d'Analyse de conflits et de Méthodologie de Résolution de conflits au
Caucase à l'Ecole de Relations internationales et de Diplomatie
(Université de Trieste) et membre de recherche post-Doc au Département
de Sciences politiques (Université de Trieste). Il a un doctorat en
Géographie politique et Géopolitique et un Master of Arts en Relations
internationales et Diplomatie (Université de Trieste)
# APPENDICE 2 / SOMMAIRE DU LIVRE
Introduction: Setting the Geopolitical Stage; S.Ghazaryan
PART I: APPROACHING THE CONFLICT: THE INTERNAL RATIONALE
The Quintessential Conflict: A Cultural and Historic Analysis of
Nagorno-Karabakh; B.Coulie
A Case Sui Generis: Nagorno-Karabakh in Comparison with Other Ethnic
Conflicts in Eastern Europe; U.Halbach
What the People Think: Town Hall Meetings Reveal the EU's Potential
and Limits in the Nagorno-Karabakh Conflict; T.Poghosyan &
A.Martirosyan
What the People Think: Key Findings and Observations of a Town Hall
Meeting Project in Azerbaijan, Armenia and Nagorno-Karabakh;
T.Poghosyan & A.Martirosyan
Nagorno-Karabakh: Learning from the Flemish Experience within
Belgium?; D.Rochtus
The Nagorno-Karabakh Conflict in Light of Polls in Armenia and
Nagorno-Karabakh; A.Cooper and K. Morris
PART II: THE INTERNATIONAL COMMUNITY AS FOREIGN POLICY ACTORS IN N-K:
THE EXTERNAL RATIONALE
The EU's New Foreign Policy and Its Impact on the Nagorno-Karabakh
Conflict; E.Brok
Soft and Hard Security in the South Caucasus and Nagorno Karabakh: A
Euro Atlantic Perspective; R.Giragosian
The Cold War Legacy in Nagorno-Karabakh: Visions from Russia, The USA
and Regional Actors; S.Markedonov
An Eye Witness' View: Human Suffering in Nagorno-Karabakh and the
Possible Role of the UK in Preventing New Violence; C.Cox
Evolution of the EU Position Vis-A-Vis the Nagorno-Karabakh Conflict;
P.Hovhannisyan
PART III: EUROPE'S NEXT AVOIDABLE WAR: THE PEACE RATIONALE
Conflict and Security in Nagorno-Karabakh: What Contribution from the
EU; P.Semneby
Nagorno-Karabakh Conflict: the Golden Apple of Discord or a Toy that
Two Have Failed to Share; G.Gurbanov
The EU'S Commitment in Nagorno Karabakh and the Required Steps Ahead;
C.Tannock Building a 'Consensus for Peace' in Armenia and Azerbaijan;
D.Sammut
The Karabakh Dilemma: Right to Self-Determination, Imperative of
Territorial Integrity, or a Caucasian New Deal?; F.Engel
Learning from Georgia: A Non-Use-of-Force Treaty for Nagorno-Karabakh;
O.Luchterhandt
Conclusion: Realistic Scenarios and How to Avoid a War in
Nagorno-Karabakh; M.Kambeck
http://www.palestine-solidarite.org/analyses.Luc_Michel.010613.htm